mercredi 22 octobre 2014

LA GRANDE GUERRE AU JOUR LE JOUR 14 SEPTEMBRE 1914

14 OCTOBRE 1914


I)
Hier, vers 9h15 un « Taube », survolant Nancy, a lancé 3 bombes qui sont tombées dans la gare, entre le pont de Mon-Désert et le pont du Montet.
Le premier engin est tombé dans les voies de garage, creusant un trou en. terre peu profond. En explosant, les projectiles atteignent un wagon de première classe, les vitres du dernier compartiment sont brisées et les tôles, traversées.

Fait curieux, un rail, est entièrement traversé par un des projectiles. Le second engin est tombé sur le quai devant la guérite des hommes d'équipe. Faisant encore un cratère. Des fils télégraphiques sont coupés... Enfin, la dernière bombe s'est abattue sur les voies, à quelques mètres du pont de Mon-Désert, brisant simplement le marche-pied d'un wagon de marchandises... 3 employés ont été blessés... L'apparition de l'avion Allemand a suscité en ville un vif mouvement de curiosité.

II)
Nous avons le regret d'apprendre, d'une source que nous croyons sûre, bien qu'elle ne soit pas officielle, la mort du général Sibille, qui possède tant de sympathies, à Nancy et dans toute notre région... Il a été tué, sur un des champs de bataille de la Woëvre, et les détails de sa fin glorieuse sont donnés dans une lettre de l'aumônier qui l'a assisté à ses derniers moments :

« C'est en chargeant à la tête de sa division, (le général Sibille venait d'être nommé, en effet, divisionnaire par intérim) pour l'entraîner dans une attaque très difficile, qu'il est tombé, frappé par un obus et couvert d'éclats. Son corps a été enfermé dans un cercueil, et a été inhumé vers le mur nord du cimetière de Mandres-aux-Quatre-Tours... Une croix porte son nom et son grade. II a été inhumé par l'aumônier Birot, qui l'aimait particulièrement, comme tous ceux qui l'ont connu. »

Officier d'une grande valeur, il était adoré de ses hommes, et son souvenir restera vivant au 26e d'infanterie, dont il était, récemment encore, colonel, avant d'aller commander une brigade à Rodez. Ses concitoyens de Sarreguemines lui feront certainement de grandioses funérailles, lorsque la victoire nous aura rendu notre chère Alsace-Lorraine.

Parmi les pertes qui frappe aussi le plus douloureusement Nancy et la Lorraine, il faut citer celle du commandant Jean-Simon Mercuzot, du 279e, tombé à la tête de son bataillon, au combat de Courbesseaux. Le commandant Mercuzot, qui est longtemps capitaine au 69e, est très connu à Nancy, où il ne compte que des sympathies. Il est né à Montoillot (Côte-d'Or), le 24 mars 1863.

III)
Les communes éprouvées :
M. Emile Hogard, maire de Xermaménil, nous déclare que, contrairement à ce qu'on a prétendu, il est resté dans sa commune pendant l'occupation Allemande. Nous regrettons que l'on ait rapporté le bruit de son départ, et nous le félicitons très sincèrement de sa vaillante énergie.

On sait que les Allemands ont occupé Briey dès le quatrième jour de la guerre, la ville est aussitôt enfermée dans un cercle de sentinelles qu'on ne peut franchir sous peine d'être fusillé... M. André Magre, le sous-préfet, est à son poste, et il défend, pendant tous les jours qui suivent, les intérêts de ses administrés, avec un dévouement au-dessus de tout éloge.
Mais le 20 août, comme il semble y avoir un mouvement d'évacuation des troupes Allemandes dans la région, il résout d'en profiter pour télégraphier à son préfet, et porter le courrier des habitants isolés de la France depuis 16 jours. Accompagné de son ami, M. W..., pharmacien, ils partent en automobile pour Etain, dont le bureau de poste fonctionne encore, et ils reviennent quelques heures après... Le lendemain matin, un peloton de uhlans, commandé par un capitaine, arrive au galop à la pharmacie de M. W... Celui-ci sort sur sa porte.
- C'est bien vous qui avez accompagné à Etain le sous-préfet de Briey ? lui demande l'officier.
- Oui, répond-il.
Aussitôt, sans autre explication, on le pousse contre un mur, et devant sa femme et ses enfants qui sont sortis avec lui, on le fusille.
Les habitants, témoins de la scène, ayant entendu le capitaine donner l'ordre aux uhlans de se rendre chez le sous-préfet, peuvent les précéder et prévenir M. André Magre, quelques minutes avant l'arrivée des Allemands... Le sous-préfet de Briev peut se retirer en automobile à l'instant précis où les uhlans apparaissent à quelques mètres de sa demeure.

IV)
Les avions Allemands nous rendent visite. Notre cavalerie prend l'offensive dans les régions d'Hazebrouck et de Béthune contre des éléments ennemis venus de Bailleul – Estaires-la-Bassée.

Un corps d'armée Allemand a occupé Lille qui n'est défendu que par un détachement territorial.

Nous avons progressé notablement entre Albert et Arras, comme dans la région de Berry-au-Bac, à Souain, à l'est de Reims, dans l'Argonne et sur les Hauts-de-Meuse.

Un sous-marin allemand a coulé, dans la Baltique, le croiseur Pallada, une unité Russe qui datait à 1906, et qui jaugeait 7.000 tonnes.
ARRAS

Le choc s'accentue entre Russes et Austro-Allemands sur la moyenne Vistule, entre Varsovie et Ivangorod.

Le prince Oleg, fils du grand-duc Constantin, qui a été blessé sur les champs de bataille de la Prusse Orientale, a succombé à ses blessures

Les Monténégrins ont infligé un sanglant échec aux Autrichiens, prés de Sarajevo. De concert avec les Serbes, ils assiègent Raguse.

Le gouvernement Belge est arrivé au Havre où il s'installe provisoirement. A la suite de ses négociations avec le gouvernement Français, qui l'a accueilli chaleureusement, il a obtenu toutes facilités pour l'organisation de ses services.

V)
« L’Éclaireur » d’aujourd’hui publie un avertissement, émanant très probablement de la mairie, qui vient assez à propos. Il concerne la question importante du ravitaillement de la population civile et vise les agissements de certains commerçants. Voici ce texte :

Les approvisionnements à Reims, différentes communications nous ont été transmises pour nous signaler, soit des difficultés d’approvisionnement, soit encore des abus de la part de certains commerçants qui rançonnent les acheteurs.
On sait que depuis l’occupation Allemande, la municipalité de Reims a eu pour principal souci de veiller à l’approvisionnement aussi régulier que possible de la ville. On conçoit que cela n’a pas toujours été une chose aisée. Depuis la réoccupation de la ville par les armées Françaises, le service de ravitaillement a été facilité.

Les moyens de transport sont encore très réduits quoique le chemin de fer de banlieue soit maintenant d’un concours très efficace. Des laissez-passer spéciaux ont été délivrés à des commerçants Rémois, leur permettant de se rendre soit dans les environs, soit à Paris, pour obtenir des compagnies de chemin de fer, le matériel nécessaire à ramener les denrées d’approvisionnement à Reims. De cette façon, la population peut trouver en quantité à peu près suffisante les marchandises nécessaires à son alimentation.

Nous savons que la municipalité s’est entourée de certaines précautions pour prévenir la spéculation sur les marchandises ainsi mises en vente. Il est bon d’ajouter que les achats se font à un cours à peu près normal. Le prix des denrées doit donc reste sensiblement le même qu’auparavant. Il serait tout à fait scandaleux que des commerçants abusent de la situation critique dans laquelle nous nous trouvons pour spéculer odieusement sur le prix des denrées.

Aussi, la municipalité interviendra-t-elle énergiquement chaque fois que des abus lui seront signalés. Elle retirera immédiatement aux commerçants les permis qui leur ont été délivrés dans un but d’intérêt public d’approvisionnement.

Nous le répétons, le cours des denrées doit être sensiblement le même que précédemment : L’alimentation de la ville doit se faire, de plus en plus, dans des conditions normales. Tans pis pour ceux qui soigneraient trop leur intérêt particulier au préjudice de l’intérêt général, vers lequel doivent tendre tous les efforts des autorités municipales.

- On lit encore, dans le même journal, ceci :
Avis aux propriétaires sinistrés. La municipalité met des bâches à la disposition des propriétaires sinistrés. Ces bâches leur sont allouées au prix de 0.18 f par mètre carré et par mois. S’adresser 20 rue des Augustins.

- Dans Le Courrier, nous voyons cette information :
Au conseil des Ministres. M. Malvy a informé le Conseil qu’il a fait établir des notices individuelles, concernant toutes les personnes réfugiées dans certains départements Français. Le classement de ces notices, dont le nombre atteint environ un million, est aujourd’hui à peu près terminé... Des listes sont dressées pour la Belgique et pour chaque département d’origine, elles seront incessamment publiées.
- Et, sous le titre : Dans Reims, cette chronique locale :
Parmi les réclamations que l’on recueille, au cours du chemin, une domine : « Quand nous rendra-t-on le gaz et l’électricité ? ».
Certains quartiers jouissent encore de l’électricité, mais tous sont privés de gaz qui rend tant de services.

Puis, à nouveau, une longue lettre « à propos de la reconstruction des quartiers, incendiés et démolis », du correspondant ayant signé « un lecteur assidu », qui voit, dit-il, avec grand plaisir que l’on a commencé à commenter son projet...

Au cours d’une courte promenade faite avant de rentrer au bureau, j’ai salué, boulevard de la République, vers 13h30 la dépouille d’un soldat conduite au cimetière. Bien triste enterrement, où le plus simple corbillard, orné uniquement de drapeaux aux coins et précédé par le prêtre, est suivi seulement des 4 porteurs des Pompes funèbres. Il est visible que toutes les personnes qui croisent ce pauvre convoi, éprouvent une très pénible impression. La matinée de ce jour a été calme.

VI)
C’est postérieurement aux faits qu’elle décrit qu’a été forgée l’expression « course à la mer ». Elle désigne les combats confus qui se déroulent, en septembre et octobre 1914 dans les plaines du nord de la France, après la défaite de l’armée Allemande sur la Marne et son repli sur l’Aisne.

Il s’agit pour les deux belligérants, les Allemands et les Franco-Britanniques, de tenter de prendre à revers l’aile de l’armée adverse située le plus au nord, pour réaliser une manœuvre d’encerclement... Il en résulte une série de mouvements qui remontent progressivement vers la frontière Belge et les rivages de la Mer du Nord, où la « course à la mer » vient mourir à la fin d’octobre pour céder la place à la guerre de position.

Dans cette phase de près de 2 mois, les Allemands ont presque toujours l’initiative, les Alliés étant amenés à colmater dans l’urgence et l’improvisation des brèches susceptibles de menacer les ports de la Manche, devenus vitaux pour maintenir la liaison avec la Grande-Bretagne.

Plusieurs épisodes de cette guerre de mouvement improvisée, ponctuée d’innovations tactiques qui annoncent la guerre de tranchées, se déroulent en Artois, autour d’Arras. Des combats opposent des éléments appartenant fréquemment à l’élite de l’armée Allemande et à des unités Françaises souvent épuisées et mal équipées. Malgré des pertes considérables, celles-ci ne rompent pas... Arras ne tombera jamais aux mains de l’ennemi.

Ce sont des unités composées de territoriaux, épaulées parfois d’unités de cavalerie, qui s’efforcent, entre le 28 septembre et le 11 octobre, d’enrayer la progression Allemande en provenance de Picardie, qui, dans les environs de Bapaume, menace directement Arras. Il s’agit notamment du 14e régiment d’infanterie territoriale, qui, disposant de fusils pour tout armement et de maigres réserves de munitions tente de tenir une ligne de défense reliant les villages situés au nord-ouest de Bapaume.

Le corps de cavalerie que commande le général Conneau est amené à intervenir à l’ouest de Bapaume à partir du 27 septembre pour combler la brèche ouverte par la dislocation de plusieurs unités territoriales bousculées par l’infanterie Allemande.

Des combats indécis se déroulent à Irles et à Courcelles-le-Comte, où les Dragons viennent en l’aide aux territoriaux. Après avoir contribué à la fixation des Allemands sur une ligne Bapaume - Arras, les unités de cavalerie remontent vers le nord pour participer aux opérations de blocage des attaques Allemandes sur Arras et Lens et tenter une manœuvre de débordement de l’aile droite Allemande... Des renforts Français affluent, entre le 29 septembre et le 2 octobre, amenés par autobus depuis les gares de la région d’Amiens.

Le 2 octobre, les Français subissent une puissante attaque à Monchy-le-Preux, aux portes d’Arras, et s’efforcent de contenir la progression Allemande au nord de la ville en direction de Lens. Au même moment, des combats font rage à l’ouest de Bapaume entre la Garde Prussienne et des unités Françaises constituées de territoriaux, d’éléments de cavalerie et du 37e régiment d’infanterie. Des mêlées sauvages se déroulent dans plusieurs villages que les deux adversaires s’efforcent de fortifier de manière improvisée, les Allemands s’emparent de Gommecourt le 5, mais le lendemain, ils échouent dans leur tentative de prendre Hébuterne, laissant 350 tués et 297 prisonniers sur le terrain.

En revanche, le 69e régiment d’infanterie ne peut, les 7 et 8 octobre, investir Gommecourt que la Garde Prussienne a transformé en réduit avec des tranchées profondes, des lignes de barbelés, des nids de mitrailleuses et de l’artillerie de campagne.

Le 10, les Allemands prennent Monchy-au-Bois, Hannescamps et une partie de Foncquevillers.

A partir du 11, une mêlée sanglante oppose les Français qui tentent de reprendre Foncquevillers, à des unités de la Garde prussienne et à un régiment Bavarois, le village doit être « nettoyé » maison par maison, en utilisant parfois des canons de 75 en tir tendu.

A partir du 14 octobre, les combats s’arrêtent entre Arras et Bapaume. Les Allemands ont entrepris de se retrancher derrière une ligne orientée nord-sud et d’édifier un réseau de positions défensives, sur les hauteurs et dans les ruines des villages. La guerre de tranchées a commencé....
Yves LE MANER,
Directeur de La Coupole,
Centre d’Histoire et de Mémoire du Nord–Pas-de-Calais

VII)
J’ai un nouveau cheval. C’est une grande joie. Un beau cheval tout blanc, et qui était celui du général Pau. Je l’ai baptisé Altkirch, naturellement. Quand il voit des pantalons rouges il s’élance vers eux d’un élan superbe. Tout le monde dans le pays le connaît : il était soigné par un homme d’ici pour une synovite... Les gamins s’arrêtent étonnés de me voir sur « le cheval du général Pau ». Et cet après-midi durant un match que je disputais sur Altkirch contre le cheval Allemand du capitaine Lefolcalvez j’avais pour moi la foule et j’eus aussi la victoire.

VIII)
Comme la Lorraine m’a tout de suite séduit ! Comme j’aime les collines Mosellanes, avec leurs vignes, leurs petits villages nichés dans des creux, leurs routes bordées de peupliers ! Florémont, Ubexy, Bouxurulles !… Déjà je suis l’ami de vos clochers et le calme de vos campagnes me fait oublier la guerre.

IX)
Les communiqués sont muets en ce qui concerne la région Roye-Lassigny, les Allemands sont-ils renoncé à rompre cet angle de notre ligne de bataille ? », se demande un journaliste du Temps. Sur tout le front, de Noyon à la Moselle, la bataille fait rage...

Une escadrille de monoplans et de biplans sillonnent le ciel de Paris. C’est la première des mesures prises par le gouvernement pour éviter des incursions de « Taube ».
X)
Le Figaro publie un communiqué officiel du gouvernement pour aider la population de Paris à identifier les aéroplanes qui survolent la ville.

Pour reconnaître les avions Allemands :
-Tous les appareils Allemands, biplans ou monoplans en service, ont le fuselage en toile. Donc aucun appareil à fuselage non entoilé, et par conséquent transparent, n'est Allemand...

-Tous les biplans Allemands ont horizontalement la forme d'un V, c'est-à-dire les extrémités des ailes fuyantes vers l'arrière. Donc, aucun biplan à ailes rectilignes à l'avant n'est Allemand.

-Tous les monoplans Allemands ont des ailerons très prononcés vers l'arrière. Donc, aucun monoplan à ailes rectilignes à l'arrière n'est Allemand.

Tous les appareils Allemands, biplans ou monoplans, ont l'hélice à l'avant. Donc, aucun appareil ayant l'hélice à l'arrière des ailes n'est Allemand.

Il est probable que les aéroplanes Français qui, depuis lundi 12 octobre 1914, traversent le ciel de Paris, nous empêcheront de constater de visu l'exactitude de cette description des Taube...

En Belgique, c’est le début de la bataille d’Ypres.

En Prusse Orientale, l'avance Allemande en Pologne Russe se poursuit dans la région de Varsovie et sur la ligne de la Vistule, selon les dépêches publiées dans Le Temps.

En Galicie, le combat continue au sud de Przemysl ainsi que le siège de la ville.

Dans la campagne Austro-Serbe, sur la Drina, les troupes Serbes remportent quelques succès. Tandis que sur la Save, les Autrichiens attaquent les positions Serbes.


En Bosnie, dans la bataille de Kabinovich-Moakimo, les Monténégrins se sont emparés d'un grand nombre de mitrailleuses et de fusils, ainsi que d'une certaine quantité de munitions.

Vu de Paris, la situation reste confuse dans la région de Lille, les dernières nouvelles des combats ne sont pas arrivées aux journalistes du Temps :
« La place est réoccupée par un corps ennemi dont la cavalerie s'est avancée au sud-ouest jusqu'à une ligne jalonnée par Bailleul - Estaires-la Bassée. »

Dans le village de Foncquevilliers, près d’Arras les combats continuent.

Dans la Flandre, la cavalerie Française progresse et s’empare de Vieux-Berquin et de La Gorgue.

Les Britanniques progressent sur le territoire Belge et s’emparent du Mont Kemmel, Messines et Warneton. D’autre part, ils sont bloqués sur une ligne Armentières - La Bassée.

Le Temps publie une dépêche d’un correspondant de Nancy, indiquant qu’un avion Allemand survole la ville, et lance 3 bombes... Puis l'avion s'éloigne, laissant choir une longue banderole aux couleurs Allemandes qui porte l'inscription suivante :
« Nous regrettons d'entrer en relation d'une façon aussi excentrique avec les habitants de Nancy, qui sera bientôt Allemande. Nous vous saluons au nom des officiers du 3e escadron de Bavière. Lieutenants Gimmer et Schneider.»

XI)
Communiqués officiels dans la presse nationale
Les alliés à Ypres
Dans la région de Gand, quelques engagements ont eu lieu dans la nuit du 12 au 13 et dans la journée du 13. Des troupes Anglo-Françaises ont occupé Ypres.

Aile gauche, jusqu'à l'Oise, les opérations se poursuivent normalement.

Au centre, les progrès de nos armées dans la région de Berry-au- Bac sont confirmés.

Aile droite, rien de nouveau.

Ce matin, je me mets en route à 6h30 avec le cheval pour aller rejoindre ma Compagnie à Charmont. Je passe par Bignicourt, Jussecourt, Heltz – Maurupt
De Brignicourt à Villers-le-Sec, marécages où il y a de belles forêts de peupliers plantés à 4m X 6.

Départ de Villers-le-Sec à 12h30. Arrivée à Charmont à 14h30. Durant ce trajet, 7,5 km, pas une seule maison, mais des forêts de chênes, de charmes, un mélange d'aulnes et de bouleaux coupés par des vallées de prairies où paissent de nombreux troupeaux de vaches. Cela constitue la ressource du pays, mais c'est pauvre.
Charmont est à 41 km de Châlons et à 28 km de Bar-le-Duc.

XII)
Hermonville :
Ludivine Chevalier « Infirmière ? »
Dans la nuit, l’appel est si faible qu’il évoque une voix lointaine portée par un courant d’air qui aurait filé entre les pierres de l’imposante demeure où est installé l’hôpital de campagne. Pourtant, Ludivine l’a parfaitement entendu : après plus de 2 mois passés au front, elle se surprend elle-même à percevoir la moindre voix qui la sollicite, si basse soit-elle. L’hôpital résonne toujours des gémissements des blessés qui attendent que l’on vienne s’occuper d’eux et des cris de ceux que l’on emmène vers la table d’opération.

« Infirmière ? »
La voix a repris, affaiblie, mais toujours de ce ton très poli. C’est un grand blessé, elle en est sûre. Pour des raisons qu’elle ignore, Ludivine a constaté que plus les hommes sont gravement blessés, plus ils sont polis... La mort approchant, ils souhaitent peut-être l’affronter aussi dignement que possible.
Ludivine court maintenant dans le couloir où s’entassent les civières faites de bric et de broc autour desquelles des soldats aux bandages sales offrent des paroles de réconfort à leurs camarades allongés.

Enfin, elle pousse la porte de la petite salle où s’entassent ceux qui ont été le plus sévèrement touchés.
Entre eux, les blessés l’appellent « le mouroir ».

Ludivine allume une chandelle pour révéler 4 lits branlants, récupérés dans le village, et où des figures aux yeux clos respirent difficilement sous les draps blancs. Seule l’une d’entre elles s’agite : Un militaire aux cheveux blonds dont la tête dodeline en regardant l’infirmière...

À l’arrière, Ludivine a appris qu’il faut s’habituer à la pâleur des patients, lorsque la maladie les ronge de l’intérieur... Mais au front, on ne s’occupe plus de malades, mais de blessés. Et lorsque la mort vient, leur peau prend une couleur terreuse, jaune et brune, leurs veines serpentent en fleuves noirs, là où le sang s’épaissit autour de plaies monstrueuses que l’on ne peut imaginer...
Le soldat dans le lit est de ceux-là.

Les brancardiers l’ont ramené dans la nuit : Il a fallu attendre l’obscurité pour aller le chercher entre les lignes. Aux dires de ceux qui l’ont rapatrié, quelqu’un a planté une baïonnette surmontée d’un mouchoir près de l’endroit où il est tombé... On l’a découvert inconscient, il ouvre les yeux pour la première fois depuis son arrivée... De grands yeux pâles animent son visage, affreusement jaune à la lueur de la bougie. Le soldat regarde Ludivine avec une sorte de profonde révérence et murmure plus qu’il ne parle.

« Infirmière… s’il vous plaît.
— Que puis-je faire pour vous ? répond Ludivine en chuchotant à son tour.
— J’aurais besoin d’une faveur. Ce serait vraiment très aimable de votre part. »
Ludivine hoche la tête silencieusement et pose sa main sur la sienne : Elle est déjà glacée.
« Je vais partir ? dit-il en réprimant un sanglot. Je vais partir, n’est-ce pas ? »
Ludivine hésite à lui mentir... Il a probablement 22 ou 23 ans, guère plus... Le médecin qui l’a opéré a dit qu’il ne verrait pas l’aube... À quoi bon lui mentir ? Il n’a repris conscience que pour mourir... Ludivine sent une boule se former dans sa gorge à l’idée de devoir confirmer quelque chose d’aussi difficile, elle ne peut qu’approuver d’un simple signe de tête. Sur le visage imberbe du jeune homme, un sourire se dessine péniblement...
« Merci. C’est bien ce que je pensais. »
Une larme roule sur sa joue et ses lèvres se tordent alors qu’il se bat pour ne pas se laisser aller à pleurer comme un enfant.
« Faites-moi une faveur, s’il vous plaît. Il faut que vous écriviez que je suis mort très vite, d’accord ? ».
Il s’arrête un instant, et parvient à hisser sa main libre jusqu’à son visage pour le dissimuler un instant alors que des sanglots le secouent.
« C’est pour ma mère, dit-il alors que ce mot crispe les doux traits de son visage, elle ne doit pas apprendre que je suis mort comme ça... Dites-lui que je suis mort là-bas, avec mes hommes autour de moi... Dites-lui que je n’ai pas eu le temps de m’en rendre compte... Elle ne doit pas savoir que j’ai fini comme ça ! »
Il gémit et de nouvelles larmes coulent sur ses joues. Ludivine se penche vers lui pour le rassurer dans ses derniers instants. Elle chuchote suffisamment bas pour que sa propre gorge serrée ne la trahisse pas :
« Je le ferai, ne vous inquiétez pas. »
Le soldat sourit, et essuie une larme de sa main.
« Je ne m’inquiète pas. Plus maintenant », dit-il avec difficulté.
Ses yeux se perdent un peu, puis se fixent avec difficulté sur la bougie. Il est en train de perdre la vue. Il part.
« Merci pour tout. »
Ses yeux s’éteignent peu après ces derniers mots et sa tête s’enfonce mollement dans l’oreiller alors que sa main retombe sur son torse... Ses yeux sont fixés sur la bougie. L’infirmière lui abaisse les paupières puis se redresse. Elle prend une grande inspiration : Elle a encore beaucoup de difficultés à accompagner les mourants.
Et pourtant, elle ne s’imaginerait pas ailleurs.
Ludivine pose la bougie sur une table de nuit, prend son calepin et note :
« Lieutenant Nicolas Charbonnet. Mort le 14 octobre 1914. »

XIII)
M.J.Lepage, inspecteur de salubrité au bureau d’hygiène, chargé de l’enlèvement en ville des chevaux et autres animaux morts estime à 230/235 chevaux et quelques autres animaux, tués pour la plupart (…)

Nous nous couchons au bruit du canon, il en est ainsi presque tous les jours. Ce soir, la fusillade et les mitrailleuses s’entendent parfaitement et l’action paraît surtout très active vers le nord et l’est tandis que nos pièces tonnent sans discontinuer dans la direction de la petite montagne, du côté de Saint-Thierry, Pouillon, semble t-il.

XIV)
On demande de Suite :
Un bon domestique, connaissant la culture de la vigne.
S'adresser, 67, boulevard Pont-Achard.

Brevet Supérieur.
Les épreuves écrites du brevet supérieur ont commencé ce matin. 15 aspirantes et 5 aspirants y prennent part.

Les avions Allemands à Paris, le 12 octobre, sept bombes ont été à nouveau jetées ce matin sur Paris. L'une d'elles est tombée sur la gare du Nord, où elle a fait quelques dégâts, une autres est tombée à Clichy. On ne signale aucune victime.

XV)
Le couvent de Corbara en Haute-Corse :
C’est là qu’en octobre 1914, les autorités militaires Françaises ouvrent un camp d’internement de civils Allemands et Autrichiens. Les premiers incarcérés sont 400 Alsaciens, manifestement envoyés là par erreur…
Qui sont-ils, pourquoi étaient-ils prisonniers ?
Cent ans après, l’énigme reste entière…
Les DNA ont rappelé l'affaire récemment, « révélant un fait oublié, tabou même, de l’histoire de la guerre 1914-1918 : l’internement en France de civils Alsaciens. »
Mais les faits semblent avérés, Que disent-ils ?
Les voici tels que notre confrère Alsacien les décrit :
Dès la déclaration de guerre, le 3 août 1914, la France prend des mesures d’arrestation des ressortissants des pays ennemis se trouvant sur son territoire. Soit par crainte d’espionnage, soit tout  simplement pour les empêcher de servir sous leur drapeau national. Si femmes et enfants sont en grande majorité rapatriés dans leur pays d’origine, les hommes, eux, restent prisonniers durant tout le conflit, servant parfois même d’otages.

Des « dépôts d’internés », que les rares historiens spécialistes de la question, notamment l’universitaire Jean-Claude Farcy, appellent « camps de concentration », ouvrent alors dans des zones situées loin du front :
L’ouest de la France,
Le centre et la Corse.
La France a détenu 60 000 civils. Parmi eux, des Alsaciens Mosellans puisque la région appartient à l’Allemagne depuis 1871. Les historiens estiment leur nombre à 8 000, répartis dans plusieurs camps. Ces prisonniers Alsaciens sont plutôt gênants pour la France qui a une attitude ambigüe face à eux : Elle s’en méfie alors même qu’elle se pose en «libératrice des provinces perdues ». D’où, sans doute, l’épisode rocambolesque que vont vivre les « 400 Alsaciens de Corbara ».

Cette commune de Balagne, en Haute-Corse, abrite un couvent désaffecté que les autorités transforment en colonie pénitentiaire dès l’ouverture des hostilités. Début octobre 1914, tout y est prêt pour y accueillir les premiers internés... Le 14 octobre 1914, le préfet des Bouches-du-- Rhône sollicite alors son homologue de Corse... Il lui fait savoir qu’il va faire embarquer sur le navire Le Pelion, les 400 premiers détenus du « dépôt de Corbara ».

Le préfet de Marseille parle « d’Austro-Hongrois ». Le ministère de l’Intérieur, replié à Bordeaux, est informé de l’opération.
Le 16 octobre 1914 au soir, le Pelion accoste à Bastia. Le lendemain matin, les prisonniers sont acheminés par le train jusqu’à L’Île-Rousse puis à pied jusqu’à Corbara où il est alors procédé à leur installation.
Ils sont même comptés précisément. Ils sont 409 et regroupés selon leur
résidence d’origine (Altkirch et Mulhouse sont souvent mentionnées). Manifestement, il s’agit d’un aller simple.
Le 17 octobre 1914, le préfet de Corse télégraphie au ministère que l’opération s’est bien déroulée... Sauf qu’entre le 14 octobre et le 16 octobre, le 15 donc, le préfet des Bouches-du-Rhône a, lui, informé l’Intérieur que ce premier convoi se compose exclusivement d’Alsaciens-Lorrains.

Or cette information provoque visiblement un fort courroux au ministère où l’on s’inquiète beaucoup de l’image donnée par une France qui emprisonne des Alsaciens. Dans un télégramme codé, le ministère reproche vertement au préfet de Marseille sa confusion entre « Austro-Hongrois » et « Alsaciens-Lorrains ». Il évoque la « fâcheuse impression produite » par l’incarcération d’Alsaciens. Dans ce même télégramme, l’Intérieur parle de ces prisonniers comme « d’Alsaciens évacués pour les soustraire à la mobilisation Allemande, qu’il faut traiter avec bienveillance et qu’il importe de distinguer complètement des Austro-Allemands proprement dits ».

En clair, pour les hautes autorités Françaises, il n’est pas question du tout que ces Alsaciens partent pour un camp de prisonniers en Corse. Le problème, c’est que lorsque le préfet de Marseille s’est rendu compte de sa bévue, le navire voguait déjà en direction de l’île... Impossible donc de faire machine arrière. Il ne reste donc plus qu’à organiser un nouveau voyage retour pour le continent cette fois... Et c’est ce que fait l’État Français, en dépit de l’avis contraire du préfet de Corse qui suggère alors, tout compte fait, de laisser ces Alsaciens à Corbara le temps que durera la guerre. Le préfet Corse dit même « que la douceur de l’hiver est la négation de l’idée de sévérité que laisserait supposer un internement dans l’île ».
Mais l’Intérieur ne veut rien entendre et ordonne au préfet de se rendre personnellement sur place pour organiser le retour de ces Alsaciens. Ce qui sera finalement fait le 19 octobre 1914. Ce jour-là, les 400 Alsaciens de Corbara reprennent à pied la route de l’Île Rousse, puis le train pour Bastia et le vapeur Pelion pour Marseille.

Ce voyage marque la fin de cette rocambolesque affaire qui suscite encore bien des questions aujourd’hui :
Qui sont ces gens ?
Que leur reproche-t-on ?
Comment sont- ils arrivés jusqu’à Marseille ?
Pourquoi a-t-on songé à les expédier en Corse ? 
Où sont-ils allés ensuite ?...
« On ne sait pratiquement rien de cette histoire. Seule la chronologie nous est connue grâce à cet échange de télégrammes entre préfets conservé aux archives d’Ajaccio », explique le maire de Corbara, Paul Lions, également féru d’histoire locale et qui s’étonne d’une chose :
« Jusqu’en 1918, Corbara a servi de colonie pénitentiaire pour des Allemands dont toutes les identités ont été soigneusement répertoriées sur des listes. Curieusement, pour les 400 Alsaciens, cette liste n’existe pas ou n’existe plus. En tous les cas, pas dans les archives en Corse. »
« Il existe une description de ces gens qui n’est pas très élogieuse », complète encore Simon Giuseppi, un historien d’Ajaccio qui a publié, en mai dernier, une étude très fouillée sur le camp d’internement de Corbara :
L’internement en Corse à Corbara de civils Austro -Allemands *. « Ces archives évoquent les Alsaciens comme étant des gens de condition modeste, voire miséreuse. Selon ces documents, une soixantaine d’entre eux sont assez peu recommandables et ont vécu à la frontière de l’Est sans se livrer régulièrement au travail », explique cet historien dans son ouvrage.

Mais là encore, pas de noms et encore moins de photos.
« Il s’agit vraisemblablement d’hommes arrêtés dans les secteurs Alsaciens repris par la France dès le début de la guerre. Mais l’identité de ces personnes reste un mystère », avance le maire de Corbara.
Un mystère que Paul Lions ne désespère pas de percer un jour. « Peut-être qu’un article dans la presse Alsacienne facilitera l’enquête et qu’il existe des familles qui se souviennent de cet événement »,
conclut l’élu... L’appel a été lancé à la fin de l'été par les DNA.
oct 1914 début de l'occupation allemande dans le Nord
www.histoire-en-journal.com/index.php?...id...1914...
Dimanche 4 octobre 1914 : On signale des allemands à Frelinghien vers 2 heures (14 ... Mardi 13 octobre 1914 : A 11 heures, convoi allemand vers Comines.
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