I)
Notre
victoire s'affirme de plus en plus complète. Partout, l'ennemi est
en retraite. A notre gauche, nous avons franchi l'Aisne en aval de
Soissons, gagnant ainsi plus de 100 kilomètres en 6 jours de lutte.
Nos armées, au centre, sont déjà au nord de la Marne. Nos armées
de Lorraine et des Vosges arrivent à la frontière.
De
fait, au point de vue tactique, cette bataille ne réalise aucun des
caractères du coup de massue qui abat une armée. Même, si la
victoire a découlé tout naturellement des conceptions
rigoureusement logiques du Haut Commandement Français, elle n'a pas
suivi la voie que celui-ci lui avait préparée.
Un
double enveloppement des ailes était prévu aucun d'eux n'a réussi.
Nos manœuvres enveloppantes, que la faiblesse de nos effectifs ne
permettait pas d'étoffer suffisamment, ont été contre-attaquées
et mises en grand danger. En revanche, les efforts de Galliéni et de
Maunoury ont obligé l'ennemi à dégarnir son centre droit et à y
laisser un large vide... French et Franchet d'Espérey ont pénétré
dans cette brèche et l'ont agrandie, prenant à revers les armées
voisines qui durent, de proche en proche, abandonner le combat.
Il
n'y a donc pas eu enveloppement, il n'y a même pas eu rupture du
front parce que l'ennemi n'a pas attendu cet événement, il y a eu
simple poussée de toute la ligne vers le nord.
Poussée,
d'ailleurs, qui coûtait cher au vaincu, plus cher que ne coûtèrent
maints coups de filet retentissants, si l'on en croit les milliers de
morts que les Allemands ont laissés devant nos lignes, sur l'Ourcq
ou dans les marais de Saint-Gond, et l'énorme quantité de matériel
qu'ils ont abandonné sur nos routes. Au point de vue stratégique et
moral, le succès était décisif. Il ne détruisait pas l'armée
Allemande, il n'abattait pas l'Allemagne, mais il fixait le sort de
la guerre en brisant net la formidable attaque brusquée, maintenant,
l'Allemagne va devoir improviser de nouveaux moyens dans des
circonstances difficiles.
L'ivresse
des vainqueurs de la Marne, « sauveurs du Monde », n'est
pas de longue durée. Dès le 13 septembre, sous la pluie qui ne
cesse pas, et qui, changeant les routes en fondrières, ralentit la
marche de l'artillerie et des convois, la ligne de nos armées s'est
déjà partout heurtée de proche en proche à une solide résistance.
La
6e armée est engagée devant Soissons.
L'armée
Anglaise est arrêtée sur l'Aisne.
La
5e armée au nord de Reims.
La
4e entre Chalons et l' Argonne.
La
3e aux abords nord du camp retranché de Verdun.
L'ennemi
s'est réapprovisionné en munitions et a reçu d'importants
renforts.
Contre
de formidables et savantes organisations, défendues par des troupes
braves, nombreuses et puissamment outillées, tenter une attaque de
front serait folie. A un front inviolable, il va falloir opposer un
front inviolable et, afin de chasser l'ennemi, avoir recours à la
manœuvre...
La
bataille du Grand Couronné prend fin.
Pont-à-Mousson est repris sans combat.
Les armées françaises arrivent à la frontière Allemande.
La poursuite est effectuée jusqu'à la Seille où les Allemands se retranchent.
Le front va se stabiliser pendant 4 ans.
Pont-à-Mousson est repris sans combat.
Les armées françaises arrivent à la frontière Allemande.
La poursuite est effectuée jusqu'à la Seille où les Allemands se retranchent.
Le front va se stabiliser pendant 4 ans.
II)
Le
13 septembre 1914 du 56e RI de Chalon. Clayeures
(Meurthe-et-Moselle). Toute la journée le 56e RI reste dans
l’attente de nouveaux ordres.
13h00,
un ordre de la Division annonce que le 8e Corps devait changer le
front de ses opérations pour se porter plus à l’Est. Après avoir
fait un adieu touchant au sol où le 56e RI a laissé tant des siens,
il se dirige vers 15 heures sur le petit village de Clayeures,
traversant toutes les contrées où se sont livré de si sanglants
combats Magnières, Giriviller, Vennezey, Rozelieures et Clayeures.
III)
Le
28e RI quitte Villers-Franqueux, passe la Route nationale 44 et se
dirige vers Loivre. À cet instant, le 3e bataillon reçoit le feu de
l'infanterie Allemande installée à Loivre. L'artillerie Française
intervient alors et chasse les Allemands du village. Le régiment
progresse alors au-delà du village et franchit le canal de l'Aisne à
la Marne. Le but est alors de poursuivre l'ennemi et d'investir
Bermericourt.
Ici s'arrête la poursuite, c'est la fin de la bataille de la Marne. Le régiment n'ira pas plus loin. Les Allemands vont s'accrocher à leurs positions et tenter de reprendre Loivre et s'approcher de la Route nationale. Le canal sert alors de frontière :
Ici s'arrête la poursuite, c'est la fin de la bataille de la Marne. Le régiment n'ira pas plus loin. Les Allemands vont s'accrocher à leurs positions et tenter de reprendre Loivre et s'approcher de la Route nationale. Le canal sert alors de frontière :
15h00,
le 28e RI se replie sur la rive Sud du canal où les combats font
rage jusqu'à 18 heures. Loivre va ainsi constituer pendant 6 jours
un môle de défense, dirigé par le 28e RI, aidé par les 24e et 74e
RI... Le nombre des pertes est alors très important : deux
officiers tués, trois blessés. Le capitaine Fevre trouve la mort,
il sera enterré à la nécropole de la maison bleue. Montjou,
lieutenant est également tué, son corps sera transporté à Paris
où il est enterré dans le cimetière de Montparnasse.
La troupe n'est pas épargnée : une dizaine de tués et 273 blessés.
Durant les 5 autres jours, les pantalons rouges vont se terrer dans le village et défendre le passage du canal...
La troupe n'est pas épargnée : une dizaine de tués et 273 blessés.
Durant les 5 autres jours, les pantalons rouges vont se terrer dans le village et défendre le passage du canal...
« Au
cours de l’après-midi, après un arrêt devant l’église de
Loivre et notre passage devant le Café de la Marine, nous avons
traversé le pont sur le canal pour prendre position sur un
terrain parfaitement décrit par l’ami Chenaud.
Alors que nous étions déployés en tirailleurs, nous avons été accueillis par le tir des Allemands, ces derniers sont également déployés en tirailleurs à une courte distance et beaucoup plus nombreux que nous, aussi par le feu des mitrailleuses sur notre droite, venant du fort de Brimont ».
Au bout de peu de temps, notre position devenant intenable, je me suis levé pour rejoindre le lieutenant de Witte et lui demander des instructions.
Réponse : « il faut tenir ». A peine a-t-il terminé qu'il tombe frappé par une balle en pleine poitrine, revenu à ma section je fais alors augmenter le tir dans toute la mesure du possible, mais ne pouvant enrayer l'avance des tirailleurs Allemands, j'ai fait replier dans la direction du pont, les quelques hommes en état de le faire... Je me dirige vers un boqueteau situé sur le chemin de halage, espérant profiter de cet écran pour rejoindre le pont, en arrivant j'ai retrouvé le caporal Roussel et le soldat Huet de ma compagnie qui ont eu la même pensée. Malheureusement ce projet n'a pu être réalisé car aussitôt des Allemands avec des casques à pointes sont apparus et l'un d'eux, au vu de l'écusson du 28e me demande si nous étions à la Pépinière, devant mon étonnement il me répond qu'il est « louché ben » (lisez boucher) place de Budapest, (place située au bas de la rue d'Amsterdam, près de la gare Saint-Lazare) puis il nous emmène tous les 3 devant son capitaine lequel, en apercevant le soldat Huet au teint halé par le soleil, me demande : « Turcot ? auquel j'ai répondu : « Non ». Puis, voulant se montrer grand seigneur, il eut cette réflexion : « Vous vous êtes battus avec honneur », ce compliment concernant le 28e tout entier...
Ayant été pris en charge par de nouveaux Allemands, nous avons été conduits à l'arrière où nous avons passé la nuit au milieu de leur compagnie formant le cercle. Pendant ce court trajet nous avons vu des Français adossés à des meules en flamme et ayant voulu leur porter secours nous avons été refoulés à coups de crosses.
Alors que nous étions déployés en tirailleurs, nous avons été accueillis par le tir des Allemands, ces derniers sont également déployés en tirailleurs à une courte distance et beaucoup plus nombreux que nous, aussi par le feu des mitrailleuses sur notre droite, venant du fort de Brimont ».
Au bout de peu de temps, notre position devenant intenable, je me suis levé pour rejoindre le lieutenant de Witte et lui demander des instructions.
Réponse : « il faut tenir ». A peine a-t-il terminé qu'il tombe frappé par une balle en pleine poitrine, revenu à ma section je fais alors augmenter le tir dans toute la mesure du possible, mais ne pouvant enrayer l'avance des tirailleurs Allemands, j'ai fait replier dans la direction du pont, les quelques hommes en état de le faire... Je me dirige vers un boqueteau situé sur le chemin de halage, espérant profiter de cet écran pour rejoindre le pont, en arrivant j'ai retrouvé le caporal Roussel et le soldat Huet de ma compagnie qui ont eu la même pensée. Malheureusement ce projet n'a pu être réalisé car aussitôt des Allemands avec des casques à pointes sont apparus et l'un d'eux, au vu de l'écusson du 28e me demande si nous étions à la Pépinière, devant mon étonnement il me répond qu'il est « louché ben » (lisez boucher) place de Budapest, (place située au bas de la rue d'Amsterdam, près de la gare Saint-Lazare) puis il nous emmène tous les 3 devant son capitaine lequel, en apercevant le soldat Huet au teint halé par le soleil, me demande : « Turcot ? auquel j'ai répondu : « Non ». Puis, voulant se montrer grand seigneur, il eut cette réflexion : « Vous vous êtes battus avec honneur », ce compliment concernant le 28e tout entier...
Ayant été pris en charge par de nouveaux Allemands, nous avons été conduits à l'arrière où nous avons passé la nuit au milieu de leur compagnie formant le cercle. Pendant ce court trajet nous avons vu des Français adossés à des meules en flamme et ayant voulu leur porter secours nous avons été refoulés à coups de crosses.
LOIVRE |
Lorsque le 28e RI entre dans Loivre, Marcel de Witte est le seul officier de la 3e compagnie rescapé d'août 1914. Le capitaine Léon Henry, le sous-lieutenant Houter furent tués à Guise le 28 août et le lieutenant de Maisonneuve blessé ce même 28 août. Henri Rosier raconte que l'officier a été frappé d'une balle en pleine poitrine le jour même.
« Marcel de Witte [...] était de la classe 03, abandonné sur le terrain, considéré comme mort par les Allemands, il a été récupéré par nos brancardières, après de longs séjours dans les hôpitaux il a été détaché dans l'armée Anglaise, puis en raison de sa blessure, affecté à Paris. En 1938, lors de son adhésion à l'Amicale, il est Chef de bataillon commandant le Parc régional du Génie de la région de Paris, nommé colonel et affecté au Ministère de l'air, c'est là que le vice président Rosier a repris contact avec lui. »
Une fois de plus, le bulletin de l'amicale des anciens du 28e RI se rappelle des anciens de Loivre :
« Notre bon camarade André Roche de Condé-sur-Noireau est blessé à Loivre alors que des éléments de chez nous sont encore au-delà du canal, il n’est resté à Loivre que 2 ou 3 jours ce qui limite ses souvenirs mais, avant de quitter son poste, il a la responsabilité du train de combat, il s’est présenté au P.C. où il a rencontré avec le Colonel Capitant, le capitaine Roques [Roc] son adjoint et l’adjudant Jouannon secrétaire qui devait passer officier par la suite, il se souvient encore des cyclistes Lavalade, le Stayer bien connu et Hédouin qui l’ont ravitaillé avant son départ, il se souvient enfin que blessé et ayant perdu beaucoup de sang (une balle sous l’omoplate alors qu’il traverse le pont du canal, pris en enfilade par une mitrailleuse allemande) mort de fatigue, il a dormi dans la maison où se trouve le drapeau du Régiment... Mais Roche n’est plus au front pendant la période des combats qui ont lieu dans la plaine aux abords de la route 44 et dans Villers-Franqueux et c’est précisément ce que nous voulions lui faire conter ».
Dans un de ses livres, la journaliste et romancière féministe Benoîte Groult cite le journal de guerre du père de son héroïne. Celui-ci nommé Adrien Morvan, appartiendrait au 28e RI... Ce journal ressemble étrangement à celui écrit par un combattant de Loivre !
A
l’arrière, Lou et Hermine frissonnaient en lisant dans leurs
illustrés une histoire épique qui ne ressemblait pas du tout aux
missives qui parvenaient du front. […] Et elles se demandaient
comment des millions d’Adriens sans biscuit, et les godillots en
sang, pouvaient composer cette héroïque armée Française à qui
l’on demandait si tranquillement d’avancer ou de mourir.
Mon père évitera l’un et l’autre, grâce à un acte d’indiscipline qui lui vaudra d’être cité à l’ordre du jour du 28e RI et sauva sa vie, donc la mienne.
« Tandis que nous nous restaurons, une attaque Allemande trouble la fête : les balles sifflent parmi nous, le lieutenant Mouton est blessé. Le colon signale à Brunot, chef du détachement, qu’il faut se planquer le long des berges de la rivière et se replier vers l’arrière seulement si la position devient intenable. L’ordre est aussitôt exécuté. Ça pétarade mais les risques ne sont pas énormes. Mais voilà qu’au bout d’une heure à peine, Brunot déclare « la position intenable » et donne l’ordre de repli. Je lui réplique moi que je ne trouve pas la position intenable et qu’en conséquence je reste. Ménard, mon caporal, est de mon avis et déclare qu’il reste avec moi. Les autres nous traitent de ballots mais nous les laissons se replier sans nous ».
« A ce moment j’aperçois de l’autre côté du canal des fantassins qui tirent sans arrêt. Je dis à Ménard : « On y va ? J’ai envie de tirer » On n’est pas restés pour dormir dans l’herbe ! En approchant, je découvre des boches juste à portée de mon flingue que je viens d’épauler. Je tire à plusieurs reprises. Je crois que j’ai tué mon premier Allemand. Je marchais le premier, dans la position du tireur debout, le coude à la hauteur de l’épaule, quand j’ai senti une très vive douleur au bras, par derrière. J’ai commencé par engueuler mon copain : « Salaud ! Tu m’as tiré dans le coude »… « Tu es fou, me répond-il, ça vient d’en face ! »
J’essaie de tirer encore mais mon bras droit me refuse tout service. Je suis furieux. Ménard est obligé de me ramener sur l’arrière où le major me panse sommairement avant de m’envoyer sur l’hôpital militaire de Saint-Maixent, tenu par les sœurs grises. J’avais le coude en bouillie et ne pouvais plus allonger le bras. La balle était bien arrivée par-devant, traversant le bras, lésant le nerf cubital et fracassant l’olécrane et l’épitrochlée de l’humérus, comme on le verra plus tard à la radio. »
Mon père ne put jamais retourner en première ligne et en fut profondément affecté. Se considérant désormais comme un planqué, il jugea inutile de poursuivre son journal, se contentant d’y mettre en conclusion le texte de sa citation dont il fut secrètement si heureux, j’en suis sûre, mais dont le lyrisme pompeux ne lui semblait correspondre à rien de ce qu’il avait vécu :
« Excellent soldat, a donné au cours des journées du 1er au 17 septembre l’exemple de l’entrain et du courage. A été grièvement blessé en opposant une vive résistance à un ennemi très supérieur en nombre. »
Adrien Morvan est-il un proche de la romancière ? Son père ?
A-t-elle changé les noms ? à suivre...
Un grand merci à Anne Granger qui a découvert ce passage.
Voici un court témoignage : celui de Jean Bouteiller relatant brièvement les combats de Loivre et de Villers-Franqueux, extrait du Bulletin n°64 de l'amicale des anciens du 28e RI.
« Le très intéressant compte-rendu du court séjour du 28e à Loivre en Septembre 14, inséré dans le Bulletin 63 de notre Amicale, n’aura pas manqué d’intéresser la plupart de nos adhérents. Toutefois il semblerait utile d’en compléter ou d’en modifier certains passages, en soulignant notamment parmi les victime de l’intense bombardement de Loivre (le 14 ou 15 septembre, je ne me souviens plus de la date exacte) figuraient le très sympathique et regretté Capitaine Potin atteint à la tête par des schrapnels sous le porche de l’hôtel du Cheval blanc et des deux frères Piot, tués dans l’immeuble qui abritait les sapeurs de notre régiment. (Quelle douloureuse épreuve pour les parents).
Mon père évitera l’un et l’autre, grâce à un acte d’indiscipline qui lui vaudra d’être cité à l’ordre du jour du 28e RI et sauva sa vie, donc la mienne.
« Tandis que nous nous restaurons, une attaque Allemande trouble la fête : les balles sifflent parmi nous, le lieutenant Mouton est blessé. Le colon signale à Brunot, chef du détachement, qu’il faut se planquer le long des berges de la rivière et se replier vers l’arrière seulement si la position devient intenable. L’ordre est aussitôt exécuté. Ça pétarade mais les risques ne sont pas énormes. Mais voilà qu’au bout d’une heure à peine, Brunot déclare « la position intenable » et donne l’ordre de repli. Je lui réplique moi que je ne trouve pas la position intenable et qu’en conséquence je reste. Ménard, mon caporal, est de mon avis et déclare qu’il reste avec moi. Les autres nous traitent de ballots mais nous les laissons se replier sans nous ».
« A ce moment j’aperçois de l’autre côté du canal des fantassins qui tirent sans arrêt. Je dis à Ménard : « On y va ? J’ai envie de tirer » On n’est pas restés pour dormir dans l’herbe ! En approchant, je découvre des boches juste à portée de mon flingue que je viens d’épauler. Je tire à plusieurs reprises. Je crois que j’ai tué mon premier Allemand. Je marchais le premier, dans la position du tireur debout, le coude à la hauteur de l’épaule, quand j’ai senti une très vive douleur au bras, par derrière. J’ai commencé par engueuler mon copain : « Salaud ! Tu m’as tiré dans le coude »… « Tu es fou, me répond-il, ça vient d’en face ! »
J’essaie de tirer encore mais mon bras droit me refuse tout service. Je suis furieux. Ménard est obligé de me ramener sur l’arrière où le major me panse sommairement avant de m’envoyer sur l’hôpital militaire de Saint-Maixent, tenu par les sœurs grises. J’avais le coude en bouillie et ne pouvais plus allonger le bras. La balle était bien arrivée par-devant, traversant le bras, lésant le nerf cubital et fracassant l’olécrane et l’épitrochlée de l’humérus, comme on le verra plus tard à la radio. »
Mon père ne put jamais retourner en première ligne et en fut profondément affecté. Se considérant désormais comme un planqué, il jugea inutile de poursuivre son journal, se contentant d’y mettre en conclusion le texte de sa citation dont il fut secrètement si heureux, j’en suis sûre, mais dont le lyrisme pompeux ne lui semblait correspondre à rien de ce qu’il avait vécu :
« Excellent soldat, a donné au cours des journées du 1er au 17 septembre l’exemple de l’entrain et du courage. A été grièvement blessé en opposant une vive résistance à un ennemi très supérieur en nombre. »
Adrien Morvan est-il un proche de la romancière ? Son père ?
A-t-elle changé les noms ? à suivre...
Un grand merci à Anne Granger qui a découvert ce passage.
Voici un court témoignage : celui de Jean Bouteiller relatant brièvement les combats de Loivre et de Villers-Franqueux, extrait du Bulletin n°64 de l'amicale des anciens du 28e RI.
« Le très intéressant compte-rendu du court séjour du 28e à Loivre en Septembre 14, inséré dans le Bulletin 63 de notre Amicale, n’aura pas manqué d’intéresser la plupart de nos adhérents. Toutefois il semblerait utile d’en compléter ou d’en modifier certains passages, en soulignant notamment parmi les victime de l’intense bombardement de Loivre (le 14 ou 15 septembre, je ne me souviens plus de la date exacte) figuraient le très sympathique et regretté Capitaine Potin atteint à la tête par des schrapnels sous le porche de l’hôtel du Cheval blanc et des deux frères Piot, tués dans l’immeuble qui abritait les sapeurs de notre régiment. (Quelle douloureuse épreuve pour les parents).
Je puis parler en connaissance de cause de ces tragiques événements, car en qualité de chef de section de la 8e Compagnie, nous étions cantonnés moi et mes hommes, dans le bâtiment des P.T.T. de Loivre qui, par miracle, fut épargné par les obus.
Je profite de cet exposé pour raconter une anecdote qui eût pour cadre la position du canal que je fus, par ordre, l’un des tout derniers à quitter. Après avoir traversé à la queue leu leu sur des madriers branlants le canal encore rempli d’eau, j’avais reçu pour mission de tenir « coûte que coûte » la position, qui en réalité, n’existait que par notre seule présence car nous n’avions pour tout abri que le mur, percé de créneaux, du parc d’un château situé en face de nous. Dans ma section existait encore quelques « titis » parisiens qui s’apercevant que pas mal de soldats ennemis (fins saouls) la cave du château devant contenir sans doute beaucoup de champagne, s’aventuraient imprudemment vers la partie gauche du bâtiment à découvert, se mirent à faire des « cartons » sur ces cibles mouvantes et il me fallut user de mon autorité pour faire cesser cette peu glorieuse tuerie.
Robert
Tessier
[Ouvrier dans une scierie, Robert Tessier a fait son service militaire au 28e RI, incorporé dans la classe 10. Il quitte l’armée en 1912 en tant que soldat de 1re classe. En août 1914, le régiment d’Évreux le rappelle. Robert connaîtra alors les chocs de Charleroi et de Guise, puis la redoutable retraite].
Le 18 septembre 1914, alors qu’il participe à la défense des ponts de Loivre, il prend de plein fouet une balle dans la bouche, le défigurant. Gravement blessé, il est capturé par les Allemands qui ont investi Loivre. Soigné, il rejoindra le cortège de prisonniers en partance pour l’Allemagne. Son statut de grand mutilé lui permettra en juillet 1915 de retrouver les siens via la Suisse. Après la Seconde Guerre mondiale, il sera nommé chevalier puis officier de la Légion d’honneur.
[Ouvrier dans une scierie, Robert Tessier a fait son service militaire au 28e RI, incorporé dans la classe 10. Il quitte l’armée en 1912 en tant que soldat de 1re classe. En août 1914, le régiment d’Évreux le rappelle. Robert connaîtra alors les chocs de Charleroi et de Guise, puis la redoutable retraite].
Le 18 septembre 1914, alors qu’il participe à la défense des ponts de Loivre, il prend de plein fouet une balle dans la bouche, le défigurant. Gravement blessé, il est capturé par les Allemands qui ont investi Loivre. Soigné, il rejoindra le cortège de prisonniers en partance pour l’Allemagne. Son statut de grand mutilé lui permettra en juillet 1915 de retrouver les siens via la Suisse. Après la Seconde Guerre mondiale, il sera nommé chevalier puis officier de la Légion d’honneur.
J.-M.
Gambier, un ancien de Loivre avait 18 ans lorsque son village
fut frappé par la Guerre. Il fut le témoin de l’arrivée du 28e
Régiment d’infanterie.
Membre d’honneur de l’amicale des anciens du 28e I, il ravive ses souvenirs :
« […] Je suis le fils de cette petite ferme à l’entrée de Loivre, venant de la traverse de Villers-Franqueux, nous avions vu le 10 septembre 14, une patrouille de uhlans vers Villers, ne demandant rien, le chef devait bien connaître la contrée. Ensuite ce sont les chasseurs à cheval du 5e Régiment, cantonnés à Hermonville qui viennent par ce même chemin et nous les renseignons, abritant leurs chevaux, pied à terre, ils avancent en longeant les murs, à 200 m, ils reçoivent des coups de fusil, les Allemands sont au pont de l’écluse de Loivre, ils reviennent, remontent à cheval, essuient encore des coups de fusil venant des fossés de la sucrerie, un cheval est tué, son camarade prend ses armes, un autre le prend en croupe, les hommes sont sauf, et les renseignements recueillis sont précis...
Membre d’honneur de l’amicale des anciens du 28e I, il ravive ses souvenirs :
« […] Je suis le fils de cette petite ferme à l’entrée de Loivre, venant de la traverse de Villers-Franqueux, nous avions vu le 10 septembre 14, une patrouille de uhlans vers Villers, ne demandant rien, le chef devait bien connaître la contrée. Ensuite ce sont les chasseurs à cheval du 5e Régiment, cantonnés à Hermonville qui viennent par ce même chemin et nous les renseignons, abritant leurs chevaux, pied à terre, ils avancent en longeant les murs, à 200 m, ils reçoivent des coups de fusil, les Allemands sont au pont de l’écluse de Loivre, ils reviennent, remontent à cheval, essuient encore des coups de fusil venant des fossés de la sucrerie, un cheval est tué, son camarade prend ses armes, un autre le prend en croupe, les hommes sont sauf, et les renseignements recueillis sont précis...
Le 12 ou 13 septembre, les 24e et 28e arrivent dans la plaine aux vus de l’ennemi qui occupe les observatoires de Noue-Gouzaine, batterie de Loivre, sapins de Brimont. Avançant telle une multitude coquelicots, képi et culotte rouge, repérés, ils sont pris à parti par l’artillerie Allemande, cloués au sol, sans préparation, il y a déjà des pertes, mais la nuit est propice pour entrer dans Loivre, bien que l’ennemi ait l’avantage du canal et plus loin, la ligne de chemin de fer Reims-Laon, en tranchée et en remblai plus à l’est. De sérieux accrochages à l’écluse, par des meurtrières, des tireurs Français abattaient les Allemands qui passaient le pont ou les passerelles, par la suite, ces cadavres furent enterrés par nous.
les Allemands, venant de Bermericourt, s’infiltraient par les bois de la verrerie, arrêtés par le canal et le pont trop en vue, ils avaient utilisé les passerelles qu’ils devaient franchir une par une.Tous les morts Allemands furent enterrés derrière l’écluse par les civils prisonniers, un des nôtres ne s'étant pas découvert reçu un coup de sabre. Ils ont été exhumés par la suite.
Les nôtres tombés dans les rues et aux abords du canal, furent également enterrés par nos soins, ils doivent reposer maintenant au cimetière de la maison bleue, route 44 à Cormicy.
L’artillerie qui anéantissait Loivre était installée derrière Brimont, route de Neufchâtel, la nuit, nous passions près des batteries pour aller enterrer les morts sur la verrerie de Courcy et le bois Soulain, là aussi, une fanfare ennemie qui donnait une aubade à un officier supérieur, logé au château de M. Givelet, fut repérée et complètement anéantie par notre artillerie, nous les avons enterrés avec leurs instruments.
Mes souvenirs sont toujours aussi lucides, j’ai toujours admiré le colonel Capitant, son beau régiment le 28e, puis le 24e, que j’ai vu arriver à Loivre, puis un bataillon du 74e en renfort ; nous les avons ravitaillés aux abords du pays, cloués au sol par les obus ennemis.
Le colonel était dans la ferme de mes parents, à l'entrée du pays, ainsi que le Drapeau et sa garde ; nous avons eu quelques entretiens avec lui avant l’ordre de repli sur la route 44. Au recul de nos troupes vers la route 44, les Allemands envahissaient Loivre et arrêtaient tout le monde, enfermés 7 jours dans la mairie et les écoles avant d’enterrer les morts. Des souvenirs (casques à pointe, fusils, cartouchières…) ayant été prélevés sur les morts de la carrière, nous avons été accusés de cet acte regrettable et je fus désigné comme otage avec 3 autres personnes. Nous avons vu arriver la garde impériale sortis et enfermés, nous devions subir les vexations, je crois que plus de 300 personnes furent dirigées vers les Ardennes après prélèvement des 4 otages dont je faisais partie, puis ce fut notre tour de partir avec un groupe de prisonniers Français vers Guignicourt et Laon où nous arrivions exténués, enfermés à la Citadelle, sans rien manger, notre misère commençait. La nuit, lorsque nous avons quitté Loivre en flamme, pour coucher dans la tranchée du chemin de fer à Bermericourt, nous fûmes dirigés vers une pâture à Aumenaucourt, de là toutes les nuits nous allions enterrer les morts, à la sortie du bois de Brimont, au dessus de la verrerie de Courcy, 20 prisonniers, avec les hussards de la mort, nous avons dû aller plusieurs fois pour enterrer les chevaux, les soldats étaient déjà enlevés, l’artillerie Française tirait quelques obus à proximité, cet endroit était très visible de nos lignes d’Hermonville, nous n’avons pu que dresser les carcasses puantes dans le talus, les quatre fers en l’air pour en finir.
Notre ville qui comptait 1 500 habitants à l’époque a été anéantie, 54 d’entre eux ont été tués, nous sommes moitié maintenant. »
Parmi les soldats tués lors des combats de Loivre, il faut noter la présence d'Émile Lesmann, un Parisien âgé de 23 ans. Une section du 28e, installée dans une écurie à 40 m environ, un bon tireur, par une petite meurtrière, abattait, au fur et à mesure, tous ceux, téméraires, qui tentaient de passer et cela a duré un bon moment, on a compté 35 à 40 tués à ce passage. Ne pouvant que tirer seul, les fusils approvisionnés, lui étaient passés par ses camarades. A 100m plus bas, dans la ferme de M. Berge, même défense pour tous ceux qui déferlaient vers le canal jusqu’au moment où l’artillerie ennemie vint écraser les défenseurs... Le poste de secours était bien dans la sucrerie, que sont devenus ces blessés, je ne pourrais le dire : ont-ils été faits prisonniers ou tués, car tout fut détruit... Selon le blog Une autre histoire du foot et les écrits de Pierre Cazal, Émile Lesmann faisait partie de l'équipe de football de la Jeunesse athlétique de Saint-Ouen et fut sélectionné une fois en équipe nationale en 1912 où la France et la Belgique firent match nul (1-1).
Un grand nombre de soldats du 28e furent portés disparus suite aux combats de Loivre. Inquiètes, les familles recherchèrent le moindre témoignage sur leur soldat. Ce fut le cas du jeune Michel Corrard des Essarts qui trouva la mort à Loivre.
13
septembre 1914 ... Oui, aujourd'hui nous voyons tout en beau...
Victoire
! Nous pouvons enfin écrire ce beau mot puisqu'il a été
prononcé au ministère de la Guerre devant les représentants de la
presse. La victoire de la Marne a sauvé Paris et la France. Si nous
avions été battus, la partie n'était pas encore perdue, puisque le
commandement avait pris des mesures assez habiles pour que la route
restât libre derrière nos armées intactes. Mais il fallait nous
replier jusqu'à Lyon, et c'étaient encore 7 ou 8 départements
dévastés, sans compter Paris qui tombait aux mains des Allemands. A
tous les points de vue, ce succès est venu à son heure. Voilà les
Russes qui semblent arrêtés en Prusse orientale. Le fameux
« rouleau compresseur », comme disait naguère un journal
Anglais, et le mot avait fait fortune, ne comprime plus guère quand
il se trouve en présence d'une armée Allemande sérieuse. On me dit
d'ailleurs qu'au grand état-major Français on estime que les
Russes ne peuvent pas mettre sur pied plus de 2 millions
d'hommes vraiment exercés et armés. Les 8 millions de soldats dont
on parle sont une fable à l'image du public. En somme, c'est
surtout sur nous-mêmes que nous devons compter. Mais la situation se
présente ainsi :
les
Russes ont battu les Autrichiens, les Allemands battent les Russes,
les Français battent les Allemands.
Nous
sommes au sommet de l'échelle... Oui, aujourd'hui nous voyons tout
en beau...
D'un
milieu où l'on connaît les choses d'Autriche, on me dit qu'il est
vain, du moins pour l'instant, d'espérer que Vienne renonce à son
alliance même malheureuse avec Berlin. Il faudrait pour cela que le
vieil empereur François-Joseph, qu'on dit très malade, viennent à
disparaître... consente à disparaître. Son petit-neveu, marié à
une Bourbon, n'a que très peu de sympathies pour l'Allemagne. Mais
il y a le parti militaire, très puissant encore, quoique
battu, qui est associé avec la presse et la finance juives, très
anti-Russes là-bas comme en Allemagne. Pourtant il ne faut pas
désespérer que, le prestige militaire de l'Empire Allemand étant
atteint, la défection de l'Autriche se produise. A Munich, à
Dresde, à Stuttgart, il y aura ensuite du beau travail diplomatique
à faire. On peut gager que, depuis quelques jours, le roi Louis III
de Bavière sent se rouvrir la blessure qu'une balle Prussienne lui
a faite en 1866...
On
raconte que Guillaume II a envoyé ces jours-ci à Victor-Emmanuel
III d'Italie le télégramme suivant : « Vainqueur ou
vaincu, je n'oublierai jamais ta trahison. » A qui le roi
d'Italie aurait répondu : « Et moi, je ne veux pas trahir mon
peuple. » Si ce n'est vrai, c'est assez bien imaginé.
Cependant l'Italie reste neutre. C'est un baromètre à consulter. Le
jour où l'aiguille se déplacera pour de bon dans notre sens,
nous pourrons dire : « Beau temps. » Jusqu'à présent,
ce n'est que le variable. Cependant, si l'Italie laisse passer, sans
intervenir, le moment psychologique, ce sera encore le mieux. Les
neutres sont toujours sacrifiés quand vient la paix, et nous
n'aurons pas besoin d'agrandir l'Italie. Cavour calculait peut-être
mieux quand il envoyait quelques régiments Piémontais en Crimée
pour avoir le droit de s'asseoir à la table du congrès de Paris.
Mais les leçons de Cavour sont-elles perdues pour les Italiens comme
celle de Bismarck le sont, et définitivement celles-là, pour
les Allemands ? Ou bien l'Italie parvenue, et en présence de
problèmes difficiles, hésite-telle à compromettre son capital et à
courir les aventures ?
V)
Nous
n’allons certainement pas rester à Buissoncourt. En attendant les
ordres et après m’être vigoureusement lavé à même un grand
seau d’eau fraîche, je fais un tour dans le village. Ce dernier
n’a pas trop souffert des récents bombardements. Toutefois, sa
petite église est bien abîmée. Tous les vitraux sont brisés et,
de place en place, la toiture et les murailles montrent des
ouvertures béantes produites par la mitraille. Près du chœur,
gisent un maréchal des logis d’artillerie et un lignard tués
dernièrement et qui attendent une sépulture.
Sur
la place, une foule curieuse, naturellement presque exclusivement
composée de soldats, se presse autour de 3 canons de 77 enlevés aux
Boches. Je m’approche à mon tour pour examiner cette belle prise.
Quelle différence avec notre élégant et fin 75. Quoique beaucoup
plus lourdes et massives, ces pièces ne donnent pas l’impression
de force et de puissance de nos canons de campagne. Le bouclier de
l’une d’elles a été transpercé de part en part par un de nos
obus, il n’a pas dû rester grand-chose des servants qui étaient
autour.
Ah,
voici du nouveau : Je vois, en effet, apparaître le Lieutenant
de Dragons de la Tour du Pin, le nouvel agent de liaison du Colonel :
Départ dans 20 minutes.
Nous
rejoignons les 19e et 20e Compagnies à hauteur de la forêt de Saint
Paul et là, nous apprenons par nos camarades, que nous revoyons
d’ailleurs avec plaisir, que leur sort n’a pas été
meilleur que le nôtre, pendant que nous nous morfondions à la tour
de Domèvre.
Ils
ont bien cantonné à Cercueil, près de Nancy (quel singulier
nom !), mais une seule nuit, le reste du temps, ils ont occupé
le bois de Saint Paul où ils eurent à résister à de furieux
assauts. Bertin me dit que, comme à Courbesseaux, il a encore eu la
« barraka » et il me raconte un coup de main qu’il a tenté
contre une batterie d’artillerie Allemande, avec quelques hommes de
sa compagnie : la batterie n’a pas été prise … et la
plupart de ses hommes y sont restés. Le 6e Bataillon, de son côté,
a assez souffert. Deux de ses officiers ont été tués : le
Capitaine Houillon et le Lieutenant Michaud. Ce dernier était arrivé
avec le dernier renfort et je l’avais aperçu une seule fois, dans
la nuit du 4 au 5 septembre alors que nous avions été appelés pour
secourir le 269e, attaqué sur ses positions. Dans ce tragique bois
de Saint Paul, renversé d’un coup de baïonnette dans la poitrine,
il a été achevé, par terre, avec son propre revolver, par un
soldat de la Garde, qui le lui a arraché de ses mains défaillantes.
Jolie manière de faire la guerre, que celle qui consiste à tuer les
blessés !
On
s’est tout de même bien battu par ici, car on rencontre beaucoup
de cadavres Allemands et Français, ceux-ci, en majorité, sont des
coloniaux.
Mon
camarade Argant est furieux. Le Capitaine Bérault, blessé le 25
août, a rejoint le régiment et, comme il est plus ancien que le
père Durand, le Colonel a décidé qu’il remplacerait ce dernier à
la tête du Bataillon. Le Capitaine Durand passe à la 19e et, dame,
force est à Argant de lui céder son commandement. Il ne le fait pas
sans grogner.
Il
est également arrivé du dépôt un phénomène en la personne du
sous-Lieutenant Boulas. Très gentil garçon, du reste, mais ce qui
le rend amusant, c’est le nombre infini de précautions qu’il a
prises pour que sa tenue ne diffère en rien de celle des hommes :
Tout d’abord, il a remplacé les galons circulaires de sa capote
par un tout petit bout de galon d’un centimètre environ qu’il
porte sous la manche et d’un côté seulement, au collet, un seul
écusson au Numéro du Régiment et tous ses boutons dorés ont été
passés à la teinture diode pour en atténuer l’éclat. Il pense
avoir ainsi obtenu le minimum de visibilité possible. Maintenant, la
coiffe de son képi est garnie d’une calotte en métal, à
l’épreuve des balles de shrapnels, paraît-il, et je ne serais pas
autrement surpris que, sous ses vêtements, il porte quelque espèce
de cuirasse... Nous nous remettons en marche et traversons
Réméréville que nous dépassons, nous allons prendre position au
Nord-Est de la localité. Il y a un quart d’heure que nous sommes
installés quand arrive le Capitaine Bérault, je le félicite de la
prompte guérison de sa blessure et il m’accueille très
aimablement.
Les
Boches sont loin et nous avons l’impression que notre garde aux
tranchées n’est plus très utile. Nous revenons, d’ailleurs,
cantonner dans Réméréville, dans ce qui reste de Réméréville,
veux-je dire. De cette petite bourgade, il ne subsiste plus que 5 ou
6 maisons à peu près intactes, toutes les autres ne présentent
plus que leurs murs calcinés. Un obus a traversé le clocher qui est
percé à jour. Des animaux morts pourrissent sur la chaussée,
tandis que d’autres bêtes, encore vivantes, rôdent, affamées.
Mes hommes découvrent un couple de vieilles gens qui n’ont pas
abandonné les ruines de leur demeure, les pauvres n’ont pas mangé
depuis plusieurs jours et sont restés terrés dans leur cave, avec
leur veau. Ils reçoivent en pleurant les vivres que, spontanément,
leur offrent nos braves troupiers. Quelle misère !..
Le
sergent major Chanot m’amène un prisonnier boche qu’il a
cueilli, perdu, dans un bois. Ce farouche guerrier n’a rien de
terrible à voir. Maigre et chétif, il tremble de tous ses membres
quand je lui fais traduire par Poisson que, pour racheter les crimes
de ses pareils, il va être pendu par les pieds… En attendant, je
lui vois entre les mains, une demi-boule et une boite de singe,
cadeaux de mes soldats.
Le
Château, ou plutôt les châteaux car il y en a deux (ce ne sont
d’ailleurs que d’assez vastes maisons de campagne) par chance ont
été un peu épargnés. La popote du Bataillon est installée dans
l’un et je loge dans l’autre avec Cotel. On s’est furieusement
battu plusieurs jours autour du village, de nombreux tués en
témoignent et l’odeur qu’ils dégagent est épouvantable. Ainsi
que dans le bois de Crévie, on rencontre les mêmes tas d’armes et
d’effets. On m’apporte une de ces fameuses baïonnettes à scie
dont on a beaucoup parlé, ces dernières ne sont pas aussi méchantes
que se le figure le brave civil de l’arrière auquel les
journalistes bourrent le crâne. La scie qui existe au dos de la
lame, est destinée simplement à scier les troncs d’arbre, les
branches. C’est, du reste, une arme de taille et non d’estoc, car
elle n’est pas pointue et ne peut s’emmancher au bout d’un
fusil. Seuls en sont pourvus les tambours, les ordonnances, etc...
Elle a à peu près la même destination que, chez nous, le sabre
série Z. Des amoncellements d’obus de 77, enfermés par deux dans
des paniers d’osier, des caissons abandonnés, révèlent d’anciens
emplacements de batterie, celles-là même qui nous arrosaient si
généreusement lorsque nous habitions nos tranchées de
Buissoncourt.
Après
un réconfortant dîner et la garde aux issues installée, nous
prenons un repos bien gagné. Que cela semble donc bon de pouvoir
dormir sans être inquiété par de continuelles alertes ! En
arrivant sur l’emplacement que nous avons occupé quelques heures
au N.E. de Réméréville, et comme j’explorais seul les environs,
je me suis trouvé tout à coup face à face avec un Lieutenant
Colonel d’Infanterie, petit et gros, la poitrine constellée de
décorations et portant au collet de sa vareuse le n°286. Je me suis
présenté à lui et, à son tour, il m’a dit son nom :
Colonel d’Olonne.
Nom
que je connaissais pour être celui d’un officier ayant accompli
différents voyages d’exploration en Asie Centrale. Il commandait
un groupement chargé d’une mission spéciale pour laquelle il m’a
demandé différents renseignements que je lui ai donné sans trop
d’enthousiasme, en raison des propos pas autrement obligeants que,
avec sa pointe d’accent méridional, il m’avait tenu sur la
renommée, surfaite à son avis, des régiments de l’Est. Le
Journal de guerre de mon aïeul, le capitaine Lucien Proutaux, écrit
du premier au dernier jour de la Grande Guerre (1914-18) »
VI)
Des
combats violents encore peu connus. Les combats de septembre 1914
dans l’Aisne font pourtant partie des derniers soubresauts de la
guerre de mouvement et donnent la mesure des enjeux que sont, dans le
territoire de l’Aisne, le passage de la rivière Aisne et la montée
à l’assaut du Chemin des Dames... Les forces Britanniques en font
le douloureux apprentissage : elles doivent franchir l’Aisne le 13
septembre.
Le
14 septembre, leur assaut à travers les champs de betteraves et les
bois, sur un terrain escarpé et boueux, se révèle particulièrement
meurtrier : les Allemands ne font plus retraite, ils ont creusé des
tranchées et installé des postes de mitrailleuses.
Entre
le 12 septembre et le 8 octobre, les pertes Britanniques s’élèvent
à plus de 10% des troupes engagées.
Du
13 au 15 septembre, les troupes françaises qui attaquent entre
Paissy et Craonne butent sur les mêmes obstacles et connaissent la
même désorganisation. Après ces combats, chaque camp s’enterre
et l’organisation alliée se structure : les Britanniques
rejoignent le front des Flandres en octobre.
VII)
EMPLACEMENT OU JEANNE D'ARC FUT BLESSÉE |
Le général Weygand en assure dès le début, une présidence d'honneur active et efficace.
But
de l'association :
Présenter
une image complète et exacte de Jeanne d'Arc dans un esprit
strictement culturel
Son action Recherche :
Son action Recherche :
Diffusion
Liaison avec les pays étrangers
1914
: Jeanne sauve une 2e fois la France
«
A Jeanne d'Arc qui sauva deux fois la France ». Cette dédicace
devait être apposée sur la façade de la basilique Sainte-Jeanne
d'Arc construite à Paris, dans le 18e arrondissement. Mais cette
façade est restée inachevée, sans aucune inscription ni
ornement...
Dans
quelles circonstances Jeanne sauva-t-elle une deuxième fois la
France et pourquoi cette église fut-elle bâtie en ce lieu et non
pas ailleurs ? C'est tout une histoire.
Le
vœu de 1914.
Il
faut se reporter au début du mois de septembre 1914. Depuis près
d'un mois, les combats font rage et, malgré tous les efforts,
l'avancée Allemande semble irrésistible. Le front se rapproche de
plus en plus de Paris, transformé en camp retranché. Des dizaines
de milliers de Parisiens fuient la ville, le général Gallieni fait
miner les ponts sur la Seine pour retarder l'ennemi dans
l'éventualité d'une bataille à travers la capitale. Le 2
septembre, le Gouvernement va se réfugier à Bordeaux. Le même
jour, à Compiègne, les Allemands annoncent qu'ils seront à Paris
le 4 septembre.
Le
4 septembre, les Allemands ne sont pas encore arrivés mais
l'angoisse des Parisiens est à son comble. Ils ne savent pas que
leur destin va basculer ce jour-là.
Ce
4 septembre, Mgr Odelin, vicaire général, célèbre la messe au
Sacré-cœur
de
Montmartre. Après la messe dans la chapelle des armées, dédiée à
Saint Michel et à la bienheureuse Jeanne d'Arc, il fait vœu
d'élever une église à Jeanne d'Arc, à Paris, si la capitale est
épargnée. Il s'agit d'un vœu conditionnel fait au nom du cardinal
absent. L'intention de Mgr Odelin est de soumettre ce vœu à
l'approbation de l'archevêque de Paris, dès son retour de Rome où
il est retenu par le conclave qui élit Benoît XV.
Or,
le jour même où ce vœu est formulé, surviennent deux événements
extraordinaires, imprévus et simultanés :
- Au lieu de continuer à avancer droit sur Paris, vers une victoire presque assurée, le général von Klück se détourne de la capitale et oblique vers l'est, vers les bords de la Marne où il va se faire battre. Cette énorme erreur stratégique est encore mal expliquée...
- Le soir de ce 4 septembre, le général Gallieni ordonne à la 6ème armée la manœuvre hardie, l'offensive sur l'Ourcq, qui déclenche la bataille de la Marne. Dans la situation militaire où l'on se trouvait et dans l'état où était l'armée Française, il paraissait impensable de pouvoir lancer une telle attaque. Le futur vaincu de la Marne, le général von Klück, a déclaré :
«
Que des hommes ayant reculé pendant 15 jours, que des hommes couchés
par terre et à demi-morts de fatigue puissent reprendre le fusil et
attaquer au son du clairon, c'est une chose avec laquelle nous autres
Allemands n'avions jamais appris à compter : c'est là une
possibilité dont il n'a jamais été question dans nos écoles de
guerre. »
La
bataille de la Marne commence le lendemain. Les combats sont acharnés
et, le jour suivant, le 6 septembre, le général Joffre lance son
fameux ordre du
jour
: « Au moment où s'engage une bataille dont dépend le salut
du pays, il importe de rappeler à tous que le moment n'est plus de
regarder en arrière. Tous les efforts doivent être employés à
attaquer et refouler l'ennemi. Une troupe qui ne pourra plus avancer
devra coûte que coûte garder le terrain conquis et se faire tuer
sur place plutôt que de reculer »... Ce dimanche 6 septembre,
les paroissiens de Saint-Denys de la Chapelle (Paris 18e) célèbrent
le 485e anniversaire du passage de Jeanne d'Arc en ce lieu. L'abbé
Margand, ancien vicaire de cette paroisse devenu curé de
Sainte-Geneviève dans la Plaine Saint Denis, prêche après les
Vêpres. Au cours de son sermon, il s'écrie :
« De
même qu'en 1870 on a fait vœu d'élever la Basilique du Sacré-cœur,
prenons l'engagement solennel d'élever en ce lieu une basilique à
Jeanne d’Arc si Paris n'est pas touché par les armées
Allemandes ». Alors, chose inouïe à l'époque, toute
l'assistance explosa en applaudissements prolongés... Le Figaro du
lendemain relata le fait, en ajoutant :
« C'est
un engagement d'honneur, Paris voudra le tenir ».
Ce
6 septembre, jour où le vœu est ainsi renouvelé, l'attaque menée
par des soldats pourtant écrasés de fatigue s'avère payante : pour
la première fois depuis un mois, la ruée allemande est stoppée.
Dans
la nuit du 6 au 7 septembre, le commandant du camp retranché de
Paris, le général Gallieni, envoie plus de 4 000 hommes prendre
part à la bataille. Des centaines de taxis parisiens, des omnibus et
des voitures de maîtres sont réquisitionnés et, dans un long
cortège, ils vont rejoindre la ligne de feu sur le front de la
Marne.
CHAPELLE SAINTE JEANNE D'ARC |
Ce
même dimanche 13 septembre 1914, le cardinal Amette présidait à
Notre-Dame de Paris la procession des reliques des Saints de France.
Trente mille fidèles se pressaient dans la cathédrale, sur le
parvis et dans les rues avoisinantes. Son Éminence invita ses
diocésains à persévérer dans la prière pour le salut de la
Patrie.
L'adversaire
essayait de se ressaisir et un retournement de la situation était
toujours à craindre. A la fin de la cérémonie, l'Archevêque de
Paris monta en chaire et il confirma explicitement le vœu : « Depuis
le commencement de la guerre, plusieurs ont exprimé la pensée de
promettre par vœu l'érection d'une église à Jeanne d'Arc, dans la
capitale, pour obtenir la victoire.
Nous
avons devancé ce désir puisque depuis plusieurs années déjà,
nous avons résolu de construire à Paris une église à Jeanne
d’Arc. Eh bien, aujourd'hui, je fais vœu de poursuivre au plus tôt
la construction de cette église et de la dédier à la bienheureuse
Jeanne d'Arc, en ex-voto commémoratif pour le salut et le triomphe
de la France. »
La
bataille de la Marne écarta la menace Allemande sur la capitale et,
durant les quatre années de guerre, Paris fut à l'abri des combats.
Satisfaction avait donc été obtenue. Fut-ce grâce à une
intervention surnaturelle ? En d'autres termes, doit-on voir une
relation de cause à effet entre le vœu à Jeanne d'Arc et la
protection de Paris ? L’Église a répondu par l'affirmative. Voici
ce que déclarait le cardinal Feltin dans l'homélie qu'il prononça
le 10 mai 1964, le jour de la consécration de la basilique résultant
du vœu de 1914 : « On put constater que, dans le même temps où se
faisait cette promesse solennelle, pour des raisons qui nous sont
inconnues, les plans de l'armée Allemande se modifiaient et au lieu
de poursuivre sa marche vers Paris, cette première armée
s'orientait vers l'est. Sans doute espérait-elle envelopper toute
notre armée Française, c'était ainsi un combat dans le Nord-est.
Mais cette manœuvre a été le moment de stabilité : c'est le début
de la bataille de la Marne. C'est là qu'a commencé ce que l'on a
justement appelé le « miracle de la Marne ». Car s'il est
vrai que cette victoire ainsi remportée ait été présage de celle
qui viendrait après quatre années de vie passées en tranchées,
s'il est vrai que cette victoire, dis-je, est due à la valeur des
chefs et à la vaillance des soldats, on peut bien constater qu'elle
est aussi le résultat d'une protection particulière du Ciel, et
pourquoi ne pas le dire, de Sainte Jeanne d'Arc, puisque c'est depuis
ce moment-là qu'il y a eu changement dans nos attitudes de guerre. »
A
quel endroit édifier l'église votive ?
Le
curé de Saint-Denys de la Chapelle, l'abbé Georges Derroite,
souhaitait ardemment que la basilique dédiée à Jeanne d'Arc soit
construite dans sa paroisse, près de l'église où Jeanne pria et
communia en 1429... Mais, lorsque au début des années 20, le
diocèse décida d'entreprendre la réalisation du vœu, le projet
était de construire cette basilique près de la place Dupleix (15e
arrondissement), sur un terrain acquis à cet effet.
Un
beau jour de 1922, l'abbé Derroite eut la surprise d'apprendre que
ce projet ne pourrait pas être mené à bien : la Ville de Paris
venait de frapper ce terrain de servitude pour y ouvrir une nouvelle
rue. Le diocèse devrait donc trouver un autre emplacement.
Pour
notre curé, c'était un signe très clair : Jeanne d'Arc ne voulait
pas être honorée dans le 15e arrondissement, où elle n'est jamais
allée. Elle ne voudrait pas plus d'une église ailleurs dans Paris
puisque, de son vivant, elle n'a jamais pu entrer dans cette ville.
Le
seul emplacement convenable, c'était La Chapelle, ce village où
elle a logé en 1429, lorsqu'elle lança un assaut infructueux contre
la capitale, et où on la ramena, blessée par un tir Anglais. La
construction de la basilique à La Chapelle aurait aussi l'avantage
de procurer au quartier une protection et des grâces particulières,
par l'intercession de la Sainte.
Le
curé s'empressa de multiplier les démarches et d'intervenir auprès
de l'archevêque qu'il parvint à convaincre. Le 1er décembre 1922,
il rencontra le cardinal, Mgr Dubois, qui lui fit part de sa décision
: la basilique sera édifiée à La Chapelle, à charge, pour le
curé, de trouver un terrain.
SAINTE JEANNE D'ARC |
Le
terrain devait être mis en vente aux enchères le 28 décembre 1922.
Il ne fallait pas qu'il échappât à la paroisse. Pour mettre toutes
les chances de son côté, l'abbé Derroitte fit le vœu de se rendre
avec ses paroissiens en pèlerinage à Lourdes s'il parvenait à
l'acheter. Pour solenniser ce vœu, il le mit par écrit et confia ce
document à une personne qui devait le déposer à Lourdes, dans la
grotte des apparitions, le 28 décembre, jour de la vente. L'abbé
pouvait alors attendre sereinement ce jour fatidique.
Stupeur
: au jour dit, la vente n'a pas lieu ! Mais notre curé n'est pas
homme à se laisser abattre. « Le coup fut dur, écrit-il. Pourtant
nous ne perdîmes pas courage, considérant comme impossible que la
Sainte Vierge ait choisi le jour même de notre plus grande espérance
pour nous désespérer. » Il entreprend des négociations, qu'il
qualifie de « laborieuses », avec les vendeurs du terrain et ils
parviennent à un accord, sans passer par des enchères. La promesse
de vente est signée le 11 février 1923. Or ce jour (et ce n'était
pas un hasard pour le curé) est celui de la fête de Notre-Dame de
Lourdes : il savait bien que Marie ne l'abandonnerait pas (et
n'abandonnerait pas Jeanne d'Arc qui voulait être honorée en ce
lieu).
Le
soir même, il écrit à ses paroissiens pour leur annoncer la
nouvelle en laissant exploser sa joie : Chers Paroissiens, C'est un
fait accompli.
Aujourd'hui,
11 février, fête de l'Apparition de la Sainte Vierge à Lourdes,
nous sommes autorisés à vous annoncer que le vœu fait en notre nom
le 28 décembre dernier à Lourdes même est réalisé, que Son
Imminence le Cardinal Dubois, Archevêque de Paris, ému de l'état
de l'église Saint-Denys de la Chapelle, ayant considéré ses titres
historiques à devenir le sanctuaire parisien de Sainte Jeanne d'Arc,
touché de votre exceptionnelle dévotion envers la Sainte Héroïne
de la Patrie, son Conseil consulté et tous les obstacles ayant
disparu, a décidé que l'église Saint-Denys de la Chapelle serait
restaurée sous le vocable de Sainte Jeanne d'Arc, et le serait par
la piété du diocèse tout entier, en exécution du vœu fait par
Monseigneur Amette en 1914, exécution qu'avait retardée la guerre
et que rend plus que jamais pressante la Victoire.
Réjouissez-vous
et publiez-en la nouvelle. Il n'est personne qui doive rester
insensible à cet événement d'une portée matérielle et morale
incalculable. Sainte-Jeanne est à nous ! La seconde patronne de la
France, celle qui après Marie, veille sur les destinées de la
Patrie, est à nous ! Sa protection souveraine nous est un gage
certain de prospérité et de grandeur...
Mais
nous développerons ces pensées plus tard. Il n'y a de place à
l'heure présente que pour la joie et l'action de grâces.
Tous
les Parisiens et même tous les Français doivent les partager.
Il
convenait divinement que la Patronne de la France eût une église
dans la Capitale, que cette église témoignât de son final triomphe
et de son entrée dans Paris sur les lieux même qui n'avaient gardé
jusqu'alors que le triste souvenir de son échec, qu'il fût enfin le
sanctuaire même où elle avait si saintement prié, communié, pris
et repris courage. Demain tout le monde dira : c'est bien ainsi. Ce
n'en est pas moins un vrai miracle.
Que
Dieu soit béni ! Vive la Chapelle ! Vive Sainte Jeanne d'Arc !
Le
cardinal Dubois informe officiellement les Parisiens dans une Lettre
Pastorale datée du 1er mai 1923, en justifiant le choix de ce lieu :
« Ne vaut-il pas mieux choisir, pour consacrer religieusement
la mémoire de la Pucelle, un des endroits jadis voisins de la ville
et aujourd'hui enfermés dans ses murs, là où elle a passé,
séjourné, prié, communié, souffert ?
Tous
les historiens sont d'accord pour dire que Saint-Denys de la Chapelle
a eu l'insigne honneur de recevoir Jeanne d'Arc. En vérité, ce lieu
est sacré, il mérite de devenir pour tous les Parisiens, pour tous
les Français, un lieu de pèlerinage patriotique et religieux. Notre
projet d'y élever une basilique favorisera ce pèlerinage. Il ne
s'agit pas de démolir l'église actuelle de Saint-Denys de la
Chapelle et de la remplacer par une autre église. Rien de ce qui
rappelle le souvenir de Jeanne ne devra disparaître: la nouvelle
église, ex-voto de notre victoire, la conservera comme une
relique. »
Le
curé de La Chapelle peut alors entreprendre son pèlerinage d'action
de grâces à Lourdes. Il avait si bien sensibilisé ses paroissiens
à l'importance de l'enjeu qu'ils furent nombreux à l'accompagner.
Il leur écrit le 31 mai 1923 :
«
Dans quelques jours nous serons à Lourdes, fidèles au vœu que nous
avons fait d'y aller en pèlerinage, si nous avions le bonheur de
voir notre rêve accompli. Il nous tarde de partir. Notre cœur,
gonflé de reconnaissance, est impatient de remercier la Vierge Marie
du miracle qu'elle a fait en notre faveur. Car c'est miracle qu'on
ait décidé d'édifier, chez nous, sur les pauvres restes de notre
église, la basilique de Sainte Jeanne d'Arc.
(...)
Quel événement ! Quelle grâce! Comme il convient de ne faire qu'un
cœur, et le plus grand des cœurs pour exprimer notre gratitude. !
Nous,
heureux pèlerins, nous ferons en sorte de l'exprimer avec effusion
au nom de tous, nous tâcherons, par elle, d'attirer sur la paroisse
de nouveaux bienfaits et d'obtenir les miracles qui sont encore
nécessaires pour mener à bonne fin l’œuvre immense qui reste à
faire.
(...)
Nous voudrions emmener toute la Paroisse. Force nous est de nous
contenter d'une simple délégation. Du reste, elle sera fort
convenable. Nous serons plus de quatre-vingt, groupés et marchant
derrière la bannière de Jeanne d'Arc. Tous les âges et toutes les
conditions seront représentés. Plusieurs malades nous accompagnent
et parmi les malades les pauvres n'ont pas été oubliés. Espérons
qu'ils seront guéris.
Quant
à vous, chers Paroissiens, vous à qui le devoir impose le sacrifice
de rester à Paris, croyez que vous ne serez pas oubliés. Nous
emportons vos nécessités, vos requêtes, vos préoccupations de
toutes sortes. Nous recommanderons à la Sainte Vierge vos familles,
vos enfants, la santé et le bonheur de tous ceux que vous aimez.
Nous avons grande confiance de revenir les mains pleines de
bénédictions pour tous. Soyez, vous aussi, vous-mêmes, très unis
à distance par la pensée et la prière. »
Il
va falloir maintenant financer et construire la basilique, en prenant
modèle, écrit-il « sur la petite Bernadette qui, malgré sa
faiblesse, n'a pas désespéré de couronner le rocher de Massabielle
de la basilique qu'on y admire ». L'entreprise fut ardue et c'est
seulement en 1964, cinquante ans après le vœu, que l'édifice put
être consacré. Sa grande taille (1 000 places assises) devait lui
permettre d'accueillir des foules. Mais, aujourd'hui, un seul groupe
y vient en pèlerinage : les membres de notre association, le jour de
la fête nationale de Jeanne d'Arc. Mais ça, c'est une autre
histoire...
Jacques
FRANCOIS
NOTES :
(1)
On y voit le résultat de dissensions et rivalités entre généraux
allemands mal coordonnés par le commandement en chef de Moltke, qui
se trouvait alors au Luxembourg.
(2)
Au début du mois de septembre 1429, Jeanne d'Arc logea dans le
village de La Chapelle St-Denis, qui se situait à mi-chemin entre
Paris et la ville de Saint-Denis, et qui est maintenant englobé dans
le 18ème arrondissement. Elle fit une veillée d'armes dans
l'église, et y communia le lendemain matin 8 septembre avant de se
lancer à l'assaut de Paris. Ce fut un échec, Jeanne fut blessée et
ramenée dans ce village. Le roi décida alors de renoncer à la
prise de Paris.
(3)
Pour être complet, il faut signaler que le « miracle de la Marne »
fut également attribué, à l'époque, aux interventions du Sacré
Cœur, de sainte Geneviève et de la Vierge Marie (célébrée,
notamment à Barcy, près de Meaux, sous le vocable de Notre Dame de
la Marne).
CHAPELLE SAINTE JEANNE D'ARC A PARIS 18e
C'est
un copier/coller, je ne me serais pas permise d'en changer une
virgule MNC...
texte
trouvé à la 9 page du déroulant de recherche.
1914
: Jeanne sauve une 2ème fois la France trouvée à la page 9 du
catalogue « google »
www.amis-jeanne-darc.org/index.php?option...1914...
Il
faut se reporter au début du mois de septembre 1914. .... Ce même
dimanche 13 septembre 1914, le cardinal Amette présidait à
Notre-Dame de Paris la ...
Vous
avez consulté cette page 2 fois. Dernière visite :
13/09/14
Bataille
de la Marne : septembre 1914
chtimiste.com/batailles1418/marne.htm
6
au 13 septembre 19 14. On a dit que la lutte allumée le 6 septembre
au matin, de Paris à Verdun, ne fut pas une bataille unique, mais
une série de batailles ...
Vous
avez consulté cette page de nombreuses fois. Date de la dernière
visite : 13/09/14
13
septembre 1914. Les Allemands ne nous ont envoyé ...
www.nrblog.fr/.../13/13-septembre-1914-les-allemands-ne-nous-ont-env...
Il
y a 1 jour - 13 septembre 1914. Baccarat Départ de Ménil à 5h
pour Baccarat. Les Allemands ne nous ont envoyé aucun obus cette
nuit ; leur retraite doit ...
Vous
avez consulté cette page le 13/09/14.
Chalon-sur-Saône
| Le 13 septembre 1914 du 56e RI de ...
www.lejsl.com/edition.../13/le-13-septembre-1914-du-56e-ri-de-chalon
Il
y a 1 jour - Le 13 septembre 1914 du 56e RI de Chalon. Clayeures
(Meurthe-et-Moselle). Toute la journée le 56e RI reste dans
l'attente de nouveaux ...
Vous
avez consulté cette page le 13/09/14.
13
septembre 1914 ... Oui, aujourd'hui nous voyons tout en ...
lafautearousseau.hautetfort.com/.../13-septembre-1914-5423828.html
Il
y a 1 jour - Victoire ! Nous pouvons enfin écrire ce beau mot
puisqu'ila été prononcé au ministère de la Guerre devant les
représentants de la...
Vous
avez consulté cette page le 13/09/14.
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