vendredi 8 août 2014

LA GRANDE GUERRE AU JOUR LE JOUR... 7 AOUT 1914

7 août 1914

Un désir de guerre ?

Paysans, ouvriers, employés, la très grande majorité des Européens ne veulent pas la guerre en 1914. Mais, dans les capitales, des groupes influents l'appellent bruyamment de leurs vœux et enflamment les esprits.
De nombreux intellectuels et artistes sont, depuis des années, séduits par l’idée de la guerre. Ils détestent l’amollissement et l’ennui bourgeois, la décadence républicaine, le sentimentalisme efféminé. Ils exaltent l’action virile, l’héroïsme, la beauté du sacrifice. La guerre fait revenir les vertus traditionnelles. La guerre est une phase nécessaire de régénération des civilisations.
Péguy la recommande pour en finir avec la société moderne où on ne croit plus à rien.
Jusqu’aux premières batailles, Maurice Genevoix en parle avec amour.
Ernst Jünger : « La guerre reste la forme suprême de l’énergie. »
Pierre Teilhard de Chardin : « La guerre rend libre. »
Le peintre Allemand Franz Marc : « Le feu purifie ».
L’écrivain Filippo Marinetti : « La guerre est la seule hygiène du monde. »
Maurice Barrès : « Avant même qu’elle ait jeté sur notre nation sa pluie de sang, la guerre, rien que par ses approches, nous fait déjà sentir ses forces régénératrices. C’est une résurrection ! »
Depuis des années, on va d’une crise à l’autre sur l’échiquier international. On frôle plusieurs fois la guerre généralisée entre 1905 et 1913. Les incidents internationaux se résolvent mais leur accumulation laissent les opinions publiques meurtries et méfiantes. Chaque nation prend des postures menaçantes. Les dépenses militaires européennes augmentent de 300%. Certains états ont des problèmes intérieurs pour lesquels un conflit extérieur pourrait constituer une diversion utile.
Les Britanniques sont jaloux de leur domination commerciale et maritime.
L’Allemagne, devenue la première puissance manufacturière de l’Europe, ne s’estime pas assez reconnue et prise en compte dans le concert des nations.
L’Autriche-Hongrie veut en finir avec la turbulente Serbie dans les Balkans, là-même où la Russie entend asseoir sa domination.
En France, les confrontations coloniales avec l’Allemagne provoquent un intense déferlement Germanophobe. Courant Barrès ou tendance Maurras, on n’a jamais vu autant de virulence nationaliste.
On ne veut pas la guerre mais on y est conduit presque mécaniquement et tous les peuples ont la même conviction de défendre leur bon droit et d’être agressés, directement ou indirectement. Chacun se met du côté de la civilisation et se pose en rempart contre la barbarie.
Les Français sont des dégénérés,
les Russes des esclaves,
les Allemands des bêtes brutales,
les Anglais des traîtres et des fourbes.
A la mobilisation, les façades se couvrent de drapeaux mais les réactions divergent entre grands centres urbains et campagnes. Sur les boulevards, c’est l’enthousiasme et l’allégresse. Des groupes entonnent des chants patriotiques et crient « A Berlin ! » ou « A Paris ! ». On acclame les troupes autour des casernes et près des gares. Ailleurs, les hommes répondent à l’appel sans liesse martiale. Ils sont résolus à accomplir leur devoir mais préoccupés. Au moment du départ, les discours d’encouragement des maires ou des instituteurs qui restent, ne sont pas inutiles. De toute façon, il n’est pas convenable de montrer son inquiétude et on veut croire ce qui se dit partout : la guerre sera courte...
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En 1914, la France se fige à la déclaration de guerre. En effet, tout s'arrête. Dans les campagnes, les moissons sont suspendues faute d'hommes, dans les villes, la production industrielle, la vie boursière s'arrêtent. Dans les ateliers, les usines, les machines sont au repos. Le 1er août, la mobilisation des hommes désorganise l'activité économique. De plus, la population est anxieuse et espère une guerre qui sera de courte durée. Les femmes doivent remplacer les hommes partis combattre, et défendre leur pays.
1) La femme, chef de famille

Alors que les hommes partent, les femmes demeurent subitement seules face a une nouvelle vie. La vie quotidienne des femmes réside dans leur rôle traditionnel : élever les enfants, les nourrir, veiller à leur éducation, répondre à leurs interrogations. Mais cela ne suffit plus. La guerre rend leurs vies difficiles puisqu'elles se trouvent privées du salaire de leur mari. C'est pourquoi la loi de 1907 donne aux femmes mariées la libre disposition de leur salaire...

le Président du Conseil René Viviani
L'essentiel des biens de la nation est d'abord affecté à l'effort de guerre et aux poilus. En outre, la vie quotidienne pendant la Grande Guerre se traduit par une augmentation croissante des prix, un rationnement des produits de première nécessité. Notamment la nourriture au moment où les productions alimentaires se font plus rares. Il faut parfois faire la queue pendant de longs moments devant les magasins d'alimentation avant d'obtenir les aliments ceux-ci étant en partie rationnée au cours du conflit. Le manque de nourriture n'est pas la seule difficulté à laquelle doivent faire face les femmes, il est également difficile de se ravitailler en combustible... De plus, certaines femmes doivent faire face à l'occupation avec les atrocités, la misère, le malheur, la souffrance, la mort.

Elles font la découverte de l'autonomie de décisions. La mère devenue chef de famille assume le quotidien, les nouvelles responsabilités et travaille par nécessité. Les conditions psychologiques des femmes dans les campagnes sont difficiles, mais malgré tout, elles tiennent sans se lamenter. Elles sont séparées des villes, sans maris et doivent souvent gérer l'exploitation. L'instauration d'une allocation aux femmes de mobilisés devient nécessaire.

L'état vient en aide aux femmes en leur distribuant des allocations. La somme allouée permettait seulement de survivre pour les ménages ne disposant pas d'autres ressources, mais cette allocation ne pouvait à elle seule compenser la perte du salaire d'un ouvrier. Cependant, elle permettait parfois quelques rares adoucissements.

Les allocations apparaissent comme une nécessité dans certains cas, mais avec l'allongement de la durée de la guerre celles-ci donnent lieu à certaines dérives dilettantismes.
Durant l'absence des hommes, les femmes adoptent de nouveaux comportements :
Au niveau financier puisqu'elles doivent gérer le portefeuille familial et s'occuper des dépenses, rôle traditionnellement réservé aux hommes.

Au niveau physique : les femmes changent de mode vestimentaire et changent peu à peu leur apparence. Par exemple, certaines femmes portent à présent des pantalons et des robes plus courtes. Aussi, la mode des cheveux courts s'impose peu à peu dans les mentalités.

Malgré l'impulsion de ce modèle dans la mode et les milieux bourgeois, c'est avant tout à la campagne et dans les usines que les femmes se masculinisent, entre autre pour jouir d'une plus grande aisance au travail.

630 000 veuves sont ainsi devenues chefs de famille, tandis que le déséquilibre entre les sexes (1103 femmes pour 1000 hommes) conduit un certain nombre de femmes restées célibataires à se comporter en égales de l'homme.
2) La femme au travail

« Comme toute mère de famille digne de ce nom est tour à tour chez elle, comptable, couturière, institutrice, médecin, de même au sein de la grande famille Française, les Femmes ont su, pour les nécessités sociales et leurs propres besoins s'improviser dirigeantes d'exploitations agricoles, boulangères, métallurgistes, bureaucrates, administratives », d'après Léon Abensour dans Les Vaillantes en 1917.

Cette citation illustre l'évolution de la place de la femme pendant la guerre. Le fait que la guerre dure et que le nombre d'hommes mobilisés ne cesse d'augmenter va pousser les femmes à remplacer les hommes et à acquérir de nouvelles responsabilités.

Le 7 août 1914, le Président du Conseil René Viviani lance un appel aux femmes Françaises. Il est présenté à la population sous la forme d'un placard qui à l'époque est affiché dans les lieux publics. Alors que la guerre vient de commencer, cet appel patriotique s'adresse à ceux qui formeront bientôt l' « arrière », en particulier les femmes... Cela annonce l'aspect total d'un conflit. Pour obtenir cet engagement des femmes, Viviani qui s'adresse uniquement aux populations rurales fait appel à leur patriotisme ( le travail des femmes doit servir la patrie « ce n'est pas pour vous c'est pour elle ») .

D'abord, il invite les femmes à achever la moisson : 3,7 millions d'hommes sont mobilisés et il en reste 1,5 million pour effectuer le travail qui en employait 5, 2 million . Il repose alors sur les 3,2 millions d'agricultrices, ouvrières agricoles aidées par les chômeurs, les étrangers ou les prisonniers, les anciens et les enfants.

La plupart des femmes adoptent les propositions du président du conseil : Elles vont soutenir la guerre en participant indirectement au conflit... Plus de 3 millions de paysannes répondent à cet appel par la réalisation de travaux qui ne leur sont pas habituels comme les labours et le fauchage, labeurs augmentés par la pénibilité de la réquisition par l'armée des animaux de trait. Elles doivent tout faire : décider des productions, diriger la main d'œuvre, labourer, semer, rentrer les foins, conduire la charrue, nourrir le cheptel, et la population... Les agricultrices deviennent souvent des chefs d'exploitation, et doivent exécuter des travaux assumés habituellement par les hommes. Il faut toutefois noter que lorsque des hommes restent sur l'exploitation la division, des taches restent. Dans certains régions comme dans le Midi Pyrénées, les hommes sont remplacés par des étrangers, qu'elles doivent gérer. On parle alors de « contribution » de la femme. Les exploitations dirigées par des femmes restent minoritaires.

Dans les campagnes, elles se font aussi « maréchal ferrant » , travaillent à la forge, réparent les batteuses lieuses, retournent les foins, deviennent boulangères, couvreurs ou charpentiers, garde champêtre. On les retrouve aussi aux services publiques comme secrétaire de mairie, postière, institutrice. Entre 1914 et 1918 aux PTT 18 000 mobilisés seront remplacés par 11 000 trieuses et autres factrices.

La mobilisation des infirmières est immédiate tout comme celle des paysannes ou des boutiquières qui reprennent la tâche laissée par le mari. Les infirmières ont soigné les soldats blessés dans les hôpitaux de guerre et les maisons de convalescence...

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