mercredi 17 février 2016

EN REMONTANT LE TEMPS... 453

14 FÉVRIER 2016...


Cette page concerne l'année 453 du calendrier julien. Ceci est une évocation ponctuelle de l'année considérée il ne peut s'agir que d'un survol !

MORT BANALE D'UN HÉROS TYRANNIQUE

15 mars :ts) Attila meurt dans son sommeil, étouffé par un saignement de nez, la nuit de ses noces avec la princesse Germaine Ildico... Il prépare une nouvelle action contre l'empire d'Orient...
On l'enterre secrètement et les esclaves qui creusent sa tombe sont égorgés...
Son empire ne lui survit, pas et les différents peuples fédérés par lui se dispersent tandis que les Huns, en partie décimés par la peste, se replient sur la Volga...
Ses nombreux fils entrent en conflit les uns avec les autres...
Ellac, né d’une épouse d’Attila, Arykan, devient le grand-roi des Huns sans difficultés avec l’appui d’Onégèse...
Ses frères Ernac, le cadet et Dengitzic réclament vite leur part de pouvoir... Ellac réussit dans un premier temps à vaincre ses cadets avec l’aide des peuples auxiliaires Germaniques et Iraniens...

L'historiographie d'Attila se heurte à une difficulté majeure : Elle ne dispose que de sources écrites en grec et en latin par les ennemis des Huns.
Priscus est un diplomate et un historien de langue grecque. Plus qu'un témoin, c'est un acteur de l'époque d'Attila. Il est membre de l'ambassade de Théodose II, à la cour du souverain Hunnique en 449. Auteur de 8 livres d'une Histoire couvrant une période allant de 434 à 452 et dont il ne reste aujourd'hui que des fragments.
Jordanès et Procope de Césarée, historiens du VIe siècle, le citent dans leurs œuvres. Bien que Priscus soit évidemment partial de par ses fonctions, son témoignage est une source primaire majeure et il est le seul à avoir donné une description physique d'Attila.

Jordanès est un historien Goth ou Alain de langue latine du VIe siècle, il laisse un ouvrage, Histoire des Goths, qui constitue l'autre grande source concernant l'Empire Hunnique et ses voisins.
Sa vision reflète celle de son peuple et de la postérité d'Attila un siècle après sa mort.
Marcellinus Comes, chancelier de Justinien à la même époque, est une source précieuse concernant les relations des Huns avec l'Empire Romain d'Orient.
De nombreuses sources ecclésiastiques contiennent des informations utiles bien qu'éparses, parfois difficiles à authentifier et déformées par le temps et les moines copistes du VIe siècle au XVIIe siècle.
Les chroniqueurs Hongrois du XIIe siècle, considérant les Huns comme des ancêtres glorieux, reprennent des éléments historiques et les ajoutent à leurs légendes.

La littérature et la transmission du savoir des Huns sont uniquement orales, à travers les épopées et les poèmes chantés qui se transmettent de génération en génération. Très indirectement, cette histoire orale nous est transmise par les littératures nordiques et germaniques des peuples voisins couchées par écrit entre le IXe siècle et le XIIIe siècle. Attila est le personnage central de nombreuses épopées médiévales comme la Chanson des Nibelungen qui est l'une des plus connues, ou encore des Eddas et des sagas.

L'archéologie fournit des détails sur le mode de vie, l'art et les techniques guerrières des Huns, il reste quelques traces de batailles ou de sièges mais aujourd'hui encore la tombe d'Attila et l'emplacement de sa capitale n'ont toujours pas été localisés...

Le nom sous lequel Attila est connu aujourd'hui vient des Germains qui l'ont transmis aux Romains qui l'ont à leur tour transcrit en grec et en latin. Dans sa propre langue, le hunnique, son nom doit être proche phonétiquement mais probablement avec un sens différent.
Attila est un diminutif du gotique ? ￰ミヘト?￰ミフᄚ / atta signifiant « père ».
Pour les Goths, voisins, vassaux ou esclaves des Huns, Attila est donc le « Petit père ».
Ils reproduisent ainsi dans leur propre langue un son qui a une autre signification en hunnique. Celle-ci ne peut faire l'objet que d'hypothèses à partir de racines turques, comme at « cheval » et son dérivé atliğ « cavalier » ou at- « flèche » qui donne le dérivé atliğ « illustre »

La date de naissance d'Attila n'est pas connue, le journaliste et romancier Éric Deschodt et l'écrivain Hermann Schreiber avancent la date de 395 mais l'historien Iaroslav Lebedynsky et l'archéologue Katalin Escher s'accordent pour qualifier cette hypothèse « de pure fantaisie » et préfèrent l'estimer entre la dernière décennie du IVe siècle et la première du Ve siècle. Il est le fils de Moundzouk. Ce dernier est le frère des rois Octar et Ruga, qui ont régné conjointement sur les Huns... La diarchie est récurrente chez ce peuple sans que les historiens sachent si c'est coutumier, institutionnel ou occasionnel.

Sa famille est donc de lignage noble mais les historiens ne savent pas si elle constitue une dynastie royale. Même s'ils sont en voie de sédentarisation depuis leur arrivée en Europe, les Huns forment une société de « pasteurs guerriers » se nourrissant essentiellement de viande et de lait, produits de leurs élevages de bétail et de chevaux.
Attila reçoit donc une éducation de cavalier et d'archer. Comme d'autres enfants de son peuple, sa tête est très tôt enserrée par des bandages de façon à obtenir une déformation volontaire du crâne, pratique esthétique ou spirituelle. Il parle sa langue maternelle, le hunnique, apparenté à une langue turque, mais comme il fait partie de la classe dirigeante, il apprend aussi le langage des Goths.

Il grandit dans un monde en mutation. Après avoir traversé la Volga dans les années 370 et annexé le territoire des Alains, ils s'attaquent aux royaumes Goths jusqu'aux Carpates et aux rives du Danube.
Ils sont très mobiles, leurs archers à cheval ont acquis une réputation d'invincibilité et les peuples Germaniques semblent impuissants face à ces nouvelles tactiques. De vastes mouvements de population perturbent le monde Romain installé à l'ouest et au sud et dont les frontières sont délimitées par le Rhin et le Danube.

Les Huns dominent un vaste territoire aux frontières floues déterminées par l'assujettissement d'une constellation de peuples plus ou moins autonomes. Certains sont assimilés, beaucoup conservent leurs rois, d'autres sont tributaires ou reconnaissent la suzeraineté théorique du roi des Huns mais restent indépendants.
Bien que les Huns soient indirectement la source des problèmes des Romains, les rapports entre les deux empires sont cordiaux : Les seconds utilisent les premiers comme mercenaires contre les Germains et même dans leurs guerres civiles.

En 434, Ruga meurt et ses neveux Bleda et Attila deviennent rois. La succession n'est peut-être pas évidente car des Huns s'enfuient à Constantinople dont 2 membres de la famille royale Mamas et Atakam, peut-être d'autres neveux ou même les fils de Ruga.
L'historien Hongrois contemporain István Bóna estime probable que le père de Bleda et d'Attila, Moundzouk, a régné avant Ruga mais aucune source ne l'atteste.

De 435 à 440, le règne de Bleda est marqué par le triomphe des Huns face à l'Empire Romains d'Orient.
Ce triomphe est avant tout diplomatique... Le traité de Margus, ville située non loin du limes, prévoit un doublement du tribut annuel versé par Constantinople, soit 700 livres d'or contre la promesse de ne plus accueillir d'opposants en exil, ni de chercher à retourner les alliés des Huns contre eux et l'ouverture d'un marché frontalier. Durant cette période, les Huns étendent leur empire jusqu'aux Alpes, au Rhin et à la Vistule.

Pourtant, dès 440, lors de l'invasion de l'Arménie Romaine par les Perses Sassanides, qui détourne momentanément l'attention de Constantinople des Huns, Bleda attaque l'Empire Romain d'Orient. À ce moment, Attila, ayant entamé de son côté des pourparlers avec un représentant de Constantinople, n'aide son frère qu'en dernier recours au moment du siège de Sirmium, en 441. Il ne le fait sans doute que pour éviter d'être lésé sur le partage du butin.
La politique séparée d'Attila, lors de la guerre de 441-442, s'explique peut-être aussi par sa volonté de négocier avec les Romains la remise des princes héritiers Hunniques réfugiés dans l'empire à la mort de Ruga et qui peuvent prétendre à la succession en cas de décès de son frère.

Entre la fin 444 et le début 445, Attila attire Bleda dans un piège et l'assassine, sans que l'on sache de quelle façon, l'événement étant signalé par ses contemporains, mais non commenté. Le roi des Skires, Edecon et le roi des Gépides, Ardaric, participent avec leurs forces auxiliaires à la prise de pouvoir. Attila a aussi à la cour le soutien des partisans de la guerre comme les deux frères Onégèse et Scottas, des Barbares hellénisés de la région du Pont ou encore Elsa, le lieutenant de Ruga et Eskam, grand propriétaire dans les plaines méridionales.
Parmi les ralliés, il y a aussi des Romains, comme le Pannonien Constantiolus et l’affranchi de Mésie, Primus Rusticus, qui se partagent le secrétariat d’Attila. Un certain Berichus, d’origine inconnue, l’oncle d’Attila Aïbars, et Laudarik, certainement roi d’un peuple Germanique allié, sont placés aux plus hauts rangs. Le reste des fidèles de Bleda périt en fuyant, comme un dignitaire qui enterre à Szikánes un trésor de 1 440 pièces d’or provenant sans doute du traité de 443.

Les sources anciennes ne parlent d'Attila que lorsqu'il devient roi, c'est donc seulement à partir de ce moment que l'on peut dresser son portrait :
« Sa taille est courte, sa poitrine large, sa tête très grosse, de petits yeux, la barbe clairsemée, les cheveux grisonnants, le nez aplati, le teint mat, il reproduit ainsi les caractéristiques de son origine. » (Jordanès, Histoire des Goths, XXXV.)
Cette description permet de se faire une image assez précise d'Attila, aucune image de son visage n'ayant été retrouvée. Les représentations, peintures, gravures et monnaies datant du Moyen Âge et de la Renaissance sont fantaisistes.

L'ambassadeur Romain Priscus est surpris de son apparence simple, sans bijoux ni vêtements de luxe, il mange dans de la vaisselle de bois alors que ses invités sont servis dans de la vaisselle d'or.
Cette simplicité est aux antipodes du cérémonial de Rome ou de Constantinople où l'empereur vit dans un luxe ostentatoire et fait l'objet d'une vénération. Cette austérité dans l'apparence est calculée de façon à impressionner ses visiteurs par un effet de contraste.

Attila dispose de nombreuses épouses et utilise les mariages pour nouer des alliances dynastiques et diplomatiques. La plus importante est Êrekan/ Arykan, que Jordanès nomme Kreka, mère d'Ellac, son fils aîné et successeur désigné, et de deux autres fils.
Elle dispose d'une suite nombreuse, son statut particulier lui confère un rôle protocolaire et elle reçoit les ambassadeurs Byzantins. La plus connue est Ildico, la femme auprès de qui Attila meurt lors de sa nuit de noce.
La transcription de ces deux noms étant incertaine, les historiens ne savent pas s'il s'agissait de femmes Huniques ou Germaines.
Les épouses sont relativement libres, disposent d'une indépendance matérielle et de leurs propres résidences.
Attila a eu de nombreux autres fils mais seuls deux sont connus avec certitude, Dengitzic et Ernakh, son préféré d'après Priscus.
Hormidac, un chef Hun qui attaque l'Empire Romain en 466/467, n'est connu que par Sidoine Apollinaire qui le présente comme un fils d'Attila.

Une fois adulte, le fils aîné Ellac participe à la gestion de l'empire aux côtés de son père qui lui confie la charge de la partie Orientale. Lorsque des banquets officiels sont organisés, ses fils participent, Ellac devant « fixer ses yeux sur le sol par respect pour son père ».
Sous le règne d'Attila, l'Empire Hunnique ne connaît pas d'expansion territoriale importante et durable, la nouveauté réside surtout dans la concentration des pouvoirs dans les mains d'un seul homme du fait du meurtre de Bleda et de la disparition de la diarchie...
Les historiens ignorent le titre et la fonction exacte qu'il occupe au sein de son peuple, les Romains le désignent simplement comme « le roi ».

À l'inverse des empereurs Romains et donc à l'étonnement de leurs ambassadeurs, Attila vit au milieu de son peuple et en partage les mœurs. Les Huns sont des éleveurs nomades mais il semble que sous son règne commence une certaine sédentarisation, en particulier avec la construction d'une capitale dont l'emplacement exact est inconnu mais qui est situé entre les rivières Tisza et Timiș.
Elle est constituée de nombreuses maisons de bois dont certaines sont pourvues de thermes à la romaine... Également en bois, le vaste palais royal orné de portiques fastueux impressionne les ambassadeurs Romains.
Attila dispose de plusieurs autres résidences de taille plus modeste, relais de son pouvoir à travers son vaste territoire.

Pour régner sur une confédération de peuples nomades et sédentaires très différents, il ne dispose pas d'une administration organisée, sa puissance repose sur des élites dominant une structure souple de fidélités variées. Le premier cercle dirigeant appartient à une souche princière Hunnique mais nombre de personnages importants sont d'une ethnie différente.
Son bras droit Onégèse est un Hun, son secrétaire Flavius Oreste est un Romain de Pannonie, les peuples soumis ou alliés aux Huns conservent souvent leurs propres rois :
Edecon, roi des Skires,
Ardaric, roi des Gépides,
Candac, roi des Alains,
Valamir, roi des Ostrogoths.
Ces derniers sont engagés dans un rapport de pouvoir personnel avec Attila, ils lui doivent leurs places et l'ont soutenu lors de son putsch contre Bleda. Ils lui sont donc fidèles mais cette relation peut être fragilisée par la disparition du souverain.
Une des priorités d'Attila est d'empêcher que certains Huns soient tentés de passer du côté Romain pour servir comme mercenaires.
Lorsqu'il contraint Rome ou Constantinople au tribut ou lors des négociations de paix, il exige toujours que lui soit remis ceux qu'ils considèrent comme des traîtres et des déserteurs. Cette politique porte ses fruits et le phénomène des transfuges reste anecdotique.

Les croyances ont une place importante dans le monde des Huns mais la religion d'Attila est mal connue. Beaucoup de ses sujets Germains sont des chrétiens ariens mais il semble que les Huns et Attila pratiquent une religion traditionnelle polythéiste et animiste avec des chamans d'une grande importance sociale.
Ces chamans pratiquent la divination par scapulomancie, pratique typique des éleveurs nomades Turco-Mongols. Les devins ont joué un grand rôle dans la vie d'Attila, dans sa vie de famille en lui prédisant sur lequel de ses fils il peut compter et dans les batailles en influant sur ses décisions...

Concernant ses convictions et cultes, les historiens actuels divergent sur plusieurs points importants : Michel Rouche pense qu'Attila se voit comme un dieu lui-même. Rouche déduit des grands chaudrons Hunniques de bronze retrouvé par les archéologues qu'Attila pratique un « cannibalisme sacré » en faisant des sacrifices humains et en buvant du sang humain.
Edina Bozoky rejette totalement les affirmations de Rouche sur des pratiques pour lesquelles il n'existe selon elle aucun témoignage ni aucune trace matérielle et qui reposent sur des comparaisons anachroniques avec d'autres peuples.
Quant à l'idée que le roi des Huns ait pu prétendre être un dieu :
Katalin Escher et Iaroslav Lebedynsky pensent au contraire qu'il croit à son destin providentiel et à son charisme surnaturel comme « tant d'autres chefs militaires ». Il est en revanche certain qu'il utilise aussi cette religion à des fins de politique intérieure.
Ainsi au cours de son règne, Attila affirme avoir reçu une épée sacrée du dieu de la guerre, légitimation suprême et présage fédérateur précieux pour un règne qui met son peuple en état de guerre permanent.

Selon l'historien Otto John Maenchen-Helfen, les Huns vivent en pasteurs guerriers de l'élevage de chevaux et de moutons puis quand ils deviennent « les maîtres de populations paysannes, comme les Germains et les Sarmates, ils trouvent plus simple et agréable de les rançonner que de travailler eux-mêmes »
Ainsi, l'historien Michel Rouche les qualifie de « société de prédateurs ». Pour maintenir leur niveau de vie mais aussi la fidélité de leurs alliés, les Huns de plus en plus puissants commencent à exiger des tributs de leurs riches voisins Romains et Perses.

Début 453, Attila meurt de façon soudaine et inattendue dans son sommeil, étouffé par un saignement de nez durant la nuit de noces avec la Germaine Ildico, qui est retrouvée au matin, prostrée près du cadavre. Certaines chroniques Byzantines rapportent qu'il a été assassiné, l'historien Michael Babcock trouve cette hypothèse crédible et avance que Marcien a pu organiser une machination comme Théodose II avant lui l'a essayé.
Cependant les historiens Michel Rouche, Edina Bozoky, Katalin Escher et Iaroslav Lebedynsky n'y croient guère et, pour ces derniers, « on ne peut ni balayer cette idée d'assassinat, compte tenu de l'ancienneté des soupçons, ni prouver quoi que ce soit »...
Il est enterré secrètement dans un triple cercueil d'or, d'argent et de fer et les esclaves qui creusent sa tombe sont égorgés afin qu'elle ne soit jamais découverte et profanée. Son emplacement est encore inconnu au XXIe siècle.

Sa succession dégénère en conflit entre ses fils, dont les principaux sont Ellac, Dengitzic et Ernakh. Ancien allié d'Attila, le roi Ardaric et ses Gépides soulèvent les peuples fédérés et battent les Huns à la bataille de la Nedao au cours de laquelle Ellac trouve la mort, entraînant la dislocation de l'Empire Hunnique. Les tribus se désunissent et reprennent pour chefs des membres de leurs aristocraties, tandis que les différents peuples fédérés par Attila se dispersent.
Dengitzic tente une dernière incursion au sud du Danube en 469 et une chronique Byzantine, la Chronicon Paschale, nous rapporte sa fin :
« Dengitzic, fils d'Attila, est tué en Thrace... Sa tête est apportée à Constantinople, promenée en procession et plantée sur un pieu au Cirque de Bois.
Toute la ville vient la voir ». Avec sa mort disparaît toute possibilité de restaurer l'Empire Hunnique.

Si son Empire ne lui a pas survécu plus de deux années, les proches non Hunniques d'Attila continuent à jouer un grand rôle dans la géopolitique du Ve siècle et dans les événements qui accompagnent la disparition de l'Empire Romain d'Occident :
Flavius Oreste place sur le trône le dernier empereur Romain Romulus Augustule et Edecon est le père d'Odoacre qui le dépose en 476, mettant ainsi fin à l'Empire d'Occident.

Attila est surtout connu dans l'historiographie et dans la tradition chrétienne occidentale pour avoir été le « fléau de Dieu ». Cette expression a été forgée par Saint Augustin pour désigner Alaric en 410, mais dès le VIe siècle Grégoire de Tours pense déjà que les Huns sont un instrument divin.
Au siècle suivant Isidore de Séville précise l'idée :
« Les Huns sont le bâton de la fureur de Dieu. Chaque fois que la colère de Dieu s'abat sur les fidèles, c'est par eux qu'ils sont frappés ».
L'expression n'apparaît qu'au VIIe siècle dans une hagiographie de Saint Loup où Attila se présente comme étant le « fléau de Dieu », bien que « fléau » soit resté dans les mémoires, « fouet » traduit mieux le terme original de flagellum.
Les chroniqueurs et hagiographes chrétiens poursuivent cette tradition et en font un véritable « antihéros ». Les hagiographies lui prêtent de nombreux crimes et martyres imaginaires comme Saint Nicaise à Reims, Saint Memorius à Saint-Mesmin et de nombreux autres. À partir de ces chroniques se développent de nouvelles légendes mettant en scène des évêques protégeant leurs cités d'Attila :
Jean à Ravenne,
Géminien à Modène,
Alpin à Châlons,
Auctor à Metz, etc.
Sainte Ursule et 11 000 vierges mortes en martyre à Cologne constituent l'invention hagiographique la plus impressionnante, couchée par écrit au Xe siècle, elle reste populaire durant tout le Moyen Âge. Certains récits vont même identifier les Juifs aux Huns...

En Italie, à partir du XIVe siècle, Attila devient un héros littéraire. Des épopées en vers ou en prose narrent ses aventures chevaleresques et lui prêtent une naissance extraordinaire : Il serait le fils d'une princesse et d'un lévrier. Dans ces récits, par sa nature semi-bestiale et ses mauvaises actions, il est encore représenté comme l'ennemi du christianisme.
L'un des plus populaires, l'Estoire d'Atile, est copié puis imprimé à Venise à travers les siècles, la dernière édition étant de 1862.

Attila n'a pas laissé une image aussi négative dans les territoires non Romains : La Chanson de Walther, chanson de geste en hexamètres latins, attribuée au moine Ekkehard Ier de Saint-Gall, vers 930, dépeint Attila comme un roi puissant et généreux.
La Chanson des Nibelungen, Nibelungenlied en allemand, une épopée médiévale Allemande composée au XIIIe siècle, le présente, sous le nom de Etzel, sous un jour positif malgré son paganisme.
Dans les sagas Islandaises écrites au XIIe siècle, Attila et les Huns sont mis en scène dans des guerres épiques les opposants aux Burgondes, aux Goths ou aux Danois comme dans la Brevis historia regum Dacie de Saxo Grammaticus. nes
Le personnage du roi « Atli » est « issu de l'Attila historique ». Les poèmes de l'Edda mettant en scène Attila sont :
Atlamál (Les Dits Groenlandais d'Atli),
Guðrúnarkviða II (Le Second chant de Gudrún),
Sigurðarkviða hin skamma (Le Chant bref de Sigurd),
Guðrúnarhvöt (L’exhortation de Gudrún),
Atlakviða (Le Chant d'Atli).
Ces chants sont repris en prose au XIIIe siècle par Snorri Sturluson, le plus grand écrivain Scandinave médiéval.
Dans ces légendes, Gudrún pour les Nordiques ou Kriemhild pour les Germaniques, sœur du roi des Burgondes, constitue un des principaux personnages, elle est issue de l'Ildico historique.

La mort tragique d'Attila, les soupçons d'assassinat et de l'implication de sa jeune épouse ont donné lieu à une tradition littéraire dans laquelle le motif de la vengeance féminine tient une place majeure. Dans ces mythes, Attila est représenté de façon assez « sympathique », il est tolérant, loyal, généreux et chevaleresque. Ses démêlés tragiques sont dus à sa naïveté et à ses difficultés à comprendre les autres peuples.

Lorsque au Xe siècle les Hongrois, nomades venus de l'Est, s'installent dans les Carpates et commencent à mener des razzias en Europe, les chrétiens les identifient immédiatement aux Huns. Quand ils se convertissent et commencent à écrire leur propre histoire, ils adoptent cette idée, et revendiquent la filiation avec Attila le transformant en héros positif... Il devient ainsi l'ancêtre de la dynastie Árpád dans la Gesta Hungarorum rédigée vers 1210... Dans ces mythes fondateurs, Attila est glorifié, ses vertus morales et guerrières exaltées.

À la Renaissance, la Chronica Hungarorum utilise encore la figure du roi des Huns pour accroître le prestige et la légitimité de la monarchie hongroise alors à son apogée, Matthias Ier de Hongrie est célébré comme un « second Attila ». L'origine Hunnique des Hongrois et la figure d'Attila est encore un thème récurrent de la littérature Hongroise du XVIe au XIXe siècle.

En 1857, le compositeur et pianiste virtuose Franz Liszt compose un poème symphonique sur la bataille des champs Catalauniques. Le développement du nationalisme Hongrois garde Attila comme une référence majeure de l'identité nationale, la disparition de son brillant empire est mise en parallèle avec le destin des Hongrois sous domination Autrichienne et Ottomane.

Au XIXe siècle, l'historienne Edina Bozoky recense une vingtaine de drames, 9 poèmes et 3 romans Hongrois utilisant Attila, notamment 2 œuvres de grands auteurs que sont l'écrivain Mór Jókai et le poète János Arany. Plus de 15 œuvres à ce sujet sont encore écrites au XXe siècle. Le prénom Attila reste populaire tout au long du siècle comme en témoignent Attila József, Attila Csihar, Attila Zsivóczky ou Attila Horváth...

Le mythe d'Attila est aussi très utilisé dans la politique Hongroise, particulièrement par l'extrême droite dans les années 1930.
Certains développent un néopaganisme prétendant retourner aux sources Hunniques et construisent une tour à la mémoire d'Attila, d'Árpád et de Koppány.
Ces groupes connaissent une résurgence avec la 3e République Hongroise : Une « Sainte Église des Huns » est fondée en 1997 et une « Alliance Hunnique » en 2002.

En 2010, une statue équestre d'Attila est inaugurée à Budapest par le ministre de la défense Csaba Hende. À cette occasion, des arbres sont plantés aux frontières historiques de la Hongrie, officiellement pour qu'ils prennent racine auprès d'Attila

Bien qu'au siècle précédent Voltaire et Montesquieu aient dépeint un Attila contrasté et pourvu de grandes qualités, au XIXe siècle Attila devient une métaphore du tyran et les Huns des ennemis barbares et brutaux.
Benjamin Constant en 1815 et Victor Hugo en 1824 comparent Napoléon à Attila.
Les Français et dans une moindre mesure les Anglais et les Américains comparent les Allemands aux Huns, Victor Hugo compare cette fois Guillaume Ier à Attila en 1871.
Lors de la première Guerre mondiale, Guillaume II est encore comparé à Attila, la bataille de la Marne devenant une répétition des champs Catalauniques.
En 1914, Rudyard Kipling lance un appel à la guerre contre les Huns... Les affiches Canadiennes et Américaines comparent la destruction de la Belgique par l'Allemagne aux ravages d'Attila... La propagande proclame « Beat the Hun », que l'on peut traduire par « Écrasons le Hun ».

Les anecdotes historiques et morales d'Attila sont propagées par l'école : « Amené par sa monture favorite, Balamer, guidée par le vent jusqu'à l'épée de Tengri, Attila s'exclame : « Là où passe mon cheval, l'herbe ne repousse pas. »... Cette phrase a longtemps été un lieu commun de l'enseignement primaire en France.

Paradoxalement, les Allemands reprennent parfois à leur compte la métaphore, lors de la révolte des Boxers, Guillaume II galvanise ses troupes en les incitant à suivre le modèle d'Attila, il déclare :
« Pas de pitié ! Pas de prisonniers ! Il y a 1 000 ans les Huns du roi Attila se sont fait un nom qui retentit formidablement aujourd'hui encore dans les mémoires et les contes, que le nom des Allemands acquière en Chine la même réputation, pour que plus jamais un Chinois n'ose regarder un Allemand de travers ». À la façon des Hongrois, au XXe siècle, les nationalistes et les touranistes Turcs récupèrent également la figure d'Attila, libérateur des nations opprimées par les rois étrangers et la religion, précurseur de la Turquie moderne et laïque.

Plus récemment, en 2011, le général Serbe Ratko Mladić est surnommé Attila aussi bien dans son propre pays qu'à l'étranger.

À une moindre échelle qu'en Hongrie, le roi des Huns est resté populaire dans le reste de l'Europe, sa figure ayant sans cesse intéressé les artistes.
Pour l'historienne Edina Bozoky, la richesse et la variété des œuvres sur Attila sont exceptionnelles dans l'histoire littéraire : « Chaque pays, chaque époque se fabrique un Attila à son image »

Attila est très utilisé dans l'opéra :
Dès 1672, Pietro Andrea Ziani compose un Attila sur un livret de Matteo Noris. En 1807 à Hambourg,
En 1818 à Palerme,
En 1827 à Parme
En 1845 à Venise des opéras intitulés Attila sont représentés avec des succès divers.
Le plus connu reste celui de Giuseppe Verdi en 1846.
Zacharias Werner, écrivain Autrichien, écrit Attila, König der Hunnen (Attila, roi des Huns) sur les dernières années de sa vie et la fait publier en 1807.
Il met en scène la campagne d'Italie et le pillage d'Aquilée, Attila y est dépeint comme une métaphore de Napoléon. Celui-ci ordonne d'ailleurs de détruire toutes les copies de l'ouvrage en 1810... Cette œuvre est à l'origine de l'opéra de Verdi, Attila, sur un livret de Temistocle Solera en 1846.

Aux XXe et XXIe siècles, Henri Salvador écrit et chante un humoristique Attila est là en 1967,
Le poète et député hongrois Sándor Lezsák écrit un opéra-rock Attila, az Isten kardja mis en scène et joué par Levente Szörényi en 1993.
En 2002, Olivier Boreau compose une pièce pour orchestre d'harmonie sous le titre éponyme Attila.
Attila est également le nom utilisé par un groupe de deathcore américain originaire d'Atlanta et formé par Chris Fronzak en 2005.
En 2009 Danton Eeprom donne ce nom un à titre de musique électronique dans son premier album Yes is More.
En 2015, Booba sort Nero Nemesis, album de rap français incluant le titre Attila.

453 — Wikipédia
https://fr.wikipedia.org/wiki/453
... documentation du modèle. Cette page concerne l'année 453 du calendrier julien. ... Il se préparait à une nouvelle action contre l'empire d'Orient. Il est enterré ...

Encyclopédie Larousse en ligne - Attila - Larousse.fr
www.larousse.fr/encyclopedie/personnage/Attila/106591
453 roi des Huns 434-453 C'est avec le règne d'Attila surnommé le fléau de Dieu ... années de règne conjoint avec son frère Bléda (qu'il élimine en 445), Attila ... La mort d'Attila scelle le destin de son empire, auquel les rivalités de ses fils et ...

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