jeudi 16 mars 2017

EN REMONTANT LE TEMPS...105

16 JANVIER 2017...

Cette page concerne l'année 105 du calendrier julien. Ceci est une évocation ponctuelle de l'année considérée il ne peut s'agir que d'un survol !

FLAVIUS JOSEPHE L'HISTORIEN DE JÉRUSALEM
 
FLAVUS JOSEPHE
En 67, au terme du siège de Jotapata, les Romains sont vainqueurs de l'armée des Juifs. Parmi les vaincus, se trouve un représentant de l'aristocratie de Jérusalem, Flavius Josèphe. Il voue à sa patrie un véritable culte et choisit cependant de gagner Rome, où il devient un historien officiel de l'empire. Aujourd'hui, son œuvre irremplaçable est oubliée.

Il est bien rare que les historiens de la Rome antique mentionnent parmi leurs sources Flavius Josèphe qui est pourtant l'un des plus importants témoins du Ier siècle.
Le personnage est à bien des égards inclassable. Né en l'an 37 dans une famille de l'aristocratie sacerdotale judéenne, il finit ses jours à Rome vers l'an 105 après être devenu citoyen Romain et protégé des empereurs. Élevé dans la pure tradition juive et, très jeune, passé maître dans l'exégèse des textes sacrés, Yoseph ben Mattitiahu ha Cohen (fils de Mathias le prêtre) devient, dans son âge mûr, un historien de langue grecque.
Accusé de trahison de son vivant par ses compatriotes en révolte contre l'occupant Romain, il connaît une gloire posthume dans l'Église pour avoir, croit-on, mentionné le Christ dans un bref passage.

Exceptionnel destin que celui de Flavius Josèphe. D'abord attiré par l'étude sacrée et la spiritualité, il séjourne 3 ans au désert auprès d'un ermite, mais à 26 ans, on le retrouve chargé d'une mission diplomatique à Rome d'où il réussit à faire libérer quelques prêtres juifs emprisonnés.

En l'an 66, quand la Judée se soulève contre Rome, il se voit confier, à 29 ans à peine, le commandement d'une région clé, la Galilée
Au terme du siège de Jotapata, il a échappé, grâce à une ruse, au suicide collectif décidé par les derniers survivants.
Fait prisonnier par les Romains, il risque le sort cruel des généraux vaincus, mais il prédit alors à son vainqueur, Vespasien, qu'il deviendra empereur... Celui-ci lui laisse donc un délai de grâce.

En 69, la prédiction se trouve réalisée : Vespasien monte sur le trône et le citoyen Romain de fraîche date Titus Flavius Josephus, libéré de ses fers, fait partie de l'escorte qui accompagne le nouvel empereur jusqu'à Alexandrie, d'où celui-ci doit s'embarquer pour Rome. Il revient ensuite vers sa ville natale, Jérusalem, aux côtés du fils de Vespasien, le césar Titus, chargé d'en mener le siège.
FLAVUS JOSEPHE
Sans prendre lui-même les armes contre ses compatriotes, il les implore, à la demande de Titus, de se rendre pour épargner de plus grands malheurs et ne s'attire que leur mépris... Il est donc témoin de ce siège cruel où la famine vient en aide aux assiégeants, il voit éventrer, crucifier des milliers de prisonniers affamés avant d'assister à l'aboutissement épouvantable de cette tragédie : La chute de Jérusalem et l'incendie du Temple.
Il voit encore les milliers de jeunes gens livrés aux bêtes dans les amphithéâtres où l'on célèbre des jeux en l'honneur de la famille impériale.

De retour à Rome, il assiste au triomphe de la dynastie des Flaviens. Étant à cette époque, le confident discret de l'idylle entre son ami Titus et la reine juive Bérénice, sœur d'Agrippa II. Il bénéficie alors de toutes les faveurs impériales :
Vespasien lui offre pour résidence la maison même où il a vécu avant d'être empereur, il lui octroie une pension confortable et lui ouvre toutes ses archives pour qu'il puisse écrire l'histoire des événements de Judée.
C'est ainsi que, par décision de l'empereur, Flavius Josèphe s'improvise historien.
Une fois achevé, vers l'an 75, le récit de la La Guerre des Juifs contre les Romains (rédigé en araméen puis traduit en grec), il prend goût à l'écriture et se lance dans une vaste évocation de l'histoire de son peuple en 20 livres, depuis les origines bibliques jusqu'à la veille de la révolte contre Rome œuvre titrée :
Les Antiquités juives. Il est aussi l'auteur d'une apologie du judaïsme, le Contre Apion, et d'une esquisse d'autobiographie.

Faut-il considérer Flavius Josèphe comme un historien de Rome ? La Guerre des Juifs, Les Antiquités juives : Les titres associés à son nom ont valu à Flavius Josèphe d'être beaucoup plus fréquenté par les théologiens chrétiens que par les historiens de l'Antiquité.
Il suffit de feuilleter l'index d'une quelconque « histoire romaine » pour juger de l'extrême déséquilibre qui y règne entre l'utilisation de ces deux sources écrites en grec par deux anciens prisonniers de guerre, l'un Grec, l'autre Judéen. L'œuvre de Polybe a plus d'ampleur, dira-t-on. Certes, mais sur 40 livres, seuls les 5 premiers subsistent en entier, pour la plupart des autres, on ne dispose que de fragments.
Polybe est un excellent observateur des institutions Romaines, mais la description de l'organisation de l'armée impériale par Josèphe (au livre III de la Guerre) vaut bien celle de l'armée républicaine par Polybe.
De Polybe, on retient qu'il est le témoin de la prise de Carthage à laquelle il assiste aux côtés de Scipion Émilien.
Mais la prise de Jérusalem à laquelle Josèphe assiste aux côtés de Titus est-elle moins importante pour les destinées de Rome et de l'humanité ? Comment expliquer, alors, cet oubli relatif dans lequel est tombé Josèphe, voire cette méfiance inavouée à son égard ?

A la Renaissance, quand on commence à publier les grands textes du passé, l'œuvre de langue grecque qui connaît le plus grand nombre d'éditions est pourtant la sienne. Car les théologiens lui portent un intérêt passionné : N'est-il pas, selon eux, « le seul historien qui ait parlé du Christ » ?
Le Testimonium flavianum, ce fameux passage de quelques lignes auquel l'œuvre de Josèphe doit sans doute d'avoir été sauvée par les Pères de l'Église suscite il est vrai déjà, au XVIe siècles, certaines suspicions quant à son authenticité, certes, l'oratorien Cesare Baronio, découvrant que l'historien juif contredit sur certains points les Évangiles, fulmine : « scriptor mendacissimus » («auteur très mensonger ») ! Mais la valeur de l'œuvre entière n'échappe à personne.
JEZABEL
Ainsi donc, depuis qu'on écrit en Europe des histoires de Rome et des histoires du christianisme, l'habitude s'est prise de recourir à Josèphe comme à un témoin « du temps de Jésus », et aux historiens païens lorsqu'il s'agit d'histoire Romaine proprement dite.
Salluste, Tite-Live, Tacite, Suétone, Polybe ou Dion Cassius sont si prestigieux pour qui a fait ses « humanités », ils ont laissé des récits si abondants, qu'on a rarement eu l'idée d'aller chercher chez un historien juif des compléments à leurs récits.

Le grand usage qu'en font les théologiens chrétiens finit en outre par conférer à Josèphe une aura de sacré, il devient une sorte de « cinquième Évangile ». Les Pères de l'Église, à commencer par Origène (v. 185-v. 254) et Eusèbe (265-340), ont montré la voie en puisant chez lui tout ce qui sert leur polémique contre les Juifs : Ainsi la chute de Jérusalem devient la punition du peuple
« déicide ».

Au XVIIe siècle, le janséniste Arnauld d'Andilly, traducteur de Josèphe, écrit dans sa préface : « Une seule ville aurait été l'écueil de la gloire des Romains, si Dieu pour punition de ses crimes ne l'eût point accablée par les foudres de sa colère. » Il ajoute : « Des effets si prodigieux de la vengeance de la mort d'un Dieu peuvent passer pour incroyables à ceux qui n 'ont pas le bonheur d'être éclairés de la lumière de l’Évangile, s'ils ne sont pas rapportés par un homme de cette même nation aussi considérable que l'est Joseph. »
Ainsi, Josèphe est considéré comme le continuateur du Nouveau Testament, il ne fait pas simplement œuvre d'historien, mais d'historien sacré : Il vient cautionner et conclure l'Histoire Sainte.

A y regarder de plus près cependant, les théologiens chrétiens n'ont pas tout lieu d'être satisfaits des informations que leur fournit Josèphe.
Relatant par exemple le règne d'Hérode, il reste curieusement muet sur le massacre des Innocents qu'a, selon les Évangiles, ordonné ce roi.
Il parle certes avec sympathie de Jean Baptiste, mais il en fait un opposant politique au tétrarque (gouverneur) de Galilée Hérode Antipas, qui le fait mettre à mort tandis que, selon les Évangiles, cette exécution a eu lieu parce que Jean Baptiste reproche au tétrarque d'avoir enfreint la loi juive... Quand la traduction d'Arnauld d'Andilly eut facilité l'accès à l'œuvre de Flavius Josèphe, quelques savants abbés Français commencèrent donc à se montrer fort sévères pour un auteur qui répond si mal à l'attente des hommes de foi.

Au XVIIIe siècle, l'autorité de Flavius Josèphe, déjà vacillante chez les catholiques, est aussi bafouée par les ennemis de l'Église. Tout en se réjouissant que l'historien contredise sur certains points les Évangiles (car il voit dans ces contradictions une preuve de la « fausseté » des textes sacrés), Voltaire prend volontiers pour cible un auteur qui a le double tort d'être un Juif fidèle à sa tradition et une source importante pour l'histoire du christianisme primitif.
Josèphe évoque-t-il l'indépendance de la Judée retrouvée au temps des frères Maccabées (IIe siècle av. J.-C.) et l'instauration de la dynastie hasmonéenne ? Voltaire ridiculise cette fable nationaliste contraire à la «vraisemblance historique »... A force de pourfendre « l'exagérateur », « ivre de l'ivresse de sa patrie, comme le sont tous les citoyens des petites républiques », le philosophe met en doute la crédibilité d'un historien sans doute « profane » mais soupçonné d'être un apologiste.

Cette attitude fait école au XIXe siècle dans les cercles érudits. Josèphe a désormais bien du mal à se défaire de ce soupçon. Son œuvre souffre à la fois de la suspicion qu'éveille chez les scientistes positivistes toute littérature sacrée et de nouveaux préjugés anti-juifs qui se substituent à ceux des théologiens chrétiens. Ces préjugés sont particulièrement développés au XIXe siècle en Allemagne. Le pays qui donne alors le ton aux études philologiques. A cette époque, les érudits Allemands se refusent, par exemple, à admettre l'authenticité des documents romains cités par Josèphe au livre XIV des Antiquités, textes évoquant les privilèges accordés aux Juifs pour l'exercice de leur culte et le respect de leurs coutumes nationales, et témoignant de l'énergie avec laquelle le pouvoir Romain réagit vis-à-vis de quiconque porte atteinte à ces droits.
De nombreux historiens du XIXe siècle traitent ces sources avec dédain : « On croit qu 'un peuple si méconnu n'a pas obtenu toute l'attention dont il se vante .» L'historien Allemand Theodor Mommsen (1817-1903) finit par leur restituer leur respectabilité.

Comment ceux qui récusent le témoignage de Josèphe sur sa propre histoire nationale ont-ils eu l'idée de l'interroger sur l'histoire de Rome ? Tout ce que Josèphe dit de son pays concourt alors à nous faire mieux connaître la domination de Rome sur l'Orient. Son récit nous montre Rome tirant profit des querelles de succession en installant des rois vassaux avant de prendre directement pied dans le pays.
On y voit défiler des procurateurs qui justifient la réputation d'avaritia que Rome s'est faite en vivant aux dépens des populations soumises. Pourquoi l'intervention de Pompée dans la querelle dynastique qui oppose les 2 frères hasmonéens, Hyrcan et Aristobule, mériterait-elle moins d'attention que celle de Métellus et Marius contre Jugurtha dans la guerre de succession de Numidie ?
Pourquoi négliger le personnage du procurateur Gessius Florus qui, par ses exactions, est le responsable direct du soulèvement des Juifs en l'an 66 ?
On découvre aussi chez Josèphe des aspects ignorés de grands personnages Romains et de leur politique : Pompée, César, Antoine, Agrippa, Auguste, Tibère, Néron et, bien entendu, Vespasien, Titus et Domitien. Citons aussi l'admirable portrait d'Antonia, la mère de Germanicus et de l'empereur Claude, grand-mère de Caligula, grande dame vertueuse, avisée et fidèle en amitié, qui, selon Josèphe, joue un rôle important dans la disgrâce de Séjan, l'homme de confiance de Tibère (AJ XVIII, 180-182).
On trouve également chez Josèphe une intéressante évocation de la politique provinciale de Tibère : Il ne remplace jamais les gouverneurs qu'il a nommés car il compare ceux-ci à des mouches se gorgeant du sang d'un blessé, mieux vaut laisser sur le corps sanglant des mouches rassasiées que d'en faire venir de nouvelles, affamées... Le bannissement des cultes égyptiens de Rome, qui a lieu sous le règne de Tibère, n'a droit qu'à une phrase chez Tacite... Josèphe, quant à lui, nous en rapporte les circonstances sur 3 pages.
Il est tout aussi prolixe sur les derniers moments de Tibère et l'avènement de son successeur : Son récit est même beaucoup plus détaillé que ceux de Tacite et Suétone réunis (AJ XVIII, 205-237).
Tibère, dont tous les auteurs s'accordent à dire qu'il ne croit qu'en la fatalité, a par testament institué héritiers à titre égal, son petit-fils Tibère, fils de Drusus, et Caius fils de son fils adoptif Germanicus. Comme on lui a prédit que son héritier serait celui qui arrivera le premier auprès de lui le lendemain, il envoi chercher le jeune Tibère par son précepteur, mais celui-ci rencontre Caius devant le palais et le fait entrer...

Le règne de Caligula, le complot de Cherea contre lui, l'avènement de Claude font enfin l'objet de 4 chapitres entiers des Antiquités ils sont d'autant plus précieux que cette période est couverte par les livres VII, VIII, IX et X des Annales de Tacite, aujourd'hui perdus.
FLAVUS JOSEPHE
La longueur de cet épisode, qui interrompt le récit des événements de Judée, est en soi étonnante. Josèphe dispose ici d'informations que nul autre historien de Rome n'est en mesure de fournir.
En effet, un témoin discret de toute cette période apparaît fugitivement chez Josèphe qui le traite avec une attention excessive eu égard au rang et au rôle politique du personnage : Il s'agit de Thaumaste, un ancien esclave de Caligula auquel Agrippa I, prisonnier de Tibère, a promis la liberté s'il lui donne à boire. « Il tient parole et le paie de retour comme il le dit, plus tard en effet devenu roi, il affranchit avec éclat Thaumaste que lui a donné Caius devenu empereur et le nomme intendant de sa fortune...

Josèphe ne peut pas dire plus clairement qu'il a bien connu Thaumaste puisque ce dernier « meurt âgé ». Il est clair que c'est de sa bouche qu'il tient toutes les anecdotes concernant l'emprisonnement et la libération d'Agrippa I, ainsi que bien d'autres récits encore sur cette période, puisque le jeune esclave vit alors dans l'intimité de la cour impériale... Il est facile à Josèphe d'interroger un affranchi grec, à Rome, où ils se retrouvent tous deux après 70, Josèphe peut recueillir ainsi les souvenirs de jeunesse de Thaumaste. Dépositaire d'informations inédites dont il sait évaluer le prix, il croit bon de les livrer au public dans son œuvre.

Il y a mieux encore à puiser dans l'œuvre de Josèphe. Il a en effet été le témoin d'un événement capital pour l'empire : L'élection de Vespasien. On sait la place que cet événement occupe dans la vie de l'historien : C'est parce qu'il a prédit l'empire à Vespasien en 67 qu'il a eu la vie sauve, c'est parce que sa prédiction s'est réalisée 2 ans plus tard qu'il a été affranchi par le nouvel empereur et qu'il s'est mis à écrire.

Considérons maintenant le récit de Josèphe, publié du vivant du nouvel empereur. Quelle vie ! Quelle profusion de détails ! Vespasien apprend avec indignation l'élection de Vitellius, le 3e successeur de Néron en quelques mois, mais n'ose cependant s'embarquer pour Rome, ses soldats partagent son irritation et comparent les mérites de leur chef à ceux de Vitellius, cruel et débauché, ils adjurent Vespasien de sauver l'empire... Celui-ci, prudent, hésite, finit par refuser, « mais les officiers le pressent plus instamment et les soldats s'étant répandus en foule autour de lui, glaive au poing, menacent de le tuer s'il refuse de vivre d'une manière digne de lui ». Il accepte enfin. Avant de partir pour Rome, il veut toutefois s'assurer de l’Égypte, grenier à blé de l'Empire, il écrit au préfet Tibère Alexandre qui fait prêter un serment d'allégeance à ses troupes. Les légions de Mésie et de Pannonie, hostiles à Vitellius, accueillent la nouvelle avec joie.

On doit à la tradition chrétienne la conservation et la transmission de toute l’œuvre de Josèphe. « S'il n'avait tenu qu'à la tradition juive, il est probable que son œuvre ne serait jamais parvenue à la postérité. » « Si le christianisme, celui de la « Grande Église » en particulier, a conservé et transmis l’œuvre de Josèphe, c'est qu'il y a vu le complément indispensable de ses « Écritures Saintes », et plus particulièrement du Nouveau Testament.



FLAVIUS JOSÈPHE
bcs.fltr.ucl.ac.be/ENCYC-1/FlaviusJosephe.htm
La vie de Josèphe est assez bien connue, du moins les années qu'il a passées .... de Flavius Josèphe ou le roman d'une vie, dans RBPh, 77, 1999, p.105-130.

Flavius Josèphe, le Juif de Rome | lhistoire.fr
www.lhistoire.fr/flavius-josèphe-le-juif-de-rome
Faut-il considérer Flavius Josèphe comme un historien de Rome ? .... fait après le suicide de Néron pendant l'année écoulée, élirent Vespasien et « inscrivirent ...

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