30
NOVEMBRE 1914
I)
Le
canon a parlé aujourd’hui. Les Allemands ont bombardé Soissons et
puis Belleu, Billy et Acy, inoffensifs petits villages blottis au
pied du plateau où nos troupiers travaillent. Comme le vent souffle
en tempête nous n’entendons pas le sifflement de l’obus et son
éclatement nous surprend. De notre côté nous bombardons le plateau
de la rive droite. En somme, simple échange de politesses…
II)
Les
journaux nationaux publient des extraits plus ou moins long du Livre
jaune. Un livre du ministère des affaires étrangères qui contient
un recueil de documents relatifs à la guerre Européenne. Il apporte
dans les 460 pièces diplomatiques qui remplissent les 216 pages de
ce fort volume, la contribution la plus complète qui ait paru au
sujet des responsabilités et des préliminaires de la guerre.
Selon
le journaliste du « Temps », « La lecture de ce recueil
est facilitée par son ordonnance claire et logique, sa division en
chapitres permettant de suivre pas à pas les négociations où la
France, l'Angleterre et la Russie ont multiplié leurs efforts pour
arriver à une solution pacifique de la crise, jusqu'au moment où
l'Allemagne, par sa brusque déclaration de guerre, à la Russie,
détruit les dernières chances de sauver la paix.
Cet
exposé est précédé d'un certain nombre de documents réunis sous
le titre d' «avertissements » qui établissent les progrès
successifs de la volonté du parti militaire de nous faire la guerre
et montrent comment le courant belliqueux entraîne Guillaume II.
Comme
conclusion, le Livre jaune publie la déclaration solennelle de
l'Angleterre, de la France et de la Russie, de ne signer la paix que
conjointement. »
III)
Sur
le plan militaire voici le communiqué officiel publié dans le
« Figaro » : « Autour de Fay, les Français
tiennent solidement les points que nous avons occupés le 28
novembre.
Dans
la région de Soissons, les Allemands canonnent avec intermittence la
ville.
En
Argonne, les luttes d’infanterie continuent, plusieurs attaques
Allemandes sur Bagatelle ont été repoussées par nos troupes. Le
brouillard épais sur les Hauts-de- Meuse empêche toute action
d’envergure.
En
Voivre, les Allemands bombardent encore le bois d'Apremont, mais sans
aucun résultat.
En
Belgique, la bataille en Flandre change d'aspect, les Allemands
renonçant à chercher une trouée vers Dunkerque et Calais, passent
de l'offensive à la défensive sur tout le front Nieuport - Dixmude
et Dixmude - Ypres.
Depuis
plusieurs jours, l'action se borne dans cette région à un
bombardement à grande distance des positions alliées.
Dans
la campagne Russe, des combats obstinés continuent dans la direction
de Lovitch, sur la Bsoura.
La
gigantesque bataille engagée entre Lodz et Lovitch par la 8e armée
Allemande, commandée par le général von Mackenstein, contre les
forces Russes des généraux Roussky et Ivanof continue.
Sur
le front de Galicie, les opérations militaires se terminent. Les
Russes continuent à chasser l'armée Autrichienne vers Cracovie et
au-delà des Carpates en dépit du froid intense qui entrave leur
offensive.
Dans
son discours prononcé à la Chambre des communes, M., Winston
Churchill, premier lord de l'amirauté, affirme que les pertes de
matériel naval éprouvées par les Allemands pèsent beaucoup plus
sur leur flotte que celles éprouvées par l'Angleterre.
Un
journal Britannique établit à ce propos la comparaison suivante :
« l'Angleterre a perdu 12 navires dont 2 de moins de 10 ans, 5
de moins de 15 ans et 5 de plus de 15 ans, et l'Allemagne, 14 navires
dont 6 de moins de 10 ans, 2 de moins de 15 ans et 6 de plus de 15
ans. »
Un
hydro aéroplane Allemand ainsi désigné Kiel-82, est tombé à la
mer près de l'île Fanoè, située dans la mer du Nord, à peu de
distance de la frontière Allemande.
Très
peu de nouvelles dans les journaux concernant la situation dans le
Nord – Pas-de-Calais. Voici 2 télégrammes publiés dans le
« Temps ».
Le
correspondant du « Times » à Boulogne dit :
«
avoir de bonnes nouvelles d'Arras. » Le correspondant du « Daily
Mail » à Rotterdam télégraphie :
«
J'ai reçu aujourd'hui la nouvelle que les alliés ont repris
l'offensive au sud d'Ypres. ».
Une
dépêche de dernière heure de Copenhague au « Daily News »
est publiée dans « Le Temps » mettant du baume au cœur
de la population Française...
Le
chef de l'état-major général de l'armée Allemande en campagne, en
charge lors de la première bataille de la Marne, n’est pas malade,
il est emprisonné !
Ce
qui s’avérera plus tard être une fausse information.
«
Le général Von Moltke ne serait nullement malade mais tout
simplement prisonnier dans un des palais impériaux, celui de
Homburg-an-der-Hœhe, croit-on.
Obéissant
à un ordre du kaiser, le général de Moltke se serait retiré du
quartier général et aurait abandonné son commandement parce qu'il
marchait par trop sur les brisées du prince héritier dans la
direction des opérations sur de front occidental lors du
commencement de la retraite allemande. »...
IV
Pierre
Mangin (Epinal) à Georges Cuny, son cogérant. Bien que mobilisé à
Épinal (pas encore réintégré dans mon grade, mais ayant obtenu du
ministre la promesse de recevoir satisfaction bientôt), je continue
à m’occuper des usines de Cornimont, 2 fois par semaine, les
employés font le service et viennent me faire signer le courrier.
On
mobilise et on prend tout le monde, même les infirmes, borgnes,
boiteux, etc..., etc..., de sorte que je ne sais pas si je pourrai
marcher encore bien longtemps !
Il
ne me restera que les directeurs, qui eux sont trop âgés pour
partir, et encore si la guerre dure longtemps comme cela semble
probable, on fera peut-être appel aux hommes jusqu’à 60 ans !
Enfin
je travaillerai le plus que je pourrai.
Charmes
travaille à ½ et nous expédie des filés avec lesquels nous
faisons du tissu à Cornimont.
Je
pense pouvoir recevoir 500 balles de coton du Havre, avec ce coton je
ferai travailler Cornimont si toutefois je puis arriver à recevoir
le dit coton.
Notre
portefeuille reste en souffrance et je ne puis pas arriver à me
faire payer, c’est cela le plus ennuyeux.
Je
crains que de ce côté nous ne subissions de graves pertes car après
la guerre il va y avoir des faillites en quantité !...
V)
La
gaîté dans les tranchées - L’heure de la chanson
Nos
lecteurs verront, par divers extraits de lettres de soldats que nous
publions dans notre « Variété », comment on passe le
temps dans les tranchées. La gaîté, cette vertu française,
n’abandonne pas nos troupiers. On s’amuse, on rit, on chante, il
est rare qu’une tranchée ne possède pas quelque joyeux
boute-en-train qui en sait de tous les genres et qui se donne mission
de distraire les camarades. « La gaîté, dit Émile Faguet,
est la santé de l’âme. » Or, nos troupiers nous prouvent
qu’ils ont l’âme bien portante. Ils sont gais : ils sont
vaillants, car c’est la gaîté qui nourrit le courage.
Le
concert interrompu
Cette
scène s’est passée dans une ville de l’Argonne. Les Allemands,
suivant leur grotesque habitude, y ont fait leur entrée au pas de
parade.
L’après-midi,
le général, afin de célébrer son triomphe, décide qu’une
musique de régiment donnera un concert sur la place de la localité.
La population est invitée à y assister.
Et
quand nous disons « invitée » vous savez ce que nous
voulons dire. Les malheureux citadins sont bel et bien forcés de
venir écouter les accords harmonieux des trombones et des bombardons
du Kaiser.
Bref,
le concert touche à sa fin quand un avion apparaît dans le ciel...
C’est un Français.
Et
voilà que soudain, comme la musique Allemande vient d’entamer le
« Deutschland über alles », une bombe tombe au beau
milieu des exécutants. L’aviateur a merveilleusement visé.
Le
chef d’orchestre est soulevé de terre comme par un ressort et
retombe en morceaux au milieu de ses exécutants. Tous sont tués, et
plusieurs soldats faisant la haie sont blessés. Je vous laisse à
penser si les habitants ont su gré au général Allemand de les
avoir conviés à ce spectacle inattendu...
VI)
A
7h, ce matin, départ à Bezannes de ma femme et des enfants. Par le
CBR, ils gagneront Bouleuse et Dormans pour revenir à Épernay par
la ligne de l'Est.
Éloignement
qui s'est imposé par un impérieux besoin de calme pour toute la
petite famille, et surtout devenu nécessaire et prudent en raison de
la permanence du danger à Reims, où tous nos espoirs tenaces en la
libération ont été et sont peut-être susceptibles encore d'être
trop déçus.
Quoique
la séparation nous coûte beaucoup à tous, car je dois rester à
mon poste, j'éprouve un réel soulagement à voir les miens
s'éloigner et échapper ainsi à la vie infernale qu'il faut mener
dans notre ville, à les savoir désormais en sécurité.
Dès
ce jour, je décide de mettre à profit l'offre aimable qui nous a
été faite après l'incendie du 19 septembre, où nous nous étions
trouvés non seulement démunis de tout, mais sans mobilier et sans
habitation.
Par
l'intermédiaire d'un de leurs fils, M. l'abbé Marc Ricard, aumônier
de l'école des Arts et de l'école Saint Jean -Baptiste de la Salle,
Mme Ricard et M. Ricard, ancien officier de cavalerie légère
démissionnaire et lieutenant-colonel du services des Étapes, non
appelé à la mobilisation, en raison de son âge, ont mis très
obligeamment et de la manière la plus délicate à la disposition de
ma famille, une partie de la maison qui leur a été louée 8 rue
bonhomme, où ils demeurent se réservant le rez-de-chaussée et le
premier étage, ils nous ont proposé de nous installer au second.
Quelques
jours après la destruction de notre quartier et l'incendie de la
cathédrale, M., Mme Ricard et M. l'abbé se sont brusquement décidés
à quitter Reims pour aller à Beauvais où ils possèdent une
propriété de famille, sans que nous ayant donné suite à leur fort
intéressante suggestion, puisque nous avions trouvé immédiatement
le gîte chez mon beau-père, 57 rue du Jard.
Je
suis resté en relations, par correspondance, avec M. et Mme Ricard
et je me sais autorisé à occuper leur maison, en cours de bail à
Reims. Je sais, en outre, qu'au cas où je juge à propos d'aller m'y
abriter ou y loger, j'y trouverais leur cuisinière, Mme Vve
Martinet, bonne vieille personne des plus dévouées pour ses
maîtres, qui demeure 71 rue du faubourg Cérès et a, depuis leur
départ, pour consigne de venir chaque jour, si possible, rue
Bonhomme, s'occuper de l'entretien de la maison en état de propreté,
au nettoyage des meubles, à l'astiquage des ustensiles, etc...
Le
bombardement, avec ses lubies, me paraissant moins fréquent
qu'ailleurs de ce côté de la ville, actuellement du moins, je me
rends donc sans attendre, rue Bonhomme. Mme Martinet a reçu des
instructions très précises, dans l'éventualité de mon arrivée.
Cette brave Mme Martinet met tout son empressement à m'aider pour
l'installation d'un lit-cage en un endroit que je choisis dans la
salle à manger, face à un grand vitrage donnant sur le jardin. Elle
m’explique qu'elle vient chaque matin vers 7h, qu'elle me préparera
mes repas, qu'elle déjeunera elle-même à la maison vers midi et
qu'elle continuera à s'en retourner, chaque soir, chez elle à 18h.
Mon
emménagement étant effectué, puisque j'ai apporté un petit sac à
main et une musette contenant tout ce que je possède : un peu de
linge etc..., il est entendu, sans plus de formalités que j'élis
domicile aujourd'hui, que j'y prendrai mes repas et qu'à partir de
ce soir, j'y passerai les nuits...
2h
(2 h 45) bombes. Écrit au Cardinal Gasparri et envoyé vues
photographiques de la Cathédrale... Cardinal Luçon dans son Journal
de la Guerre 1914-1918, éd. Travaux de l’Académie Nationale de
Reims.
Temps
couvert on découvre de très loin, sans pluie cependant. Toute la
journée canonnades et bombardements. Un homme tiré rue de Betheny
parait-il. Comme hier violente canonnade vers Berry-au-Bac, à 5h15,
le calme parait un peu rétabli, mais il ne faut cependant pas se
réjouir de trop car la situation est vite changée.
Toujours
violente canonnade vers Berry-au-Bac à une heure très avancée de
la nuit...
VII)
Carnet
d'Eugène Chausson durant la guerre de 1914-1918
Alors
que le général Foch réunit les commandants de corps d’armée
pour réfléchir aux opportunités d’une offensive utile dans le
Nord, un ouvrage sur les origine de la Guerre, « Le livre
jaune » paraît en France et va être diffusé à l’étranger.
Ce
Même 30 novembre 1914, le président de la République Raymond
Poincaré, le président du Conseil René Viviani et les présidents
de l’Assemblée nationale et du Sénat se rendent en visite aux
armées. Ils tiennent à manifester le soutien de toute la Nation aux
soldats qui se trouvent engagés sur le front et assurer les blessés
que la France pense à eux.
On
salue aussi ceux qui sont morts pour la France. Sur le chemin du
retour Paul Deschanel confie au général Gallieni son inquiétude
sur la suite du conflit : »...
La
guerre va s’éterniser, durer des saisons, des années peut-être »
VIII)
Triste
livre ! Triste lecture !...
Fin
du quatrième mois de la guerre qui semble entrer dans une phase
nouvelle. D'après certaines indications, il se peut que l'hiver
marque un ralentissement des opérations. Le général de Castelnau a
écrit à sa femme que peut-être il viendrait la voir en janvier.
En
tout cas, la volonté de tenir bon et de poursuivre la lutte jusqu'au
bout est énergique dans le pays malgré les souffrances et la
fatigue... Il y a nos morts à venger, le territoire à libérer, la
Belgique à rendre aux Belges. La passion de l'honneur emporte
tout...
Le
livre jaune Français vient de paraître. Manifestement, il est
incomplet, il offre des lacunes. Il n'a ni la belle ordonnance ni la
suite du Livre bleu Anglais. A-t-on quelque chose à cacher ?... Le
chapitre le plus impressionnant est peut-être le premier, intitulé
« Avertissements ». On y voit que, dès 1913, notre
diplomatie a donné au gouvernement de la République les
renseignements les plus sérieux sur l'évolution des esprits dans
les cercles officiels Allemands, les progrès du parti de la guerre,
la résistance, de jour en jour moins forte, de Guillaume II à
la pression des éléments belliqueux...
Cela,
le Président, les ministres et l'état-major peuvent le savoir. Le
véritable souverain, c'est-à-dire 11 millions d'électeurs, n'ont
pas connaissance des nouveaux rapports Stoffel qui arrivent rue
Saint-Dominique et au Quai d'Orsay.
Quant
au reste, le Livre jaune accuse la passivité du gouvernement de la
République dans les journées décisives de juillet. La diplomatie
Française s'y montre dépourvue d'initiative, toujours à la
remorque de la Russie et de l'Angleterre, manœuvrée par ses alliés,
intimidée par ses adversaires.
Quand
M. Cambon, à Berlin, veut élever la voix, il est rabroué avec
insolence.
IX)
Journal
du Rémois Paul Hess (extraits)
Le
Conseil municipal de Lyon, sur proposition du maire, décide de créer
une école pour la rééducation professionnelle des grands blessés
de guerre.
Le
général Sarrail, commandant la 3e armée, cite le bataillon à
l’ordre de l’armée pour sa bonne tenue au cours des combats des
22-24 septembre à la Vau-Marie
Udrelier,
général de brigade. Né en 1858 à Strasbourg. Sorti de Saint-Cyr
en 1879 dans l’infanterie de marine.
Campagnes
coloniales presque continues jusqu’en 1910.
Général
en 1908.
Commandant
en 1914 la 6e brigade coloniale.
Tué
à l’ennemi devant Miraucourt le 30 novembre 1914. Commandeur de la
Légion d’honneur.
X)
Lu
dans Le Moniteur en date du 30 novembre 1914( N°du dimanche 13
décembre)
France.
La
lutte d’artillerie tourne partout à notre avantage, et l’on
remarque d’ailleurs que l’ennemi a très peu recouru à
l'artillerie lourde.
En
Belgique
Plusieurs
points d’appui ont été enlevés par les nôtres dans les
alentours d’Ypres. 3 régiments ennemis qui mènent une attaque
sont refoulés au nord d’Arras. Succès pour nous près de
Chaulnes, échecs Allemands dans les Vosges et dans l’Argonne.
Russie.
L’État
major Russe publie une note pour dire qu’il faut encore
n’accueillir qu’avec réserve les correspondances privées de
Pétrograd.
les
Russes avancent sur toute la ligne, infligeant aux Allemands des
pertes immenses, mais les combats continuent en Pologne.
Un
autre communiqué établit que des colonnes Allemandes qui
s'acheminent en rang serré dans la région de Lodz, ont été
littéralement fauchées.
C’est
sans doute pour faire illusion à l’opinion publique Teutonne et au
Reichstag qui va se réunir que Guillaume II a nommé le général
von Hindenburg feld-maréchal.
Les
nouvelles qui arrivent de Vienne et de Budapest portent que la
situation y devient terrible. Une révolution y éclaterait que l’on
n’en serait pas autrement surpris, tant la pénurie de toutes
choses y apparaît grande...
Marine.
Des
sous-marins Allemands ont détruit deux steamers Anglais au large de
la côte Normande, près des caps d’Attifer et de la Hève.
Un
navire Italien, le croiseur Calabia, a été envoyé à Beyrouth pour
y protéger la colonie Italienne, menacée comme toutes les autres de
pillage par les troupes Ottomanes.
Grande-Bretagne.
Dans
une longue dépêche, le maréchal French rend hommage à l’ardeur
avec laquelle les généraux Français n’ont cessé de lui prêter
une collaboration efficace.
Turquie.
Les
Turcs ont abandonné la position de Kaprikeui, en Arménie, sur
laquelle ils luttaient depuis plusieurs semaines, pour s’enfuir
vers Erzeroum.
XI)
JMO/Rgt
:
Matin :
exercices de groupes (a-tireurs, b-tirailleurs). Exercices d’ordre.
Soir :
exercices de bataillon, progression de l’infanterie aux petites
distances. Travaux d’approche en terrain découvert. »
JMO/SS
:
« Même
emploi du temps
Indisponibles
= 41 demandes de médicaments et de matériel pour le mois de
Décembre »
XII)
Mutilés
de guerre (2/3) Le premier institut de reconversion des blessés est
créé à Lyon en novembre 1914 sous l'impulsion de son maire Édouard
Herriot. Le Figaro relate cette belle expérience qui fait des
émules.
Durant
la guerre plus d'une centaine d'école de ce genre vont voir le jour.
Au
lendemain de la première guerre mondiale, on compte plus de 3
millions de blessés Français dont environ 300.000 mutilés et
amputés.
Le
premier office national des mutilés et des réformés sera créé en
1916.
Il
est rattaché au ministère du Travail.
En
1918, les mutilés se regroupent dans une Union Fédérales des
Mutilés. La Loi Lugnol du 31 mars 1919 leur donne droit à une
pension spécifique.
Dès
le début de la guerre de nombreuses écoles sont créées avec le
soutien financier du ministère de l'intérieur. Elles permettent la
réadaptation des mutilés et leur formation à la pratique d'un
nouveau métier.
L'école
de Lyon installée rue Rachais en 1914 ouvre très rapidement une
seconde école. Elle se situe chemin de Tourvielle.
En
1915, l'école de la rue de Rachais prend le nom de Joffre, celle de
Tourvielle devient l'école Foch. L'éventail des métiers proposés
est assez large:
On
trouve des formations de comptables, de tailleurs , de cordonniers,
de menuisiers ébénistes, horticulteurs … Et celui de fabricants
de jouets en bois.
La
durée d'apprentissage varie de 6 à 8 mois selon les métiers.
En
fin de formation, le mutilé reçoit un certificat d'aptitude
professionnelle (crée en 1911, il devient CAP en 1919).
Sources:
Région Rhône-Alpes, Inventaire général du patrimoine culturel ; ©
Ville de Lyon...
Article
paru dans Le Figaro du 4 août 1915.
Il
y aurait un volume à écrire (et j'espère bien que ce Volume sera
écrit) sur l'ensemble des œuvres d'assistance militaire et civile,
nationale et municipale auxquelles la ville de Lyon, sous la
direction de son maire, s'est consacrée depuis un an. C'est vraiment
un superbe spectacle… [sic]
Mais
il me semble que le grand honneur de Lyon a été la création de son
école professionnelle de blessés.
Ce
problème si grave de la rééducation des mutilés de la guerre,
nous ne faisons, à Paris, que commencer à le résoudre. A Lyon, il
est résolu depuis 8 mois.
C'est
exactement le 30 novembre 1914 que, sur la proposition de M. Herriot,
le Conseil municipal approuve la création d'une École pour soldats
mutilés. Lyon possède un domaine-privé considérable.
Cette
très grande ville est une personne fort riche, et d'ailleurs
modeste.
Elle
ouvre à l'œuvre un pittoresque vieil hôtel qu'elle n'utilise
point, et tout de suite le fait aménager, meubler, munir de
l'outillage nécessaire aux premiers apprentissages qu'on veut
tenter.
En
même temps, le directeur du Service de santé de la 14e région,
résolu à encourager une expérience si généreuse, donne aux
formations sanitaires l'ordre d'envoyer à Lyon les sujets
« justiciables » de la nouvelle institution. Le 16
décembre 1914, l’École ouvre ses portes. 12 soldats y sont
installés.
Elle
en instruit, à cette heure, une soixantaine, répartis en plusieurs
classes.
Il
y a la classe des comptables et celle des sténo-dactylographes, la
classe des tourneurs, la classe des ouvriers en jouets, la classe des
cartonniers...
Plusieurs
apprentis comptables ont perdu le bras droit et sont devenus, de la
main gauche, en 3 ou 4 mois, des calligraphes.
Les
leçons de machine à écrire sont très suivies. Je vois un élève
s'y exercer avec une dextérité remarquable, il conduit la machine
du seul doigt qui reste à sa main gauche.
A
la « tournerie », aux ateliers de brochage, de
cartonnage, de jouets, on est frappé de l'aisance avec laquelle
certains de ces pauvres mutilés sont devenus des gauchers de la plus
merveilleuse adresse.
L'atelier
des jouets a un succès énorme. Le professeur y a reçu pour 5 000
francs de commandes. Ces jouets consistent généralement en
découpages (exécutés à la scie mécanique) de personnages peints
au pochoir, et dont le coloriage se complète de raccords ou se
rehausse d'ornements peints à la main. Travaux d'une naïveté
charmante, mais qui marquent le début d'une industrie à créer chez
nous : L'industrie du jouet.
Les
Allemands y excellent...
Il
est émouvant de penser que ces revanches d' « après-guerre »,
ce sont encore des soldats (et des blessés !) qui nous aideront tout
à l'heure, à les préparer.
Mais
ce n'est pas, tout. Il est nécessaire de faciliter aux amputés des
jambes l'apprentissage d'autres métiers assis.
Les
plus avantageux de ces métiers sont ceux de cordonnier et de
tailleur.
On
peut pratiquer dans le moindre village et à peu de frais. La
création d'ateliers de cordonniers et de tailleurs est bientôt
décidée, et comme la place manque dans le vieil hôtel de la rue
Rachais, le Conseil municipal décide, sur la proposition du maire,
la création d'une seconde école de blessés !
Le
14 mai 1915, l’École est ouverte. 70 mutilés, l'occupent en ce
moment. Elle est installée au bord de la ville, presque à la
campagne, au chemin de Tourvielle, dans un délicieux domaine, à peu
près inutilisé.... J'ai déjà dit que Lyon possède des immeubles
à n'en savoir que faire. Heureuse ville ! La vaste maison
campagnarde très méridionale d'aspect, avec ses façades blanches
et ses toits plats, vêtus de tuiles grises, héberge, à cette
heure, 36 cordonniers et 16 tailleurs, qui sont déjà de fort
honnêtes ouvriers. J'oublie l'atelier de menuiserie, où 12
apprentis travaillent, et déjà confectionnent à la main des ronds
de serviettes du plus agréable aspect.
Mais
je n'oublie pas le jardin ! le jardin immense de Tourvielle, où j'ai
vu quelque chose d'admirable et de poignant : Les mutilés
horticulteurs. Ils sont venus à Lyon, comme les autres, pour y
apprendre un état, et puis, à l’École de Tourvielle, ils ont
aperçu la terre... la bonne terre sur laquelle ils ont peiné avant
d'être soldats. Et cela a été plus fort qu'eux. Ils sont revenus à
elle. Elle les a repris !
Et
j'ai vu, à Tourvielle, un amputé de la jambe droite piocher,
piocher furieusement, en s'appuyant sur le pilon qui s'enfonçait à
chaque pas dans la terre molle.
J'ai
vu un manchot planter des salades, un autre qui bâchait, et qui,
chaque fois qu'il a planté sa bêche en terre, n'ayant plus de main
gauche pour la soulever, plie les genoux, et, dans un mouvement de
bascule de la main droite allongée jusqu'au bas du manche, arrache
le fer du sol.
Et
il aimait encore mieux ça que d'apprendre à faire un gilet...
Ce
qui est remarquable, enfin, c'est l'air de bonne humeur et de
politesse qui règne dans ces deux maisons. Le professeur y aime ses
élèves, parce qu'il a commencé par les plaindre. L'élève y aime
son professeur, parce qu'il a le sentiment d'avoir été peut-être
sauvé par lui.
L’École
n'est pour ces pauvres jeunes gens ni un internat ni une caserne,
mais un asile aimable, où la discipline est la plus douce qui soit.
Personne
ne les y retient. Quand ils sauront bien le métier qui doit les
faire vivre, ils retourneront chez eux, et s'ils souhaitent de
trouver une place hors de l’École, elle la cherchera pour eux.
En
attendant, elle subvient à toutes leurs dépenses, (évidemment
supérieures au montant de leur allocation qu'ils ne touchent pas),
et leur abandonne, en outre, le produit de leurs petits travaux.
Ces
mutilés n'ont pas seulement appris à travailler, l’École leur a
donné des habitudes de bonne tenue. Ils vivent dans l'ordre et la
propreté, sous la surveillance d'infirmières bénévoles qui sont
de délicieuses maîtresses de maison. Je les ai vus quitter le
travail pour déjeuner.
Tous
vont se laver les mains. Les dortoirs de nos plus grands lycées ne
sont pas mieux tenus que les leurs.
C'est
une élite ouvrière qu'on forme là.
L’École
de Tourvielle pourra recevoir dans une quinzaine de jours, quand ses
nouveaux locaux seront aménagés, une cinquantaine de pensionnaires
de plus. Il est question d'y organiser une section de photographie et
une section d'orthopédie.
Et
pourquoi, demandait l'autre jour un Lyonnais à M. Herriot, n'auriez-
vous pas une section de chant, et ne formeriez-vous pas des chantres?
C'est un métier lucratif, en somme, et facile.
Le
maire de Lyon n'est pas un sectaire. Il a souri. Et il n'a pas dit
non.
Par
Emile Berr.
XIII)
Les
journaux de tranchées
Éric
Labayle
Avec
la stabilisation du front et l’invention d’une nouvelle guerre,
statique, les soldats adoptent un rythme de vie réglé sur celui des
tranchées. Désormais, ils passent le plus clair de leur temps à
attendre :
Attente
de la relève, de la montée en ligne, du courrier, de la soupe, de
la prochaine corvée, de l’attaque, de la permission, de la
blessure ou de la mort… Dans cette existence morne et généralement
désespérante, les distractions sont rares....
Or,
sur le front comme dans toute société organisée, le besoin de
communication, d’expression et de fantaisie est vital.
C’est
la raison pour laquelle apparaissent très vite des feuilles
ronéotypées, que l’on baptise « journaux de tranchées »
(ou « journaux du front ») et qui sont diffusées plus ou
moins largement, soit dans un secteur du front, soit au sein d’une
unité, mais également, parfois, auprès des parents et amis restés
à l’arrière...
Ces
journaux de tranchée mettent à contribution tous les talents :
Dessinateurs, conteurs et journalistes en herbe y trouvent un espace
de liberté propre à l’expression de leurs humeurs, presque un
exutoire.
Ils
jouent également un rôle important en servant de lien entre les
hommes de l’unité concernée.
En
ce sens, ils procèdent de l’esprit de corps, ce qui explique la
grande tolérance dont le commandement fait généralement preuve à
leur égard. Car l’humour présent dans ces « feuilles de
chou » est souvent grinçant, tandis que le contenu
rédactionnel flirte parfois avec les limites du tolérable par la
censure militaire.
Néanmoins,
la production de journaux de tranchées reste abondante tout au long
du conflit. Bien entendu, elle est plus dynamique dans les secteurs
calmes, où les infrastructures permettent de réaliser des tirages
de bonne qualité.
Voici
une liste des journaux de tranchées édités par les corps de troupe
de l’armée Française. Nous l’avons voulue la plus complète
possible, mais il subsiste sans doute des lacunes et des omissions
(le contraire serait étonnant, étant donné la profusion de titres
publiés et la modestie de la plupart des tirages).
30
novembre 1914. Le canon a parlé aujourd'hui. | Comme ...
www.nrblog.fr/.../30/30-novembre-1914-le-canon-a-parle-aujourdhui/
Il
y a 6 jours - 30 novembre 1914. Courmelles Le canon a parlé
aujourd'hui. Les Allemands ont bombardé Soissons et puis Belleu,
Billy et Acy, inoffensifs ...
Lundi
30 novembre 1914 : les Allemands renoncent à une ...
www.il-y-a-100-ans.fr/.../lundi-30-novembre-1914-les-allemands-renoncen...
Il
y a 6 jours - Politique, société, culture, sport, insolite,
qu'elles soient nationales, internationale ou régionales retrouvez
ce qui faisait l'actu dans nos ...
Lundi
30 novembre au dimanche 6 décembre 1914
www.14-18hebdo.fr/18e-semaine-de-guerre-lundi-30-novembre-au-dim...
28
nov. 2014 - LUNDI 30 NOVEMBRE 1914 - SAINT ANDRE - 120e jour de la
guerre. MARDI 1er DECEMBRE 1914 - SAINT ELOI - 121e jour de la
guerre.
30
Novembre 1914 ... Triste livre ! Triste lecture ...
lafautearousseau.hautetfort.com/.../30-novembre-1914-5487686.html
Il
y a 6 jours - 30 Novembre 1914 ... Triste livre ! Triste lecture
!... R240065695.jpg Fin du quatrième mois de la guerre qui semble
entrer dans une phase ...
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