samedi 27 février 2016

EN REMONTANT LE TEMPS... 445


22 FÉVRIER 2016...

Cette page concerne l'année 445 du calendrier julien. Ceci est une évocation ponctuelle de l'année considérée il ne peut s'agir que d'un survol !

ORGUEIL ET SPÉCULATIONS DE CEUX QUI SE CONSIDÈRENT COMME GRANDS !

On parle de ces proscriptions et de ces exactions cruelles par lesquelles les Romains se ruinent les uns les autres... Mais pourquoi dit-on qu'ils se ruinent mutuellement ? Disons plutôt qu'un petit nombre opprime une innombrable multitude, et c'est en cela que le crime paraît plus grand. (apparemment rien n'a changé... C'est toujours une poignée de technocrates et de politiciens qui font danser le monde).
Il est plus supportable si chacun souffre à son tour de ce qu'il fait souffrir aux autres.
Mais quel est ce renversement par lequel on voit les impôts publics devenir la proie des particuliers. On voit, sous le prétexte du fisc, des hommes privés s'enrichir des dépouilles du peuple... On dirait que c'est une conspiration; tout y contribue, les supérieurs et les subalternes; les juges mêmes n'en sont pas exempts. (tout comme aujourd'hui) Y a-t-il une ville, un bourg, un village, où il n'y ait pas autant de petits tyrans qu'il y a de juges et de receveurs des droits publics ?
Ils sont fiers du nom qu'ils portent, ils s'applaudissent de leurs concussions et de leurs violences, parce que c'est par ce même endroit qu'ils sont craints et honorés, semblables aux voleurs de grands chemins, qui ne se croient jamais plus glorieux ni plus dignes d'envie que quand ils sont plus redoutés.
Répétons donc : Est-il une ville où les principaux ne ruinent les veuves et les orphelins, et ne leur dévorent pour ainsi dire les entrailles ? Les gens de bien ont le même sort, soit que par mépris des biens de la terre, ils ne veuillent pas se défendre, soit que n'ayant que leur innocence pour tout appui, ils ne le puissent pas. (encore une fois le parallèle est troublant). Ainsi personne n'est en sûreté, et si vous en exceptez ceux que leur autorité ou leur crédit rend redoutables, personne n'échappe à l'avidité de cette espèce de voleurs.
Il faut leur ressembler, si l'on veut éviter de devenir leur proie, et l'on a porté l'injustice jusqu'à ce point qu'il n'y a de sûreté que pour les méchants et qu'il n'y en a plus pour les gens de bien... (ce ne sont plus des coïncidences, c'est copier/coller).

Mais quoi, au milieu de cette foule d'hommes injustes, ne se trouve-t-il pas des personnes amies de la vertu qui protègent les gens de bien, qui, selon l'expression de l'Écriture, délivrent le pauvre et l'indigent des mains du pécheur ?
Non ! il n'en est pas, et peu s'en faut que l'on ne puisse dire. « Il n'y a pas un homme qui fasse le bien, il n'en est pas un seul ».
En effet, les malheureux trouvent-ils quelque part du secours ? Les prêtres mêmes du Seigneur n'ont pas assez de fermeté pour résister à la violence des oppresseurs. (c'est encore d'actualité)
Parmi ces prêtres, les uns gardent le silence et les autres ne font pas mieux que s'ils le gardaient, non que tous manquent de courage, mais une prudence et une politique coupables les retiennent.
Ils se dispensent d'annoncer la vérité, parce que les méchants ne sont pas disposés à l'écouter, ils portent ce dégoût jusqu'à la haine et à l'horreur.
Loin de respecter et de craindre la parole de Dieu, ils la méprisent avec un orgueil insolent.
Voilà sur quoi se fondent les prêtres pour autoriser ce silence par lequel ils ménagent les méchants. Ils n'osent, disent-ils, exposer la vérité avec toute la force qu'il faudrait, de peur que cette exposition ne serve à rendre les méchants plus criminels, en les rendant plus rebelles.
Tandis que l'on use de ces lâches ménagements, les pauvres sont dépouillés, les veuves gémissent, les orphelins sont opprimés, on en voit qui, sortis d'une honnête famille, et après avoir reçu une honnête éducation, sont contraints de chercher un asile chez les ennemis même du peuple Romain, pour ne pas être les victimes d'une injuste persécution, prêts à périr par la cruauté dont usent à leur égard d'autres Romains, ils vont chercher chez les Barbares une humanité qui devrait être le vrai caractère des Romains...

J'avoue que ces barbares chez qui ils se retirent ont des mœurs, un langage, une manière malpropre de se mettre, qui n'a nul rapport aux coutumes et à la propreté des Romains, mais qu'importe, ils ont moins de peine à se faire à ces manières qu'à souffrir la cruauté des Romains... Ils passent au service des Goths, ou se mêlent à des voleurs attroupés, et ne se repentent point d'avoir pris ce parti, trouvant plus de douceur à vivre libres en portant le nom d'esclaves qu'à être esclaves en ne conservant que le seul nom de liberté... Autrefois on estimait et on achetait bien cher le titre de citoyen Romain, aujourd'hui on y renonce, et on le quitte devenu tout à la fois vil et détestable. Or je demande quel plus fort argument pour prouver l'injustice des Romains que de voir des personnes nobles se résoudre à perdre le nom de Romains pour échapper à l'injustice de leurs persécuteurs ? (Aujourd'hui outre ceux qui prennent le chemin de l'exil pour ne pas être tondus pire que des moutons, le nom de Français ne leur apporte aucune joie ni considération fasse à ceux qui se moquent d'eux ouvertement)

De plus, parmi ceux qui ne se retirent pas chez les Barbares, une partie est contrainte de devenir en quelque sorte semblable à eux. Je parle d'une grande partie de l'Espagne et des Gaules et de toutes ces autres provinces de l'empire à qui notre injustice a fait renoncer ou à qui elle a fait perdre le nom de citoyens Romains.
Je parle encore de ces exilés à qui on a donné le nom de Bagaudes, (déjà des Bretons) maltraités, dépouillés, condamnés par des juges injustes, après avoir perdu tout droit aux immunités de l'empire, ils ne se sont plus mis en peine de conserver la gloire du nom Romain.
Après cela, nous leur faisons un crime de leur malheur.
Nous leur donnons un nom odieux, dont nous les avons forcés de se charger. Nous les traitons de rebelles, après que par nos vexations nous les avons comme contraints de se soulever.
Car quelle raison les a déterminés à vivre ainsi de vols et de brigandage?
Ne sont-ce pas nos violences ?
N'est-ce pas l'injustice des magistrats ?
Ne sont-ce pas les proscriptions, les rapines, les concussions de ceux qui s'enrichissent du bien des citoyens, et qui, sous le prétexte de tributs et d'impôts, augmentent leurs richesses des dépouilles du peuple ?
Ce sont des bêtes farouches, qui n'ont de penchant que pour dévorer.
Ce sont des voleurs qui, différents de la plupart des autres, ne se contentent pas de voler, mais portent la fureur jusqu'à donner la mort et à se repaître, pour ainsi dire, de sang...
Par ce procédé inhumain, on a forcé de devenir Barbares des gens à qui il n'est plus permis d'être Romains, ou qui ne le peuvent être sans périr. Après avoir perdu leur liberté, ils ont pensé à conserver leur vie.
N'est-ce pas là la peinture de ce qui se fait aujourd'hui.
Il est un nombre infini de gens que l'on réduit à être contraints de se retirer parmi les Bagaudes, ils s'y retirent en effet, tant est grande la persécution qu'ils souffrent, si le défaut de courage ne les empêchait de se résoudre à mener cette vie vagabonde.
Ils gémissent sous le joug de leurs ennemis, et souffrent un supplice forcé. Accablés sous le poids de la servitude, ils font des vœux inutiles pour la liberté. Ainsi leur cœur se trouve partagé, d'une part la violence dont on use à leur égard les porte à chercher les moyens de se rendre libres, mais cette même violence les met hors d'état d'exécuter leurs résolutions.

En vain on dirait que ces sortes de personnes, souvent bizarres dans leurs désirs, souhaitent de certaines choses et craignent en même temps qu'on ne les force à les faire.
Toutefois, comme ce qu'ils désirent est un grand malheur pour eux, la justice n'exige-t-elle pas de ceux qui les dominent, de ne pas les contraindre à former de semblables souhaits ?
Mais après tout n'est-il pas naturel de voir des malheureux penser à la fuite, tandis qu'on les opprime par des exactions cruelles, tandis que des proscriptions qui se succèdent les unes aux autres les mettent dans un danger continuel.

S'ils quittent leurs maisons, c'est qu'ils craignent qu'elles ne deviennent le théâtre de leurs tourments, et l'exil est pour eux la seule ressource qui leur reste contre l'oppression.
Il est vrai qu'ils se retirent chez des peuples ennemis, mais ces ennemis mêmes leur semblent moins redoutables que ceux qui les ruinent par leurs exactions. Et ces exactions sont d'autant plus insupportables pour eux, qu'elles sont mal distribuées, que chacun n'en est pas chargé à proportion du bien qu'il possède.
Car n'y a-t-il pas de la cruauté à exiger que les pauvres payent ce qui devrait être pris sur les riches, et que, pour ainsi dire, tout le fardeau tombe sur les faibles, tandis que les forts ne sont chargés de rien ?
Ainsi deux choses concourent à les rendre malheureux, l'envie et la pauvreté, l'envie s'acharne contre eux, parce qu'ils refusent de payer, la pauvreté les afflige. N'est-ce pas là la situation la plus déplorable que l'on puisse imaginer ?

Voici des choses plus cruelles encore, et des injustices plus criantes que l'on fait à ces malheureux. On voit les riches se faire une étude d'inventer de nouveaux tributs pour en charger ensuite le peuple. (encore une similitude avec ce qui se passe aujourd'hui où les forces vives de la nation artisans, cultivateurs, retraités, petits commerçants se voient taxés et surtaxés pour permettre à d'autres de bénéficier d'avantages auxquelles normalement ils n'ont aucun droit)

Ce serait se tromper que de prétendre justifier les riches en disant que leurs richesses doivent les empêcher d'en user de la sorte, parce qu'en augmentant les impôts ils se chargent eux-mêmes. Et quoi ! ignorez-vous que les lois ne sont pas pour les riches, hardis et empressés à faire ces augmentations, parce qu'ils savent bien qu'elles ne tomberont pas sur eux ? Or, tels sont les prétextes auxquels ils ont recours. Tantôt ce sont des ambassadeurs et tantôt des envoyés extraordinaires des princes. On les recommande aux personnes qui tiennent les premiers rangs dans la province, et l'accueil magnifique qu'on leur offre est toujours la cause de la ruine du peuple... (on n'aurait beaucoup de mal à ne pas trouver une ressemblance frappante) Les présents qu'on leur fait sont pris sur de nouveaux tributs que l'on impose, et toujours le pauvre fournit ce que le riche donne, celui-ci fait sa cour aux dépens de celui-là. (bis repetita)

Ici l'on fait une objection frivole. Peut-on, disent quelques-uns, se dispenser de faire de ces sortes de réceptions aux ministres des princes ?
Non, on ne doit pas s'en dispenser. Mais la justice n'exige-t-elle pas des riches qu'étant les premiers à imposer, ils soient aussi les premiers à payer, et que ces longs flots de compliments et de marques de respect dont ils sont si prodigues soient soutenus par une libéralité plus réelle ?
Les pauvres ne sont-ils pas en droit de leur dire : « voulez que nous portions une partie des charges publiques, il faut donc que vous portiez l'autre, et que tandis que nous donnons vous donniez de votre côté » ?
Ne peuvent-ils pas même prétendre avec justice que ceux qui recueillent toute la gloire de ces sortes de réceptions en fassent toute la dépense ? Ils se relâchent cependant sur cet article, et ils demandent seulement un partage juste et plus humain des impositions publiques.

Qu'après tout la condition des pauvres est à plaindre ! Ils payent, et on les force de payer, sans qu'ils sachent pourquoi on les y force. Car permet-on à quelqu'un de demander pourquoi il doit payer, ou d'alléguer et de chercher les raisons qu'il a de payer, ou de demander à être déchargé ?
Au reste, on ne sait au vrai jusques où va l'injustice des riches que quand ils viennent à se brouiller entre eux.
Alors on entend ceux qui se croient offensés reprocher aux autres que c'est une injustice criante de voir deux ou trois hommes faire des traités, inventer des tributs qui ruinent des provinces entières. (c'est formidable j'ai l'impression de lire un hebdomadaire du moment)
C'est là en effet le caractère des riches, ils croient qu'il est de leur honneur de ne pas souffrir que l'on décide de rien sans les consulter, prêts à approuver les choses les plus injustes, pourvu que l'on ait pour eux la déférence qu'ils croient qu'on leur doit. Guidés par leur seul orgueil, on les voit, ou pour se venger de ceux qui les ont méprisés, ou pour faire briller leur autorité, ordonner les mêmes choses qu'ils ont traité d'injustices lorsque les autres les ordonnaient.
Au milieu de ces dissensions, les pauvres sont comme sur une mer orageuse, toujours battus et agités par les flots qui s'entrechoquent. Il ne leur reste pas même cette consolation, de pouvoir dire que les personnes constituées en dignité ne sont pas toutes injustes, qu'il se trouve des gens de bien qui réparent le mal que les méchants ont causé, et qui relèvent par de nouveaux remèdes ceux que l'on avait opprimés par de nouvelles impositions. Il n'en est pas ainsi. L'injustice est partout égale. Ne voit-on pas que comme les pauvres sont les premiers que l'on accable, ils sont les derniers que l'on pense à soulager.

Nous l'avons éprouvé, il n'y a pas longtemps, lorsque le malheur des temps a obligé les empereurs à diminuer les impôts de quelques villes, ce soulagement qui devrait-être répandu également sur tout le monde, a-t-il été pour d'autres que pour les riches ? Ce n'est point aux pauvres que l'on pense dans ces conjonctures, et après avoir commencé par les opprimer, on a la dureté de ne pas seulement penser à les soulager, du moins les derniers. (cela est toujours d'actualité toutes les taxes accumulées soit disant à titre exceptionnelles se retrouvent pérennent,et personne pas même le gouvernement suivant ne songe à en alléger le contribuable)
C'est aux pauvres que l'on fait porter tout le fardeau des tributs, et ce n'est jamais à eux qu'on en fait sentir la diminution.
Quelle serait après cela notre erreur si, traitant les pauvres avec tant de rigueur, nous croyions que Dieu n'usera d'aucune sévérité à notre égard, comme s'il nous était permis d'être injustes sans que Dieu nous fasse sentir le poids de sa justice ? Les Romains seuls sont capables de se souiller par tous les vices qui règnent parmi eux, nulle autre nation ne les porte à cet excès.
On ne voit rien de semblable chez les Francs, chez les Huns, chez les Vandales, chez les Goths...

Ceux des Romains qui ont cherché un asile dans les provinces Barbares y sont à l'abri des maux qu'ils endurent sur les terres de l'empire. Il n'y a rien qu'ils souhaitent avec plus d'ardeur que de n'avoir plus à vivre sous la domination Romaine, plus contents parmi les Barbares que dans le sein de leur patrie. Ne soyons donc plus surpris de voir les Barbares prendre l'ascendant sur nous. Leur nombre grossit tous les jours, et bien loin que ceux qui se sont retirés parmi eux les quittent pour revenir à nous, nous voyons tous les jours de nouveaux Romains nous abandonner pour chercher un asile parmi eux.

Une seule chose m'étonne à ce propos, c'est que tout ce qu'il y a de pauvres et de malheureux parmi nous, n'aient pas recours à ce moyen de se mettre à l'abri de l'oppression. (ils n'en n'ont pas plus le pouvoir que nos démunis aujourd'hui) Ce qui les en empêche, c'est sans doute la difficulté de transporter leurs familles et le peu de bien qu'ils ont dans une terre étrangère, forcés par une dure nécessité, ils ne quittent qu'à regret leurs maisons et leurs troupeaux, mais la violence et le poids des exactions leur paraît un plus grand mal, et dans cette extrémité ils prennent la seule ressource qui leur reste, quelque pénible qu'elle soit.
Ils se jettent entre les bras des riches pour en recevoir de la protection, ils se réduisent à une triste espèce de servitude. (ou ils embrassent une idéologie politique qui tout en continuant à les flouer leur fait croire au paradis terrestre.)

Mais qui peut ne pas regarder comme une cruauté dans les riches de les voir ne se déclarer les protecteurs des pauvres que pour les dépouiller, de ne défendre des malheureux qu'à condition de les rendre plus malheureux encore qu'ils ne sont, c'est-à-dire par la perte de tout leur bien...
Le père alors, pour acheter un peu de protection, est contraint de livrer ce qu'il a destiné à être l'héritage de son fils, et l'un ne peut se mettre à l'abri de l'extrême misère qu'en réduisant l'autre à l'extrême disette.
Voilà tout ce qui revient aux pauvres de la protection des riches, voilà où aboutissent les secours qu'ils se vantent de donner. Il paraît bien qu'ils n'ont jamais que leur intérêt en vue, et qu'en se déclarant pour les pères ils ne cherchent qu'à ruiner les enfants. (ainsi en est des frais d'héritage et autres droits de mutation de reprises etc...)
Telle est la manière dont les riches s'y prennent pour tirer du profit de tout ce qu'ils font. Il est à souhaiter que du moins leur façon de vendre est semblable à ce qui se pratique dans les autres ventes, il resterait quelque chose à celui qui achète. Mais quel est ce nouveau genre de commerce dans lequel celui qui vend reçoit sans rien donner, et dans lequel celui qui achète donne tout sans rien acquérir ? Dans les autres marchés, la condition de celui qui achète est regardée comme la plus avantageuse, par l'espérance du profit, ici celui qui vend profite seul, et rien ne reste à celui qui achète...

Ce n'est là cependant qu'une partie du malheur des pauvres. Voici quelque chose de plus barbare et de plus criant, on ne peut ni le voir ni l'entendre sans frémir d'horreur...
Il arrive que la plus grande partie du petit peuple, après avoir été ainsi dépouillés de leurs terres et de leurs possessions, réduits à ne rien avoir, ne laissent pas d'être chargés d'impôts, l'exaction est un fardeau dont ils ne peuvent se décharger, et ce qui semble devoir être seulement attaché à leurs terres retombe sur leurs personnes.
Quelle injustice cruelle ! Le riche possède, et le pauvre paye ! Le fils sans avoir recueilli la succession de son père se trouve accablé par les mêmes impôts que le père payait ! Imagine-t-on une plus dure extrémité que celle d'être dépouillé par des usurpateurs particuliers et d'être en même temps persécuté par des tyrans publics ?
Parmi ces malheureux, ceux à qui il reste quelque prudence naturelle, ou ceux que la nécessité a rendus prudents, tâchent à devenir les fermiers des terres qu'ils possèdent, d'autres se cherchent des asiles contre la misère, et d'autres enfin, en qui se trouve une âme moins élevée, se rendent volontairement esclaves, chassés non-seulement de leur patrimoine, mais encore dégradés du rang de leur naissance, bannis de leurs maisons, et perdant le droit qu'ils ont sur eux-mêmes par la perte de la liberté.
De là vient le comble de leur misère, car en perdant la liberté ils perdent presque la raison, et par un changement qui tient de l'enchantement, des hommes devenus esclaves sont traités comme des bêtes, et leur deviennent semblables en quelque sorte en cultivant comme elles les terres des riches... (là aussi on peut voir un parallèle avec nôtre époque où ceux qui devraient vivre bien de leur travail utile à tous se retrouvent acculés à la misère et parfois au suicide)

Cessons donc de nous plaindre avec étonnement de ce que nous devenons la proie des Barbares, nous qui ravissons la liberté à nos concitoyens. Ces ravages qui désolent les campagnes, ces villes ruinées et détruites, sont notre ouvrage, nous nous sommes attiré tous ces maux, et la tyrannie que nous avons exercée contre les autres est, à dire vrai, la cause de celle que nous éprouvons.
Nous l'éprouvons plus tard que nous ne méritions, Dieu nous a longtemps épargnés, mais enfin sa main s'est appesantie, et selon l'expression de l'Écriture, prise dans un autre sens, l'ouvrage de nos mains retombe sur nous...
Mais que l'aveuglement des hommes est incurable ! Nous sentons le poids de la colère de Dieu justement irrité contre nous, et nous nous dissimulons à nous-mêmes que la justice de Dieu nous poursuit.

Salvien, prêtre, né vers 390, à Trèves, meurt en 484, à Marseille, où il est prêtre depuis longtemps. Il est auteur des traités De la Providence ou du Gouvernement de Dieu, et De l'Avarice. Ces ouvrages sont écrits avec éloquence et énergie. (Voy. plus loin le récit intitulé: Conduite du clergé envers les conquérants Germains.)
Les Chroniques de Prosper d'Aquitaine (qui s'arrêtent hélas en 444) et d'Hidace de Galice (jusqu'en 468) sont œuvres de Gallo-Romain et d'Hispano-Romain, surtout attentifs à Rome.
Ils ne regardent les Goths qu'avec mépris et n'imaginent pas qu'ils puissent avoir d'autre ressort d'action que la haine de Rome.
Ils sont nos seuls et tout de même précieux observateurs si nous savons lire ce genre de récit.
Ces textes d'usage traditionnel et qui sont déjà une forme d'histoire, peuvent être mis en parallèle avec une source de nature très différente : La Vie de saint Sever. Texte difficile, mêlant diverses rédactions dont deux sont repérables comme des compositions du XIe siècle, la troisième du IXe siècle : Le prince Guillaume Sanche de Gascogne à qui on en donne lecture aux années 970 la dit alors vieille de presque 100 ans. A travers la vie de deux hommes, Sever et Sébastien, que les sources mettent en scène, se découvre une page d'histoire illustrée par le combat du Palestrion, sanglant résultat d'une non moins sanglante injure.

« Ce récit qui date d'environ 1550 ans est en tout point semblable à ce que nous vivons aujourd'hui »

Merci à tous ces auteurs des temps jadis qui nous apportent par leur récits une réflexions sur ce qui c'est passé et perdure de nos jours. Il est dommage que ces textes ne soient pas plus connus et étudiés

The Project Gutenberg's eBook of L'Histoire de France ...
www.gutenberg.org/files/42126/42126-h/42126-h.htm
Depuis quelques années, le goût de lire l'histoire dans les documents originaux s'est ... ne sont indiqués dans les chroniques que par une phrase courte et sèche. ...... est confirmée par un fait que rapporte la Chronique de Prosper à l'année 445. ...... On connaît la suite de cette anecdote du vase de Reims à laquelle 359 je ...

Prosper d'Aquitaine (Tiro).
www.cosmovisions.com/Prosper.htm
Prosper Tiro ou Prosper d'Aquitaine, écrivain du Ve siècle ap. ... chronique universelle connue sous le nom d'Epitoma chronicon et qui s'étend ,jusqu'à l'année 455. Pour la période antérieure à 379, Prosper n'a fait que résumer la chronique ...

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