dimanche 4 janvier 2015

EN REMONTANT LE TEMPS... 879

20 DECEMBRE 2014...

Cette page concerne l'année 879 du calendrier julien. Ceci est une évocation ponctuelle de l'année considérée il ne peut s'agir que d'un survol !

OPPOSITION ACHARNEE D'UN MULADIS ESPAGNOL...

RUINE DE BOBASTRO
Exil et retour
La légende dit que le jeune Omar est querelleur, et dans une lutte il tue un voisin, il doit s'enfuir et se réfugie dans les montagnes inaccessibles du Haut Guadalhorce (défilé des Gaitanes), dans les ruines d'un vieux château qui sera le Bobastro (Bubaštrū en arabe) inexpugnable.

Avec d'autres fugitifs il commence à rapiner dans les sierras de Rayya et de Takoronna jusqu'à ce qu'il soit capturé par le wali (gouverneur) de Malaga, qui ignorant le meurtre qu’il a commis à Ronda, lui inflige une simple amende... Omar décide de s’exiler en Afrique du nord afin de fuir la justice, il travaille comme tailleur de pierre, encouragé par d'autre muladi (chrétien converti à l'islam) qui lui prédit qu'il va être roi d'un grand royaume, il décide de revenir vers l’an 879, en profitant du chaos interne croissant d'al-Andalus.

Avec l'appui de son oncle Mohadir il réunit ses alliés et des mécontents avec lesquels il restaure les ruines du château de Bobastro et commence à harceler le secteur.
Cela inquiète l'émir de Cordoue, Muhammad Ier, qui envoie un fort contingent. Omar négocie et entre au service de l'émir avec ses hommes en 883. Avec l'armée omeyyade il prend part au siège d’Alava, après une rébellion du wali local.

Mais le muladí qu’il est, et non l’arabe, font qu’après une période de 2 ans il abandonne Cordoue, et retourne à Bobastro, en accueillant des centaines de partisans mozarabes, muladís et aussi quelques Berbères unis contre l'aristocratie d'origine arabe qui les domine.
Il s’empare rapidement d'Auta (avec Riogordo), Mijas, Comares et Archidona.

En 886, il pactise avec d'autres rebelles, les Banu Rifá qui dominent Alhama et sa montagne et doit faire face aux troupes de l’émir, commandé par le prince héritier Al-Mundhir.
Alors qu'il est sur le point d'être mis en échec, l'émir Muhammad Ier meurt le 4 août 886 et al-Mundir doit retourner à Cordoue pour prendre en charge l’émirat.

Pendant cette pause Omar, en profite pour réorganiser ses troupes, en recrutant des campagnards, prend le contrôle absolu des sierras de Takoronna (montagne de Ronda) et de Rayya (Málaga-Axarquía), s’empare d'Iznájar et de Priego, et fait des incursions vers Cabra et Jaén

L'émir Al-Mundhir (886-888) envoie 3 généraux pour le soumettre, il ne peut récupérer qu'Iznájar.

Au début de l'année 888, l'émir lui-même doit prendre le commandement de ses troupes, assiège Archidona, les muladis se rendent, après qu'il ait exécuté les défenseurs mozarabes, dont le chef est crucifié entre un chien et un porc.

Le même fait se produit à Priego, qui est aussi reprise. Après ces victoires, Al-Mundir continue le harcèlement de Bobastro. Omar négocie à nouveau avec l’émir et se rend en échange de l'amnistie.

Omar rompt la trêve quand l'émir se retire, ce qui provoque l’ire d'Al-Mundir qui promet de ne pas lever le siège tant que le rebelle ne se rendra pas. L'émir malade, doit faire appel à son frère 'Abd Allāh ibn Muhammad. Lorsque celui-ci arrive le 29 juin 888, il le trouve déjà mort.

'Abd Allāh ibn Muhammad essaye de dissimuler le décès de son frère pendant 3 jours, mais Bobastro ne se rendant pas, il l’annonce aux troupes, qui retournent à Cordoue en cortège funèbre... Omar attaque ce cortège. Le nouvel émir 'Abd Allāh lui demande de respecter le défunt, ce qu'Omar accepte.

Sous l’émirat d'Abd Allāh les rébellions internes en Al-Andalus s’intensifient. Omar en profite pour signer des alliances avec d'autres rebelles muladís, comme Ibn Mastana dans les montagnes de Cordoue, et Ibn al Saliya à Jaén, des berbères comme les Banu Jalí de Cañete et aussi des Arabes comme les Banu Hayyay de Séville.

Cette alliance est une menace mortelle pour l’émirat, bien ce ne soit pas un « royaume uni » sous le seul commandement d'Omar comme quelques historiens l’affirment, ni une révolte exclusive de muladis contre les Arabes comme le démontre la composition ethnique de l'alliance.

Omar prend Estepa, Osuna et Ecija en 889, conquiert Baena en massacrant ses défenseurs, Priego et le reste de la Bétique se rendent sans combattre, ses troupes font des incursions près de la capitale, Cordoue.
Le vaste État que contrôle Omar établit des impôts, et cherche une légitimité en envoyant des émissaires en 891 aux Aghlabides de Tunis, les informant qu'il reconnaît le califat de Bagdad.

De même en 910 aux Fatimides, lorsque ces derniers prendront la succession des Aghlabides, sans informer la population qu’ils sont chiites. De fait, depuis les mosquées contrôlées par Omar on lance des proclamations chiites bien que la population suivent la doctrine sunnite.
En même temps il installe un évêque chrétien à Bobastro, construit une église, et se convertit au christianisme en 899, ayant pris comme prénom Samuel... Il essaye aussi de faire reconnaître son État par le roi d'Asturies Alphonse III le Grand (866-910).
Pendant ce temps, l'émir 'Abd Allāh ibn Muhammad ayant remporté le 16 mai 891 à Poley une importante victoire, avec 14 000 hommes, sur les 30 000 d'Omar qui marchent sur Cordoue, récupère Ecija et d'autres places fortes proches du Guadalquivir.

Le nouveau siècle voit le début du déclin, aggravée par sa conversion contestée, Séville et Carmona dominées par l’Arabe Ibrahim ibn Hayyay rompent l’alliance. La nouvelle défaite d'Omar à Estepa permet à l'émir de reconquérir Jaén en 903.
Les Berbères Banu Jali l'abandonnent et se soumettent à l’émir. Bobastro et tout son royaume sont attaqués par les armées ennemies et perd Martos en 906.

Le décès de l'émir 'Abd Allāh ibn Muhammad et l'arrivée au trône de son petit-fils 'Abd al-Rahmān III al-Nāsir, aggravent encore plus la situation.
Le jeune omeyyade veut pacifier son émirat, il organise une grande armée avec laquelle il conquiert de nouveau Ecija, puis marche sur la sierra d'Elvira, prenant Baza et Salobreña en évitant l'attaque directe contre Bobastro. Pendant cette première expédition 'Abd al-Rahmān III récupère 70 places fortes et 300 « husún » ou forteresses mineures.

En 914, nouvelles attaques d 'Abd al-Rahmān III, par la sierra de Takoronna il vainc Omar à Ojén, et suit par la côte vers Algésiras, puis il se dirige vers Séville qui se soumet.
Carmona sous les Banu Hayyay est assiégée et tombe en 917.
La perte de Baeza en 916 et ses défaites devant Jaén et Antequera, oblige Omar à attaquer l’émir, le voyant perdu, son fils Chafar (aussi chrétien), ne lui n'obéit plus et pour démontrer sa franchise et son obéissance au califat, Omar attaque son propre fils, qui a repris la place forte de Ubeda en 917, il tombe toutefois malade et avant de mourir en septembre de cette même année se convertit au christianisme.

Son état passe à son fils aîné Chafar, après avoir perdu plusieurs places en 919, il est assassiné en octobre 920.

Lui succède son frère Sulayman qui récupère brièvement Ojén, perd Jete y Almuñécar en 921, il est capturé lors d’un combat en 927 et décapité, comme son frère Abd al-Rahmán.
Son autre frère Hafs est aussi prisonnier. Après avoir perdu Malaga, Bobastro la place mythique se rend le 19 janvier 928.
Après avoir pris Bobastro, Abd al-Rahmán III ordonne d’exhumer les cadavres d'Omar et de son fils Chafar, pour les exposer au public de Cordoue.
Puis il se dirige jusqu’à Malaga en démolissant les châteaux inutiles, et exile les partisans mozarabes de Hafs, dernier fils de Omar.
Avec cette victoire définitive, il atteint un grand prestige qui l’encourage à se proclamer calife en 929.

Selon Manuel Acién Almansa, Omar ben Hafsún n'est pas le rebelle glorieux comme l’ont affirmé les historiens du XIXe siècle.
Non plus le « chef de toute la race Espagnole méridionale » comme l’a appelé l’historien Néerlandais Reinhart Dozy, ni « le caudillo de la nationalité Espagnole opprimée » de Simonet dans son expression maximale du nationalisme conservateur Espagnol du franquisme, théorie qu’a aussi partagé Sanchez Albornoz en écrivant « la race Hispanique a été illuminé par un grand capitaine populaire (...) que les Espagnols, chrétiens ou musulmans ont aimé avec passion ».

Évariste Lévi-Provençal souligne la déprédation et le manque d'éthique d'Omar ben Hafsún, alors que Pierre Guichard voit dans la rébellion la survivance d'une société feudataire occidentale face à l'Orient Andalou. Les versions nationalistes Andalouses voient dans cette révolte « l'indépendance et l'autonomie Andalouse face au pouvoir central » et Omar comme « un pur Andalou » (Domínguez Ortiz).
'Umar ibn Ḥafṣū n
Le plus grand ennemi de'Abd al-Rahman a été un rebelle crypto-chrétien,'Umar ibn Hafsun, seigneur de Bobastro. La stratégie de'Abd al-Rahman est un harcèlement continu des forts d'Ibn Hafsun. Commençant par la campagne de Monteleón,'Abd al-Rahman capture 70 forts dans les provinces de Elvira, ...

Les troupes d'Ibn Hafsun deviennent de plus en plus conscientes de leur pouvoir, ils ont augmenté la révolte dans le nord de la péninsule, dirigé par le puissant clan Banu Qasi, et dans le sud (879), dirigé par'Umar ibn Hafsun bien protégé dans Bobastro et dans les montagnes de Malaga.

Umar ibn Hafsun ibn Ja'far ibn Salim, connu dans l'histoire Espagnole comme Omar ben Hafsun, est un leader chrétien IXe siècle des forces anti Ummayad dans le sud de la péninsule Ibérique.

Son contemporain, le poète Ibn Abd Rabbih fait de lui un Sawada, un descendant des Africains noirs. Un texte d'Ibn Hayyan un siècle plus tard trace pour Umar ibn Hafsan, son ascendance à un arrière grand-père, Ja'far ibn Salim, converti à l'Islam, installés dans la région de Ronda de la province de Malaga dans le sud de l'Espagne. Mais il aurait également pour ascendance le comte de Marcellus, fils d'Alphonse, apparemment un Wisigoth chrétien.
« Ils aiment l'orthodoxie, disent-ils, mais ils se plaignent que ses jeûnes soient trop longs.
Ils aiment l'orthodoxie, mais les offices sont trop longs.
Les barbes sont trop longues aussi, et les soutanes sont de trop.
De plus, l'orthodoxie a trop de vigiles, trop de prosternations, trop d'épitimies, trop de saints canons dans le Pedalion…
Et enfin, elle a trop d'anathèmes, contre trop d'hérésies. »
Photios Kontoglou
Ce que les Ottomans et les communistes n'ont pas réussi à faire, méfions-nous, les relativistes avec leur dogmatisme « branché » (car s'ils n'aiment ni les canons (sauf pour condamner ceux qui leur déplaisent), ni les dogmes, ils exigent l'œcuménolatrie) préparent les nouvelles apostasies et les nouvelles « églises vivantes. » Et c'est parce que nous les aimons aussi, que nous avons le devoir d'Amour de leur dire qu'ils se trompent et trompent les brebis du Christ.

Vitam impendere vero… « Donner sa vie à la Vérité », car la Vérité, c'est le Christ Qui est Amour!

C. L.-G.

La vie rêvée des Chrétiens au paradis perdu Andalou
On ne répétera jamais assez à quel point cette société idéale de l'Andalousie médiévale dont on nous rebat tant les oreilles, où auraient déjà régné les Lumières avant l'heure et une si enviable tolérance universelle, donc un prétendu modèle pour nos sociétés contemporaines, n'est qu'un mythe d'autant plus dangereux qu'il est constamment relayé sous forme de matraquage par toutes sortes d'instances politiques, religieuses et médiatiques au point que c'est devenu une sorte de dogme indubitable.
Il faut faire savoir que la vie des dhimmi, chrétiens et juifs, était majoritairement pour le moins difficile si bien qu'il s'en est suivi une résistance  réelle dont on ne parle jamais, comme si le peuple avait subi avec délices cet asservissement.
Il est plus que temps aujourd'hui, quand des groupes djihadistes du Maghreb comme du Moyen-Orient prêchent la reconquête de ce qu'ils considèrent comme leur appartenant de droit, de connaître la réalité des faits et de ce que nous promettent ces fanatiques nostalgiques de leur pouvoir totalitaire oppressif passé, et qu'ils cherchent, déjà sur place,  en Europe, à imposer...

 Le drame des chrétiens Mozarabes
« Dès la conquête, Juifs et Chrétiens ont été soumis à la dhimma, un impôt spécial assorti de mesures vexatoires et de brutalités ce qui entretient les ferments de résistance.

 En réalité, les libertés dont peuvent jouir les Chrétiens demeurent très limitées. Les dhimmi doivent respecter très scrupuleusement le pacte conclu avec les vainqueurs. 

Si l'un d'entre eux ne s'acquitte pas du tribut, il peut être réduit en esclavage ou puni de mort. Le pouvoir musulman peut décréter en ce domaine la responsabilité collective de ses sujets chrétiens et supprimer les privilèges accordés à toute la communauté en cas de défaillance de l'un de ses membres.
Les Chrétiens doivent également se garder de toute action pouvant être interprétée comme une provocation par les Musulmans.
Ils doivent dissimuler les croix, faire en sorte que, dans les campagnes, les Musulmans ne puissent voir les porcs qu'ils élèvent, car cela est considéré comme une injure faite au Prophète.
Quand des troubles éclatent, les communautés chrétiennes en font souvent les frais, comme c'est le cas lors de la révolte de la garnison arabe de Séville en 891. 

La sécurité des musta'rib (ceux « qui vivent comme les Arabes ») est ainsi, parfois, un vain mot.
Les dhimmi se voient interdire le port d'une arme, ils ne peuvent monter à cheval et doivent se contenter de mulets ou d'ânes sous peine du fouet et de la prison.
Diverses obligations vestimentaires doivent permettre de distinguer les Croyants des « protégés ».
Ceux-ci doivent s'effacer quand ils croisent dans la rue un fidèle de Mahomet. Leurs maisons doivent être moins hautes que celles de leurs voisins musulmans, ils doivent l'hospitalité à tout Croyant qui la demande et le paiement de la capitation les contraint à se prêter à des rituels humiliants, les dhimmi devant se prosterner devant le percepteur, qui leur assène parfois un soufflet avant de les repousser violemment.

Les Chrétiens ont conservé la plupart de leurs églises, mais il leur est interdit d'en construire de nouvelles.
Le son des cloches est tout juste toléré, à condition d'être le plus discret possible.
Les cortèges de funérailles doivent être silencieux, les croix sont confinées à l'intérieur des églises et des maisons privées.
Les processions et les cierges sont interdits quant aux cimetières des fidèles des diverses religions, ils doivent être rigoureusement séparés.
Tout Musulman abjurant sa religion pour se convertir à celle du Christ est condamné à mort. La même peine est appliquée à tout Chrétien mettant en cause les croyances transmises par le Coran et la Sunna.

Les discriminations judiciaires font que, pour un crime identique, musulmans et dhimmi encourent des peines différentes et les indemnités dues aux familles varient du simple au double, voire au triple, selon la confession de la victime et du coupable.  
Les autorités musulmanes respectent généralement les conditions fixées lors de la conclusion du pacte de soumission des dhimmi car elles ont intérêt à ménager une population procurant une ressource fiscale précieuse mais, à l'inverse, le peuple des « vrais Croyants », soumis à l'influence des prédicateurs malékites locaux, se montre beaucoup plus hostile, et les muwalladun, les nouveaux convertis, sont parfois les plus intransigeants vis-à-vis de leurs anciens coreligionnaires.
Les discriminations et vexations subies quotidiennement vont contribuer au développement d'une volonté de résistance. 
Celle-ci est d'abord spirituelle et s'exprime à travers le recours au martyre. Le moine Perfectus, qui a dénoncé Mahomet comme un imposteur, est ainsi exécuté mais la mort rapide de celui contre qui il a lancé une malédiction, contribue à entretenir un climat d'exaltation religieuse qui explique, au milieu du IXe  siècle, l'épisode des « martyrs de Cordoue ».
Le mouvement qui pousse alors de nombreux Chrétiens au martyre dure ainsi pendant près d'une dizaine d'années, jusqu’à l'exécution de Saint Euloge, égorgé en 859.

La résistance n'est pas seulement spirituelle et l'histoire d'Al-Andalus est ponctuée de nombreuses révoltes. 
Outre celles des Berbères, de certains clans arabes associés à la conquête ou des muwalladun  fraichement convertis, il faut compter aussi avec celles des Mozarabes.
Tolède se soulève ainsi en 852 et peut bénéficier pendant 3 quarts de siècle d'une large autonomie.
Mérida entre également à plusieurs reprises en rébellion au cours du IXe siècle. La dissidence la mieux connue et la plus importante par son ampleur et sa durée est celle d'Omar ibn Hafsun, qui persiste de 879 à 927.

Le chef rebelle installe une base inexpugnable à Bobastro, véritable nid d'aigle de la Serrania de Rondo et lance à partir de là de multiples raids jusqu'à Séville, Cordoue, Grenade et Jaén, en regroupant sous son autorité muwaladun mécontents et Mozarabes.
Lui-même converti, il se rallie au christianisme en 898 et, après sa mort, son fils poursuit pendant plusieurs années la résistance.
La révolte armée demeure cependant le plus souvent vouée à l'échec et c'est le choix de l'exil que font certains.
Ils partent vers la marche d'Espagne, la future Catalogne, établie par les Carolingiens au début du IXe siècle, ou vers le Nord-Ouest de la péninsule, vers le réduit Asturien où se développe un petit royaume appelé à constituer l'un des premiers noyaux de la reconquête à venir.

En 872, des réfugiés fondent ainsi le monastère de Sahagùn qui sera bientôt l'un des grands centres de rayonnement Ibérique.
Au fil du temps, l'arrivée de ces Mozarabes dans les royaumes chrétiens du nord contribue au développement d'un idéal de lutte contre l'Islam, perçu comme la Bête qui orne les « Commentaires » que le moine Beatus de Liébana fait alors de l'Apocalypse  de Saint-Jean.
Le pouvoir musulman veille également à l'éloignement des populations insoumises et quelques indices laissent supposer l'existence de déportations massives vers l'Afrique du Nord, un procédé généralisé par les Almoravides au cours du XIIe siècle.

Les spécialistes ne sont pas pleinement d'accord à propos de l'évolution respective des communautés chrétienne et musulmane, mais il semble admis que l'équilibre qui s'était maintenu, quant au volume de la population, en faveur des Mozarabes jusqu'au début du Xe siècle se trouve inversé à la fin de celui-ci.
En 1126 cependant, les Mozarabes de Grenade se révoltent contre les nouveaux maîtres almoravides de l'Espagne musulmane et appelleront à leur secours le roi d'Aragon, mais celui-ci ne remporte qu'une victoire sans lendemain et ne peut s'emparer de la ville.
Les rebelles sont alors contraints de se replier avec Alphonse le Batailleur jusqu'à la vallée de l'Èbre où ils vont contribuer au peuplement chrétien d'une région restée très longtemps musulmane et où les Mudejares devenus les Morisques demeurent nombreux jusqu’au début du XVIIe siècle »
(extrait d'un article de Jean Kappel) 

Ibn Ḥafsûn ou la construction d’un bandit populaire
Le bandit dont je veux vous parler, ‘Umar ibn Ḥafṣûn, vécut au IXe siècle, mais naît dans l’œuvre de José Antonio Conde, Historia de la dominación de los Arabes en España publiée en 1820.
Non pas que l’auteur soit un de ces romanciers dont Walter Scott est le modèle, à peu de temps de là, et qui s’autorisent à incarner l’attente de leurs lecteurs dans un héros d’imagination. Tout au contraire, il s’en tient scrupuleusement aux textes, et même, comme pour satisfaire une des plus rudes des exigences de l’histoire positiviste à venir, à des textes neufs.
Conde est en effet de ceux qui traduisent et révèlent au public Européen, par le biais de l’usage qu’il en fait dans la rédaction de son Historia, nombre de chroniques Arabes, Andalouses ou Orientales. Professeur d’arabe à l’Université de Salamanque, Conde a l’ambition d’écrire la première histoire des Arabes en Espagne.

J’entends la première qui a pour objet central l’époque de la présence arabe dans la péninsule, la première aussi, par conséquent, qui ose adopter la vision des vaincus arabes, alors que toute l’historiographie antérieure, même lorsqu’elle mentionne leur rôle, même lorsqu’elle exalte leurs mérites, ne les considère que du point de vue des chrétiens victorieux.

La nouveauté de son entreprise ne lui avait pas échappé. Il le dit dès le prologue (Conde, 1874 : 3) :
C’est semble-t-il une fatalité des choses humaines que les événements les plus importants de la vie des peuples, les mutations des empires, les révolutions et les bouleversements des dynasties les plus fameuses soient destinés à passer à la postérité par les récits suspects qu’en donne le parti vainqueur (…) Voilà pourquoi je me suis consacré à illustrer l’histoire de la domination des Arabes en Espagne en la compilant dans les mémoires et les écrits arabes, de sorte qu’on puisse la lire telle qu’ils l’écrivent eux-mêmes, et qu’on y voie de quelle sorte ils y relatent les événements de cette époque si mémorable.

Cette histoire de la domination des Arabes en Espagne est compilée de divers mémoires et livres arabes choisis, anciens et authentifiés. Je me suis donné pour but de dire ce qu’ils relatent, et je le fais le plus souvent dans leurs propres mots fidèlement traduits. Ainsi, en même temps que l’on verra les hauts faits de cette nation, on pourra s’informer du génie et du style dont ils usent pour en faire eux-mêmes l’histoire (…)
« Dans tout le cours de cette histoire, j’ai employé les dates et les années des Arabes » (Conde, (…)
Et il promet de limiter son texte à une « traduction fidèle et exacte » de sources arabes, et de donner au lecteur la saveur véritable d’un discours musulman que cette histoire sera contée selon le calendrier de l’Hégire. En somme un livre arabe, bien qu’écrit en espagnol (Conde, 1874 : 6-7) :

Notre riche langue doit tant à la langue arabe, non seulement quant au vocabulaire, mais quant à sa syntaxe, à ses phrases et à ses locutions métaphoriques, qu’on peut la considérer sous ce rapport comme un dialecte arabe déformé (aljamiado). .

Cette détermination à écrire « en arabe » rappelle d’abord cette inversion du regard qui porte l’exotisme et la critique sur soi, et dont le XVIIIe siècle est si friand à la suite des Lettres Persanes de Montesquieu. Mais on y retrouve surtout une douloureuse expérience personnelle. Lié aux cercles afrancesados – c’est-à-dire aux admirateurs des idées nouvelles illustrées par les « philosophes » Français

« L’année 898 est la plus importante dans l’histoire de Omar ibn Hafsun. Il y a déjà longtemps que le chef Espagnol était chrétien au fond de son âme, et qu’il y agitait la pensée de restaurer en Espagne la vieille religion, bien qu’il ne s’y soit jusque-là pas résolu pour des raisons politiques, et surtout pour ne pas perdre ses alliés musulmans.
Mais dessillé peut-être sur le fait que cette aide n’était ni sincère ni durable, et connaissant l’importance du facteur religieux, unique et puissant mobile et lien qui puisse unir la race Espagnole divisée, cédant enfin aux impulsions de sa conscience, il embrasse le christianisme avec toute sa famille.
Tout cela dit pour venger la mémoire d’un héros et d’un paladin aussi relevé de la nation Espagnole et chrétienne dans ces moments si hasardeux de son histoire.

C’est vers la fin du siècle qu’il se convertit au christianisme de ses ancêtres. Il meurt insoumis en 917. Ses fils ne rendront la forteresse de Bobastro qu'en 927, et l’événement est directement lié, dans les chroniques omeyyades, à la proclamation du califat, à Cordoue, en 929. C’est sans doute dans la Chronique anonyme du calife al-Nâṣir que ce lien est le plus clairement établi.

En 316/928, celui qui n’est encore qu’émir d’al-Andalus, ‘Abd al-Raḥmân III, se rend à Bobastro dont il vient d’obtenir la capitulation, fait exhumer le corps d’Ibn Ḥafṣûn, mort 10 ans auparavant, et constate qu’il a été enterré selon l’usage chrétien. Puis, il fait rétablir l’invocation de son nom dans la mosquée de Bobastro (Lévi-Provençal-Garcia Gomez, 1950 : éd. 77-78, trad. 151-152) :

Les mosquées désertes se peuplent de nouveau et à l’inverse, on démolit les églises où tous accourraient.
Le bel ornement de ces églises et leur densité dans les domaines du maudit ‘Umar, à côté de l’abandon des mosquées de Bobastro et de la ruine qui y règne, sont les preuves les plus simples de l’apostasie du maudit ‘Umar et les plus éloquentes dans la dénonciation de son infidélité.

Cette année-là, al-Nâṣirli-dîni-llah ordonne qu’on le nomme dans les lettres qu’on lui adresse et qu’on l’invoque dans les chaires sous le titre de « Prince des Croyants » pour ce qu’il est digne de ce nom, qui en réalité n’appartient qu’à lui seul, et qui n’est pour tout autre que plagiat et postiche. Il s’en vêt donc comme d’une tunique adéquate à sa dignité et comme l’héritage … qui lui revenait… (lacune).
Ainsi le califat s’oppose à l’apostasie d’Ibn Ḥafṣûn. À la légitimité des Arabes omeyyades, fidèles à leur religion, l’islam, oppose l’usurpation des convertis, et l’incertitude de leur conversion. Ce qui est vrai pour les muwallad Ibériques, ne l’est pas moins pour les Berbères qui soutiennent les Fatimides et pour les Persans qui entourent les Abbassides. Il n’est d’islam sûr qu’arabe, et donc de califat légitime qu’omeyyade.

Mais de bandit, il n’est toujours pas question. Et pour cause. Dans les chroniques omeyyades, Ibn Ḥafṣûn est l’avatar des convertis Persans qui ont triomphé autrefois en Orient et y ont offert le califat aux Abbassides. Il est donc implicitement l’incarnation Ibérique du califat dominant.
Contre toutes les apparences, qui tromperont Conde, Ibn Ḥafṣûn assume l’ordre impérial, et les califes de Cordoue sa contestation.
La rébellion n’est pas du côté du muwallad, mais plutôt dans le camp des Omeyyades, dissidents de l’empire universel dont Bagdad demeure le centre aux yeux du plus grand nombre en ce Xe siècle.


ʿUmar ibn Ḥafṣūn - Britannica
www.britannica.com/EBchecked/.../Umar-ibn-HafsunTraduire cette page
... of their power, they rose in revolt in the north of the peninsula, led by the powerful Banū Qāsī clan, and in the south (879), led by ʿUmar ibn Ḥafṣūn.

Histoire/chronologie - Tecfa
tecfa.unige.ch/tecfa/teaching/UVLibre/9900/bin08/chrono.htm
879 Soulèvement de Umar ben Hafsun contre l'émirat omeyyade. ... Le roi de Séville Al-Mutamid demande de l'aide aux Almoravides, et une année plus tard il ...
Blogs frères, Amour de l'Orthodoxie dans la Vérité...
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21 janv. 2013 - ... près d'une dizaine d'années, jusqu'à l'exécution de Saint Euloge, ... et sa durée est celle d'Omar ibn Hafsun, qui persiste de 879 à 927.
Ibn Ḥafsûn ou la construction d'un bandit populaire
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de G Martinez-Gros - ‎2011 - ‎Cité 1 fois - ‎Autres articles
Comment Ibn Hafsûn, le plus fameux rebelle de l'époque omeyyade (act. vers ..... L'année 898 est la plus importante dans l'histoire de Omar ibn Hafsun.
Termes manquants : 879







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