vendredi 26 juin 2015

21 DECEMBRE 1914 LA GRANDE GUERRE AU JOUR LE JOUR

21 DECEMBRE 1914


I)
Bataille de Givenchy : La 1ère Division y arrive le 21 en début de matinée après une marche de plusieurs heures. A peine reposés, les Britanniques attaquent à 14h45. La méconnaissance du terrain rend l'offensive difficile. La 1ère brigade qui doit prendre les lignes Allemandes face à Givenchy, ne réussit pas à gagner son objectif. elle conserve cependant le village et les positions abandonnées par les Indiens le 20.
La 3ème brigade qui attaque les 21 et 22 pour reprendre les positions perdues par la Sirhind Brigade ne parvient pas à rétablir la ligne initiale. Ses pertes sont importantes, 844 officiers, sous-officiers et hommes de troupe sont tués, blessés ou disparus.
La 2e brigade échoue aussi dans sa tentative...

II)
Journal du rémois Paul Hess (extraits)
« Constaté ce jour, en allant chez mon beau-frère L.Montier, Place Amélie-Doublié, combien ce quartier, et en particulier la rue Lesage, assez mouvementée en temps ordinaire, est triste. Les voies du chemin de fer abandonnées , les maisons pour la plupart fermées et l’absence de passants donnent par là une impression de délaissement et de vide presque complet. »

III)
En allant toucher chez le receveur municipal les 76 francs, montant de notre allocation pour logement de nos deux bleus en novembre, je lis une nouvelle affiche. C’est le discours prononcé ces jours-ci au Reichstag par le chancelier qui commence par faire voter à la presque unanimité un subside de guerre de 5 milliards de marks. Puis vient l’historique de la déclaration de guerre et de la violation de la Belgique, du point de vue Allemand bien entendu. C’est l’Angleterre, l’infâme, qui est cause, la seule cause de cette guerre Européenne, l’Angleterre n’a qu’un mot à dire pour que la Russie suspende sa mobilisation et que l’Allemagne concilie les esprits en Autriche et en Russie.
Au lieu de cela :
L’Angleterre jalouse de sa principale concurrente commerciale dans le monde, a choisi ce moment pour exciter contre la nation Allemande, la Russie
La France « qui veut toujours réparer la brèche de 1870 »
La Belgique « qui a violé sa propre neutralité »
Le Japon qui a violé aussi la neutralité de la Chine en s’emparant du territoire de Kiao-Tcheou, malgré la défense de ses glorieux combattants... L’Angleterre porte devant Dieu et devant l’histoire le poids d’une terrible responsabilité...
IV)
Nous écrivons une carte postale à Jean par la kommandantur pour lui souhaiter, à l’occasion de ses 31 ans un prompt retour de captivité. Le froid revient. Nous voudrions lui envoyer un colis de vêtements chauds, l’employé Allemand dit qu’on ne peut expédier que de l’argent.
Van Leynseele ne revient pas de Bruxelles avec ses 150 lettres consignées, sa belle fille semble inquiète de ne pas le revoir. 3 soldats sont venus demander qu’il se présente à la kommandantur sitôt sa rentrée. Que lui veut-on ?

En me rendant avec Suzanne rue de la Blanchemaille, j’ai eu l’occasion d’une émotion brève mais inattendue. Depuis quelques jours, Maman désire avoir l’adresse de Mme Bastin, son amie, et femme du consul d’Allemagne à Roubaix, dans le but d’arriver plus sûrement à faire parvenir à Jean des effets de laine confectionnés par elle. Marguerite nous a dit qu’elle saurait par M. Duhamel où Mme Bastin s’est retirée. Or, au moment où nous nous engagions dans la rue de la Fosse-aux-Chênes, voici que j’aperçois, venant vers nous, le dit M. Duhamel. J’ai à peine remarqué qu’un gros-bleu du 42e, fusil sur l’épaule, marche sur le même front que lui, et à un bon mètre à gauche. Sur le champ, l’idée me vient de demander à M. Duhamel l’adresse désirée, mais j’ai à peine dit les premiers mots que le dogue, auquel je suis loin de penser, se met à gesticuler devant moi avec des accents furibonds.
Il conduit M. Duhamel pour un interrogatoire à la kommandantur et ne prononce que des « Nichts… »... Et qu’il n’est pas permis de parler aux prisonniers ! J’en reste baba, et ma pauvre petite Suzanne elle-même est toute interloquée de voir grand-père ainsi houspillé dans la rue par un Allemand.

Nous tournons la rue du Fontenoy que la brute n’a pas encore achevé ses imprécations. Là un rassemblement s’est formé et des gens me demandent ce que j’ai pu dire ou faire pour m’attirer pareilles menaces... J’explique que je crois avoir rencontré M. Duhamel seul comme souvent, et que j’ai voulu lui demander un renseignement. Les voisins me disent à leur tour que l’habitation de M. Craye au n° 23 est convertie en prison pour civils et qu’à chaque instant on en voit passer, accompagnés de gardes de la Landsturm, pour être interrogés à la kommandantur.

M. Eugène Motte lui-même a été ces jours-ci appelé à s’expliquer sur un cas particulier. Notre ancien maire se serait exprimé, selon sa façon libre et coutumière, en présence des officiers qui logent chez lui, en répondant à leurs éloges du kaiser, par des louanges à l’adresse de nos généraux. Puis, à leur observation de dire « Sa majesté » en parlant de l’empereur, il aurait répliqué qu’il ne disait pas toujours « Son excellence » en désignant M. Poincaré. L’histoire dit que, par sa rondeur habituelle, M. Motte aurait réussi à faire sourire ses juges et à les désarmer...

V)
En mettant un peu d’ordre dans mes vieilles paperasses, je tombe sur des notes prises autrefois pour ainsi dire sous la dictée de mes grands-parents et je vais profiter de cette journée de tristes loisirs pour en tirer au moins ce qui concerne les diverses occupations ennemies à Roubaix et en mettre le récit résumé un peu plus au net, chose que je n’ai jamais pu faire.

Ma grand-mère Dengremont (Marie-Louise Thiry) en particulier, se plaisait à raconter que, née en 1781 à Willems, elle avait assisté à de graves événements pendant la période de 1792 à 1795. Dès septembre 1792, un corps d’armée Autrichien surgit devant Lille et pendant 8 jours, les bombes incendiaires firent rage sur la cité vaillamment défendue par les Gardes nationaux du général Ruault.
Pendant ce siège, les environs de Roubaix furent pillés par les alliés (Autrichiens, Prussiens et Anglais) et les habitants molestés. Ma grand-mère se souvenait qu’encore toute gamine, s’étant aventurée un jour avec de petites compagnes dans la direction de Lille, d’où venaient les échos des obusiers ennemis, elle avait failli payer cher sa curiosité d’enfant. Ce jour-là, surprise par des troupes en fuite, elle dut prendre les jambes à son cou pour regagner le logis paternel à Willems, à travers champs, sous la fusillade de soudards Autrichiens poursuivis par l’armée de Dumouriez qui accourait de Valmy au secours des Lillois (8 octobre)...
En 1793, alors qu’en plus de l’invasion étrangère, la terreur sévissait jusque dans les provinces, ma grand-mère fit sa première communion dans une grange du village, en cachette, grâce à un prêtre « inassermenté » qui lui-même se dissimulait sous un costume civil et portait secrètement les Divines Espèces.
21 ans plus tard, en 1814, après notre défaite de Leipzig, les Alliés envahirent de nouveau le nord de la France. Ma grand-mère, orpheline, dirigeait une fabrique de tissus qu’elle tenait de ses parents qui étaient venus s’installer à Roubaix rue de la Fosse-aux-Chênes, 44. C’est là que mon grand-père, Julien Dengremont, vint l’épouser le 26 juillet 1813 et prendre la direction des affaires commerciales.

Ici, leurs souvenirs peuvent être joints à ceux de mon grand-père paternel, Joseph Destombes, lui aussi fabricant de tissus, 15, rue Nain, et aux quelques notes qui m’ont été fournies par notre oncle, Mgr J.B. Destombes. L’armée du Nord, dirigée par Bernadotte, ancien maréchal de France, roi de Suède, et devenu à cause de sa haineuse jalousie pour Napoléon, l’allié d’Alexandre de Russie, occupa la Belgique et, comme l’armée Allemande fin août dernier, franchit bientôt notre frontière.
Le 1er février 1814, les troupes Françaises qui cantonnaient à Roubaix furent obligées de se retirer sur la Marque. Le lendemain, l’ennemi fit son apparition sur la grand place, et les jours suivants, poussa des reconnaissances jusqu’à Lannoy.

Après la prise de Paris et le retour de Louis XVIII, les troupes alliées envahirent les départements et occupèrent militairement le territoire pendant environ trois années. Des corps Saxons prirent leur cantonnement dans le Nord : L’état-major du 1er bataillon d’infanterie légère et trois compagnies arrivèrent de Roubaix en février 1816. Ils furent logés chez l’habitant.
La présence des Saxons avait laissé dans l’esprit de mes grands-parents un souvenir très vivace. J’ai moi-même entendu répéter par mon père que, d’après le récit de ses parents, les deux Saxons, logés chez eux, 15 rue Nain, l’avaient quelquefois fait danser sur leurs genoux ainsi que nos gros bleus de la Landsturm faisaient ces derniers jours avec petit Pierre en lui donnant du chocolat.

Au moment où cessa l’occupation de Roubaix, c’est-à-dire le 17 octobre 1818, mon père, Louis Destombes, avait 20 mois, étant né le 2 février 1817. A son tour, il narrait avec plaisir le passage des Français allant au siège d’Anvers en 1832.

VI)
Hier soir, canonnade et fusillade violentes sur la droite, du côté Herleville. Je dormais d’un bon sommeil, quand soudain, vers 22h, une fusillade assez violente vient me réveiller en sursaut. Stefanaggi sort pour voir de quoi il s’agit. Il ne peut le savoir au juste, d’ailleurs le calme se rétablit bien vite : Une sentinelle, sans doute, a été surprise : D’où la fusillade. Bref, j’ignore le fin mot de l’affaire... J’ai mal reposé cette nuit. Il pleuvait, il faisait froid, ce matin, je me suis réveillé tout courbaturé. J’ai demandé de travailler au boyau pour me réchauffer, mais je ne me sens plus le même courage qu’hier. La relève des travailleurs se fait au bout d’une heure…

Il pleut ! Que les tranchées sont donc tristes quand il pleut !… Quelle boue ! Chacun demeure accroupi au fond de son terrier, et, moi, je rentre comme tout le monde.

J’en profite pour casser la croûte : Beurre, jambon, chocolat et fumer une pipe. Pendant ce temps-là, du même côté qu’hier au soir, très violente canonnade.
Midi : Le ciel s’éclaircit, le soleil vient nous réchauffer un peu.
Le soir, une heure et demie de travail au boyau… Mais je commence à en avoir assez. Je n’ai pas l’habitude de manier pelle et pioche. J’ai faim, je tire de ma musette une boite de tripes à la mode de Caen et m’en régale.

VII)
L’histoire de l'Océanie Française montre de nombreux cas d’antagonisme entre pouvoir civil et pouvoir militaire comme celui qui a éclaté à Tahiti entre août et décembre 1914. C’est l’un de ces cas (sinon le plus) intéressant(s), d’un conflit qui dégénère tant en raison des circonstances que de la personnalité des deux hommes en présence. Devenu commandant de la place d’armes de Tahiti en août 1914, le lieutenant de vaisseau Maxime Destremau est chargé d'organiser la défense de la colonie sous l’autorité du gouverneur William Fawtier, avec l’aval du Conseil de défense de la colonie. L’un et l’autre doivent prendre de nombreuses décisions pratiques et gérer une situation qu’ils n’ont jamais connue depuis le début de leur carrière. Normalement, leurs prérogatives n’entrent pas en concurrence, chacun ayant ses propres responsabilités dans des domaines différents. Les rapports tendus que les deux hommes entretiennent sont également le reflet de problèmes récurrents dans les Établissements Français de l’Océanie depuis la fin de l’administration directe par des gouverneurs issus de la Marine.

Lorsque la Première Guerre mondiale est déclarée, la priorité, pour le représentant de l’autorité militaire, est de préserver l’intégrité du territoire sans autre alternative possible. Le gouverneur voit en premier lieu la conservation de l’autorité de l’État, mais il a aussi (et peut-être surtout ?) le souci de préserver la vie économique de la colonie qui, si elle vient à s’altérer, menace l’ordre public. Conflit de fonction, conflit de responsabilités, il est nécessaire d’approfondir les raisons qui ont poussé le gouverneur Fawtier à mener une politique pour le moins conciliante envers les compagnies commerciales Allemandes présentes dans les EFO et à s’opposer à Destremau tout en le laissant décider seul le jour du bombardement de Papeete.

Quelques rappels : Le désengagement des forces armées dans les colonies et dans les EFO en particulier est entrepris depuis le début du siècle. Le Bataillon d’Infanterie coloniale de la Nouvelle-Calédonie, créé en 1903, n’entretient plus qu’un détachement de 25 hommes à Tahiti. Il reste cependant dans les EFO une canonnière, la Zélée, commandée par le lieutenant de vaisseau Destremau, sous l’autorité du contre-amiral Albert-Marie Huguet, 57 ans, commandant de la division navale d’Extrême-Orient. C’est le gouverneur Repiquet, à Nouméa qui est le commissaire général de la République dans le Pacifique, responsable de la mobilisation des Français en Océanie. L’absence totale de communications dès le début de la guerre avec Nouméa rend inapplicable de décret du 26 mai 1903 qui place militairement la colonie des Établissements Français d’Océanie sous le contrôle du commandant supérieur des troupes de la Nouvelle-Calédonie. Il est possible d’examiner la situation à Papeete entre août et décembre 1914 pour tenter de comprendre comment un officier supérieur qui a été nommé presque « par défaut » commandant de la place d’armes, peut écrire 2 mois plus tard à son épouse : « Je suis maintenant le chef réel de la colonie. » Il  faut décrire les mécanismes d’État dans cette colonie si éloignée de la métropole, explorer l’environnement militaire et politique et leurs éventuels dysfonctionnements tout comme les prises de pouvoir incongrues. Nous verrons en quoi le type d’organisation et l’état d’esprit des officiers supérieurs impliqués ont pu être responsable d’un « dérapage ».
Enfin, il faut aussi considérer les événements à partir d’une analyse qui tend à mieux discerner le spectre des interactions mises en jeu et de vérifier en quoi les profondes querelles politiques qui secouent la société Tahitienne ont influé sur le comportement et la réflexion tant du corps militaire que du gouverneur en place.

Destremau est bien loin d'être le seul à exprimer son désaccord contre la politique de Fawtier, c'est aussi le cas d'une partie de la population et particulièrement de l'administrateur des Tuamotu qui reproche au gouverneur de ne pas avoir pris des mesures suffisamment coercitives à l'égard des Allemands et des Autrichiens dans les archipels. Néanmoins, le gouverneur justifie sa politique vis à vis des Allemands au consul des États-Unis qui les représente : « Ils ne sont pas en effet des malfaiteurs, mais, comme vous le faites remarquer des infortunés. »
LE BARON ROUGE

Destremau envoie ce rapport un mois après l’événement. Certains responsables sont vilipendés, d’autres sont au contraire loués. Enfin, il signale que tous les officiers et les membres de l’équipage de la Zélée ont assumé leur rôle. Destremau apporte également dans ce rapport, une justification aux décisions qu’il a prises et qui n’étaient pas de sa responsabilité : « Il me paraît établi que si le Gouverneur Fawtier avait commandé effectivement le 22 septembre, la ville aurait été rendue et la colonie serait Allemande. Devant ce fait, j’ai cru de mon devoir de négliger sa présence et d’agir seul. Il ne s’est d’ailleurs nullement opposé à cette manière de faire.» Le même jour, il écrit à sa femme une lettre assez surprenante émanant d’un officier supérieur : « Et le gouverneur qui voulait se rendre ! J'avais posté derrière lui un brave type avec un bon revolver et l'ordre de lui brûler la cervelle s'il faisait mine d'amener le pavillon Français. Il ne s'y est pas frotté et a préféré fout'le camp chez les curés, à la Mission avec les femmes et les enfants. Depuis ce jour-là, il n'est pas très fier et je le tiens. »

Le 27 novembre, le Montcalm arrive à Papeete. Jusqu’au 1er décembre 1914, l’émissaire du ministre peut donc instruire l’affaire. L’objectif de son enquête est de déterminer l’attitude et les responsabilités tant du gouverneur que du commandant des troupes depuis le début de la guerre et lors du bombardement de Papeete puis de tenter de comprendre le conflit d’autorité qui a conduit aux événements des journées des 31 octobre, 1er, 2 et 3 novembre 1914. Fawtier et Destremau ont préalablement, chacun de leur côté, établi des dossiers qu’ils ont remis à Huguet. L’amiral dispose de quatre dossiers : Le rapport du gouverneur Fawtier en date du 20 novembre, les quatre rapports du lieutenant de vaisseau Destremau datés des 21 septembre, 21 et 22 octobre et 17 novembre, un rapport du gouverneur portant sur la réfutation des principaux points de l’accusation du commandant et le compte-rendu de la rencontre qu’Huguet a eue avec le gouverneur.

Le jugement du contre amiral ne porte que sur l’aspect de la défense de Papeete et les marins de la Zélée. L’émissaire du gouvernement reste strictement dans le cadre des textes de loi : Il justifie le bien-fondé des décisions du gouverneur par le décret du 7 octobre 1912 sur le service des Places, qui fait du gouverneur le seul chef responsable de la défense de la colonie, et par la date d’arrivée quasi officielle de la déclaration de guerre le 29 août, puis des décrets ministériels consécutifs. S’il admet les décisions justifiées, l’attitude courageuse et le réel patriotisme de Destremau lors du bombardement de Papeete, Huguet stigmatise l’attitude ambiguë du commandant des troupes qui, malgré de sourdes critiques à l’égard du gouverneur, continue à déjeuner une fois par semaine à la Résidence (avec les membres du Conseil de Défense) et a accepté que le gouverneur le propose pour la croix d’officier de la Légion d’Honneur.

En outre, Huguet renouvelle les remarques qu’il a faites lors de sa précédente inspection de la Zélée sur le manque d’entretien de la canonnière, la désinvolture des marins et la familiarité de Destremau envers son équipage.
Le contre-amiral dénonce également les dépenses excessives dues aux réquisitions exigées par Destremau et qui dépassent largement les possibilités du budget de la colonie. Enfin, Huguet relève que la correspondance de Destremau à plusieurs chefs d’administration de la colonie et surtout au gouverneur est extrêmement irrespectueuse.
Au travers de toutes ses remarques, Huguet démontre que le champ d’intervention de Destremau est allé au-delà des limites de sa fonction. Dans son rapport d’enquête, l’amiral dénonce l’inanité du jugement de Destremau envers le gouverneur : « M. Fawtier n'a nullement manqué de courage ou de sang-froid, il n'a nullement fui, il s'est toujours trouvé là où l'appelait son devoir de gouverneur. Quant à lui reprocher d'avoir été prêt à rendre la ville à l'ennemi, il s'agit là d'une accusation dénuée de tout fondement... »
Il relève, d’un rapport à l’autre, les changements d’appréciation de Destremau sur le gouverneur :  « ces allégations sont donc le travail mental du mois suivant. » Enfin, Huguet, qui a pris la mesure des luttes d’influence entre les Tahitiens, dénonce l’ingérence et le parti pris de Destremau dans les particularismes de la vie locale ce qui expliquerait le manque d’autorité de Destremau sur ses officiers qui abusent de la situation. Il ajoute que en outre « Cet état d’esprit s’exalte de la violence de quelques officiers (…) et de l’importance souveraine qu’ils s’attribuent tous à leur rôle de Défenseurs de la Colonie. Ils s’y donnent certes de tout cœur, mais en même temps se considèrent comme au dehors de toutes les lois, de tous les règlements, la nécessité de la Défense primant tout. N’étant pas tenus en bride par leur Commandant, ils ont fini par se croire tout permis…»

Et l'amiral d’affirmer que «  leur attitude et leurs actes sont en partie responsables des graves désordres provoqués dans la colonie depuis le début de la guerre. » Le lieutenant de vaisseau Destremau n’est donc pas seul responsable. Durant l’enquête, Destremau a mesuré les excès de son attitude, attendant la sentence, il écrit à son épouse : « Si je suis brisé, je ne pourrai que me reprocher d'avoir agi trop vite, et pas assez habilement... Si je perds ma carrière, ce ne sera pas au moins par une action basse ou malhonnête... ».
Le contre-amiral a donc entièrement adhéré à la version du gouverneur et c’est ce qu’il écrit à celui-ci le 2 décembre : « J’ai l’honneur de porter à votre connaissance que de l’enquête dont j’ai été chargé, résulte l’inanité des accusations portée par Monsieur le Lieutenant de Vaisseau Destremau à votre égard. J’estime que les menaces dont vous avez été l’objet aussi bien que l’attitude à votre égard de Monsieur Destremau et d’un certain nombre d’officiers de la Zélée ne leur permettent pas de rester dans la Colonie. J’ai donc décidé le renvoi de Monsieur Destremau à la disposition du ministre de la Marine et de remplacer une partie de l’État-major.»
Après la décision de l’amiral, Destremau écrit à son épouse : « Je n'ai plus rien à faire maintenant dans la Marine. » Les désaccords nombreux survenus entre le contre-amiral Huguet lors de ses inspections et le lieutenant de vaisseau Destremau expliquent en partie pourquoi le chef de la division navale d’Extrême-Orient a préféré privilégier la version du gouverneur. Il est également à remarquer que le contre-amiral Huguet a lui aussi utilisé, lors de son enquête, les mêmes moyens que ceux qu’il reproche au lieutenant de vaisseau : Les on-dit, la rumeur. « La véracité de ces témoignages – si contradictoires – ne faisait cependant pas de doute dans mon esprit. » rapporte-t-il au ministre de la Marine le 13 décembre 1914.

L’enquête terminée le 3 décembre, le Montcalm  reprend sa croisière. Destremau, relevé de son commandement et condamné à 2 mois d’arrêts, va regagner la métropole. Malgré quelques regrets, dans toute sa correspondance ultérieure, Destremau ne change pas d’opinion sur le gouverneur Fawtier et estime que ce qu’il a accompli était parfaitement légitime et bien en accord avec sa conscience de patriote.
Il écrit sa certitude de s’entendre donner raison par le Conseil de Guerre le jour venu. Mais à son arrivée à Marseille, le 1er février 1915, le préfet maritime de Toulon lui confie provisoirement le commandement d'un torpilleur d'escadre en Méditerranée, le Boutefeu.
SIMILITUDE
Cependant, le dossier de Maxime Destremau, établi par la 3e section de l’État Major Général en date du 15 février 1915, évoque des « irrégularités graves dans le fonctionnement de la Justice Militaire » à Papeete, ce qui permet une révision des conditions de condamnation des marins de la Zélée. La direction militaire des services de la flotte préconise de s’en tenir aux sanctions prises par le contre-amiral Huguet sans recours au Conseil de guerre. Tombé gravement malade, Destremau meurt moins d’un mois plus tard. Puis, en octobre 1915, la mémoire du lieutenant de vaisseau Destremau est lavée de tout soupçon. Il sera cité à titre posthume à l’ordre de l’armée et recevra la croix de guerre avec palme et obtiendra, à titre posthume, la Légion d’honneur : « Commandant la défense de Tahiti, après le désarmement de la Zélée, a su, malgré le peu de concours apporté par les autorités locales, organiser la défense de l’île… »

VIII)
 21 décembre 1914, le soir de ce jour, de grosses pièces traversent la ville, montant par la rue Cérès, pour aller prendre position : Nuit calme.
Bombardement dans la matinée, les obus tombent boulevard de la République, rue de la Justice et environs.
- A 13h30, je suis à la Haubette, où j'ai dû me rendre sur une convocation adressée à tous les hommes exemptés et réformés des classes 1887 à 1909, pour passer devant le conseil de révision, siégeant depuis plusieurs jours dans la salle des fêtes du pont de Muire.
La cour est remplie d'assujettis et l'opération terminée, j'ai le plaisir de rencontrer là des amis. Presque tous sont déclarés bons ou classés dans l'auxiliaire, avec ma malheureuse infirmité, je reste exempté. Dans la matinée, mon beau-frère Montier, à été reconnu bon.
- Au retour, je puis me rendre compte que si la population est très dense, dans ce quartier de la Haubette et dans le faubourg de Paris, cela va vite en décroissant suivant que l'on rentre en ville. Les promeneurs se raréfient à partir du milieu de la rue de Vesle et leur nombre se réduit de plus en plus, au point qu'on ne voit plus personne du côté de la place Royale.

Les plaintes parviennent nombreuses à la police, contre des individus inconnus, qui ont pénétré nuitamment dans des maisons bombardées ou momentanément abandonnées par leurs légitimes occupants.
Deux arrestations ont été opérées avant-hier.
Rappelons que les pillards s'exposent à des peines très sévères, en raison du caractère odieux que revêtent ces cambriolages.
Lundi 21 - Nuit très calme. Bombes vers 10h matin.
Visite aux Fournaux économiques : rue Brûlée 15 et rue Fery. Le premier tenu par les Sœurs de l'Espérance, le 2e par Sœur Stéphanie et Filles de la Charité. On y distribue plus de 50 rations, parce qu'il n'y a plus personne qui donne des bons. Les autres années, en temps ordinaire on distribuait jusqu'à 10 000 rations par jour.
A 10h30 une grosse bombe a pulvérisé l'autel moyen de Saint Jean-Baptiste de la Salle.
Aujourd'hui ouverture du : Fourneau de Sainte Geneviève.
Reçu la réponse du Cardinal Gasparri, datée du 17 décembre
« Cardinal Luçon dans son Journal de la Guerre 1914-1918, éd. Travaux de l’Académie Nationale de Reims »

IX)
Toujours du temps gris, toujours vive canonnade et bombes pour ne pas en perdre l'habitude. De nombreuses victimes au cours de cette journée, surtout des enfants. Le père Bastien, commis chez Carton rue Henri IV est du nombre des victimes.
La nuit, Canonnade et quelques bombes
« Carnet d'Eugène Chausson durant la guerre de 1914-1918
Voir ce beau carnet sur le site de sa petite-fille Marie-Lise Rochoy »


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