lundi 9 mai 2016

EN REMONTANT LE TEMPS... 383


21 AVRIL2016...

Cette page concerne l'année 383 du calendrier julien. Ceci est une évocation ponctuelle de l'année considérée il ne peut s'agir que d'un survol !

LE POÈTE AUSONE.

Ici naît le grand vignoble Gallo-Romain de L’Aquitaine. Le poète, consul et viticulteur latin Decimus Magnus Ausone, a installé une de ses villas sur le territoire des Graves : « Pagus Novarrus » à Mérignac. C’est Ausone qui a chanté ainsi sa ville natale :
« O Bordeaux, ma patrie célèbre par ses vins … »
« … Toi qu’illustrent tes vins et tes fleurs … »

Ausone ou Decius ou Decimus Magnus Ausonius, est né en Aquitaine soit à Bazas (Gironde) soit à Burdigala (actuelle Bordeaux) en 309/310 et mort en 394/395 dans la villa paternelle située dans le vignoble Bordelais entre Langon et La Réole où il s'est retiré à la mort de son protecteur, l'empereur Gratien. Professeur et conseiller politique du Bas-Empire Romain. Son père, Jules Ausone (287-377), est médecin, préfet d'Illyrie et archiatre (premier médecin) de Valentinien Ier.

Ausone est surtout renommé par son statut littéraire : Poète de langue latine, ce fin lettré du Bas Empire Occidental est l'auteur de 20 livres en latin. Mais la littérature Française le tient pour le premier représentant d'une longue tradition, celle des lettres latines de France et de l'usage du latin moderne dans ce pays jusqu'à nos jours.
Il fait ses études d'abord à Bordeaux (Burdigala ou Burdigalia), puis à Toulouse (Tolosa) sous la direction de son grand-oncle paternel Aemilius Magnus Arborius, lettré né dans la province Lyonnaise et cultivant des origines Eduennes, avocat et précepteur de la famille impériale qui réside alors dans cette ville.
Revenu à Bordeaux, il pratique le droit quelque temps, mais préfère se tourner vers une carrière d'enseignement d'abord de la grammaire, puis de la rhétorique. Il a parmi ses derniers élèves Paulin de Nole (353-431) avec qui il entretient une longue correspondance, sa vie durant. Ausone, parlant des professeurs, nous apprend qu'il y a à Bordeaux des philologues, des grammairiens et des rhéteurs, enseignant en latin et en grec...
Le digne et vénérable professeur Ausone approche de sa 55 année, lorsque l'empereur Valentinien Ier l'appelle en 364 pour prendre la place de précepteur auprès de son fils Gratien, âgé de 5 ans.
Le jeune Gratien honoré du titre honorifique d'empereur à 8 ans en 367, prend véritablement en charge les affaires impériales à la mort de son père longtemps malade et invalide.

Gratien voue à ses protecteurs toute sa vie un immense respect. Ausone connaît une belle et tardive carrière : D'abord il devient un des comites ou comtes du palais, qui fait fonction de précepteur de Gratien, puis questeur du palais de 374 à 378. Enfin, il obtient de hautes charges dans l'administration civile en tant que préfet du prétoire des Gaules en 377/378, consul en 379 puis proconsul d'Asie.
Le déplacement de la capitale impériale de Trèves à Milan en 381 sonne le glas de la courte carrière du puissant conseiller impérial.
Le vieux conseiller, craignant une disgrâce fatale, se retire de la cour de Milan à la mort de Gratien en 383, et s'en retourne à Bordeaux, partageant sa vie entre ses amis, la poésie et les plaisirs champêtres : C'est là qu'il compose ou met en forme ses derniers ouvrages, supposés les plus nombreux. Sa tombe se trouve peut-être dans l'ermitage de Mortagne-sur-Gironde.
On a de lui des épigrammes, des idylles, des églogues et des épîtres. Ses vers célèbrent souvent la table et surtout, le vin, le vin de Bordeaux dont le château Ausone prend le nom, mais aussi les vins de Moselle et les vins d'Italie. Son chef-d'œuvre est La Moselle, description en 483 hexamètres d'un voyage de Bingen à Trèves. Ses morceaux les plus estimés sont les Parentales, les Roses, la Moselle et le Crucifiement de l'Amour.

C'est dans l'ode à la Moselle de ce pêcheur accompli qu'apparaît pour la première fois, parmi force précisions halieutiques et ichtyologiques, le nom latin (salar) de la truite :
{« purpureisque salar stellatus tergora guttis » (« la truite a le dos étoilé de gouttes de pourpre »)
« qui nec dum salmo nec iam salar » (« toi, truite saumonée, qui n'es pas encore le saumon et n'es plus la truite »).}
La correspondance entre Ausone, chrétien modéré, et Paulin de Nole, converti à un christianisme exalté, (futur évêque de Nole et futur saint) « est un document d'une importance exceptionnelle tant sur le plan de l'histoire de la société aristocratique de l'Antiquité tardive (vie de grands propriétaires, réaction d'Ausone à la conversion de Paulin) que sur le plan littéraire (abandon de la poésie profane par Paulin, conception de l'amitié épistolaire) ».
Ferdinand Lot estime que « La plupart du temps Ausone est ennuyeux et sans originalité », et il cite à l'appui de sa critique René Pichon, auteur d'une célèbre Histoire de la Littérature latine :
« Son style, bourré de citations, de plagiats et de pastiches, est celui d'un vieux professeur qui a la tête meublée d'expressions consacrées et qui croit rendre aux auteurs qu'il a si longtemps expliqués un suprême hommage, en pensant et en parlant sans cesse d'après eux... Il déverse dans ses écrits la masse des renseignements hétéroclites qu'il a accumulés pendant ses trente ans de professorat. »
Tout ce que F. Lot concède est que « cette érudition indigeste gâte les parties où l'on trouve ce que l'on cherche vainement chez les classiques : Un je ne sais quoi de confiant et de familial »
Dans la Catholic Encyclopedia, Paul Lejay (1861-1920), membre de l'Académie des inscriptions et belles-lettres, est loin de se montrer aussi sévère :
Pour juger Ausone à sa juste valeur il faut garder à l'esprit qu'il est le type du professeur du IV siècle. Certaines de ses œuvres, par conséquent, écrites pour l'enseignement et dans l'esprit de l'enseignement, souvent des traductions du grec, sont sans importance. Versificateur capable de traiter n'importe quel sujet (plus il est difficile et moins il est poétique, mieux c'est) Ausone connaît par cœur les œuvres de ses prédécesseurs, mais son goût et ses particularités métriques font de lui un disciple des poètes de la nouvelle école (les Neoterici, innovateurs poétiques de l'époque des Sévères) plutôt que des poètes classiques. Il

Le paganisme de ses œuvres est un paganisme scolaire, et, l'on veut en se fondant sur lui mettre en doute qu'il est chrétien, à l'inverse sa façon littéraire de traiter la mythologie permet de se demander s'il est païen. Mais la prière Pascale, et plus encore la prière des « Ephemeris » ne peut être l'œuvre d'un païen. Chrétien orthodoxe lorsqu'il prie, il est païen dans ses cours. Voilà pourquoi ses œuvres scolaires peuvent sembler très naturellement païennes. On a dit qu'après l'édit de Julien (361) Ausone a du renoncer à l'enseignement, mais rien ne le prouve ni ne prouve le contraire, puisque Julien meurt l'année suivante. On suppose que, comme certains de ses contemporains, Ausone est resté catéchumène pendant longtemps.
Il est possible qu'il n'ait pas encore été baptisé au moment où nous perdons sa trace, dans le silence et l'obscurité des derniers jours de sa vieillesse.
Son épouse Attusa Lucana Sabina est la fille du sénateur Attusius Lucanacus Talisius
En général brefs, les écrits d'Ausone forment une collection d'œuvres variées qu'on peut diviser en deux groupes :


«  Les Épigrammes » : Poèmes courts sur différents sujets, souvent traduits de l'Anthologie Grecque.
« Parentalia » : 30 panégyriques sur des proches décédés, avec de temps en temps quelques expressions de sentiment personnel (vers 379).
« Commemoratio professorum Burdigalensium » : Une collection sur le modèle de la précédente, ce qui donne une idée d'une université au IVe siècle (après 389).
« De Mosella » : Une description de la Moselle et du pays qu'elle traverse, écrite pendant un voyage de Bingen à Trèves (vers 371). Ce poème présente un certain intérêt, local et archéologique.
De charmants poèmes où il parle de Bissula (après 368).
Beaucoup de courts poèmes, qu'Ausone a appelés églogues ou « Epyllia », prières pour le temps Pascal (368), « Epicedion » : Chant funèbre sur la mort de son père (mort en 378), conseils au petit-fils de celui-ci (vers 380), « Cupido crucifixus » : Description d'une peinture dans une salle à manger de Trèves, qui représente Cupidon tourmenté en enfer par les femmes qui le poursuivent sur la terre etc.
« Gratiarum actio dicta domino Gratiano Augusto », dans lequel Ausone exprime en prose ses remerciements pour avoir été nommé consul. Lu à Trèves en 379, il est composé de fleurs de rhétorique et de flatteries conventionnelles.
« Ephemeris » : Le compte de ses tâches quotidiennes, du matin jusqu'au soir, un fragment (379). Dans cette œuvre, on trouve une prière du matin, composée d'expressions bibliques, dans laquelle la doctrine de la Trinité est présentée dans des formules détaillées dirigées contre les hérésies de l'époque.
« Lettres » : 25 épîtres, en vers la plupart du temps. Les plus intéressantes sont adressées à Saint Paulin de Nole (393). Ausone regrette amèrement une conversion qui prive l'État et la littérature du bénéfice d'un esprit si brillant et il essaie de ramener le saint à la vie mondaine de Rome. Cette correspondance nous expose deux idéaux de la vie, il exprime en couleurs claires, les points de vue qui, à ce moment-là sont en conflit l'un avec l'autre et divisent la société.
« Praefatiunculae » : Préfaces et envois de poèmes. Hommages

L'institut d'archéologie en Sciences de l'Antiquité et du Moyen Âge de l'Université Bordeaux Montaigne porte son nom : Institut Ausonius.
Le lycée français de Trêves porte le nom de « Lycée Ausone », il a fermé lors du retrait des Forces Françaises en Allemagne.
La rue dans laquelle se situe la grande école « Sciences Po Bordeaux » porte le nom d'Allée Ausone, tout comme la lettre d'information de cette même école.
Une station de la future ligne E du réseau de tramway de Bordeaux porte son nom.

Je te rends grâce, empereur Auguste, si je pouvais, je te rendrais plus encore mais ta fortune, en obligeant, ne demande pas de retour, et la nôtre nous refuse les moyens de nous acquitter.
Les particuliers peuvent sans peine entre eux échanger des largesses, mais tes bienfaits excellent par trop de grandeur, pour exiger qu’on y réponde. Ainsi donc, et c’est tout ce que je puis faire, je te rends grâce, mais, comme il arrive toujours en présence de Dieu, avec plus d’effusion de cœur que de paroles. Et ce n’est pas seulement dans le sanctuaire de l’oracle impérial, dans ce lieu où, saisis d’un frisson muet et d’une religieuse terreur, l’esprit et le visage demeurent rarement les mêmes, c’est partout et toujours que je te rends grâce, par mon silence ou par mon langage, dans les assemblées publiques ou seul avec moi-même, quand ma voix éclate ou quand ma pensée se recueille, en tout lieu, en toute chose, à tout propos, en tout temps.
Et il n’est pas étonnant que je ne mette point de bornes à l’expression de ma reconnaissance, quand tu ne sais point mettre un terme à tes faveurs. Est-il un endroit, un jour, qui ne me rappelle cette dette ou toute autre ? Qui me rappelle ! Ô parole impuissante et sans force ! Est-il un endroit, dis-je, qui ne me trouble, qui ne me brûle du souvenir de tes bienfaits ?
Il n’en est aucun, je le dis, empereur Auguste, qui ne frappe mon esprit de l’admirable image de ta majesté sainte ni le palais, qu’on t’a livré si terrible, et que tu as rendu si aimable, ni le forum et la basilique, autrefois pleins de disputes, aujourd’hui pleins de vœux, et de vœux formés pour ton salut (car du sien propre, qui s’en inquiète sous ton règne ? ), ni la curie, heureuse à présent de décrets qui l’honorent, attristée naguère par tant de lamentables plaintes, ni les rues, où la rencontre de tant de joyeux visages ne permet plus à personne de se réjouir seul, ni le réduit commun du logis : Le lit même, destiné au repos, devient plus calme au ressouvenir de tes bienfaits, et le sommeil, qui efface tout, nous retrace ton image.
Mais ce siège d’honneur, cette chaise curule, parée des magnificences de la faveur impériale, ce rang sublime où (de quel humble lieu ! ) tu m’as élevé, chaque fois que j’y songe, tant de grandeur m’accable, et me réduit au silence, non que je sois un ingrat, mais je suis écrasé par le bienfait. Car tu es pour nous présent en tous lieux, et je ne m’étonne plus de la licence des poètes qui nous disent que tout est plein de la divinité.
Tu passes notre espérance, tu préviens nos désirs, tu vas au-devant de nos vœux, et cette rapidité de la pensée qui nous assimile aux dieux, la promptitude du bienfait la devance, et tu as plus tôt donné, que nous n’avons désiré.
Aussi je te rends grâce, excellent empereur. Et si quelqu’un attribue cette répétition des mêmes mots, qui revient si souvent en mon discours, à la pauvreté de l’orateur, qu’il tente d’accomplir une telle œuvre : Et il ne pourra rien dire avec plus d’éloquence.
Oui, je rends grâce, et ce n’est ni pour flatter la majesté du prince, ni sans fondements : Au plus valeureux des empereurs, témoin la limite du Danube et du Rhin pacifiée dans l’espace d’une année... Au plus libéral, cela se voit, l’armée est riche... Au plus indulgent, on sait qu’une erreur de l’esprit humain est aujourd’hui sans danger... Au plus habile, l’ordre établi dans l’Orient en est la preuve... Au plus pieux enfin, et cet éloge s’appuie de brillants témoignages. Son père honoré d’une consécration divine, son frère associé, comme un fils, à l’empire, son oncle vengé des outrages de la guerre, et, puis un fils et un père appelés conjointement à partager la préfecture, et un précepteur élevé au consulat.
Je pourrais parcourir tous les titres que la vertu t’a donnés jadis, que la fortune t’accorda naguère, que la bonté divine te promet encore.
Je t’appellerais le Germanique, pour la reddition des barbares, l’Alémanique, pour la translation des prisonniers, et, pour tes victoires et ta clémence, le Sarmatique.
Je mêlerais tous les mérites de la vertu à tous les surnoms du bonheur... Mais c’est un autre sujet qui veut être traité séparément, quand nous jugerons à propos, non plus de tracer tout d’une suite, mais de dessiner à part et dans un cadre plus resserré, tous les faits qui nous sont connus, à l’exemple de ceux qui décrivent sur la largeur d’une seule carte la sphère du monde, au détriment sans doute de sa grandeur, mais jamais aux dépens de la vérité.
Quant à présent, et c’est l’œuvre spéciale de cette journée, j’ai à rendre grâce pour mon consulat. Mais voici d’autres dignités qui prennent le devant, et qui élèvent la voix de la reconnaissance, et qui réclament l’honneur de s’acquitter les premières : Toutes les distinctions accumulées sur ma tête avec le titre de comte, pour prix de tes progrès, la questure qui, pour tes mérites, m'est accordée en commun par les empereurs ton père et toi, et ce don de ta seule munificence, la préfecture, qui ne veut pas qu’un seul te félicite après avoir été plus libéralement divisée entre deux que si elle eût été réunie en un seul, car si nous possédons à deux la dignité entière, nous ne la désirons ni l’un ni l’autre séparément.
ÉCOLE PALATINE DE MILAN
Mais ces distinctions, comme je l’ai promis tout à l’heure, auront leur tour pour te rendre hommage. Ici, mon consulat te prie et te supplie de permettre à celui que tu as préféré à tous, de ne rapporter sa dignité qu’à toi seul. Et que de degrés encore dans cette faveur ! Associé, pour partager cet honneur, à un illustre personnage, mais désigné avant lui, nommé consul par ta volonté, empereur Auguste, je n’ai point subi l’ennui des enclos, du Champ de Mars, des suffrages, des points, des pièces de monnaie... Je n’ai point pressé les mains du peuple, troublé dans mes salutations par la rencontre d’un concurrent, je n’ai point confondu les noms de mes amis, je ne leur ai point imposé des noms étrangers, je n’ai point parcouru les tribus, je n’ai point flatté les centuries, je n’ai point tremblé à l’appel de chaque classe, je n’ai rien déposé chez le séquestre, je n’ai fait aucun pacte avec le distributeur.
Peuple romain, Champ de Mars, ordre des chevaliers, rostres, enclos, sénat, curie, Gratien seul fut tout pour moi.
J’ai le droit d’affirmer, très-grand Auguste, sans nuire à la considération d’aucun de ceux qui jamais à divers titres parviennent à cet honneur ou qui doivent y parvenir (car chacun a son esprit, son mérite, et la conscience de ses actes), j’ai, dis-je, le droit d’affirmer que mon consulat a comme un caractère particulier qui le distingue... (…)

Gregorio Jilio. On ne sait trop qui est ce Gregorius qu'Ausone, lequel par affection, appelle son fils... Souchay pense que c'est celui dont parle Sulpice Sévère à la fin du livre de son Histoire sacrée, qui est préfet des Gaules en 383, et ami de Symmaque (liv. vu , lelt. 88), qui lui adresse plusieurs lettres (liv. m, lettr. 17 et suiv.). On trouve un autre Gregorius intendant des vivres en 376. (Voir Tillemont, Hist. des Emp., t. v, p. 146, 147 et 722.) On peut croire, par l'amitié qui unissait Gregorius à Symmaque, qu'Ausone appelle aussi son fils, que la conjecture de Souchay a quelque fondement.
Grégoire a au moins un fils qui, suivant la coutume de la plupart de nos jeunes Gaulois de ce temps-là, va à Rome hanter le barreau. Nous avons une lettre par laquelle Symmaque qui est prié de veiller sur ses études, le recommande à Messala, homme habile dans les lettres, et depuis préfet d'Italie).
Symmaque, dans cette lettre, parle de Grégoire comme d'un homme du premier mérite, qui n'est plus au monde. De sorte qu'il meurt quelques années avant la fin de ce IVe siècle. Il ne nous reste plus aujourd'hui aucun monument de cette grande éloquence que Symmaque admire si fort en lui, et qui lui fait dire en lui parlant à lui-même : Oratinne mirabilis es. » (Histoire littéraire de la France, t. i, 2e part. , p. 3qo.)

« Amour reposait un jour, abattu, l'enfant sous l'aile du sommeil, parmi des branches de myrte, sur des herbes blanches de rosée. Autour de lui se lèvent, sorties de la cour ténébreuse de Pluton, les âmes dont son flambeau cruel a fait le supplice.
Voici mon chasseur, dit Phèdre, enchaînons-le ! »
« Coupons-lui le cheveu ! » criait l'inhumaine Scylla.
Progné, la veuve de Colchide : « Perçons-le de mille coups ! »
Didon et Canacé : «Exterminons-le par le glaive cruel ! »
Myrrha: « Avec mes branches ! »
Evadné: « Qu'il brûle dans les flammes ! »
Arélhuse et Byblis: « Qu'il périsse dans les flots ! »
Mais Amour qui s'éveille : « Envolons-nous, mes ailes! »...

Dans son gouffre azuré la Moselle déchaîne un océan, et roule mollement de grandes eaux. Elle caresse le gazon printanier qui parfume ses rives, et baigne, en l'effleurant de son onde, la chevelure des prairies. A sa droite coule un fleuve appelé Salia (la Seille), mais qui traîne en son cours de plus pauvres vagues. Ses flots transparents pénètrent dans la Moselle : Il accroît ainsi la force de l'autre, et périt lui-même. Fondée en ce lieu, majestueuse , éclatante, Mettis (Metz) est fière des poissons qui, de part et d'autre, assiègent ses flancs. Son délicieux paysage s'égaye des champs qui fleurissent : Ici vous contemplez des guérets en culture, là vous voyez des roses, et devant vous des coteaux que le pampre revêt de son ombrage : Tous les produits se disputent ces fertiles campagnes. »

La Naïade n'a pas été sourde à l'appel du poète, elle l'a fort bien inspiré dans la description des différents poissons de la Moselle. Les anciens commentateurs d'Ausone n'ont pas toujours vu clair dans l'interprétation de ce morceau. Peu confiant dans leurs assertions souvent contradictoires, et n'ayant personnellement aucune des connaissances nécessaires pour décider entre eux et rectifier leurs erreurs, j'ai eu recours, aujourd'hui que la science a fait de grands progrès en cette matière, aux lumières des maîtres. M. A. Valenciennes, professeur au Muséum d'histoire naturelle, au nom duquel de savantes recherches sur l'histoire des poissons ont acquis une autorité imposante, a bien voulu m'expliquer les difficultés du texte d'Ausone, et, grâce à ses conseils éclairés, j'ai pu éviter les méprises assez nombreuses où sont tombés la plupart des interprètes qui m'ont précédé.
« Cette esquisse a d'autant plus de mérite qu'Ausone n'y est point tombé dans sa faute ordinaire : Il n'a point surchargé de détails ces légères images. Au lieu d'accumuler, il a choisi, et son choix a été si heureux , que je ne crains pas de rapprocher ce passage d'une strophe charmante du Tasse (La Gerusal. liber., c. xv, st. 58) dont le sujet est le même :
« S'en vont jouant par l'onde claire deux fillettes au doux babil, à la folâtre allure, qui, tantôt se jettent de l'eau au visage, tantôt font un défi à qui arrivera la première à un but marqué. Elles plongent alors, et, après avoir caché leur course, elles découvrent enfin leur tête et leurs épaules. »
Quelle que soit la grâce de cette peinture, les jeux des Naïades d'Ausone ont quelque chose de plus piquant C'est avec goût qu'Ausone ne prolonge pas sa description. En effet, il ne peint point une scène dont il ait été témoin , il raconte ou suppose une tradition. Son sujet lui refuse des détails plus précis : il ne pouvait, comme fait ensuite le Tasse, développer sous nos jeux de blonds cheveux tout ruisselants d'une onde limpide , et des formes voluptueuses que dissimule mal la transparence de l'eau. La peinture du poète latin est donc plus indécise, plus fuyante, sa riante mythologie ne se laisse entrevoir qu'à travers un voile mystérieux, la curiosité est plutôt excitée que satisfaite, ses détails glissants échappent, comme les Naïades, à l'imagination qui les poursuit.
La muse d'Ausone fait comme la bergère de Virgile, elle désire bien qu'on l'aperçoive, mais elle s'enfuit derrière les saules. » (M. Demogeot, Études hist. et liltér. sur Ausone, p. 65.)

L'Homme des champs, (Ai. 1, v. 2g5), dont quelques vers sont imités de la Forêt de Windsor, de Pope.
Sous ces saules touffus, dont le feuillage sombre
A la fraîcheur de l'eau joint la fraîcheur de l'ombre,
Le pêcheur patient prend son poste sans bruit,
Tient sa ligne tremblante, et sur l'onde la suit.
Penché, l'œil immobile, il observe avec joie
Le liège qui s'enfonce et le roseau qui ploie.
Quel imprudent, surpris au piège inattendu,
A l'hameçon fatal demeure suspendu?
Est-ce la truite agile ou la carpe dorée?
Ou la perche étalant sa nageoire pourprée,
Ou l'anguille argentée errant en longs anneaux,
Ou le brochet glouton qui dépeuple les eaux?

Ausone — Wikipédia
https://fr.wikipedia.org/wiki/Ausone
Ausone ou Decius ou Decimus Magnus Ausonius, est né en Aquitaine soit à Bazas (Gironde) ... Le digne et vénérable professeur Ausone approche de sa cinquante-cinquième année, ... Le vieux conseiller, craignant une disgrâce fatale, se retire de la cour de Milan à la mort de Gratien en 383, et s'en retourne à Bordeaux, ...

Ausone et Paulin de Nole, correspondance: introduction, texte latin, ...
https://books.google.fr/books?isbn=3039102478
Decimus Magnus Ausonius, ‎David Amherdt, ‎Paulinus (évêque de Nole.) - 2004 - ‎History
L'année 380 marque le début de la perte d'influence du clan ausonien. ... au plus tard en 383, date de l'assassinat de Gratien, Ausone est de retour à Bordeaux.

Ausone : la montee de l'integrisme religieux durant sa vie
orvinfait.pagesperso-orange.fr/ausone%20religion.htm
Ausone : la montée de l'intégrisme religieux durant sa vie ... Gratien vécut de 359 à 383. ... Cette année là l'empereur Théodose Ier le Grand publia l'édit de ...

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire