22
NOVEMBRE 2015...
Cette
page concerne l'année 538 du calendrier julien. Ceci est une
évocation ponctuelle de l'année considérée il ne peut s'agir que
d'un survol !
SEVERE :
LE PATRIARCHE D'ANTIOCHE
Sévère
d'Antioche, né à Sozopolis en Pisidie vers 465, et mort à Xoïs en
Égypte le 8 février 538, est patriarche d'Antioche du 18 novembre
512 au 29 septembre 518. C'est un des principaux théologiens
monophysites et un saint de l'Église Syriaque orthodoxe, de l'Église
Copte et de l'Église Arménienne.
Selon
son contemporain et ami Zacharie le Rhéteur, qui lui consacre une
biographie, il est issu d'une famille de rang élevé : Son père
est membre du sénat (βουλή) de la cité de Sozopolis, et il
descend d'un autre Sévère, évêque de la même cité à l'époque
du concile d'Éphèse.
Il
a deux frères plus âgés que lui, et tous trois sont envoyés
étudier à Alexandrie par leur mère devenue veuve. À cette époque,
affirme Zacharie, il n'a pas encore reçu le baptême chrétien car
c'est la coutume, dans sa région natale, de n'être baptisé qu'à
l'âge adulte.
Après
de brillantes études de rhétorique à Alexandrie, il va poursuivre
sa formation à l'école de droit Romain de Beyrouth, ce qui est à
l'époque le parcours typique d'un fils de bonne famille.
La
biographie de Zacharie est une apologie destinée à défendre Sévère
des accusations qui sont portées contre lui par ses adversaires
religieux au moment de son accession au patriarcat d'Antioche en
512 :
On
disait qu'il était païen militant pendant ses années d'études, et
qu'il avait participé à des sacrifices clandestins à Beyrouth...
Zacharie,
qui est son condisciple aussi bien à Alexandrie qu'à Beyrouth,
s'inscrit en faux contre ces accusations et en appelle au témoignage
de nombreux autres étudiants de l'époque encore vivants au moment
de la rédaction de l'ouvrage.
À
l'époque de leurs études communes à Alexandrie, vers 485, les
écoles de la ville sont le théâtre d'affrontements violents, qui
sont restés dans les mémoires, entre les chrétiens et des
professeurs et étudiants fidèles au paganisme.
Au
début surtout intéressé par ses études profanes, Sévère a été
attiré par Zacharie, à Beyrouth, dans une association d'étudiants
chrétiens constituée autour de l'ascète Évagre de Samosate. Il
reçoit finalement le baptême en l'église Saint-Léontios de
Tripoli, Évagre étant son parrain.
À
la fin de ses études, il fait un pèlerinage à Émèse, où on
vénère la tête de Saint Jean-Baptiste, puis à Jérusalem, et
renonçant à s'établir comme avocat dans son pays natal, il revêt
l'habit monastique dans le couvent fondé à Maïouma, le port de
Gaza, par l'évêque monophysite Pierre l'Ibère.
Quelque
temps plus tard, Sévère quitte cet établissement et se retire en
compagnie d'un autre moine nommé Anastase d'Édesse dans le désert
d'Éleuthéropolis, entre Gaza et Jérusalem, pour s'y livrer dans la
solitude à l'ascèse la plus rigoureuse, dont il garde ensuite des
séquelles physiques. Recueilli en piteux état dans le monastère de
l'abbé Romanos, situé dans la même région et réputé pour
l'extrême sévérité de sa règle, il y séjourne un temps, puis
retourne à Maïouma où il vit dans une cellule de solitaire. Quand
il reçoit son héritage, il en consacre une partie à la fondation
dans la même ville d'un monastère dont il devient le supérieur.
C'est à cette époque qu'il est ordonné prêtre par Épiphane,
évêque monophysite de Magydos en Pamphylie, privé de son siège
pour son opposition à l'Hénotique. Il se rattache au courant des
« Acéphales ».
SAINT SEVERE |
À
l'initiative notamment de Néphalios, un moine originaire
d'Alexandrie, Sévère et ses compagnons sont accusés de
monophysisme et chassés de leurs murs.
Sévère
se rend à Constantinople en 508 avec 200 moines pour défendre sa
cause devant l'empereur Anastase. Reçu par celui-ci grâce à de
puissants appuis, il acquiert un grand ascendant sur lui et reste
dans la capitale jusqu'à la fin de l'année 511.
Revenu
en Orient pour assister au concile provincial de Sidon, Sévère est
finalement élevé au patriarcat d'Antioche après la déposition de
Flavien II, soupçonné de nestorianisme, en 512, il est intronisé
le 18 novembre de cette année. Élie Ier, patriarche de Jérusalem,
et d'autres évêques (dont les métropolites de Tyr, de Damas et de
Bostra), refusent de le reconnaître. Cette élection, comme celle de
Timothée Ier au siège de Constantinople, signifie pour beaucoup le
ralliement d'Anastase au monophysisme.
Le
patriarcat de Sévère ne dure que tant que vit Anastase. Celui-ci,
mort le 9 juillet 518, est remplacé par Justin, partisan du concile
de Chalcédoine, et Sévère, menacé d'arrestation par Irénée,
comte de l'Orient, doit quitter Antioche dès le 29 septembre suivant
pour se réfugier à Alexandrie, « place-forte » des
monophysites.
En
535, il retourne à Constantinople à l'invitation de Justinien et
sympathise notamment avec le patriarche Anthime Ier, qui est déposé
pour monophysisme en mars 536, moins d'un an après son
intronisation... Mennas, successeur d'Anthime, réunit un concile qui
condamne Sévère, malgré l'appui que lui accorde toujours
l'impératrice Théodora, qui l'a rencontré dès le temps de son
séjour en Égypte en 521.
Arrêté
malgré le sauf-conduit qu'il a reçu, Sévère peut s'échapper et
retourner en Égypte grâce à l'impératrice.
Il
y finit sa vie hébergé par des sympathisants, n'ayant jamais pu
regagner Antioche, mais il est considéré jusqu'à sa mort comme le
patriarche légitime de cette ville par de nombreux fidèles. Inhumé
dans le village monastique de l'Énaton, son tombeau est bientôt un
lieu de pèlerinage et de culte.
Au
moment de son baptême, il avait fait vœu de renoncer aux bains et
de pratiquer le jeûne et les veilles, et il s'y tient toute sa vie.
Quand il devient patriarche, il fait détruire les bains du palais
patriarcal et renvoyer tous les cuisiniers... À la veille de sa
mort, il refuse le bain dont on lui dit qu'il lui sauvera la vie,
mais accepte finalement de se faire baigner avec tous ses vêtements.
Pendant
son patriarcat, il combat avec constance l'existence de spectacles
comme le théâtre et les courses de chars : L'une de ses
homélies contient une dénonciation au ton très moderne de la
cruauté subie par les chevaux dans les hippodromes.
Il
contribue fortement à l'abandon après 516 des Jeux olympiques
célébrés à Antioche depuis l'an 41 (concours isolympique).
Outre
la biographie déjà citée de Zacharie le Scholastique, une autre
écrite du vivant de Sévère est due à Jean bar Aphthonia,
« supérieur du monastère de Beith-Aphthonia ».
Sévère
s'attache à suivre l'enseignement de Cyrille d'Alexandrie. Sa
doctrine est totalement distincte de celle d'Eutychès, qu'il
condamne explicitement.
Il
affirme que Jésus-Christ a une seule « nature divino-humaine »
(φύσις θεανδρική), nature composée (φύσις
σύνθετος), et il admet la formule έκ δύο φύσεων
(« venant de deux natures »).
Suivant
le rapport de l’évêque Bar-Hebraeus, il expose ainsi sa
doctrine :
« En
Jésus-Christ, il n’y a qu’une nature, la divine et l’humaine,
sans confusion, sans mélange et sans corruption, et qui demeurent ce
qu’elles sont, de même que la nature de l’homme est de deux
natures, de l’âme et du corps, et que le corps est aussi composé
de deux natures, la matière et la forme, sans que l’âme soit
changée au corps et la matière en la forme. »
À
cette nature unique correspond pour lui des « activités (ou
opérations) divino-humaines » (ένέργειαι θεανδρικαί),
sans qu'on puisse distinguer les « activités divines »
et les « activités humaines », comme dans la formulation
des partisans du concile de Chalcédoine. Il attribue aussi au Christ
une seule volonté (monothélisme)...
PONT ROMAIN A ANTIOCHE |
En
518, il retrouve à Alexandrie son ancien allié Julien
d'Halicarnasse et s'oppose à lui sur la question de la
corruptibilité du corps du Christ avant la Résurrection : Les
sévériens admettant cette corruptibilité (comme volontairement
assumée, et non nécessitée par une nature humaine distincte) sont
appelés Φθαρτολάτραι ou Corrupticolae par les
julianistes, inversement, ils accusent ceux-ci, tenants de
l'incorruptibilité du corps du Christ, de verser dans le docétisme
(Άφθαρτοδοκῆται) (Le
docétisme (du grec dokein, paraître) est une hérésie chrétienne
qui désigne généralement un ensemble de courants de pensées du
début du christianisme, relevant du courant christologique sarx pour
lequel le christ se faisant « chair » ne signifie pas
qu'il se fait « homme ». Les théologiens docètes
interprètent littéralement le verset de l’évangile selon Jean où
il est écrit que « la Parole se fait chair »)
.
Sévère est un écrivain abondant et n'écrit qu'en grec.
A
partir de 536, tous ses écrits sont voués au feu, et toute personne
convaincue de les conserver peut avoir la main droite coupée.
Il
en résulte que seuls des fragments subsistent en langue grecque,
mais beaucoup de textes, en revanche, ont été conservés en
traduction syriaque.
Un
travail systématique de traduction de son œuvre en syriaque est
effectué de son vivant, entre 519 et 528, par son disciple Syrien
Paul de Callinicum. Il faut citer d'abord les textes de polémique
doctrinale :
Le
dialogue intitulé Philalêtês (L'Ami de la vérité), composé à
Constantinople en 509-511 et dirigé contre les tenants du concile de
Chalcédoine, la controverse qui s'ensuit avec un certain Jean le
Grammairien de Césarée, qui a composé une réponse (notamment la
Défense de Philalêtês et Contre Jean le Grammairien, rédigé
après 519), la correspondance avec Serge le Grammairien, datant des
années 518-520, dans laquelle Sévère définit précisément et
clairement sa doctrine face à un « monophysite » avec
lequel il est en désaccord, le corpus abondant lié à la polémique
avec les julianistes.
Ensuite
les sermons :
Ceux
qu'il prononce comme patriarche d'Antioche sont connus sous le nom
d'Homélies cathédrales et ont été préservés dans deux
traductions syriaques différentes, celle de Paul de Callinicum et
celle de Jacques d'Édesse, 125 sont publiés dans la collection
Patrologia Orientalis.
Sévère
a également composé des hymnes, préservés dans une traduction
syriaque de Paul d'Édesse (début du VIIe siècle) révisée
par Jacques d'Édesse. L'ensemble de sa correspondance comprend près
de 3 800 lettres, il en reste de très nombreux fragments,
et plusieurs lettres entières inédites.
Sévère
est peut-être l'auteur de la Théosophie de Tübingen, un recueil
d'oracles en grec.
Les
après conciles ne sont pas toujours de tout repos. C'est
particulièrement le cas pour les générations qui suivent le
concile de Chalcédoine (451). Entre ceux qui sont plus conciliaires
que le concile et les opposants plus ou moins rigides, les tentatives
d’unions sont là pour révéler combien les questions théologiques
se mêlent aux positions politiques et aux caractères, souvent bien
trempés, des acteurs du champ religieux.
Le
patriarcat de Sévère à Antioche est court (512-518), mais
l’histoire nous a laissé une riche documentation qui permet,
lorsqu’elle est analysée avec rigueur et finesse, comme le fait la
monographie de F. Alpi de présenter, un vaste panorama, non
seulement de la vie et de l’œuvre de cet évêque d’exception,
mais de toute l’histoire institutionnelle du monde chrétien
environnant.
Après
cette présentation détaillée de la vie de Sévère, F. Alpi
exploite le riche dossier de sources et de documents (réunis dans le
second volume) pour analyser en détail le fonctionnement de cette
« communion sévérienne » que le patriarche d’Antioche
a construite entre 512 et 518. Les conflits théologiques conduisent
souvent à ce que les protagonistes soient amenés à préciser leurs
droits et leurs pouvoirs respectifs. Sévère montre un grand souci
de rigueur institutionnelle et disciplinaire, il aura à cœur de
développer une communion des évêques d’Orient autour de lui,
marquée par la réunion de synode et par un essai d’unification.
FALAISES PRES D'ANTIOCHE |
Une
analyse fine des Regestes du patriarcat et de la correspondance
autour de Sévère permet à F. Alpi d’exposer tout ce qui
concerne le patriarche (son élection, son investiture, ses pouvoirs
et ses domaines de juridiction) et le fonctionnement du patriarcat :
La chancellerie, le synode semestriel, l’organisation des provinces
ecclésiastiques… Les événements d’avril-septembre 518
permettent aussi de comprendre le fonctionnement subtil de la
déposition du patriarche où se mêlent l’utilisation de la foule,
les dénonciations du clergé local, le pouvoir politique et
épiscopal. Cette première partie se termine par un inventaire
complet de toutes les fonctions repérables dans l’administration
et le gouvernement du patriarcat, de la résidence patriarcale avec
ses dignitaires (syncelle, archidiacre, économe, sénodochos,
paramonaires qui gardent les différents sanctuaires, courriers,
chargés de missions extraordinaire, apocrisiaires délégués et
représentants de Sévère), à toute l’organisation de la
chancellerie, des archives, des bibliothèques ainsi que les notaires
et à tous les employés aux documents et copies. On comprend que
tout ce personnel demande un fonctionnement financier extrêmement
lourd et que le thème de la détresse ou de la banqueroute de
l’Église d’Antioche soit une question récurrente : Faut-il
alors accuser Sévère d’avoir accumulé ces dettes ou
remontent-elles à ses prédécesseurs ? (voilà
une question qui reste d'actualité seules les instances en sont
changées)
Ses
adversaires utiliseront cet argument lors de sa déposition en 518,
accusant Sévère d’avoir « ruiné les biens et les bâtiments
de l’Église »... Le monde des clercs et des moines s’est
particulièrement développé en ce début du VIe siècle.
Une vingtaine de pages (89-115), terminée par un tableau
récapitulatif, présente tout ce que l’on peut alors savoir du
patriarche, du métropolite, de l’évêque et du chorévêque, des
presbytres, archidiacres, diacres, sous-diacre, lecteurs,
diaconesses, archimandrites, moines et simples clercs, de leurs
positions sociales, leurs engagements théologiques, leur répartition
géographique. (c'est un peu comme notre
administration moderne)
Tout
historien et ecclésiologue doit tenir compte de ce dossier lorsqu’il
veut comprendre le développement des structures ecclésiales...
Mais, en Orient surtout, il est impossible de séparer le
fonctionnement institutionnel des églises de celui des pouvoirs
civils et politiques.
« Le
patriarche (comme le note très justement F. Alpi p. 117)
entretient avec (l’empereur) une relation institutionnelle, comme
l’un de ses grands fonctionnaires ».
D’où
l’importance de connaître au plus près tous les rouages des
relations avec l’Empereur, législateur religieux suprême :
C'est toujours lui qui convoque et contrôle les assemblées
épiscopales, qui arbitre les conflits ecclésiastiques. Il n’est
pas sans intérêt de connaître le rôle et la puissance de chacun
des fonctionnaires qui font appliquer cette étroite imbrication du
politique et du religieux, du maître des offices à tous les
dignitaires attachés au palais impérial jusqu’aux gouverneurs de
provinces, l’armée, les autorités municipales et les notables
locaux. De la même manière que pour le clergé et les moines, ce
chapitre se termine par des tableaux récapitulatifs particulièrement
utiles et pédagogiques.
La
seconde partie de cet excellent ouvrage concentre l’attention sur
la ville d’Antioche et le rôle qu’y a joué son évêque
entre novembre 512 et septembre 518. Il s’agit là d’un
véritable travail de sociologie pastorale, facilité par une
abondante documentation : 125 Homélies cathédrales (dont un
tableau récapitulatif situe la date, le lieu précis, le titre, le
contenu dans un classement particulièrement précieux, p. 187-194
et une abondante correspondance.
On
y découvre un évêque soucieux de gérer le temps et l’espace, le
temps par l’organisation d’un calendrier liturgique qui scande
les mois et les jours du peuple d’Antioche. Centré sur les fêtes
christologiques, Sévère sait inviter ses fidèles à l’ouverture,
à la diversité liturgique et à la participation par le chant.
C’est l’occasion de découvrir toute une topographie religieuse,
tout l’espace religieux que l’évêque s’est approprié, qu’il
sait habiter et éventuellement remodeler. F.Alpi en quelques pages
(p. 149-155) présente une synthèse fort utile de ce que nous
apprennent les sources littéraires croisées à une documentation
archéologique abondante (regroupés en fin de volume – p. 305-322
– dans un dossier de planches géographiques et d’illustration
archéologiques et iconographiques). On y découvre un évêque
« faiseur de temps et d’espace » (p. 157), soucieux de
faire fonctionner dans sa ville, un modèle de cité idéale, où le
souci des pauvres ne doit pas être oublié.
En
un bon siècle, l’institution épiscopale a pris le pas sur les
institutions municipales, l’évêque sur les notables des cités.
Mais
les réalités sociales montrent que cette transformation a ses
limites et les nombreux reproches entendus dans les homélies
cathédrales nous apprennent qu’il y a toujours une distance entre
l’idéal prôné et la réalité vécue dans une cité qui se veut
chrétienne.
Sévère
se donne comme tâche de favoriser le passage à cet idéal chrétien
pour les fidèles de son Église, mais aussi pour toute la région du
diocèse d’Orient dont il a juridiction et sur laquelle il entend
affirmer son autorité.
Cette
unification se fera par la lutte contre les restes de paganisme,
particulièrement chez les nomades arabes, mais surtout par sa
tentative d’union dogmatique autour d’une lecture
anti-chalcédonienne de l’Hénotique. Sévère nomme cette démarche
« la route royale » (d’où le titre un peu énigmatique
de l’ouvrage de F. Alpi, expliqué p. 200).
Cette
démarche consiste à trouver une voie moyenne entre ce qu’il
considère comme l’erreur diphysite de Chalcédoine et l’hérésie
eutychianiste (monophysisme).
RUINES D'ANTIOCHE |
Cette
voie royale constitue pour lui le juste milieu représenté par la
pensée de Cyrille d’Alexandrie. Toute sa politique théologique
consiste, durant ses six années de pontificat, à mettre en place,
par des documents synodaux, des conventions d’adhésions, des
formulaires de rétractation ou des professions d’orthodoxies, des
réseaux d’évêques, d’institutions monastiques, de relations
avec des hommes de pouvoirs et d’influence autour de cette
communion orientale. Dans tous ces débats, on perçoit une passion
pour la précision théologique : Il ne faut pas se fier au rang
hiérarchique des personnes, mais à leur degré de précision
théologique « car l’Église est une collectivité d’hommes
pieux, rassemblés en communion par une juste croyance » (p.
201).
On
comprend facilement que cette politique ecclésiale menée de main de
maître ne trouve pas que des amis. La dernière partie de l’ouvrage
présente les oppositions et les dissidences, les révoltes plus ou
moins ouvertes qui conduiront, lorsque les appuis impériaux
disparaîtront avec l’arrivée d’un nouvel empereur, à la chute
et à l’exil de ce patriarche d’Antioche si entreprenant.
Les
opposants sont d’abord et surtout des chrétiens considérés comme
doctrinalement déviants, des adversaires christologiques, mais
Sévère ne peut s’empêcher, pour mieux les détruire, de les
traiter parfois de juifs ou de manichéens.
C’est
l’occasion pour F. Alpi de brosser un tableau de l’état de
l’anti-judaïsme à Antioche et de la présence manichéenne en
Orient. Mais ce sont les partisans du concile de Chalcédoine qui
sont les plus grands adversaires de la communion que Sévère a tenté
de réaliser durant les années 512-518 autour du siège d’Antioche.
On saura gré à F. Alpi de faire entrer le lecteur dans les
méandres de cette géopolitique christologique.
Bien
connu des historiens du dogme chrétien, Sévère d’Antioche est au
début du VIe siècle le principal opposant à la réception du
concile de Chalcédoine (451) dans le diocèse d’Orient. Moine en
Palestine, il anime d’abord la résistance christologique des
monastères acéphales du secteur de Gaza ( 500-508), puis se rend à
Constantinople pour défendre leurs intérêts auprès de l’empereur
Anastase (508-511). Placé par ce dernier sur le trône patriarcal
Antiochien, il oriente alors la politique religieuse du monarque dans
le sens d’une hostilité ouverte au dogme de la double nature du
Verbe incarné (512 518).
Contraint
de s’exiler en Égypte à l’avènement de Justin Ier (518), il ne
cesse jusqu’à sa mort (538) de résister à toutes les mesures
d’intimidation du nouveau pouvoir Chalcédonien, et même de
s’opposer aux tentatives de conciliation envisagées un temps par
Justinien (532-536). L’Église Syrienne jacobite, qui se constitue
dans la seconde moitié du siècle, ainsi que l’Église Copte
d’Égypte, réunies l’une et l’autre en communion de foi
anti-Chalcédonienne, vont se réclamer de sa mémoire, mais cette
postérité schismatique, par rapport à l’orthodoxie officielle,
ne doit pas dissimuler que Sévère, quant à lui, situe son action
dans le cadre strict de la chrétienté d’Empire, qu’il a
seulement voulu rallier à sa propre théologie. Il a continué
d’ailleurs, après 518, à revendiquer la dignité et les
prérogatives patriarcales, surveillant à distance la discipline des
clercs orientaux qui lui restent fidèles. La vaste correspondance
qu’il entretient au cours de sa carrière, initialement répartie
en lettres antérieures à son patriarcat, contemporaines de celui-ci
ou postérieures à sa déposition, documente ainsi le fonctionnement
de l’Église impériale dans le ressort d’Antioche.
Elle
doit certes à la dissidence jacobite d’avoir survécu en Syriaque,
avec le reste de l’œuvre Sévérienne, homilétique et polémique,
tandis que la censure orthodoxe fait disparaître la plupart des
originaux grecs, mais cette circonstance a pu détourner les
historiens d’exploiter pleinement les lettres de Sévère comme une
source importante sur le droit ecclésiastique proto-Byzantin. Il
convient encore de prendre en compte l’ensemble des documents dont
nous disposons aujourd’hui. Faire le point sur l’état du corpus
épistolaire Sévérien et sur sa tradition conduit à dégager
quelques éléments neufs qui importent à l’histoire
institutionnelle et disciplinaire de l’Église Antiochienne. Après
la condamnation définitive des positions de Sévère par un synode
de Constantinople, le 4 juin 536, confirmée par Justinien le 6 août
suivant, les œuvres du patriarche sont vouées à disparaître,
interdites à la détention comme à la copie, sous peine
d’amputation de la main pour les scribes et les calligraphes qui
s’y seraient risqués...
Selon la tradition, confirmée par Eusèbe(1), l'Église d'Antioche aurait été fondée par saint Pierre, en 37, et Evodius lui succédra en 67. Les Actes ne font état que d'un voyage de Pierre à Antioche en 49 mais attestent de l'ancienneté de la communauté chrétienne d'Antioche et c'est là que, pour la première fois, les fidèles du Christ furent appelés « Chrétiens ».
Antioche,
fondée en ~300 par Seleucus Ier Nicator, sur la rive gauche de
l'Oronte et au pied du mont Silpius, fut très vite une métropole
hellénistique, riche, commerçante et cultivée. C'était la
troisième ville de l'Empire, après Rome et Alexandrie. Au IVème
siècle, elle comptait trois cent mille habitants libres et environ
deux cent mille esclaves. Sa population était très hétérogène :
on y trouvait des Juifs, des Arabes et des Grecs.
L'Église
d'Antioche, reconnue comme l'un des trois patriarcats majeurs par le
Concile de Nicée, a donné à la Chrétienté plusieurs de ses plus
grands saints. Pour n'en citer que trois, il faut retenir :
De
nos jours, Antioche ne compte pas moins de 5 patriarcats ! Il s'agit
:
COLONNE DE JUSTINIEN |
Du
patriarcat Maronite, intégré à l'Église Romaine depuis le XIIIe
siècle et qui compte près de 2 millions de fidèles, surtout au
Liban.
Du patriarcat Grec-orthodoxe, ou « Melkite », qui compte près d'un million de fidèles et qui reconnaît la « primauté d'honneur » du patriarche œcuménique de Constantinople.
Du patriarcat Grec-catholique, détaché du précédent pour s'intégrer à l'Église Romaine et qui compte plus d'un million de fidèles.
Le patriarcat Syrien-catholique, qui s'est séparé de l'Orthodoxie au XVIIe siècle pour se rattacher à Rome et qui compte moins de cent mille fidèles,
Le patriarcat Syrien Orthodoxe, véritable héritier du siège d'Antioche, qui a reçu, à la fin du XVIIe siècle, le ralliement d'une très importante communauté Indienne, sans doute issue de l'Église nestorienne, ce patriarcat compte environ 300 000 fidèles au Moyen-Orient et plus de 2 millions en Inde.
Du patriarcat Grec-orthodoxe, ou « Melkite », qui compte près d'un million de fidèles et qui reconnaît la « primauté d'honneur » du patriarche œcuménique de Constantinople.
Du patriarcat Grec-catholique, détaché du précédent pour s'intégrer à l'Église Romaine et qui compte plus d'un million de fidèles.
Le patriarcat Syrien-catholique, qui s'est séparé de l'Orthodoxie au XVIIe siècle pour se rattacher à Rome et qui compte moins de cent mille fidèles,
Le patriarcat Syrien Orthodoxe, véritable héritier du siège d'Antioche, qui a reçu, à la fin du XVIIe siècle, le ralliement d'une très importante communauté Indienne, sans doute issue de l'Église nestorienne, ce patriarcat compte environ 300 000 fidèles au Moyen-Orient et plus de 2 millions en Inde.
Le
patriarcat Syrien Orthodoxe a compté, depuis Saint Pierre, une
lignée de 122 patriarches, l'actuel, Ignatius Zakka I Iwas, ayant
été intronisé en 1980.
Sévère
d'Antioche — Wikipédia
https://fr.wikipedia.org/wiki/Sévère_d'Antioche
Sévère
d'Antioche, né à Sozopolis en Pisidie vers 465, et mort à Xoïs en
Égypte le 8 février 538 , fut patriarche d'Antioche du 18 novembre
512 au 29 ... 512 : on disait qu'il avait été un païen militant
pendant ses années d'études, et qu'il avait …
Hello!
- Institut de theologie orthodoxe
mgr.uriel.g.free.fr/origines.php
Pendant
onze années, avant d'être appelé au patriarcat de Constantinople
en ... saint Sévère d'Antioche, qui fut patriarche d'Antioche entre
512 et 538 et qui ...
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