Cette
page concerne l'année 1013 du calendrier julien. Ceci est une
évocation ponctuelle de l'année considérée il ne peut s'agir que
d'un survol !
SAINTE
FOY ET SES MIRACLES DONT L'ESSOR ARCHITECTURAL ROMAN
On
dispose de très peu de données biographiques sur ce personnage. De
surcroît, il portait un prénom assez courant à l'époque (y
compris en Rouergue) . A Chartres, il suit l'enseignement de L'évêque
Fulbert. Revenu à Angers, il est devenu écolâtre, c'est-à-dire
directeur d'école (celle de la cathédrale). On sait aussi que son
frère Robert est abbé de Saint-Paul-de-Cormery, en Touraine.
Bernard
d'Angers
a été successivement pèlerin, écrivain, historien.
C'est
un pèlerin sceptique qui débarque à Conques en 1013. Bernard doute
de la réalité des miracles attribués à Sainte Foy, dont le
retentissement est grandissant en Europe. L'un d'entre eux paraît
particulièrement extravagant, celui qui aurait touché un habitant
d'Esperac (dans l'Aveyron), Guibert
l'illuminé,
à la fin du Xe siècle. Il est raconté par le médiéviste Pierre
Bonnassie.
C'est
au cours de ce séjour de 3 semaines et demi que Bernard commence à
rédiger le Livre des Miracles de Sainte Foy (qui est en fait un
assemblage de livres écrits à des périodes différentes). Il y
évoque l'accueil bienveillant qu'il a reçu à Conques. Il semble
qu'à cette époque (et dès le Xe siècle), deux types d'accueil
sont proposés aux pèlerins, l'un destiné aux seigneurs, l'autre
aux pauvres. Il existe donc deux « portiers », qui
prennent en charge deux sortes d'arrivants. On peut en déduire que
Bernard a été classé dans la « bonne » catégorie...
A
l'époque, les journées... et les nuits semblent parfois longues à
Conques, y compris aux pèlerins. Beaucoup chantent. Si les vocalises
des religieux ne soulèvent aucune contestation, celles des pèlerins
pauvres (qui sont souvent d'inspiration profane...) suscitent parfois
des réactions d'hostilité, à l'image de celle d'un abbé de
Conques, qui parle des « vociférations
sauvages des paysans ».
Bernard
a écrit les 6 premiers écrits durant ce voyage de 1013, les
laissant à Conques, avec interdiction d'y toucher ou d'évoquer leur
contenu... Étant donné que les réflexions et anecdotes qu'ils
contiennent se sont répandues comme une traînée de poudre en
Occident, on peut en conclure que les prescriptions de Bernard n'ont
pas été suivies à la lettre... A l'occasion de son deuxième
séjour (avant 1020), Bernard écrit 6 nouveaux récits. Le troisième
et dernier séjour (en 1020) donne naissance à 9 autres. Comme on
estime qu'au total il en a écrit une cinquantaine, c'est donc un peu
moins de la moitié de son œuvre qui a été composée à Conques.
Bernard
d'Angers dit retranscrire les propos des habitants et ceux de l'abbé
Adalguier
(Adalgerius). Cela explique la profusion d'anecdotes que son texte
contient. cet assemblage hagiographique peut-être analysé sous un
angle historique.
En
effet, il s'appuie sur des témoignages, en particulier pour établir
les miracles. Il fait preuve d'un indéniable esprit critique
vis-à-vis de ceux-ci (dans certaines limites)... Et il n'hésite pas
à exprimer son scepticisme, à l'occasion. Il serait même allé
jusqu'à « tester » une miraculée, qui prétend avoir
recouvré la vue. En lui tendant un denier...
Il
s'est de plus efforcé de vérifier les affirmations contenues dans
les témoignages, tentant de croiser les sources, lorsque c'était
possible. Frédéric
de Gournay
a cité une anecdote éclairante à ce sujet. « Elle vient du
sixième récit du Livre I ».
L'érudit
s'est rendu à la cour du duc d'Aquitaine (sise à Poitiers) et y
aurait interrogé (avec insistance !) une aristocrate
nommée Béatrice.
Celle-ci lui aurait confirmé les propos tenus par des moines de
Conques...
Bernard
d'Angers n'est pas le seul à livrer ce genre d’œuvre, à
l'époque. Rien que dans le voisinage, Saint
Vivien de Figeac
et Saint
Privat de Mende
ont subi un traitement semblable à celui de Sainte
Foy.
Ces récits ont été répandus pour attirer les pèlerins, qui sont
source de revenus... On espère aussi bénéficier de donations...
N'oublions pas que des communautés monastiques ont très tôt
développé le sens du commerce ! Voilà pourquoi l'ouvrage commencé
par Bernard d'Angers a été continué, par celui que l'on nomme
couramment « l'anonyme de Conques ». Frédéric
de Gournay
n'est pas loin de penser qu'il s'agit de l'abbé
Odolric II,
l'initiateur de la construction de la nouvelle église abbatiale,
celle qui fait les délices des touristes encore aujourd'hui...
EN ROUTE VERS COMPOSTELLE |
3
exemples de données historiques fiables fournies par les livres de
Bernard : Le cas d'un comte du Rouergue (Raymond
II),
mort en 961 sur la route du pèlerinage de
Saint-Jacques-de-Compostelle.
Revenant
en détail sur le seigneur Hugues
de Cassagnes,
qui a tenté de voler le vin des moines (entreposé du côté
d'Escandolières, en bordure du vallon de Marcillac... eh, oui, déjà
!). Dans cette affaire, il a perdu deux hommes... ce qui prouve que,
soit ils s'y sont mal pris, soit les moines tenaient vraiment
beaucoup à leur vin ! L'histoire ne s'arrête pas là... Le seigneur
furieux s'en serait pris à son épouse Sénégonde,
qui était hostile à l'équipée. Il l'aurait frappée... mais,
accident malencontreux ou punition divine, il se serait blessé par
la suite...
Au
vu des anecdotes racontées par Bernard d'Angers dans ses ouvrages,
on est amené à se demander si certains éléments du tympan de
l'église abbatiale, censés illustrer de manière générale les
péchés du monde, ne sont pas inspirés par ses écrits.
Le
cas du chevalier désarçonné a été cité :
A
l'époque, il a vraiment existé un de ces nobles, qu'une chute
malencontreuse (alors qu'il harcelait des paysans) a fait passer de
la vie à trépas. Des questions subsistent aussi à propos du couple
adultère représenté à ses côtés :
L'homme
pourrait-il être ce seigneur pèlerin, qui, lorsqu'il venait à
Conques, trompait son épouse sans vergogne... et qui a été mêlé
à plusieurs rixes ? Soyons toutefois prudents. Il existe d'autres
interprétations de cette partie du tympan (ce serait un prêtre
nicolaïte).
On
s'est aussi demandé si le mauvais évêque-abbé (tonsuré, tenant
une crosse) châtié sur le tympan ne serait pas celui de Clermont,
réputé voleur, qui aurait fini par être chassé de Conques... Les
3 personnages situés à l'arrière-plan seraient des proches ou des
neveux... mais ?...
CONQUES |
L’abbaye
de Conques est bâtie « dans
un pays presque sauvage »,
à l’aplomb d’une faille géologique, et toute son histoire n’est
que ruptures, encoches, chutes et renouveaux... L’origine de
Conques remonte aux premiers temps de l’Église des Gaules, d’après
la chronique monacale du XIe et XIIe siècle.
Fuyant les persécutions Romaines, quelques chrétiens se sont retirés dans ces versants inaccessibles de ces « gorges resserrées d'aspect sinistre » pour y vivre comme les ermites du désert Égyptien, de manière ascétique et solitaire... Ils suivent l’exemple de Paul de Thèbes et d’Antoine qui marquent le temps des anachorètes.
Fuyant les persécutions Romaines, quelques chrétiens se sont retirés dans ces versants inaccessibles de ces « gorges resserrées d'aspect sinistre » pour y vivre comme les ermites du désert Égyptien, de manière ascétique et solitaire... Ils suivent l’exemple de Paul de Thèbes et d’Antoine qui marquent le temps des anachorètes.
Si
Antoine, considéré comme le « père
de moines »,
jouit d’un grand renom au Moyen-Âge, Conques a tenu à marquer cet
attachement à l’érémitisme originel en faisant figurer Saint
Antoine au tympan, et en revendiquant la possession d’une relique
de l’ermite Paul, « premier
anachorète »
(selon Saint Jérôme)
Finalement
les ermites éparses dans «
l'âpre désert de Conques »
se regroupent en communautés cénobitiques sous l’impulsion de
Saint Pacôme, dont la règle institue la première forme de la vie
monastique proprement dite... Ce serait l'origine du premier
monastère de Conques.
En
371 un milliers de moines sont massacrés par les païens. Les
cénobites sont précipités du haut de la falaise du Bancarel dans
le torrent de l’Ouche le bien nommé, Ocha
[prononcé oucho]
signifiant en occitan, hoche, brèche, encoche, entaille...La stèle
élevée à cet emplacement au XIIe siècle se rapporte probablement
à cette première tragédie...
Le
nouvel essor de l’abbaye correspond à celui des Carolingiens
dont l’administration s’appuie sur les institutions religieuses :
Pépin le bref, Charles le Grand et Louis le Pieux vont combler
l'abbaye de dons :
Charlemagne
dote le monastère d’une relique insigne, celle de la Vraie
Croix,
pour laquelle est confectionné, 3 siècles plus tard, en 1100, un
reliquaire le fameux « A
de Charlemagne »,
marquant selon les historiens, la primauté de Conques parmi tous les
monastères royaux.
En
801, son fils, Louis le Pieux (ou le Débonnaire) partant pour la
Reconquista
de la Catalogne occupée par les Sarrasins, construit au passage la
première route qui mène à Conques, taillée à même le roc de la
« Vallée
Rocheuse
», nous dit la chronique monacale.
En 818 ce même Louis le Pieux, devenu roi d'Aquitaine puis Empereur, érige le monastère en abbaye impériale placée désormais sous la règle de Saint Benoît et lui donne son nom actuel « Conquae », « Les conques » au pluriel, ce qui signifie en latin de l’époque « les absides ». Le « s » de Conques rappelle son étymologie latine et la référence au grand nombre d’oratoires munis d’absides dont la conque résonne les chants « comme des essaims d’abeilles sauvages dans la montagne »...
En 818 ce même Louis le Pieux, devenu roi d'Aquitaine puis Empereur, érige le monastère en abbaye impériale placée désormais sous la règle de Saint Benoît et lui donne son nom actuel « Conquae », « Les conques » au pluriel, ce qui signifie en latin de l’époque « les absides ». Le « s » de Conques rappelle son étymologie latine et la référence au grand nombre d’oratoires munis d’absides dont la conque résonne les chants « comme des essaims d’abeilles sauvages dans la montagne »...
L'abbaye
prospère :
Pépin
d'Aquitaine, fils de Louis le Débonnaire, favorise la fondation
d'une abbaye filiale à Figeac, alors nommée « Nouvelle
Conques ».
En
844, au début du mouvement de la Reconquista,
l'apôtre Saint Jacques apparaît à Compostelle en Galice.
Cet
événement assurera bientôt l'essor de Conques...
L'ouverture
de la « via
podiensis »,
itinéraire de pèlerinage du Puy à Saint-Jacques-de-Compostelle,
passant par Conques, inaugurée par l'Evêque du Puy, Godescalc, en
950-951. Grâce à ce pèlerinage, Conques entretient des relations
privilégiées avec la péninsule Ibérique.
En
1082, Pierre d'Andouque, originaire de Conques, devient évêque de
Pampelune en Navarre. Le culte de Sainte Foy se développe de la
Galice, où une chapelle lui est consacrée en 1105 dans le
déambulatoire de Saint-Jacques-de-Compostelle, à la Catalogne en
passant par l'Aragon où Pierre 1er la choisit comme protectrice de
son royaume...
L’érection
de la sublime effigie de Sainte Foy en Majesté vers 960... En effet
n'est-ce pas braver l’interdit biblique des images humaines et
retourner aux idoles païennes que d’oser introduire dans le
temple, assise sur un trône, couronnée, sertie de pierres
précieuses et de bijoux, l’effigie d’une personne, fut-elle
martyre ? « J’ai
cru voir Diane en personne
», s’écrit scandalisé, l’écolâtre Bernard
d’Angers
à la vue de Sainte Foy en Majesté ! Oser en l’an 960, statufier
et vénérer un être humain à travers ce reliquaire-simulacre,
c’est accomplir un retournement de la tradition au risque de
rallumer la guerre des icônes...
Heureuse
audace, qui en dépit des interdits introduit la sculpture dans l’art
sacré de l’occident... Dès lors Michel-Ange devient possible...
La
vénération populaire atteint son point culminant lorsqu’en 1010
Sainte Foy restitue ses yeux à Guibert
« l’énucléé
». Ce miracle a un tel retentissement que Bernard
d’Angers
accourt à Conques, et « converti
» par l’accumulation des témoignages, en entreprend le repétoire
dans le fameux « Livre
des Miracles de Sainte Foy »
(1010-1020).
Modèle
du genre de récits « merveilleux
» destinés à l’admiration, cet ouvrage contribue à la célébrité
et à l’expansion de l’abbaye...
De
l’Espagne à l’Angleterre, de l’Allemagne au Moyen-Orient,
Barbastro, Pampelune, Roncevaux, Westminster, Saint-Gall, Bamberg, et
autres prieurés sur l’Euphrate, jalonnent la progression et
suscitent un courant de pèlerins sur le chemin de Compostelle, via
l’abbaye mère... Si bien que le flot croissant entraîne la
nécessité d’une nouvelle basilique. De 1031 à 1087, les abbés
Odolric
(1031 - 1065) et Étienne
II (1065
- 1087) lancent les travaux de construction de l'actuelle basilique
et inaugurent une architecture nouvelle :
Celle
qu’il est convenu d’appeler « église
à pèlerinage
», dont Conques représente le prototype (après celle de
Saint-Martin de Tours, détruite à la Révolution, modèle qui sera
repris bientôt, notamment à Saint-Sernin de Toulouse). Le
déambulatoire passant derrière le chœur permet la circulation
fluide des pèlerins et l’adjonction de bas-côtés et de tribunes
permet d’élever la voûte à plus de 27 mètres et d’ouvrir plus
de 100 fenêtres, faisant désormais pénétrer la lumière au sein
des églises romanes... C’est dans ce contexte que s’achève le
Moyen-âge de l’an Mil...
Dans
ce grand maelstrom
de l’histoire, deux autres événements majeurs ont marqué le
destin de l’abbaye :
La
Croisade
pour son avantage.
L’émergence
de Cîteaux,
à son détriment.
Bernard
d'Angers est venu par curiosité, pour s’enquérir de la renommée
grandissante du sanctuaire et des miracles attribués à Sainte Foy.
C’est donc un pèlerin particulier qui bénéficiera de
l’hospitalité des moines. Avec leur contribution active, et sur la
base des témoignages qu’il a recueillis à Conques, Bernard
d'Angers entreprend pendant son premier séjour la rédaction des
Miracles de Sainte Foy.
La
chanson de Sainte Foy Texte écrit vers 1060
Ce
texte de 593 octosyllabes, constitue l’un des titres de gloire de
la littérature occitane. Une rédaction dans le secteur de Conques
aux
alentours
de 1060 est probable. Cette datation fait de la « canson » le plus
ancien texte de cette ampleur écrit dans une langue romane. Si le
récit s’attarde surtout sur la vie édifiante de Sainte Foy et son
supplice il permet également d’appréhender l’atmosphère d’une
époque de grands troubles.
Sainte
Foy a été convertie par Saint Caprais, évêque d'Agen, et a subi
le martyr le 6 octobre 303.
La
fillette est livrée aux soldats pour être violée, mais par un
premier miracle le temple s’écrase sur les agresseurs.
Elle
doit être flagellée, elle est miraculeusement guérie.
Condamnée
à être brûlée vive sur le grill, une pluie divine vient étouffer
le feu. Dacien ordonne alors qu’elle soit décapitée…
2013-10
- La senteur de l'esprit : Archives
lasenteurdel-esprit.hautetfort.com/archive/2013/10/index.html
30
oct. 2013 - Doté d'une imagination débordante, il s'invente des
histoires.
.... La grande histoire
se marie parfaitement avec la petite,
celle du ...... Quelques anecdotes
(réelles, comme celle de la cravate) donnent du relief à cet
épisode convenu. .... s'était déroulé en 1013,
Bernard d'Angers étant notamment présent …
www.centre-europeen.com/archives/cycle-de-conférences/
14
juin 2013 - "Bernard
d'Angers
à Conques en 1013.
Le pèlerin, l'écrivain, l'historien". par Frédéric de
GOURNAY,. historien médiéviste (Voves). Elève de ...
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