mardi 23 décembre 2014

LA GRANDE GUERRE AU JOUR LE JOUR 5 DECEMBRE 1914

5 DÉCEMBRE 1914


I)
Nos progrès en Alsace. Paris, 5 décembre, 0h30.
Communiqué officiel du 4 décembre, 23 heures :
Sur l'ensemble du front, aucun incident notable.
Notre aile droite progresse dans la direction d'Altkirch.
On rend compte que, le 2 décembre, nous avons fait 991 prisonniers dans la seule région du Nord....

Quelques offensives de l'ennemi repoussées dans le Nord et dans l'Argonne
Bordeaux, 5 décembre, 15h30.
En Belgique, canonnade intermittente, assez vive entre la voie ferrée, Ypres, Roulers et la route de Becelaere à Paschendaele, où l'infanterie ennemie a essayé, sans aucun succès, de gagner du terrain.

A Vermelles, nous continuons l'organisation des positions conquises.
De la Somme à l'Argonne, calme sûr tout le front.

En Argonne, plusieurs attaques de l'infanterie Allemande ont été repoussées par nos troupes, notamment à la corne nord-ouest du bois de la Grurie.

Quelques canonnades en Woëvre et en Lorraine.

En Alsace rien à signaler.

Nous leur enlevons leurs tranchées dans le Nord et l'Argonne.

Ils s'acharnent sur Reims.

Bordeaux, 5 décembre, 15h46.
Au nord de la Lys, nous avons réalisé de sensibles progrès. Notre infanterie, attaquant au point du jour, a enlevé, d'un seul bond, deux lignes de tranchées ; le gain a été de 500 mètres.
En avant de Poësel, à mi-distance entre Dixmude et Ypres, nous avons pris, sur la rive droite du canal, une maison de passeur vivement disputée depuis un mois.
L'ennemi a tenté, sans succès, de nous obliger, par une attaque violente d'artillerie lourde, à évacuer le terrain conquis.

Dans la région d'Arras et en Champagne, canonnades intermittentes de part et d'autre.

Reims a été bombardée avec une intensité particulière.
De notre côté, nous avons détruit, avec notre artillerie lourde, plusieurs ouvrages en terre.

En Argonne, la lutte est toujours très chaude. Nous avons enlevé plusieurs tranchées et repoussé toutes les contre-attaques.

En Lorraine et en Alsace, rien d'important à signaler.

Paris, 6 décembre, 0h53.
Communiqué officiel du 5 décembre, 23h :
En Belgique, même activité que la veille. Nous avons consolidé notre situation dans le Nord. La maison du passeur a été enlevée dans la journée du 4 décembre. Sur le reste du front, rien d'important à signaler.

La guerre aux frontières de l'Est, de Nancy aux Vosges Paris, 5 décembre,
17h08.
Un correspondant de l'agence Havas, qui a parcouru la Lorraine et les Vosges, raconte les opérations à la frontière de l'Est, depuis le début de la guerre...
Après Morhange et Sarrebourg. Il montre comment l'offensive des armées de Castelnau, Dubail et Bonneau, heureuse au début, se heurte, sur le front Morhange-Sarrebourg, à une organisation défensive extrêmement puissante et à de très nombreuses colonnes ennemies.

Nos attaques échouent. Les Allemands prononcent une offensive violente, surtout sur la droite de l'armée de Castelnau, qui est obligée de reculer dans la direction de Lunéville.
Ce mouvement oblige la gauche de cette armée à se replier vers Nancy, pendant que l'armée Dubail, également inquiétée, revient sur Baccarat.
Toutefois, les deux armées conservent leur liaison, et l'offensive Allemande se brise contre la résistance de nos troupes.

La défense du Grand-Couronné, l'armée de Castelnau, non seulement arrête, mais refoule des attaques répétées contre le Grand-Couronné de Nancy.
L'attaque Allemande a deux objectifs : le mont Sainte-Geneviève au Nord ; le plateau d'Amance à l'Est, deux positions défendues par l'extrême gauche du 20e corps.

Avec de telles troupes nous vaincrons
Le général Dubail a déclaré au correspondant de Havas que les soldats ont fait preuve de qualités d'endurance et d'opiniâtreté que personne ne soupçonnait.
Grâce à ces qualités et à l'organisation du haut commandement, nous avons obtenu les premiers succès. Grâce à elles, nous vaincrons.

Le 5 décembre, à 3h, l'attaque est reprise ; Le groupe L'Arbalétrier prolonge la ligne du 147e. A gauche, une section  progresse jusqu'à 10 mètres des tranchées mais, non secondée par le 87e qui na pas pu s'avancer aussi près des tranchées, les éléments coloniaux ne peuvent que s'accrocher au sol. L'attaque reprend à 5h. La première ligne renforcée n'est plus qu'à quelques mètres des tranchées. Elle est arrêtée par un réseau de fil de fer et définitivement brisée. Le commandant Pallenet donne l'ordre au groupe L'Arbalétrier de rompre et d'aller s'établir sur la crête occidentale du ravin.

II)
Journal du Rémois Paul Hess (extraits)
« Il nous a fallu encore nous relever cette nuit à cause d’une canonnade toute proche, des nombreux sifflements et de l’arrivée, assez près, d’obus de différents calibres.
Ce matin, en allant  au bureau, j’ai tenu à faire une tournée pour me rendre compte des dégâts causés au cours de la nuit. Il paraît évident que la cathédrale a été visée de nouveau, de gros projectiles sont tombés rue du Cardinal de Lorraine, rue de l’école de médecine, (maison Abelé), sur la pharmacie de la place du Parvis, rue Libergier, rue Colbert et rue du Cadran Saint-Pierre.

L’État de la cathédrale Paul Hess évoque un article du Courrier de la Champagne dans lequel l’abbé Landrieux, curé de la cathédrale évoque les dégâts subis par l’édifice.
« Il y a eu trois foyers d’incendie:
L’échafaudage du portail,
les combles de la grande nef et l’abside.
Au point de vue artistique il y a eu des dégâts irréparables.
L’édifice a mieux résisté qu’on ne l’a cru. Notre cathédrale, avec ses deux tours, garde sa grande allure (…)
Les pierres cependant, sont assez profondément calcinées.
Les cloches ont fondu.
La tour sud n’a pas été atteinte, les bourdons sont intacts... Ils sonneront le Te Deum quand même à l’heure de la victoire.

La plupart des verrières sont détruites, soit par les bombes, soit par le feu. L’intérieur a relativement peu souffert, nous avons pu sauver le Trésor... Et maintenant quand rentrerons-nous dans notre chère cathédrale ?

Le hameau de Sapigneul, dépendance de Cormicy, que les Allemands possèdaient, est réoccupé par nos troupes. Beaucoup sont enterrés au cimetière de Bligny (Marne)

III)
 Le 5 novembre 1914, a été constitué au sein de Légion étrangère, le 4e régiment de marche, qui a pris le nom de « Régiment des Garibaldiens » en souvenir de Garibaldi, grande figure de l’indépendance Italienne venu combattre aux côtés des Français lors de la guerre de 1870.
6 des petits-fils de Giuseppe Garibaldi ont combattu dans ce régiment qui a été dissous en 1915, après l’entrée en guerre de l’Italie aux côtés de la France et du Royaume-Uni contre l’Autriche-Hongrie et l’Allemagne, les volontaires Italiens rejoignant alors des unités Italiennes engagées sur le front Austro-Italien.

IV)
Le commandant Ducarre prolonge le groupe L'Arbalétrier à l'aide d'une compagnie du 51e de ligne, restée en réserve et prescrit à chacun d'eux de se couvrir à l'aide d'une série de petits postes qui vont s'enterrer peu à peu à 100 mètres en arrière de la crête, de façon :
1° A empêcher toute infiltration et toute attaque,
2° De créer le prolongement d'une ligne de tranchées qu'il appartient à des travailleurs spéciaux d'exécuter pendant la nuit, car la fatigue des coloniaux est extrême.

V)
 Louis Oger (27e RIT) fusillé le 5 novembre pour « abandon de poste »
Extrait du carnet du 27e RIT): Le commandant Delignière, avec une compagnie du 1er Bon, est commandé pour procéder à l’exécution de deux déserteurs du 27e RIT, les nommés Oger et Proust, condamnés à mort par le conseil de guerre de la 45è DI, les 2 hommes sont fusillés à 6h40, à la croisée des routes au Nord de Villers-Châtel, devant une Cie du 28e et une compagnie du 26e de Caucourt. Les piquets d’exécution sont fournis par le 27e territorial.
VI)
Promenade militaire :
L’Angleterre déclare la guerre à l’empire Ottoman. Un corps expéditionnaire Anglo-Indien, rassemblé à Bombay, aux Indes, sous le commandement du général Delamain, débarque dès le lendemain à l’embouchure du Chott-al-Arab, un bras de fleuve formé par l’union du Tigre et de l’Euphrate, au fond du Golfe Persique. Les Britanniques ne veulent que protéger les raffineries d’Abadan, en Perse. Ils les occupent sans difficulté puis pénètrent dans les possessions Ottomanes.

VII)
 Lu dans Le Moniteur en date du 5 novembre 1914
France-Belgique.
-Les Allemands, qui veulent franchir l’Yser, battent réellement en retraite, malgré leur grand nombre : Ils sont, paraît-il, 500.000, mais auraient perdu 100.000 hommes… Sur les pentes au nord de l’Aisne, vers Vailly, nous avons regagné à peu près tout le terrain cédé.

Russie.
Les troupes Russes, qui poursuivent à gauche de la Vistule, les Austro-Allemands vaincus ont repris Kielce et un grand nombre de localités en arrière, dans la direction de la frontière Silésienne.
Le quartier général Allemand a été transporté à Gentoschau, près de cette frontière.
Von Hindenburg n’est pas plus heureux en Prusse Orientale, où se dessine progressivement l’offensive de nos alliés.

Marine.-
La flotte Allemande a fait son apparition sur la côte orientale Anglaise, à Yarmouth, mais elle a dû se retirer devant l’arrivée de l’escadre Anglaise, après avoir, il est vrai, coulé un sous-marin.
Les forces navales Franco-Anglaises ont bombardé l’entrée du détroit des Dardanelles où l’on croit qu’un fort a sauté.
De leur côté, les troupes Russes de Trans-Caucasie ont franchi la frontière de l’Arménie Ottomane.
Le cabinet de Constantinople est d’ailleurs loin d’être uni, et plusieurs ministres, dont le ministre des Finances Djavid bey, ont démissionné pour ne point se solidariser avec la politique insensée d’Enver bey.

Chine.-
La forteresse Allemande de Kiao-Tcheou, sur le littoral Chinois, est sur le point d’être anéantie par le bombardement qu’opèrent les Japonais.
Un croiseur allemand a coulé dans le port.

Italie.
-Le cabinet Italien est complètement formé. C’est M. Sonnino, déjà 2 fois président du Conseil, qui prend le portefeuille des Affaires étrangères.

VIII)
La Syrie de l’empire Ottoman lors de la première guerre : L'Empire Ottoman entre en guerre aux côtés de l’Allemagne, tandis que les nationalistes arabes choisissent de soutenir les Anglais et les Français.
Une répression s’abat alors sur eux : le 6 mai 1916, 17 nationalistes musulmans et 4 chrétiens seront pendus sur la place des Canons, à Beyrouth.

Par ailleurs, suite à un échange de lettres, le haut-commissaire Britannique en Égypte MacMahon promet un royaume arabe indépendant au chérif Hussein, dirigeant de la région du Hedjaz et gardien de la Mecque et de Médine (correspondance Hussein-MacMahon).
Le chérif Hussein déclenche alors la grande révolte arabe destinée à libérer les provinces arabes de l’Empire.

IX)
Situation en France :
En ce 5 novembre 1914, c’est la question vitale de la baisse de la récolte de blé qui est en première page du Figaro, « d'après un avis de M. François Berthault, directeur des services agricoles, on sait que la récolte pourrait être évaluée entre 80 et 82 millions de quintaux, en France.(…).
Elle semble être, dans l'hémisphère septentrional, inférieure à celle de l'année précédente (…) Pour l'ensemble de la récolte en Europe, en Asie, en Afrique et au Canada, ne représente que 709 millions de quintaux, soit environ 93 % de la récolte de l'année 1913.

X)
« Entre la région de la Bassée et la Somme, la journée est marquée par une lutte d'artillerie », selon le communiqué officiel, qui poursuit « dans la région de Roye, nous avons maintenu l'occupation du Quesnoy-en-Santerre et avancé sensiblement vers Andéchy.

Au centre, entre l'Oise et la Moselle, à signaler une recrudescence de l'activité des Allemands, manifestée surtout par le feu de l'artillerie.

Des attaques ennemies sur divers points de notre front sont en fin de compte repoussées, parfois après un combat qui a duré toute la journée. »

La France déclare officiellement la guerre à la Turquie. Deux jours après la Russie, c'est au tour de l'Angleterre et de la France d'entrer en conflit contre l'empire Ottoman. La Turquie est entrée dans la première guerre mondiale le 28 octobre et s'est ralliée aux empires centraux : l'Allemagne, l'Autriche-Hongrie et l'Italie.

En Belgique, la retraite Allemande en Flandre Occidentale se précise de plus en plus et les alliés gagnent notablement du terrain vers Lombaertzyde et vers la digue de l'Yser.
Les Allemands occupent encore Saint-Georges et les fermes situées sur la rive gauche de, l'Yser, aux environs de Schaerbeke et de Tervaete. Ils continuent leurs attaques, au sud de Zandvoorde, avec la plus grande violence sur le front des alliés entre Hollebeke et Messines.

En Prusse Orientale, les Russes continuent à progresser sur le front. Les Allemands sur la totalité, du front, ne conservant que leurs positions fortifiées de la région de Vergbolovo.

En Pologne Russe, La bataille de la Vistule ne mérite plus ce nom. Elle se déroule maintenant à proximité des frontières de Silésie et de Posen.

En Galicie, le communiqué Russe rapporte que la traversée de la rivière San par les troupes Russes continue avec succès et que les Autrichiens battent en retraite.

En relation avec les combats au-delà de la frontière, en Belgique, dans la région d'Armentières et au sud de la Lys, la situation ne s'est pas modifiée.

Entre la région de la Bassée et la Somme, la journée est surtout marquée par une lutte d'artillerie.

Les Allemands lancent une violente offensive au nord d'Arras.

Le général Joffre, dans un communiqué publié dans le Temps, revient sur la situation dans le Nord et en Belgique en déclarant « Nous avons arrêté les attaques furieuses Allemandes, et par une action énergique et incessante nous cherchons à détruire les forces ennemies qui nous sont opposées.
Notre situation est bonne et nos efforts combinés amèneront bientôt, je l'espère, le succès final. »

XI)
Les gros échecs allemands
Le plan Allemand a enregistré des échecs d'une haute portée. Ce sont les suivants :
Attaques brusquées par Nancy,
Marche rapide sur Paris,
Enveloppement de notre gauche en août,
Percée de notre centre en septembre,
Enveloppement en novembre,
Attaque par la côte Dunkerque-Calais,
Attaque d'Ypres.

Leur retraite est fatale et prochaine...
Dans ces efforts stériles, l'Allemagne a épuisé ses réserves.
Les troupes qu'elle forme aujourd'hui sont mal encadrées, mal instruites.
De plus en plus, la Russie affirme sa supériorité.
L'arrêt des armées Allemandes est donc fatalement condamné à se changer en retraite.
XII)
Belleville Brigadier Édouard Bachimont
Mille couleurs se bousculent dans la vitrine du magasin de jouets où s’alignent chevaux de bois, poupées, voitures miniatures et soldats de plomb.
Au-dessus de cet étalage, une grande affiche représente un Père Noël dans un grand manteau blanc qui dit : « Noël approche, n’attendez plus, entrez ! »
Édouard, la moustache collée sur la vitrine, inspecte avec attention chacun des jouets. Finalement, il se décide à entrer dans le magasin.
Une clochette tinte doucement alors qu’il pousse la porte et que se révèle l’intérieur de la boutique.

Sur de grandes tables, le propriétaire a fidèlement reproduit la circulation d’un boulevard parisien avec ses petites voitures.
À côté, une fastueuse table a été dressée pour un repas magnifique dans une maison de poupées.
Dans un coin, une armée de soldats miniatures bleus et rouges encerclent quelques figurines surmontées de casques à pointe.
Des cartes de Noël où s’affichent des Pères Noël de toutes les couleurs sont alignées sous un panonceau qui apostrophe l’acheteur : « Envoyez une carte à vos soldats pour leur dire que vous pensez à eux pour les fêtes ! »

« Que puis-je pour vous, brigadier ? demande avec entrain le propriétaire de la boutique, un petit homme au crâne dégarni et à la moustache bouclée.
Vous cherchez un cadeau pour un petit garçon ? Une petite fille ?
— Je suis intéressé par la petite voiture jaune en vitrine », répond Édouard.
Le vendeur de jouets s’empresse d’aller prendre avec précaution la minuscule automobile.
« Puis-je la voir de plus près ? » demande le policier.
Lorsqu’il a le véhicule en main, il l’inspecte et le fait tourner entre ses doigts pour qu’aucun détail ne lui échappe.
« Ah ! s’exclame-t-il enfin.
— Il y a un problème, monsieur ? s’inquiète le vendeur de jouets.
— Regardez ce qui est écrit entre les roues avant !
— Je ne vois pas bien. Vous permettez, je vais chercher mes lunettes, dit-il, le souffle court.
— Je vais vous le dire, moi ! gronde Édouard. Il est écrit « Fabriqué à Hambourg » ! Vous pensiez que je ne reconnaîtrais pas un modèle fabriqué par les Boches, peut-être ?
— C’est-à-dire que… tente timidement le marchand.
— Silence ! ordonne Édouard. Vous vendez des jouets produits par l’ennemi ! Vous les enrichissez ! Ah, je vous y prends !
— Écoutez, presque tous mes jouets viennent de France, s’explique à toute allure le commerçant, je vous assure que je suis patriote !
— Hé bien, on ne dirait pas ! Prouvez-le-moi ! »
Le marchand de jouets se frotte nerveusement les mains en regardant autour de lui comme s’il espérait trouver une solution. Son regard revient finalement à la petite voiture toujours entre les mains du policier. Il dit alors, hésitant :
« Peut-être… peut-être pourrais-je offrir ce jouet au garant de l’ordre que vous êtes ? Pas un sou de plus n’ira aux Allemands, et vous avez peut-être un enfant que cela rendra heureux. »
Édouard feint de réfléchir à la proposition, mais il a déjà pris sa décision :
« Très bien, dit-il enfin en fourrant le jouet dans sa poche. Mais que je ne vous y reprenne plus ! »
Il ressort de la boutique pour retrouver le trottoir enneigé. Sitôt qu’il s’est suffisamment éloigné de la vitrine, il sourit largement. La ruse a déjà marché dans deux magasins. Maintenant qu’il a trouvé un jouet pour ses deux fils, il faudrait qu’il trouve quelque chose pour sa femme. Édouard resserre la cape noire de son uniforme et tourne au coin de la rue.
Si ses souvenirs sont bons, il y a là un tailleur qui fait venir son tissu d’Autriche.

XIII)
L'Europe rêvée par l'Allemagne, publié par Jean-Baptiste Vançon
En ce jour du 5 décembre 1914, le Petit Journal publie un article sur le Pangermanisme.
« La curieuse carte que nous reproduisons n'est pas une facétie française. Comme l'indique les inscriptions Allemandes que nous avons conservées pour lui laisser son caractère d'authenticité, ce document de la Mégalomanie germanique a été conçu, exécuté et publié de l'autre côté du Rhin.
C'est la carte de ce que eût été l'Allemagne après la victoire finale des Allemands. Rêve pangermaniste, rêve de fou !
La France y est réduite au pays Basques. La Russie à la Crimée. La Grande Bretagne est une colonie Allemande, l'Irlande une colonie Autrichienne.

La grande Allemagne s'étend de Saint-Pétersbourg aux Pyrénées en englobant toute la Belgique.
L'Allemagne doit commencer à s'apercevoir que ce cauchemar de cerveau malade n'est pas près de se réaliser »

En effet, suite à la première Bataille de la Marne qui conduit à l'arrêt définitif de l'avancée Allemande par l'ouest en passant par Paris, ce rêve est stoppé net par l'Armée Française qui combattait à un contre cinq.
Après le traité de Versailles de 1919, le Pangermanisme ne tardera pas à être relancé... bien avant l'arrivée de Hitler au pouvoir.
N'oublions pas que c'est la République de Weimar qui a réarmé l'Allemagne avec le soutien logistique des soviétiques dès 1924 par un programme de formation d'un état major et la formation de pilotes (les avions produits par l'Allemagne étaient capables d'être transformés en avions militaires).

XIV)
Le Temps publie un mot du général Joffre destiné à soutenir le moral de la population. « On a, dans ces derniers jours, surtout après la forte reprise Russe sur les troupes de von Hindenburg, émis l'idée que les Allemands ne manqueraient pas de dégarnir le front Français pour porter plusieurs corps d'armée sur le front Russe. Il est intéressant d'apprendre ce qu'en pense la plus haute de nos autorités militaires.
Nous le savons par un bref échange de mots entre un de nos officiers et le général Joffre. Sous le titre « Notes d'un officier », l'Illustration d'aujourd'hui publie :

« D'une voix posée, peu timbrée, le général dit sa certitude de la victoire. Et comme, faisant allusion à la victoire Russe, j'exprime l'idée que la nécessité de se renforcer à l'Est contraindra sans doute l'Allemagne à s'affaiblir à l'Ouest, le général laisse tranquillement tomber: « Je ne tiens pas à ce qu'ils dégarnissent leur ligne. Les Russes avanceront plus vite. Ce que j'ai devant moi, je m'en charge. »

Le Globe relève les paroles adressées aux Alsaciens de Thann par le général Joffre, disant que les Français reviennent dans leur ville pour toujours. Cette déclaration, dit le Globe, est significative. Le généralissime exprime par là son opinion politique aussi bien que militaire, et ces mots renferment certainement plus que l'affirmation de la puissance militaire Française, ils signifient que la France insiste sur le retour des provinces perdues et qu'elle ne remettra pas l'épée au fourreau aussi longtemps que ce retour ne sera pas accompli.

Prononcée par le meilleur de ses généraux, cette parole signifie, en outre, que la France possède la force militaire suffisante pour obliger l'adversaire à lui rendre ces provinces.

En Argonne, la lutte est toujours très chaude. Nous avons enlevé plusieurs tranchées et repoussé toutes les contre-attaques.

Une partie du hameau de Weindendreft (1 kilomètre nord-ouest de Langemarck) est restée entre nos mains.
En avant Poesele (à mi-distance entre Dixmude et Ypres) nous avons pris sur la rive droite du canal une maison de passeur, vivement disputée depuis un mois. L'ennemi a tenté sans succès de nous obliger, par une attaque violente d'artillerie lourde, à évacuer le terrain conquis.
Dans la campagne Austro-Serbe, sur le front qui s'étend de Slovatz (nord-est de Valiévo) vers le sud-ouest, et de là, en ligne droite vers le mont Maljen, et par Souzerevatz jusqu'à Obrenovatz, sur la Save, les combats ont lieu sans discontinuer.
Au centre de ce front, sur la ligne de Maljen-rivière Lijg-Lazarevatz, sur la Koloubara, les Autrichiens attaquent avec une extrême violence les positions Serbes près de Doudovatz.

Dans la guerre avec la Turquie, un télégramme de Mytilène publié dans Le Temps indique que les autorités militaires Ottomanes poursuivent fiévreusement la mise en défense des côtes de la Syrie. Des préparatifs identiques se poursuivent tout le long de la côte, d'Asie-Mineure, en particulier à Barbakalessi, dans le golfe d'Adramit et Tchandarli.
Le correspondant du journal d'Alexandrie télégraphie que « la police a arrêté deux Allemands qui arrivaient sur un bateau Italien. Ils ont été envoyés au dépôt de la ville.

Le journal le Temps revient sur la visite du roi George V dans les tranchées.
Un correspondant du Daily Mail dans le Nord de la France télégraphie que le roi George V a inspecté mercredi dernier les troupes de la région de Bailleul et d'Armentières. Le souverain a voyagé avec sa suite en automobile à une allure très lente. La voiture royale était précédée d'un soldat à motocyclette.
Le roi a reçu un accueil enthousiaste de la part des troupes, principalement dans les tranchées et les abris qu'il a visités. George V s'est entretenu avec les officiers et les hommes qu'il a félicités du courage dont ils ont fait preuve.
Les batteries Allemandes ont canonné les positions alliées par intermittences pendant la visite du souverain.
Aujourd’hui le même journal nous apprend que « Le roi d'Angleterre a quitté le sol Français, et sa visite en France signale ce joli geste de « gallantry », consistant à traverser la Manche, avec son pavillon flottant sur le navire qui le transportait, au moment, on pourrait dire presqu'à l'heure où un sous-marin Allemand est allé couler des navires jusque dans les eaux du Havre. Si la traversée n'est pas sans une jolie crânerie de la part de George V, il est hors de doute que l'amirauté Britannique a pris toutes les précautions nécessaires pour que le voyage par mer soit aussi sûr que possible. »

Dans le journal Le temps nous pouvons lire les extraits d’un procès en désertion d’un véritable patriote. « Le patriotisme d'un déserteur : Le canonnier Henri-Albert Martini, âgé de 40 ans, du 1er régiment d'artillerie, comparait hier devant le premier conseil de guerre sous l'accusation de « désertion à l'intérieur » en temps de guerre.
À ses juges, il a fait la déclaration suivante : « J'étais, depuis le commencement de la mobilisation, détaché au fort des Arches, près de Louveciennes (Seine-et-Oise), et l'immobilité me pesait. Je suis originaire du département de l'Aisne, j'ai été élevé au milieu, des ruines laissées par les Allemands.
Mon père a été tué en 1870. J'ai un frère et 4 neveux sur le front. Il me semble injuste de demeurer aux environs de Paris alors que tous les miens se battent et que mon cher département est souillé par l'ennemi. J'ai fait de nombreuses démarches pour aller combattre, elles n'ont pas abouti. C'est alors que, le 1er novembre, j'ai quitté mon détachement et je me suis rendu à Paris afin de voir le général Galliéni pour lui demander à lui-même la faveur que je sollicitais.
Je reconnais avoir commis une faute grave, mais je croyais bien faire. Je m'excuse et vous demande de m'envoyer le plus tôt possible sur le front. »

Le conseil a cependant condamné Martini à 2 ans de travaux publics, mais cette peine est subordonnée à la conduite qu'il aura au feu...

XV)
Journal du Rémois Paul Hess (extraits)
Canonnade par les grosses pièces dès le matin. Bombardement l’après-midi.
Le Rémois fait état de visites de Mgr Luçon évoqué dans « l’Écho de Paris ». (…)
L’archevêque s’est rendu au château d’Aubilly où sont hospitalisés des orphelins et les malades des couvents émigrés de Reims. Après cette visite et pendant qu’il revient, le verglas tombe, de sorte que l’archevêque de Reims a été obligé de descendre de voiture et de revenir à pied jusqu’à X (…)
A son retour il a constaté que, pendant son absence, trois obus étaient tombés dans… (reproduction interdite aux journaux de Reims)

XVI)
Les « familiarisations » entre ennemis sont très précoces, puisqu’elles sont interdites par un ordre lu aux soldats le 5 décembre 1914.

Nominations.
Le journal officiel du 5 décembre publie un décret du président de la République en vertu duquel les caporaux de l’armée active, réserve et territoriale peuvent être nommés sous-officiers sans conditions d’ancienneté.

Permissions.
Le général commandant en chef par note du 5 décembre rappelle encore une fois qu’il a interdit de donner aucune permission quelle qu’en soit la durée aux officiers et hommes de troupe stationnés dans la zone des armées et qu’enfin aucun officier ou homme de troupe ne peut quitter son cantonnement sans raison de service porté sur un ordre dont il doit toujours être porteur.

XVII)
France.-Dans le nord et la Flandre, quelques canonnades.
Nous repoussons des attaques Allemandes en Argonne.
A l’aile droite, en Alsace, nous progressons dans la direction de Altkirch.
Le bulletin des armées publie un compte rendu détaillé des 4 premiers mois de la guerre.
Il en résulte que le plan Allemand a enregistré 7 échecs d’une haute portée :
-Échec de l’attaque brusquée projetée sur Nancy.
-Échec de la marche rapide sur Paris.
-Échec de ce même enveloppement en novembre.
-Échec de la percée de notre centre, en septembre;
-Échec de l’attaque par la côte sur Dunkerque et le Pas de Calais;
-Échec de l’attaque sur Ypres.

La bataille de Lodz s’est terminée à l’avantage des Russes, qui ont capturé beaucoup d’hommes, de matériel et de munitions.

Allemagne.
-M.Bernard Dernburg, ancien ministre Allemand des Colonies, agent de Guillaume II aux États-Unis, formule les prétentions Germaniques qui peuvent, d’après lui, servir de base aux négociations de paix: Il demande la Belgique et le Maroc (…)

XVI
Courmelles
Les routes en temps de guerre ont leur physionomie bien à elles. Il y a d’abord les grandes routes, bien entretenues par les territoriaux devenus cantonniers, sur ces grandes routes passent les autos des officiers d’état-major allant et venant comme des flèches de l’arrière vers le front, et
du front vers l’arrière, passent aussi les longues queues leu leu de convois automobiles chargés de munitions, de vivres en gros, parfois de troupes.

Il y a ensuite les simples routes, les routes de campagne, chemins vicinaux, communaux, chemins de simples charrois.
On y enfonce dans la boue jusqu’aux chevilles.
On y croise des petits convois de voitures plus ou moins hétéroclites, Charrettes de cultivateurs.
Carrioles de boucher.
Voitures de déménagement.
Voitures régimentaires.
Charrettes marocaines à deux roues attelées de mules.
Tous ces équipages sont chargés de pain, de sucre, de café, de viande fraîche ou de viande australienne frigorifiée, de boites de conserves, de sacs de pommes de terre…

On y rencontre sur ces routes étroites des paysans fuyant l’ennemi ou ses obus, le dos chargé de ballots de linge, des troupiers, par petits groupes, gagnant très lentement, très maussadement le front où les envoie leur dépôt, ils ont la nouvelle tenue gris bleu si pratique et si inélégante, on y rencontre des chevaux en promenade, des chevaux d’artilleurs dont les pièces sont immobilisées depuis 2 mois sur les rives de l’Aisne, on y rencontre enfin des hommes caparaçonnés de boue, le visage crasseux et la barbe inculte : C’est la relève des tranchées…

De temps à autre on croise 2 gendarmes, à pieds, à cheval ou à bicyclette : Ils nous dévisagent désagréablement, cherchant l’espion sous chaque képi, ils sont chargés de faire la police des routes et des champs, de veiller à ce que les troupiers ne braconnent pas, ne coupent pas des fagots dans les bois… Ils représentent l’ordre… Et l’on est tout heureux de voir que l’ordre règne en France, au quatrième mois de la guerre, au point que les lièvres, les lapins et les canards sauvages sont jalousement gardés par les Pandores.




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Décembre 1914 - La Vie en Lorraine (1/3) - blamont.info
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