21
DECEMBRE 1914
I)
Bataille
de Givenchy : La 1ère Division y arrive le 21 en début de
matinée après une marche de plusieurs heures. A peine reposés, les
Britanniques attaquent à 14h45. La méconnaissance du terrain rend
l'offensive difficile. La 1ère brigade qui doit prendre les lignes
Allemandes face à Givenchy, ne réussit pas à gagner son objectif.
elle conserve cependant le village et les positions abandonnées par
les Indiens le 20.
La
3ème brigade qui attaque les 21 et 22 pour reprendre les positions
perdues par la Sirhind Brigade ne parvient pas à rétablir la ligne
initiale. Ses pertes sont importantes, 844 officiers, sous-officiers
et hommes de troupe sont tués, blessés ou disparus.
La
2e brigade échoue aussi dans sa tentative...
II)
Journal
du rémois Paul Hess (extraits)
« Constaté
ce jour, en allant chez mon beau-frère L.Montier, Place
Amélie-Doublié, combien ce quartier, et en particulier la rue
Lesage, assez mouvementée en temps ordinaire, est triste. Les voies
du chemin de fer abandonnées , les maisons pour la plupart fermées
et l’absence de passants donnent par là une impression de
délaissement et de vide presque complet. »
III)
En
allant toucher chez le receveur municipal les 76 francs, montant de
notre allocation pour logement de nos deux bleus en novembre, je lis
une nouvelle affiche. C’est le discours prononcé ces jours-ci au
Reichstag par le chancelier qui commence par faire voter à la
presque unanimité un subside de guerre de 5 milliards de marks. Puis
vient l’historique de la déclaration de guerre et de la violation
de la Belgique, du point de vue Allemand bien entendu. C’est
l’Angleterre, l’infâme, qui est cause, la seule cause de cette
guerre Européenne, l’Angleterre n’a qu’un mot à dire pour que
la Russie suspende sa mobilisation et que l’Allemagne concilie les
esprits en Autriche et en Russie.
Au
lieu de cela :
L’Angleterre
jalouse de sa principale concurrente commerciale dans le monde, a
choisi ce moment pour exciter contre la nation Allemande, la Russie
La
France « qui veut toujours réparer la brèche de 1870 »
La
Belgique « qui a violé sa propre neutralité »
Le
Japon qui a violé aussi la neutralité de la Chine en s’emparant
du territoire de Kiao-Tcheou, malgré la défense de ses glorieux
combattants... L’Angleterre porte devant Dieu et devant l’histoire
le poids d’une terrible responsabilité...
IV)
Nous
écrivons une carte postale à Jean par la kommandantur pour lui
souhaiter, à l’occasion de ses 31 ans un prompt retour de
captivité. Le froid revient. Nous voudrions lui envoyer un colis de
vêtements chauds, l’employé Allemand dit qu’on ne peut expédier
que de l’argent.
Van
Leynseele ne revient pas de Bruxelles avec ses 150 lettres
consignées, sa belle fille semble inquiète de ne pas le revoir. 3
soldats sont venus demander qu’il se présente à la kommandantur
sitôt sa rentrée. Que lui veut-on ?
En
me rendant avec Suzanne rue de la Blanchemaille, j’ai eu l’occasion
d’une émotion brève mais inattendue. Depuis quelques jours, Maman
désire avoir l’adresse de Mme Bastin, son amie, et femme du consul
d’Allemagne à Roubaix, dans le but d’arriver plus sûrement à
faire parvenir à Jean des effets de laine confectionnés par elle.
Marguerite nous a dit qu’elle saurait par M. Duhamel où Mme Bastin
s’est retirée. Or, au moment où nous nous engagions dans la rue
de la Fosse-aux-Chênes, voici que j’aperçois, venant vers nous,
le dit M. Duhamel. J’ai à peine remarqué qu’un gros-bleu du
42e, fusil sur l’épaule, marche sur le même front que lui, et à
un bon mètre à gauche. Sur le champ, l’idée me vient de demander
à M. Duhamel l’adresse désirée, mais j’ai à peine dit les
premiers mots que le dogue, auquel je suis loin de penser, se met à
gesticuler devant moi avec des accents furibonds.
Il
conduit M. Duhamel pour un interrogatoire à la kommandantur et ne
prononce que des « Nichts… »... Et qu’il n’est pas permis de
parler aux prisonniers ! J’en reste baba, et ma pauvre petite
Suzanne elle-même est toute interloquée de voir grand-père ainsi
houspillé dans la rue par un Allemand.
Nous
tournons la rue du Fontenoy que la brute n’a pas encore achevé ses
imprécations. Là un rassemblement s’est formé et des gens me
demandent ce que j’ai pu dire ou faire pour m’attirer pareilles
menaces... J’explique que je crois avoir rencontré M. Duhamel seul
comme souvent, et que j’ai voulu lui demander un renseignement. Les
voisins me disent à leur tour que l’habitation de M. Craye au n°
23 est convertie en prison pour civils et qu’à chaque instant on
en voit passer, accompagnés de gardes de la Landsturm, pour être
interrogés à la kommandantur.
M.
Eugène Motte lui-même a été ces jours-ci appelé à s’expliquer
sur un cas particulier. Notre ancien maire se serait exprimé, selon
sa façon libre et coutumière, en présence des officiers qui logent
chez lui, en répondant à leurs éloges du kaiser, par des louanges
à l’adresse de nos généraux. Puis, à leur observation de dire «
Sa majesté » en parlant de l’empereur, il aurait répliqué qu’il
ne disait pas toujours « Son excellence » en désignant M.
Poincaré. L’histoire dit que, par sa rondeur habituelle, M. Motte
aurait réussi à faire sourire ses juges et à les désarmer...
V)
En
mettant un peu d’ordre dans mes vieilles paperasses, je tombe sur
des notes prises autrefois pour ainsi dire sous la dictée de mes
grands-parents et je vais profiter de cette journée de tristes
loisirs pour en tirer au moins ce qui concerne les diverses
occupations ennemies à Roubaix et en mettre le récit résumé un
peu plus au net, chose que je n’ai jamais pu faire.
Ma
grand-mère Dengremont (Marie-Louise Thiry) en particulier, se
plaisait à raconter que, née en 1781 à Willems, elle avait assisté
à de graves événements pendant la période de 1792 à 1795. Dès
septembre 1792, un corps d’armée Autrichien surgit devant Lille et
pendant 8 jours, les bombes incendiaires firent rage sur la cité
vaillamment défendue par les Gardes nationaux du général Ruault.
Pendant
ce siège, les environs de Roubaix furent pillés par les alliés
(Autrichiens, Prussiens et Anglais) et les habitants molestés. Ma
grand-mère se souvenait qu’encore toute gamine, s’étant
aventurée un jour avec de petites compagnes dans la direction de
Lille, d’où venaient les échos des obusiers ennemis, elle avait
failli payer cher sa curiosité d’enfant. Ce jour-là, surprise par
des troupes en fuite, elle dut prendre les jambes à son cou pour
regagner le logis paternel à Willems, à travers champs, sous la
fusillade de soudards Autrichiens poursuivis par l’armée de
Dumouriez qui accourait de Valmy au secours des Lillois (8
octobre)...
En
1793, alors qu’en plus de l’invasion étrangère, la terreur
sévissait jusque dans les provinces, ma grand-mère fit sa première
communion dans une grange du village, en cachette, grâce à un
prêtre « inassermenté » qui lui-même se dissimulait
sous un costume civil et portait secrètement les Divines Espèces.
21
ans plus tard, en 1814, après notre défaite de Leipzig, les Alliés
envahirent de nouveau le nord de la France. Ma grand-mère,
orpheline, dirigeait une fabrique de tissus qu’elle tenait de ses
parents qui étaient venus s’installer à Roubaix rue de la
Fosse-aux-Chênes, 44. C’est là que mon grand-père, Julien
Dengremont, vint l’épouser le 26 juillet 1813 et prendre la
direction des affaires commerciales.
Ici,
leurs souvenirs peuvent être joints à ceux de mon grand-père
paternel, Joseph Destombes, lui aussi fabricant de tissus, 15, rue
Nain, et aux quelques notes qui m’ont été fournies par notre
oncle, Mgr J.B. Destombes. L’armée du Nord, dirigée par
Bernadotte, ancien maréchal de France, roi de Suède, et devenu à
cause de sa haineuse jalousie pour Napoléon, l’allié d’Alexandre
de Russie, occupa la Belgique et, comme l’armée Allemande fin août
dernier, franchit bientôt notre frontière.
Le
1er février 1814, les troupes Françaises qui cantonnaient à
Roubaix furent obligées de se retirer sur la Marque. Le lendemain,
l’ennemi fit son apparition sur la grand place, et les jours
suivants, poussa des reconnaissances jusqu’à Lannoy.
Après
la prise de Paris et le retour de Louis XVIII, les troupes alliées
envahirent les départements et occupèrent militairement le
territoire pendant environ trois années. Des corps Saxons prirent
leur cantonnement dans le Nord : L’état-major du 1er
bataillon d’infanterie légère et trois compagnies arrivèrent de
Roubaix en février 1816. Ils furent logés chez l’habitant.
La
présence des Saxons avait laissé dans l’esprit de mes
grands-parents un souvenir très vivace. J’ai moi-même entendu
répéter par mon père que, d’après le récit de ses parents, les
deux Saxons, logés chez eux, 15 rue Nain, l’avaient quelquefois
fait danser sur leurs genoux ainsi que nos gros bleus de la Landsturm
faisaient ces derniers jours avec petit Pierre en lui donnant du
chocolat.
Au
moment où cessa l’occupation de Roubaix, c’est-à-dire le 17
octobre 1818, mon père, Louis Destombes, avait 20 mois, étant né
le 2 février 1817. A son tour, il narrait avec plaisir le passage
des Français allant au siège d’Anvers en 1832.
VI)
Hier
soir, canonnade et fusillade violentes sur la droite, du côté
Herleville. Je dormais d’un bon sommeil, quand soudain, vers 22h,
une fusillade assez violente vient me réveiller en sursaut.
Stefanaggi sort pour voir de quoi il s’agit. Il ne peut le savoir
au juste, d’ailleurs le calme se rétablit bien vite : Une
sentinelle, sans doute, a été surprise : D’où la fusillade.
Bref, j’ignore le fin mot de l’affaire... J’ai mal reposé
cette nuit. Il pleuvait, il faisait froid, ce matin, je me suis
réveillé tout courbaturé. J’ai demandé de travailler au boyau
pour me réchauffer, mais je ne me sens plus le même courage
qu’hier. La relève des travailleurs se fait au bout d’une heure…
Il
pleut ! Que les tranchées sont donc tristes quand il pleut !…
Quelle boue ! Chacun demeure accroupi au fond de son terrier,
et, moi, je rentre comme tout le monde.
J’en
profite pour casser la croûte : Beurre, jambon, chocolat et
fumer une pipe. Pendant ce temps-là, du même côté qu’hier au
soir, très violente canonnade.
Midi :
Le ciel s’éclaircit, le soleil vient nous réchauffer un peu.
Le
soir, une heure et demie de travail au boyau… Mais je commence à
en avoir assez. Je n’ai pas l’habitude de manier pelle et pioche.
J’ai faim, je tire de ma musette une boite de tripes à la mode de
Caen et m’en régale.
VII)
L’histoire
de l'Océanie Française montre de nombreux cas d’antagonisme entre
pouvoir civil et pouvoir militaire comme celui qui a éclaté à
Tahiti entre août et décembre 1914. C’est l’un de ces cas
(sinon le plus) intéressant(s), d’un conflit qui dégénère tant
en raison des circonstances que de la personnalité des deux hommes
en présence. Devenu commandant de la place d’armes de Tahiti en
août 1914, le lieutenant de vaisseau Maxime Destremau est chargé
d'organiser la défense de la colonie sous l’autorité du
gouverneur William Fawtier, avec l’aval du Conseil de défense de
la colonie. L’un et l’autre doivent prendre de nombreuses
décisions pratiques et gérer une situation qu’ils n’ont jamais
connue depuis le début de leur carrière. Normalement, leurs
prérogatives n’entrent pas en concurrence, chacun ayant ses
propres responsabilités dans des domaines différents. Les rapports
tendus que les deux hommes entretiennent sont également le reflet de
problèmes récurrents dans les Établissements Français de
l’Océanie depuis la fin de l’administration directe par des
gouverneurs issus de la Marine.
Lorsque
la Première Guerre mondiale est déclarée, la priorité, pour le
représentant de l’autorité militaire, est de préserver
l’intégrité du territoire sans autre alternative possible. Le
gouverneur voit en premier lieu la conservation de l’autorité de
l’État, mais il a aussi (et peut-être surtout ?) le souci de
préserver la vie économique de la colonie qui, si elle vient à
s’altérer, menace l’ordre public. Conflit de fonction, conflit
de responsabilités, il est nécessaire d’approfondir les raisons
qui ont poussé le gouverneur Fawtier à mener une politique pour le
moins conciliante envers les compagnies commerciales Allemandes
présentes dans les EFO et à s’opposer à Destremau tout en le
laissant décider seul le jour du bombardement de Papeete.
Quelques
rappels : Le désengagement des forces armées dans les colonies
et dans les EFO en particulier est entrepris depuis le début du
siècle. Le Bataillon d’Infanterie coloniale de la
Nouvelle-Calédonie, créé en 1903, n’entretient plus qu’un
détachement de 25 hommes à Tahiti. Il reste cependant dans les EFO
une canonnière, la Zélée, commandée par le lieutenant de vaisseau
Destremau, sous l’autorité du contre-amiral Albert-Marie Huguet,
57 ans, commandant de la division navale d’Extrême-Orient. C’est
le gouverneur Repiquet, à Nouméa qui est le commissaire général
de la République dans le Pacifique, responsable de la mobilisation
des Français en Océanie. L’absence totale de communications dès
le début de la guerre avec Nouméa rend inapplicable de décret du
26 mai 1903 qui place militairement la colonie des Établissements
Français d’Océanie sous le contrôle du commandant supérieur des
troupes de la Nouvelle-Calédonie. Il est possible d’examiner la
situation à Papeete entre août et décembre 1914 pour tenter de
comprendre comment un officier supérieur qui a été nommé presque
« par défaut » commandant de la place d’armes, peut écrire 2
mois plus tard à son épouse : « Je suis maintenant le chef réel
de la colonie. » Il faut décrire les mécanismes d’État
dans cette colonie si éloignée de la métropole, explorer
l’environnement militaire et politique et leurs éventuels
dysfonctionnements tout comme les prises de pouvoir incongrues. Nous
verrons en quoi le type d’organisation et l’état d’esprit des
officiers supérieurs impliqués ont pu être responsable d’un «
dérapage ».
Enfin,
il faut aussi considérer les événements à partir d’une analyse
qui tend à mieux discerner le spectre des interactions mises en jeu
et de vérifier en quoi les profondes querelles politiques qui
secouent la société Tahitienne ont influé sur le comportement et
la réflexion tant du corps militaire que du gouverneur en place.
Destremau
est bien loin d'être le seul à exprimer son désaccord contre la
politique de Fawtier, c'est aussi le cas d'une partie de la
population et particulièrement de l'administrateur des Tuamotu qui
reproche au gouverneur de ne pas avoir pris des mesures suffisamment
coercitives à l'égard des Allemands et des Autrichiens dans les
archipels. Néanmoins, le gouverneur justifie sa politique vis à vis
des Allemands au consul des États-Unis qui les représente : « Ils
ne sont pas en effet des malfaiteurs, mais, comme vous le faites
remarquer des infortunés. »
LE BARON ROUGE |
Destremau
envoie ce rapport un mois après l’événement. Certains
responsables sont vilipendés, d’autres sont au contraire loués.
Enfin, il signale que tous les officiers et les membres de l’équipage
de la Zélée ont assumé leur rôle. Destremau apporte également
dans ce rapport, une justification aux décisions qu’il a prises et
qui n’étaient pas de sa responsabilité : « Il me paraît établi
que si le Gouverneur Fawtier avait commandé effectivement le 22
septembre, la ville aurait été rendue et la colonie serait
Allemande. Devant ce fait, j’ai cru de mon devoir de négliger sa
présence et d’agir seul. Il ne s’est d’ailleurs nullement
opposé à cette manière de faire.» Le même jour, il écrit à sa
femme une lettre assez surprenante émanant d’un officier supérieur
: « Et le gouverneur qui voulait se rendre ! J'avais posté derrière
lui un brave type avec un bon revolver et l'ordre de lui brûler la
cervelle s'il faisait mine d'amener le pavillon Français. Il ne s'y
est pas frotté et a préféré fout'le camp chez les curés, à la
Mission avec les femmes et les enfants. Depuis ce jour-là, il n'est
pas très fier et je le tiens. »
Le
27 novembre, le Montcalm arrive à Papeete. Jusqu’au 1er décembre
1914, l’émissaire du ministre peut donc instruire l’affaire.
L’objectif de son enquête est de déterminer l’attitude et les
responsabilités tant du gouverneur que du commandant des troupes
depuis le début de la guerre et lors du bombardement de Papeete puis
de tenter de comprendre le conflit d’autorité qui a conduit aux
événements des journées des 31 octobre, 1er, 2 et 3 novembre 1914.
Fawtier et Destremau ont préalablement, chacun de leur côté,
établi des dossiers qu’ils ont remis à Huguet. L’amiral dispose
de quatre dossiers : Le rapport du gouverneur Fawtier en date du 20
novembre, les quatre rapports du lieutenant de vaisseau Destremau
datés des 21 septembre, 21 et 22 octobre et 17 novembre, un rapport
du gouverneur portant sur la réfutation des principaux points de
l’accusation du commandant et le compte-rendu de la rencontre
qu’Huguet a eue avec le gouverneur.
Le
jugement du contre amiral ne porte que sur l’aspect de la défense
de Papeete et les marins de la Zélée. L’émissaire du
gouvernement reste strictement dans le cadre des textes de loi : Il
justifie le bien-fondé des décisions du gouverneur par le décret
du 7 octobre 1912 sur le service des Places, qui fait du gouverneur
le seul chef responsable de la défense de la colonie, et par la date
d’arrivée quasi officielle de la déclaration de guerre le 29
août, puis des décrets ministériels consécutifs. S’il admet les
décisions justifiées, l’attitude courageuse et le réel
patriotisme de Destremau lors du bombardement de Papeete, Huguet
stigmatise l’attitude ambiguë du commandant des troupes qui,
malgré de sourdes critiques à l’égard du gouverneur, continue à
déjeuner une fois par semaine à la Résidence (avec les membres du
Conseil de Défense) et a accepté que le gouverneur le propose pour
la croix d’officier de la Légion d’Honneur.
En
outre, Huguet renouvelle les remarques qu’il a faites lors de sa
précédente inspection de la Zélée sur le manque d’entretien de
la canonnière, la désinvolture des marins et la familiarité de
Destremau envers son équipage.
Le
contre-amiral dénonce également les dépenses excessives dues aux
réquisitions exigées par Destremau et qui dépassent largement les
possibilités du budget de la colonie. Enfin, Huguet relève que la
correspondance de Destremau à plusieurs chefs d’administration de
la colonie et surtout au gouverneur est extrêmement irrespectueuse.
Au
travers de toutes ses remarques, Huguet démontre que le champ
d’intervention de Destremau est allé au-delà des limites de sa
fonction. Dans son rapport d’enquête, l’amiral dénonce
l’inanité du jugement de Destremau envers le gouverneur : « M.
Fawtier n'a nullement manqué de courage ou de sang-froid, il n'a
nullement fui, il s'est toujours trouvé là où l'appelait son
devoir de gouverneur. Quant à lui reprocher d'avoir été prêt à
rendre la ville à l'ennemi, il s'agit là d'une accusation dénuée
de tout fondement... »
Il
relève, d’un rapport à l’autre, les changements d’appréciation
de Destremau sur le gouverneur : « ces allégations sont donc
le travail mental du mois suivant. » Enfin, Huguet, qui a pris la
mesure des luttes d’influence entre les Tahitiens, dénonce
l’ingérence et le parti pris de Destremau dans les particularismes
de la vie locale ce qui expliquerait le manque d’autorité de
Destremau sur ses officiers qui abusent de la situation. Il ajoute
que en outre « Cet état d’esprit s’exalte de la violence de
quelques officiers (…) et de l’importance souveraine qu’ils
s’attribuent tous à leur rôle de Défenseurs de la Colonie. Ils
s’y donnent certes de tout cœur, mais en même temps se
considèrent comme au dehors de toutes les lois, de tous les
règlements, la nécessité de la Défense primant tout. N’étant
pas tenus en bride par leur Commandant, ils ont fini par se croire
tout permis…»
Et
l'amiral d’affirmer que « leur attitude et leurs actes sont
en partie responsables des graves désordres provoqués dans la
colonie depuis le début de la guerre. » Le lieutenant de vaisseau
Destremau n’est donc pas seul responsable. Durant l’enquête,
Destremau a mesuré les excès de son attitude, attendant la
sentence, il écrit à son épouse : « Si je suis brisé, je ne
pourrai que me reprocher d'avoir agi trop vite, et pas assez
habilement... Si je perds ma carrière, ce ne sera pas au moins par
une action basse ou malhonnête... ».
Le
contre-amiral a donc entièrement adhéré à la version du
gouverneur et c’est ce qu’il écrit à celui-ci le 2 décembre :
« J’ai l’honneur de porter à votre connaissance que de
l’enquête dont j’ai été chargé, résulte l’inanité des
accusations portée par Monsieur le Lieutenant de Vaisseau Destremau
à votre égard. J’estime que les menaces dont vous avez été
l’objet aussi bien que l’attitude à votre égard de Monsieur
Destremau et d’un certain nombre d’officiers de la Zélée ne
leur permettent pas de rester dans la Colonie. J’ai donc décidé
le renvoi de Monsieur Destremau à la disposition du ministre de la
Marine et de remplacer une partie de l’État-major.»
Après
la décision de l’amiral, Destremau écrit à son épouse : « Je
n'ai plus rien à faire maintenant dans la Marine. » Les désaccords
nombreux survenus entre le contre-amiral Huguet lors de ses
inspections et le lieutenant de vaisseau Destremau expliquent en
partie pourquoi le chef de la division navale d’Extrême-Orient a
préféré privilégier la version du gouverneur. Il est également à
remarquer que le contre-amiral Huguet a lui aussi utilisé, lors de
son enquête, les mêmes moyens que ceux qu’il reproche au
lieutenant de vaisseau : Les on-dit, la rumeur. « La véracité de
ces témoignages – si contradictoires – ne faisait cependant pas
de doute dans mon esprit. » rapporte-t-il au ministre de la
Marine le 13 décembre 1914.
L’enquête
terminée le 3 décembre, le Montcalm reprend sa croisière.
Destremau, relevé de son commandement et condamné à 2 mois
d’arrêts, va regagner la métropole. Malgré quelques regrets,
dans toute sa correspondance ultérieure, Destremau ne change pas
d’opinion sur le gouverneur Fawtier et estime que ce qu’il a
accompli était parfaitement légitime et bien en accord avec sa
conscience de patriote.
Il
écrit sa certitude de s’entendre donner raison par le Conseil de
Guerre le jour venu. Mais à son arrivée à Marseille, le 1er
février 1915, le préfet maritime de Toulon lui confie
provisoirement le commandement d'un torpilleur d'escadre en
Méditerranée, le Boutefeu.
SIMILITUDE |
Cependant,
le dossier de Maxime Destremau, établi par la 3e section de l’État
Major Général en date du 15 février 1915, évoque des «
irrégularités graves dans le fonctionnement de la Justice Militaire
» à Papeete, ce qui permet une révision des conditions de
condamnation des marins de la Zélée. La direction militaire des
services de la flotte préconise de s’en tenir aux sanctions prises
par le contre-amiral Huguet sans recours au Conseil de guerre. Tombé
gravement malade, Destremau meurt moins d’un mois plus tard. Puis,
en octobre 1915, la mémoire du lieutenant de vaisseau Destremau est
lavée de tout soupçon. Il sera cité à titre posthume à l’ordre
de l’armée et recevra la croix de guerre avec palme et obtiendra,
à titre posthume, la Légion d’honneur : « Commandant la
défense de Tahiti, après le désarmement de la Zélée, a su,
malgré le peu de concours apporté par les autorités locales,
organiser la défense de l’île… »
VIII)
21
décembre 1914, le soir de ce jour, de grosses pièces traversent la
ville, montant par la rue Cérès, pour aller prendre position :
Nuit calme.
Bombardement
dans la matinée, les obus tombent boulevard de la République, rue
de la Justice et environs.
-
A 13h30, je suis à la Haubette, où j'ai dû me rendre sur une
convocation adressée à tous les hommes exemptés et réformés des
classes 1887 à 1909, pour passer devant le conseil de révision,
siégeant depuis plusieurs jours dans la salle des fêtes du pont de
Muire.
La
cour est remplie d'assujettis et l'opération terminée, j'ai le
plaisir de rencontrer là des amis. Presque tous sont déclarés bons
ou classés dans l'auxiliaire, avec ma malheureuse infirmité, je
reste exempté. Dans la matinée, mon beau-frère Montier, à été
reconnu bon.
-
Au retour, je puis me rendre compte que si la population est très
dense, dans ce quartier de la Haubette et dans le faubourg de Paris,
cela va vite en décroissant suivant que l'on rentre en ville. Les
promeneurs se raréfient à partir du milieu de la rue de Vesle et
leur nombre se réduit de plus en plus, au point qu'on ne voit plus
personne du côté de la place Royale.
Les
plaintes parviennent nombreuses à la police, contre des individus
inconnus, qui ont pénétré nuitamment dans des maisons bombardées
ou momentanément abandonnées par leurs légitimes occupants.
Deux
arrestations ont été opérées avant-hier.
Rappelons
que les pillards s'exposent à des peines très sévères, en raison
du caractère odieux que revêtent ces cambriolages.
Lundi
21 - Nuit très calme. Bombes vers 10h matin.
Visite
aux Fournaux économiques : rue Brûlée 15 et rue Fery. Le premier
tenu par les Sœurs de l'Espérance, le 2e par Sœur Stéphanie et
Filles de la Charité. On y distribue plus de 50 rations, parce qu'il
n'y a plus personne qui donne des bons. Les autres années, en temps
ordinaire on distribuait jusqu'à 10 000 rations par jour.
A
10h30 une grosse bombe a pulvérisé l'autel moyen de Saint
Jean-Baptiste de la Salle.
Aujourd'hui
ouverture du : Fourneau de Sainte Geneviève.
Reçu
la réponse du Cardinal Gasparri, datée du 17 décembre
« Cardinal
Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. Travaux de
l’Académie Nationale de Reims »
IX)
Toujours
du temps gris, toujours vive canonnade et bombes pour ne pas en
perdre l'habitude. De nombreuses victimes au cours de cette journée,
surtout des enfants. Le père Bastien, commis chez Carton rue Henri
IV est du nombre des victimes.
La
nuit, Canonnade et quelques bombes
« Carnet
d'Eugène Chausson durant la guerre de 1914-1918
Voir
ce beau carnet sur le site de sa petite-fille Marie-Lise Rochoy »
21
décembre 1914, le soir de ce jour, de grosses pièces ...
www.reims14-18.com/.../21-decembre-1914-le-soir-de-ce-jour-de-gross...
21
déc. 2014 - Nuit calme. Bombardement dans la matinée, les obus
tombent boulevard de la République, rue de la Justice et environs. -
A 13 h 1/2, je suis à ...
Le
21 décembre 1914 dans les tranchées - 21/12/2014 - La ...
www.lanouvellerepublique.fr/.../21/Le-21-decembre-1914-dans-les-tranc...
21
déc. 2014 - Il y a 100 ans, le 21 décembre 1914, bonnes et
mauvaises nouvelles arrivaient en flot ininterrompu : « Madame B.
nous dit avoir de bonnes ...
Le
21 décembre 1914 dans les tranchées - 21/12/2014 - La ...
www.lanouvellerepublique.fr/.../21/Le-21-decembre-1914-dans-les-tranc...
21
déc. 2014 - Il y a 100 ans, le 21 décembre 1914, bonnes et
mauvaises nouvelles arrivaient en flot ininterrompu : « Madame B.
nous dit avoir de bonnes ...
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