samedi 27 décembre 2014

LA GRANDE GUERRE AU JOUR LE JOUR 11 DECEMBRE1914

11 DÉCEMBRE 1914


I)
Semaine du 11 décembre 1914
Résumé : La perte
Alors que la compagnie regagne les tranchées de Sapigneul, ils ne trouvent aucune trace de l’officier qui doit leur transmettre le secteur. Antoine, Benoît et Coutier sont désignés pour aller vérifier l’état de la ligne de défense. Malheureusement, Coutier est touché pendant la patrouille.
De longues heures passent avant que ses camarades puissent aller le récupérer. Antoine et Benoît le transportent le plus vite possible vers l’hôpital de campagne de Cormicy, mais Coutier est fort mal en point…

II)
Tu ne m’étonnes pas en me disant que Mme H... a été retenue 12 heures dans l’Argonne. La route est encore peu sûre, les Allemands bombardent la ligne. Je t’envoie ci-joint un article paru ces jours-ci et qui est fort juste.
Cela te prouvera que je n’ai pas tout à fait tort de m’élever contre toute idée d’un voyage à Verdun.
Nous abandonnons les tranchées demain matin pour une dizaine de jours. Où allons-nous ? Je ne sais. Quelques kilomètres en arrière, sûrement, car ce repos est motivé par la vaccination antityphique.
Je t’assure que ceci ne me réjouit pas du tout et que je vais faire mon possible pour y couper.

Maintenant autre nouvelle. Le capitaine m’a demandé ce soir de faire popote, à partir de demain, avec les officiers. Je t’avoue que je n’en suis pas ravi du tout.
Depuis ma nomination notre popote des sous-officiers marche a la perfection et j’ai réussi à faire l’union parfaite entre tous.

J’ai objecté au Capitaine que je ne suis pas officier et que ceci est gênant pour moi, mais il m’a dit :
« Vous êtes fonctionnaire officier et en cette qualité, comme vous êtes le plus jeune, vous ferez fonction de chef de popote. Rien à dire, mais voilà encore un sacrifice de plus et non le moindre, je t’assure.
Je vais quitter de bons camarades pour un milieu qui ne me convient pas du tout.
Si tu savais les bonnes heures que nous avons passées à notre popote de sous-officiers, ceci nous faisait oublier bien des misères, et depuis un mois, elle fonctionnait à la perfection.

- La langouste, le poulet, les pommes, poires, figues, etc, tout est excellent et le plaisir que cela à fait à tous, car à part les deux maigres bestioles que m’ont apportées mes cuisiniers d’escouade, je n’ai pas mangé de poulet depuis mon départ.
Quant à la langouste, on n’en pêche pas par ici, elles ne remontent pas jusqu’ici.
Par contre, si je rentre..., ne me parle plus de bouilli, je ne peux plus le voir et ne peux même plus l’avaler.

III)
En Belgique et en Argonne
Bordeaux, 11 décembre, 15h35.
L'ennemi a montré hier quelque activité dans la région d'Ypres. Il a dirigé contre nos lignes plusieurs attaques, dont 3 ont été complètement repoussées. Sur un point unique du front, les Allemands ont réussi à atteindre une de nos tranchées de première ligne. De notre côté, nous avons continué à progresser dans la direction des lignes ennemies.

Dans la région d'Arras et dans celle de Juvincourt, combats d'artillerie.

Dans l'Argonne, nous avons poussé en avant de plusieurs de nos tranchées et refoulé deux attaques Allemandes.

Dans la région de Varennes, nous avons consolidé nos gains des jours précédents.

L'artillerie allemande s'est montrée très active, mais ne nous a infligé aucune perte.
Il en a été de même sur les Hauts-de Meuse.

Dans le Bois-le-Prêtre, notre progression s'est poursuivie et accentuée.
Au sud de Thann, nous avons enlevé la gare d'Aspach.
Sur le reste du front des Vosges, combats d'artillerie.

dans la région d'Ypres
23 heures :
Dans la région d'Ypres, une très violente attaque Allemande a été repoussée.
Dans la même région, celle de nos tranchées signalée dans le communiqué de 15 heures comme atteinte par les Allemands a été reprise par nous.
Sur le reste du front, rien à signaler.

IV)
Nancy, 11 décembre.
Qui porte tort aux marchands ferme la porte du bien-être sur la cité et l'armée. (Proverbe hindou.)

Je mets ce proverbe en exergue d'abord parce qu'il me paraît exact, ensuite parce qu'étant oriental il a une saveur particulière, puis parce qu'il est d'actualité, enfin parce que le souvenir des Hindous, (maintenant Indiens,) combattant avec nous et pour nous adoucira les observations que timidement je désire présenter.

La population civile de Nancy, pourtant durement éprouvée par cette guerre, n'a jamais cessé d'observer une discipline stricte.
A quelques très rares exceptions près, elle a conservé même le sourire. Elle a supporté avec allégresse tous les sacrifices que la défense nationale exigeait de donner.
Elle s'est pliée sans un murmure à toutes les nécessités.
Elle a reçu les visites des Taubes, et n'a montré qu'une curiosité discrète.
Elle a reçu des obus, et n'en a été nullement émue.
Elle salue les blessés avec émotion.
Elle respecte les prisonniers.
Quoi qu'on lui ordonne dans l'intérêt de la patrie, elle le fait sans une ombre d'hésitation. Elle comprend qu'elle doit donner l'exemple.

On lui a supprimé les lumières dans les rues et aux fenêtres des façades, les bicyclettes, les automobiles.
On a fermé les cafés à 6 heures, puis on lui a permis d'y rester jusqu'à 7 heures.
On lui a enlevé la gare, et on l'a rétablie.
On a successivement indiqué que les laissez-passer étaient délivrés, tantôt à la préfecture, tantôt à la mairie, tantôt au commissariat.
Elle a trouvé que tout cela était bien puisqu'on était obligé de l'édicter.
Et elle a tout exécuté ponctuellement.

Cette attitude vaut bien une récompense. Je demande, comme récompense, qu'il y ait un peu plus d'aise pour les relations commerciales.
Oui, je sais. La gare est rétablie. La Compagnie de l'Est a fait tout ce qu'elle peut, et mieux encore qu'on ne pourrait l'imaginer.
Elle a réalisé et réalise chaque jour des améliorations considérables. C'est exact et j'applaudis des deux mains.

Les banques locales donnent plus de facilités aux commerçants.
La caisse d'épargne permet des retraits plus fréquents et plus larges.
Il est maintenant possible de réaliser en partie les Bons de la défense nationale que l'on a souscrits.
Les services d'alimentation sont admirablement assurés.
C'est exact, c'est exact.

Mais ne pourrait-on, par exemple, abréger les formalités d'expédition pour les télégrammes.
Donner un peu plus de rapidité aux communications postales.
Adoucir le régime des papiers de réquisition.
Améliorer et activer les transports et surtout faire du moratorium quelque chose de plus souple et de plus vivant ?

On a fait beaucoup. On serait heureux d'avoir davantage.
Il faut songer que la guerre sera longue sans doute. On ne cesse de le répéter, et cela n'est pas invraisemblable.
Nous ne pouvons pas vivre éternellement sur les provisions accumulées par l'agriculture, le commerce et l'industrie.
Il faut créer si l'on veut vivre.
Chaque jour on mange, on boit.
Chaque saison ou chaque année on s'habille.
Il est nécessaire de donner non seulement des armes à nos soldats mais aussi de quoi les nourrir, et des vêtements et des chaussures.

Pour produire tout cela il est indispensable que le travail reprenne. Non pas d'une façon normale certes, personne ne demande une telle impossibilité, mais dans la mesure de nos moyens présents.
Il y a dans les coffres de l'argent qui ne fait rien, dans les usines des machines qui ne fonctionnent plus, dans les maisons des hommes et des femmes qui volontiers occuperaient leurs bras à de fructueuses besognes, et dans les pays voisins ou dans nos ports ou dans nos gares des matières premières qui seraient vite transformées en objets utiles.

Nous souffrons d'un mal nécessaire, la guerre.
Pourquoi ne vivons-nous pas normalement, en nous accommodant de ce mal, comme on s'est déjà accommodé de tant d'autres ?
Il est bien entendu qu'avant tout ce sont les services militaires qui doivent passer.
Qui le contesterait serait odieux.
Avec raison on le considérerait comme un fou dangereux.

Mais n'est-ce point aussi un service militaire en ce temps-ci que le travail national, une sorte de service d'arrière qui est en contact avec les services de l'intendance ?
N'est-ce pas un service militaire que de confectionner des vêtements, que de moudre le blé, de le transformer en pain, de nourrir, de vêtir les troupes et aussi les enfants et les hommes qui demain rejoindront leurs aînés et leurs cadets dans les tranchées ?
N'est-ce pas un service militaire que les femmes accomplissent en tricotant des chandails, des passe-montagne, en cousant des tricots, en soignant les blessés, et même plus simplement en gardant ce sourire un peu mélancolique qui donne du cœur aux hommes et fait surgir les héros ?
Tout actuellement est service militaire.
Tout se fait pour et par la nation.
Les chefs commandent. Les soldats se battent.
Ce que peuvent faire les civils, c'est travailler.
Si peu qu'on les aide, ils se mettront joyeusement à la besogne. Mais il leur faut du crédit, des moyens de transport, et certaine liberté.
Oui, on ne demande plus qu'une chose, travailler. Celui qui travaille apporte un concours efficace au triomphe final.
Et peut-être abrège-t-il pour une grande part la durée de la guerre.
Ce n'est pas la bonne volonté qui manque. Ce sont les aises.
René Mercier.

V)
Le journal « Le Temps » annonce le retour à Paris du président de la République qui, avant son départ, a fait remettre au maire de Bordeaux 3 000 francs pour les pauvres de la ville.
Ce retour est un événement important repris dans les journaux étrangers que « Le Temps » souligne ainsi : « Les dépêches que nous recevons nous transmettent le résumé des articles que des journaux étrangers consacrent au retour de M. Poincaré.
Athènes dit que le retour à Paris du président de la République et du ministère cause une vive satisfaction à tous ceux qui considèrent Paris comme la capitale non seulement de la France, mais de tout le monde civilisé.

« Le Daily Express » de Londres, dans un article de fond sur le retour du gouvernement à Paris, dit que « l'Angleterre se joint à la France pour souhaiter la bienvenue à son président. »

Le Grand-Livre est ramené à Paris : M. Bley, directeur de la Dette Inscrite, quitte Bordeaux, ramenant au ministère des finances à Paris le Grand-Livre de la Dette Publique, dont le transport n'exige pas moins de 10 wagons.

VI)
Sur le plan militaire, les opérations en Haute-Alsace, d'après les renseignements recueillis par la « Gazette de Lausanne », « les Français ont pris l'offensive en Alsace, en direction d'Altkirch et Mulhouse.
Du côté de Seppois, ils se sont emparés des villages de Bisel, Largazen et Hirtzbach, ainsi que de Carspach, près d'Altkirch.
Du côté de Pfetterhausen, ils ont occupé les premières tranchées allemandes près du village de Mous. »
Le communiqué officiel du ministère de la Guerre indique que :
«- Dans la région d'Arras, des combats d'artillerie ont lieu.

Dans la région de Nampcel, nos batteries ont réduit au silence les batteries ennemies.

Dans la région de l'Aisne, notre artillerie lourde a fait taire les batteries de campagne des Allemands, une de leurs batteries d'obusiers a été complètement détruite au nord-est de Vailly.

Dans la région de Perthes et dans celle du bois de la Grurie, on assiste à des combats d'artillerie et à quelques engagements d'infanterie.

Sur les Hauts-de-Meuse, l'artillerie ennemie a été peu active, au contraire, la nôtre a démoli à Deuxnouds (à l'ouest de Vigneulles-les-Hattonchatel), deux batteries ennemies, l'une de gros calibre, l'autre destinée au tir contre les avions. Dans la même région, nous avons fait sauter un blockhaus et détruit plusieurs tranchées.

Entre Meuse et Moselle, rien à signaler.

Dans les Vosges, combats d'artillerie.

Dans la région de Senones, nous avons consolidé les positions gagnées la veille.

En Belgique, les Allemands ont achevé d'évacuer la rive ouest du canal de l'Yser, au nord de la maison du passeur, les Alliés occupent cette rive.

Dans la campagne Russe, dans la région des cols de Vyczkof et des Beskidde, dans les Carpates, au cours de l'attaque d'une position fortifiée des Autrichiens, les soldats Russes s’emparent de 4 canons et de nombreux chariots, et font plus de 300 prisonniers. (Les cols de Vyczkof et des Beskidde se trouvent au sud des positions de l'aile gauche Russe opérant au sud-est de Cracovie et contre laquelle les Austro-Allemands ont tenté un mouvement enveloppant.)

Un télégramme de Petrograd à l'agence Central News annonce qu'un aviateur Russe a lancé des bombes sur les forts de Breslau.

La guerre avec la Turquie : Les troupes Australiennes arrivent en grand nombre au Caire.
Les dépêches annoncent que 80 000 soldats Turcs sont arrivés en Syrie.

Lebanon est fortement occupée, Beyrouth est calme.
En s'emparant de Kurnah (Égypte), les troupes Anglo-Indiennes font 1 100 prisonniers.

Sur mer, l'amirauté Britannique fait le communiqué suivant concernant le combat naval des îles Falkland :
« Un nouveau télégramme du vice-amiral Sturdee annonce que le Nürnberg a coulé le 8 décembre et que la poursuite du Dresden continu. Le combat a duré 5 heures, avec des intervalles. Le Scharnhorst a coulé après 3 heures, et le Gneisenau 2 heures plus tard.
Les croiseurs légers de l'ennemi se dispersent et sont poursuivis par nos croiseurs et croiseurs légers.
Aucune perte de navire Anglais n'est annoncée. »

Le correspondant du Temps de Saint-Omer écrit : « Depuis dimanche, la région d'Armentières est de nouveau bombardée. Les obus sont tombés, particulièrement sur Houplines et le Bizet. Un seul obus est tombé sur la ville même d'Armentières, on a reconnu que le projectile, tiré à grande distance, avait atteint la ville par hasard.

VII)
Le journal Le Temps s’interroge sur l’origine du mot « Boche ». Pour cela, il fait appel à ses lecteurs. Le journal a soumis à la perspicacité de ses lecteurs l’idée de M. Arnold Naville qui pense que le mot « Boche » pourrait venir du nom du roi Teutobochus, qui a régné sur les Teutons quelque 100 ans avant Jésus-Christ. » Voici quelques extraits de lettres reçus par le journal en réponse à cette théorie.

« M. Robert Lestrange nous paraît avoir résolu la question de la manière la plus ingénieuse et la plus scientifique en même temps. Voici la lettre qu'il nous adresse :
Monsieur le directeur,
A propos de l'étymologie du mot « Boche », l’explication de M. Arnold Naville est sans doute ingénieuse et raffinée. Mais sans aller chercher si loin, sans tirer de son sommeil millénaire le géant Teutobochus que Marius a traîné à son char de victoire, sans accepter l'hypothèse de ceux qui prétendent que Boche viendrait de « bursch » qui, en allemand, veut dire vagabond, ou d'Alborah, nom de la bête fantastique, sur laquelle Mahomet monte au ciel, ou du mot Turc boch, qui veut dire vide, ou encore de la corruption des mots Allemands altdeutsch et deutsch, ne peut-on tout simplement admettre que Boche est un diminutif de Alboche, forme péjorative du mot « Allemand » ?

La langue verte emploie en effet les désinences en oche comme dans bidoche, moche, rigolboche, etc. Alboche est ensuite devenu Boche par une simplification analogue à celle qui a réduit les vocables argotiques charbougnat, mastroquet en bougnat et troquet. »

L'explication donnée par M. Robert Lestrange trouve sa confirmation dans le fait que le mot péjoratif « Alboche » et son diminutif « Boche » ont été fort employés à l'époque de la guerre de 1870.
On signale même un professeur d'anglais qui, en 1868, au lycée de Tours, traitait de « têtes d'Alboches » ses élèves qui se montraient le plus rebelles à son enseignement.
Tombés quelque peu en oubli depuis 40 ans, ils se sont reconstitués instantanément et universellement au commencement de la guerre actuelle.
Ces mots semblent donc bien, comme le montre M. Robert Lestrange, une véritable création de l'esprit populaire Français. »

VIII)
Nos troupes enlèvent de nouvelles tranchées Allemandes dans le Santerre, dans l'Argonne et sur Hauts-de-Meuse.

On annonce que Guillaume II doit renoncer à toute occupation et qu'il passe au kronprinz le commandement suprême des forces Allemandes.
L'armée Anglo-Indienne a occupé dans l'Asie Turque, toute la ligne du Chatt-el-Arab, qui résulte du confluent du Tigre et de l'Euphrate. Des fusiliers marins Britanniques ont pris terre à Moka, sur le littoral arabique de la mer Rouge.

L'état-major Austro-Hongrois avoue l'échec grave que les Serbes lui ont infligé du 4 au 7 décembre.

IX)
Mémoires de... | Jean-Luc Thomas, prêtre-soldat
Adieu, chers et regrettés camarades ! En partant, vous ne nous avez pas quittés tout à fait. Vous nous avez laissé votre souvenir, qui restera toujours vivaces parmi nous, comme celui de braves et bons camarades. Vous nous avez laissé votre exemple, êtes morts de la mort des braves, en faisant votre devoir à votre poste, jusqu’au bout, pour votre patrie. Vous êtes allés recevoir dans un monde meilleur la récompense de votre vie et de votre mort.

La guerre ! Quelle horrible chose que la guerre ! Depuis Virgile, elle n’a rien perdu de son atrocité. Elle est toujours la plus terrible des fléaux. Elle est même plus terrible de nos jours, après tant de siècles de civilisation, qu’elle n’a jamais été. Il est honteux de voir les hommes employer tout leur génie à perfectionner l’art de s’entre-tuer.

Plus qu’aucune autre guerre, celle-ci est une guerre de destruction, d’extermination. Il faut que l’une des puissances rivales disparaisse, semble-t-il, pour que surgisse la paix. La paix ne sera obtenue que lorsqu’une des parties, écrasée, demandera merci, et il ne lui sera pas accordé de merci : On veut la mettre dans l’impossibilité de recommencer.

La guerre c’est la mort de milliers d’hommes : Ce sont des milliers d’autres estropiés pour la vie, des milliers enfermés dans des parcs avec des fils de fer épineux, comme des bestiaux, contraints au travail forcé comme galériens, c’est la ruine de provinces riches et peuplées, l’incendie des villes des monuments, des églises, des hôpitaux, et jusqu’au massacre des femmes et des enfants, comme cette guerre l’a fait voir à nous, qui avions cru à l’intangibilité de la parole d’honneur !

Extrait de Carnets d’un prêtre-soldat, 1914-1918, éd. Bernard Giovanangeli.

X)
Le roi des Belges et son état-major travaillent dans les tranchées
Il fait très froid ce jour-là, et les troupes sur l’Yser souffrent terriblement. En dépit de la température, le roi Albert reste longtemps près des tranchées. A un moment, il rencontre quelques soldats qui, après avoir creusé la terre, laissent là leurs pelles et soufflent dans leurs mains pour les réchauffer. Le roi leur dit :
« Il fait joliment froid, n’est-ce pas ? » Les soldats, reconnaissant le souverain, n’osent protester que faiblement, mais le roi, avec un sourire charmant, se tournant vers les officiers de l’état-major, dit : « Messieurs, je propose de relever ces braves garçons et de creuser des tranchées à leur place jusqu’à ce qu’ils aient plus chaud. »
Une quinzaine d’officiers supérieurs se proposent comme volontaires et s’emparent des pelles. Le roi fait de même et, pendant quelque temps, au milieu d’une grande gaieté, le jeune et héroïque roi-soldat et ses conseillers militaires remuent la terre.

Tous les actes, et jusqu’aux moindres gestes de cet admirable souverain sont inspirés par l’âme la plus généreuse et reflètent la plus noble simplicité.

XI)
Après la bataille de Lodz - Prisonniers allemands sous la surveillance des cosaques :
La grande bataille qui s’est livrée dans la région de Lodz s’est terminée par la défaite complète des Allemands.
Une division Allemande entière s’est rendue.
Les Russes ont fait une énorme quantité de prisonniers.
Une dépêche de Varsovie rapporte que de longues colonnes de prisonniers capturés par les Russes au cours des combats victorieux qu’ils ont livrés autour de Lodz traversent Varsovie.
Beaucoup de ces Allemands ont les pieds et les mains gelés, faute de vêtements suffisamment chauds.
Les Russes, au contraire, bien équipés, bien entraînés, font preuve d’une endurance remarquable.
Durant la guerre actuelle, plusieurs régiments Russes d’infanterie sont restés plus de 50 jours de suite sur les positions de première ligne, ont participé à la prise d’ouvrages puissamment organisés et ont accompli de longues marches par des chemins impraticables.
Partout, la trempe du soldat Russe s’est trouvée à la hauteur de l’effort colossal que la guerre contemporaine exige des troupes et, à l’heure actuelle, les régiments endurcis par les fatigues d’une lutte permanente, constitue une force offensive encore plus redoutable qu’auparavant.

XII)
Extrait du journal des opérations du 128ème RI à la date du 11 décembre 1914: « Le régiment relève le 72ème RI. Un obus de 105 est tombé sur la 6e Cie formée en colonne de compagnie à Vienne le Château, près du coteau de Saint Thomas. 18 soldats tués, 1 adjudant tué et 44 blessés !. »

XIII)
Nuit calme.
Violente canonnade de notre part, dans la journée.
Le soir, lorsque je retourne rue Bonhomme, l’obscurité est si complète que je ne puis apercevoir une voiture rencontrée rue Cérès, voiture de ravitaillement, sans doute, descendant du faubourg.

Je l’entends s’approcher et le passage sur la chaussée est très limité, entre les tas de décombres existant depuis longtemps à droite et à gauche, je dois m’arrêter et chercher à me garer comme je peux, sur le côté, afin de laisser passer.
Elle s’éloigne. Je me suis rendu compte que le conducteur marchait à côté de son cheval, mais je suis resté invisible pour lui comme il l’a été pour moi, cependant, en raison du peu de place disponible, je l’ai senti me frôler. Bon sang ! qu’il fait noir la nuit à Reims, en cette triste saison.

Nuit tranquille. Visite à Madame Kunkelmann, malade. Visite au Général de brigade Rouquerol.

XIII)
Les Serbes qui ont pris l’avantage contre les troupes Autrichiennes enfoncent le clou en ce 11 décembre 1914 et engage une offensive pour reprendre le contrôle de leur capitale Belgrade.
La France livre pendant ce temps des munitions pour l’artillerie Serbe.  Les Serbes réoccupent également Baïna-Bachta, Rogatchitza et Kamenitza.

En Italie, se tient une première réunion du Comité central interventionniste qui affirme que 70 comités locaux sont favorables à ce que l’Italie viennent combattre auprès des Français et des Anglais.

XIV)
Lorsque le matin, je passe sous la grande verrière, le froid me tombe sur les épaules comme un bloc de glace. Puis j’entends le bourdonnement continu de la ruche humaine : L’hiver qui commence ne l’a pas endormie hélas.  Mais dans cette atmosphère glacée, j’arrive désormais à maîtriser mes émotions.
On me l’a appris pendant ma formation de la Croix-Rouge. J’ai ma place, les habitudes sont prises, dans un « vaisseau » qui a trouvé son rythme.

Une seconde salle de chirurgie s’est ouverte, ce qui n’est pas rien, presque entièrement financée par un riche donateur. Je suis impressionnée par tous ces dons.
Ceux qui sont là depuis les premiers jours m’ont raconté que l’hôpital avait été créé en moins d’un mois avec la générosité de riches entrepreneurs ou de grands magasins comme le Bazar de l’Hôtel de Ville ou les Galeries Lafayette : mobilier, literie, couvertures … et le linge !
C’est qu’il en faut pour changer 1 000 lits tous les 2 jours ! Maintenant, ce sont surtout des dons des simples civils : journaux, bonbons, tabac et surtout linge chaud : chaussettes, écharpes, gants, ceintures, chemises de flanelle… et puis de quoi écrire.
Comment survivre sans le facteur et ces lettres, symbole d’un peu d’humanité dans ces temps de folie ?... J’ai envie de serrer Rodolphe dans mes bras.

XV)
Le 217ème RI dans la Grande Guerre, du Bonhomme au Mont Kemmel
JMO/Rgt :
« Continuation de l’organisation de la 1ère ligne au Sud des avant-postes par les unités disponibles.
Les patrouilles de nuit n’ont rien signalé sur le front de surveillance du secteur
5e bataillon : Reconnaissance d’une ½ section (Ss/Lieut. Deygas) avec mission d’observation sur bois Banal et Domèvre.
Cette reconnaissance, en position au point du jour, après avoir battu le bois Lecomte, signale Domèvre inoccupé, attaque une patrouille de 4 cavaliers, en voit tomber 2 sous son feu mais ne peut s’en emparer, une forte patrouille d’infanterie ennemie s’étant montrée et se replie vers 11h30 après avoir dirigé son feu sur cette patrouille.

6e bataillon : Reconnaissance d’une ½ section (adjudant-chef Guilhem) avec mission d’observations successives sur Halloville, cote 326 et Barbas. La reconnaissance aperçoit une faible patrouille sur cote 320 qui se replie, un détachement d’une vingtaine d’hommes se dirigeant vers Barbas et essaie sans résultat de tendre une embuscade vers Halloville à une patrouille de cavaliers Allemands, elle ne peut que tirer à environ 1 000 mètres au moment où cette patrouille, se sentant en danger se replie ».
JMO/SS :
« Aménagement des tranchées et reconnaissance des positions d’avant-poste. Reconnaissances de contact. Visite des avant-postes et distribution de médicaments. Contre visite par M, le Médecin Major de 1ère classe Mourey? des territoriaux préparés pour être renvoyés au dépôt.
Indisponibles = 37
Evacués sur hôpital d’év. de Rambervilliers :
Dépot d’éclopés :

Decembre 1914/167eRI - 167e Régiment d'Infanterie
167e.regiment.free.fr/167eregimentinfanteriedecembre1914.html
La 73e DI lance l'attaque le 7 décembre 1914, avec sept bataillons (167e, 346e, ... "Positions du 3e Bataillon du 167e d'Infanterie les 7 et 8 Décembre 1914".
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#24 Semaine du 11 décembre 1914 | À la vie, à la guerre
www.alaviealaguerre.fr/category/24-semaine-du-11-decembre-1914/
Paris. Maurice Chaumette. Dans l'encadrement de la porte, Maurice regarde son bureau avec émotion. Le bureau de bois laqué, jadis parfaitement aligné avec ...
Décembre 1914 - La Vie en Lorraine (1/3) - blamont.info
www.blamont.info/textes871.html
Accès à la rubrique des textes concernant 1914-1918 ... DECEMBRE 1914. L'Est Républicain ..... Le 11 septembre le général Foch entre à Châlons-sur-Marne.
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Chalon-sur-Saône | Le 11 décembre 1914, journée RAS au ...
www.lejsl.com/edition.../11/le-11-decembre-1914-journee-ras-au-56e-ri
11 déc. 2014 - Le 56e régiment d'infanterie de Chalon est toujours dans la Meuse. Poste du colonel : Bois Mulot (ravin de la cote 284) Bureaux : Mécrin. 1er ...

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