mardi 8 novembre 2016

EN REMONTANT LE TEMPS... 201

16 OCTOBRE 2016...

Cette page concerne l'année 201 du calendrier julien. Ceci est une évocation ponctuelle de l'année considérée il ne peut s'agir que d'un survol !

GALIEN ET SON ŒUVRE
 

GALIEN A PERGAME
Galien est né en 129, à Pergame, en Éolide (actuelle Bergama, au nord de Smyrne en Turquie), dans un milieu aisé.
Dans l'Antiquité, il est connu sous le nom de Galenos (Γαληνός). Le prénom de Claudius (Claudios) n'a semble -t-il rien d'authentique et paraît d'origine plus tardive.
Fils d'un riche architecte de Pergame d'origine grecque, Claude Galien étudie d'abord le grec, la rhétorique et la philosophie dans sa ville natale. À 17 ans, il entreprend des études de médecine, qu'il poursuit ensuite à Smyrne, à Corinthe et à Alexandrie, voyageant tout autour du bassin méditerranéen pour côtoyer les médecins les plus réputés de l'époque.
De retour à Pergame à 26 ans, il devient médecin de l'école des gladiateurs et peut ainsi perfectionner ses connaissances en anatomie et en traumatologie. En 162, il s'établit à Rome, où il va se forger une solide réputation tant par ses capacités à faire un bon diagnostic médical, fondé sur l'observation clinique du patient, que pour la qualité de son enseignement, qu'il illustre de nombreuses dissections d'animaux (chèvres, singes, chiens, porcs). Cependant, cassant et orgueilleux, il s'attire la jalousie de ses confrères et quitte la ville en 166, à l'occasion d'une épidémie de peste. Il y revient 2 ans plus tard, rappelé par l'empereur Marc Aurèle, pour devenir son médecin personnel et celui de ses fils.

En tant que praticien, Galien suit la tradition d'Hippocrate, dont il se pose lui-même comme le continuateur, en anatomie et en physiologie, il s'inspire plutôt d'Aristote.
Grâce à ses expériences sur les animaux, il observe les fonctions du rein et de la vessie, et identifie 7 paires de nerfs crâniens. Il tente d'expliquer le contrôle des muscles par les nerfs qui partent de la moelle épinière. Il montre que le cerveau contrôle la voix et que les artères transportent le sang, réfutant une croyance vieille de 4 siècles selon laquelle les artères transportent de l'air.
En outre, il décrit les valvules du cœur et constate les différences de structure entre les artères et les veines, sans pourtant expliquer correctement le fonctionnement de la circulation, pensant, à tort, que le foie est l'organe central de l'appareil circulatoire et que le sang part du foie vers la périphérie du corps. Il donne aussi des descriptions remarquables de maladies comme le choléra, la rage ou la tuberculose pulmonaire.

Sa doctrine médicale, le galénisme, reprend la théorie d'Hippocrate des 4 éléments fondamentaux (air, terre, eau et feu), dont les quatre qualités physiques (chaud, froid, humide ou sec) influent sur les 4 humeurs du corps humain (sang, bile, pituite et atrabile).
Ces dernières déterminent, selon lui, quatre tempéraments physiologiques : sanguin, flegmatique, mélancolique et colérique. La santé provient du bon équilibre et des justes proportions de ces humeurs, tandis que la maladie résulte de leur déséquilibre.
À l'inverse de celle d'Hippocrate, sa thérapeutique se fonde sur la prescription de remèdes opposant les humeurs et les qualités du traitement (loi des contraires). Les plantes médicinales occupent une place de choix dans sa pharmacopée. Mais son mépris pour la chirurgie marquera longtemps la médecine.

Vitaliste, Galien attribue l'essence même de la vie à une force occulte, ou pneuma, qui se manifeste sous 3 formes, siégeant respectivement dans le cœur et les artères, dans le cerveau et dans le foie. Il est convaincu de l'existence d'un dieu unique, créateur du corps humain, ce qui incite ultérieurement l'Église catholique à soutenir sa doctrine et à l'ériger quasiment en dogme jusqu'à la Renaissance.
Auteur prolifique, Galien a écrit au total quelque 500 traités de médecine, de philosophie ou d'éthique. La plupart ont malheureusement été détruits, en l'an 192, dans l'incendie du temple de la Paix, à Rome, à proximité duquel ils étaient conservés, 83 ouvrages considérés comme authentiques nous sont parvenus, parmi lesquels de nombreux traités d'anatomie (les Préparations anatomiques, Des os, De la dissection des muscles), de physiologie (De l'usage des parties du corps, Des facultés naturelles, De l'usage des médiastins et de la plèvre), de pathologie (Des régions malades, Du pouls, Des différentes fièvres) et de thérapeutique (De la méthode de soigner, Des médicaments).
Traduite au IXe siècle par des intellectuels arabes, l'œuvre de Galien a régné sur la médecine jusqu'au XVIe siècle. Elle représente l'apogée de la médecine grecque, mais elle en marque aussi le terme. En effet, après sa mort, Galien n'a laissé que des héritiers écrasés par le poids de sa personnalité.

La cité de Pergame est un des hauts lieux scientifiques, littéraires et artistiques du monde gréco-romain. Longtemps royaume indépendant, elle devient romaine en -133, mais n'en continue pas moins à jouir d'une prospérité extraordinaire jusqu'au IIe siècle de notre ère.
Nicon, le père de Galien, est architecte et géomètre. Il apprend à son fils la morale stoïcienne. Galien indique qu'il s'est efforcé de respecter les préceptes paternels en veillant à ne pas se laisser atteindre par les pertes matérielles et à ne pas se chagriner inutilement. Son père, un modèle de maîtrise de soi et d'affabilité qu'il oppose aux débordements de sa mère : « J'ai eu la chance d'avoir un père complètement inaccessible à toute colère, parfaitement juste, honnête et ami des hommes, une mère au contraire profondément irascible au point de mordre parfois ses servantes et de toujours crier et se quereller avec mon père...».
Son père lui a aussi transmis son amour de la campagne, gérant des domaines agricoles où le jeune Galien passe une partie de son enfance, lui donnant une excellente connaissance des plantes médicinales.
Son père fin connaisseur en géométrie, arithmétique et calcul, lui donne les premiers rudiments de connaissances scientifiques jusqu'à l'âge de 14 ans.
On suppose qu'il reçoit aussi une formation à l'étude des textes classiques par un maître de grammaire (grammatikos) ainsi qu'à l'art de composer des discours par un rhéteur (rhêtor).

À l'âge de 14 ans, Galien entreprend des études de philosophie. Il se souviendra plus tard de 4 de ses maîtres : Un stoïcien, un platonicien, un péripatéticien et un épicurien.
Il dira dans les Propres livres que le premier ne lui donne pas les « preuves rhétoriques » de ce qu'il avance, que le second arrive à des conclusions contraires du précédent et que les suivants ne s'avèrent pas plus concluants. Il ressort de cette formation philosophique « profondément affligé », selon ses propres termes.
Galien espère apprendre un art de raisonner qui permette l'accord de tous, sur le modèle des démonstrations géométriques capables de s'imposer à tout le monde. Déçu, il décide alors de « prendre ses distances avec les discours philosophiques » (Propres livres XIV, 6) mais sans rompre complètement avec la réflexion philosophique.

Lorsqu'il a 16 ans son père, qui nourrit de grandes ambitions pour lui, décide alors de lui faire commencer des études de médecine, tout en poursuivant ses études de philosophie. Cette orientation vers la médecine procède probablement du choix d'une discipline pratique qui doit lui permette d'échapper au doute pyrrhonien dans lequel l'a plongé le spectacle des affrontements de systèmes philosophiques incompatibles, chacun avec sa propre vérité sans qu'aucune méthodologie ne puisse jamais les départager...

En 145, Galien va d'abord à l'école de Satyros dans l'espoir de retirer une bonne connaissance d'Hippocrate (-460, -370), le « père de la médecine » Européenne. Après avoir assisté à un débat sur l'empirisme en médecine, il suit l'enseignement d'un des orateurs, nommé Pélops.

En 148, survient le décès de son père qui lui laisse une fortune considérable. Il a alors 19 ans. Il confie la gestion de ses biens à un intendant et part à travers le monde gréco-romain étudier auprès des médecins les plus réputés.
Il se rend d'abord à Smyrne où il retrouve son maître Pélops. Il y écrit un ouvrage sur le mouvement du thorax et du poumon dans lequel il consigne l'enseignement de Pélops. Il demeure ensuite à Corinthe (c. 151?) pour apprendre auprès de Numisianos avant d'embarquer pour Alexandrie en Égypte. Y séjournant au moins 4 ans avec le désir d'y étudier l'anatomie.
EXAMEN DES URINE
Le passage par Alexandrie semble constituer une sorte d'étape obligée dans la formation de tout médecin ambitieux de l'époque. La ville égyptienne est devenue sous les premiers Ptolémées au IIIe siècle av. notre ère, un centre majeur de la vie intellectuelle de la civilisation hellénistique. 2 des plus grands anatomistes de l'Antiquité, Hérophile et Érasistrate, ont pu y pratiquer des dissections humaines qui font faire d'importants progrès à la connaissance des structures internes du corps humain.
Près de 4 siècles plus tard, quand Galien arrive à Alexandrie, la dissection des cadavres n'est plus pratiquée. Galien se contente d'y « étudier les os humains ».

D'après ses écrits ultérieurs, Galien semble avoir été assez déçu par son séjour à Alexandrie. Dans son Commentaire aux épidémies, il présente ses professeurs Alexandrins comme des savants seulement en parole qui sont complètement incapables de reconnaître une maladie. Il n'apprécie guère mieux la nourriture égyptienne comportant des vers de bois, des vipères, de la viande de singe, de chameau et même d'âne.
Mais nous dit-il, comme les égyptiens y sont habitués, ils réussissent à évacuer rapidement ces mauvais aliments avant qu'ils ne causent des dégâts au corps.

L'Égypte a de tout temps été réputée pour ses drogues, ses parfums et ses onguents. Galien en mentionne de nombreux notamment dans ses écrits pharmacologiques : Huile de ricin (kikinon), de raifort (rhaphaninon), de sénevé (sinapinon) et le poivre. Il s'intéresse aussi à un curieux arbre, le persea (Cordia myxa), dont les feuilles sont souveraines en cataplasme contre le mal de tête ou à une argile aux précieux effets thérapeutiques.

Galien revient finalement à l'âge de 27 ans dans sa ville natale, durant l'été 157, Galien se gave tellement des bons fruits de son pays qu'il en a une bonne indigestion et une maladie gastrique aiguë. Il s'agit probablement d'une amibiase, responsable de dysenteries fréquentes alors dans tout le bassin méditerranéen. Cet épisode joue un rôle si important dans sa vie qu'il le mentionne à 3 reprises dans ses écrits. Il déclare avoir décidé à la suite de cette maladie, de s'abstenir de tous les fruits, sauf les figues et les raisins, de suivre un régime équilibré et de fréquenter assidûment le gymnase. Il raconte dans la dernière partie de sa vie comment suivant les indications reçues d'Asclépios au cours de deux songes clairs, ses douleurs disparaissent après une saignée d'un nouveau type, faite en incisant une artère située entre l'index et le majeur. À la suite de cette guérison miraculeuse, Galien se déclare serviteur (therapeutès) d'Asclépios.
RUINES DE PERGAME
Dans cette même année 157, il est nommé médecin des gladiateurs. Dans les cités Orientales de l'empire, le grand-prêtre (archihierus) est chargé d'organiser le culte impérial. Il entretient à ses frais une troupe de gladiateurs qui s'affrontent tous les étés, en combat (munera) lors des fêtes en l'honneur de l'empereur. Malgré son jeune âge, Galien se voit confier la charge de soigner les plaies sanglantes des gladiateurs et plus largement de veiller à leur régime... Il doit garder en vie le plus grand nombre possible de gladiateurs afin d'éviter au grand-prêtre de devoir recruter de nouveaux combattants. Les combats à mort restent rares.
Le jeune médecin talentueux fait merveille au cours de son premier mandat : « Aucun des blessés dont j'avais la charge ne meurt, sauf 2, alors que 16 sont décédés sous mes prédécesseurs ».
Confronté à de profondes blessures, il renonce à les inonder d'eau chaude comme faisaient ses prédécesseurs mais les humecte avec de l'huile. Il dépose ensuite sur la plaie des linges imbibés de vin noir et âcre. Dans certains cas, Galien n'hésite pas à recourir à la chirurgie et en profite pour approfondir ses connaissances anatomiques.
Il ne cessera par la suite de réaffirmer la nécessité pour les médecins de s’entraîner à la dissection sur des singes.
On ne sait pas exactement pour quelle raison Galien se rend au centre de l'Empire, à Rome, mais à l'époque, il est commun que les médecins quittent leur ville d'origine et fassent des voyages à visée scientifique. C'est le cas de Galien qui, pour se monter une pharmacopée plus complète, visite de nombreux endroits pour se procurer des simples, (substances végétales, animales ou minérales utilisées comme remède). Parcourant Chypre, la Palestine, la Lycie et Lemnos...il va à Rome pour exercer la médecine.

Arrivé à Rome, en 162, Galien loue une maison près de l'un de ses concitoyens, le philosophe Eudème, qui lui permet de pénétrer dans la plus haute société romaine. Il adopte volontiers le mode de vie des romains, se rendant régulièrement aux bains avec des amis. Mais, il conserve aussi l'habitude typiquement grecque de fréquenter la palestre pour pratiquer la gymnastique. Jamais dans ses écrits, il ne mentionne la présence de femme ou d'enfants à ses côtés. Il affiche un dégoût pour la débauche et l'homosexualité. Bien qu'il reconnaisse que les relations sexuelles puissent apporter de grands plaisirs, il considère qu'elles peuvent aussi détourner les hommes de leurs objectifs supérieurs.
Le monde médical est à cette époque très compétitif. L'enseignement médical n'étant pas institutionnalisé, il n'y a pas de cursus couronné par un diplôme, Chaque médecin doit assurer sa promotion.
Les riches patients convoquent plusieurs médecins à leur chevet et chacun doit faire son diagnostic en présence des autres. La compétition pour obtenir les faveurs du malade est farouche :
Beaux discours destinés à séduire le malade,
Dénigrement des rivaux où les coups bas entre collègues sont fréquents...
En outre Galien a une haute idée de sa valeur et ne mâche pas ses mots quand il critique quelqu'un, les hostilités et les rancœurs peuvent être terribles.
Dans Pronostic, il nous dit que le médecin de valeur n'a d'autre choix que de partir en exil ou de s'exposer à la calomnie en vivant sans cesse dans la crainte de représailles.

Lors d'accès de fièvre du philosophe Eudème, originaire comme lui de Pergame, Galien lui prend le pouls, et fait le pronostic d'une fièvre quarte. Eudème reconnaît la justesse du jugement de Galien et se répand en louange en présence de personnages particulièrement influents.
Le nom de Galien parvient même jusqu'aux oreilles des 2 empereurs, Lucius Verus et Marc Aurèle.
Galien organise aussi des séances publiques de dissections ou de vivisections où le maître expose ses théories et invite l’auditoire à tirer les conséquences de ses expérimentations.
Ainsi Flavius Boethus, un personnage important qui fréquente Eudème, invite Galien à « faire une démonstration sur la voix et la respiration, en expliquant comment et grâce à quels organes elles se produisent ». Flavius Boethus, nous dit Galien, se charge de lui fournir bon nombre de porcs et chevreaux.

Plusieurs personnalités de renom assistent à cette première séance en 163. Et comme le public est fait essentiellement de rhéteurs et de philosophes, Galien s'assure d'abord qu'ils sont prêts à accepter le témoignage des sens. Ce préalable à toute démonstration n'est pas superflu car les doctrines stoïcienne et péripatéticienne sont pénétrées par le scepticisme. Et on se souvient comment le jeune Galien a refusé de « sombrer dans le doute pyrrhonien » au début de ses études philosophiques. Il montre alors comment en coupant quelques nerfs, l'animal est privé de voix, sans perdre la vie.

Dans une seconde séance, en présence de « tous ceux qui comptent en médecine et philosophie », Galien montre comment l'inspiration se produit par dilatation du thorax et l'expiration par sa contraction, quels sont les nerfs qui commandent le mouvement des muscles responsables, comment l'air expiré produit des sons en heurtant les cartilages du larynx.
Galien procède à un très grand nombre de démonstrations anatomiques sur le cerveau, la moelle épinière, les nerfs, la langue, le larynx etc.

Ces démonstrations anatomiques, sont pour Galien le moyen d'établir son savoir publiquement et d'obtenir la reconnaissance de sa valeur auprès des plus hautes autorités mais elles sont aussi l'occasion de débats philosophiques sur l'établissement de la vérité en science tant par l'observation que par le raisonnement. De vives discussions animent les différentes Écoles de médecine sur le mode d'acquisition des connaissances. Doit-on s'appuyer principalement sur la raison ou sur l'expérience ? Y a-t-il une méthode fiable ? Galien dit se placer au-dessus des Écoles. Sa formation philosophique garantit son indépendance d'esprit et l'autorise à ne jamais ménager ses critiques des écoles dogmatique, empiriste et méthodiste.

En 166, Galien va quitter précipitamment Rome. Ses motivations exactes ne sont pas claires car il en a donné des versions différentes dans ses différents traités. Dans « Pronostic », il nous dit que c'est parce qu'il est poursuivi par la haine de ces rivaux. 30 ans plus tard, il dira dans « Propres livres » que c'est l'épidémie de peste dite « antonine » ramenée de Syrie à Rome qui a précipité son départ.

De retour en Asie, Galien va occuper une partie de son temps à la révision de ses écrits de jeunesse. Il donne ainsi une nouvelle version de Mouvement du poumon et du thorax composé entre 149 et 151, qu'une personne sans scrupule a mis sous son propre nom après lui avoir ajouté un prologue.
Alors qu'il « se livre à ses occupations habituelles », il reçoit un message des deux empereurs Marc Aurèle et Lucius Verus lui enjoignant de venir les retrouver à Aquilée.
L'armée qu'ils ont rassemblée contre les Germains au nord de Trieste est ravagée par la « peste ». Les soldats meurent par centaines. Lucius Verus qui s'est décidé à rentrer à Rome meurt subitement... Marc Aurèle ordonne que Galien le suive dans sa campagne contre les Germains, Galien fait tout pour échapper à cette mission et lors d'une rencontre avec l'empereur, il réussit à le convaincre de le laisser à Rome, et dit-il « il se laisse persuader de me laisser aller quand il entend par ma bouche que le dieu de mes pères, Asclépios, ordonne le contraire ». Galien se voit confier le soin de la santé du jeune Commode, le fils de Marc Aurèle.
De retour à Rome, Galien préfère se tenir à distance de ses confrères jaloux, en choisissant de suivre le jeune Commode dans ses différentes villégiatures. « L'empereur s'étant attardé de façon inattendue à faire la guerre contre les Germains, je consacre tout ce temps à composer de nombreux ouvrages de philosophie et de médecine dont je fais don à mes amis ».
Le traitement des coliques de l'empereur va marquer un tournant dans la carrière de Galien. Invité au Palais pour soigner Marc Aurèle pris de fortes fièvres et de violentes coliques que ses médecins habituels sont impuissants à soigner, Galien prend le pouls de l'empereur, et déclare qu'il ne s'agit pas de fièvre mais d'une indigestion. Le traitement proposé est un complet succès. D'après Galien, l'empereur « ne cessait de parler de moi, comme tu le sais, en disant que j'étais premier parmi les médecins et seuls parmi les philosophes »

Galien profite de ce succès pour asseoir sa position en obtenant le poste de confiance de préparateur de la thériaque impériale. La thériaque est une préparation pharmaceutique qui comporte plus de 70 ingrédients et fait figure de panacée. Elle comporte de l'opium et de la chair de vipère. Marc Aurèle qui l'apprécie particulièrement en prend journellement.

En 169, il constate que certains des écrits qu'il a dictés pour ses amis ou ses disciples, circulent sous le nom d'autres personnes. Il décide alors de mettre en forme plusieurs ouvrages récupérés, écrits pour les débutants comme Sur les écoles, Sur les os, Sur le pouls etc.
Il s’attelle aussi à la rédaction et la finalisation de trois grandes sommes : Utilité des parties du corps, Doctrines d'Hippocrate et Platon et le début des Pratiques anatomiques.
Il a l'habitude de travailler en même temps sur plusieurs ouvrages et de reprendre et compléter des ouvrages anciens.
Pour éviter tout plagiat, il se résout vers 193 à dresser la liste de tous ses écrits. Dans Ordre de ses propres livres puis dans Propres livres, Galien dresse un catalogue raisonné de ses ouvrages et un guide de lecture.
Galien partage son temps entre la rédaction de ses ouvrages et le soin aux malades. Les nombreuses études de cas, dont il parsème ses écrits (comme Méthode de Traitement), montre qu'il manifeste auprès des malades un grand dévouement, ne ménageant ni son temps ni sa peine.
Il a même fait preuve de courage quand il s'occupe des victimes de la terrible pestilence qui frappe l'Italie de 166 à 181.

Boudon-Millot cite un passage d'un traité conservé uniquement en arabe : « Je ne demande d'honoraires à aucun de mes étudiants ni aucun des malades que je soigne. En fait, j'offre à mes malades, autant qu'ils en ont besoin, non seulement médicaments, boissons, massages et autres choses semblables, mais je leur procure même des infirmiers s'ils n'ont pas de serviteurs, et je leur fais en plus préparer la nourriture nécessaire ».
Il poursuit aussi son activité d'enseignement. Si en début de carrière, il s'adressait à des débutants, après son retour il préfère s'adresser à une élite médicale, beaucoup faisant partie du cercle restreint de ses amis (philos). Il exige de ses disciples d'être travailleur, d'aspirer à la vérité, et par dessus tout, il attend d'eux « une nature pénétrante ». Cette période sera assombrie par un immense incendie à Rome en 192, qui ravage des entrepôts situés le long de la Voie Sacrée. Réputés sûrs et bien protégés, certains de ces locaux servaient à Galien pour mettre ses objets de valeurs en sécurité : instruments, médicaments, manuscrits et objets en argent. Outre certains de ces ouvrages, il y déposait « des recettes de remèdes plus admirables que celles de toutes autres personne dans le monde habité des Romains ».

Véronique Boudon-Millot, Directrice du laboratoire Médecine Grecque, résume ainsi sa situation : « À 63 ans, en travailleur infatigable, Galien va dès lors consacrer une part importante de son activité littéraire à réécrire ses traités perdus. La période la plus féconde de son activité d'écrivain, inaugurée en 169 au début de son second séjour romain, s'achève en 192 par un véritable cataclysme.
Mais en travaillant sans relâche, Galien va désormais mettre tous ses efforts à faire renaître son œuvre de ses cendres ».
Durant les heures sombres du règne de Commode (180-192), Galien qui est déjà quinquagénaire, adopte un profil bas et préfère passer sous silence les exactions de l'empereur.
Il se contente de noter « À cette époque, une peste violente se répandit dans toute l'Italie, et exerça surtout de grands ravages dans la capitale, dont l'immense population est encore augmentée par la foule des étrangers de tous pays. Ce fléau coûte la vie à un grand nombre d'hommes et d'animaux. ».
Mais par prudence, il reste silencieux sur la disette qui frappe les Romains et les soulèvements qui s'en suivent.

Sous le règne de Septime Sévère, Galien retrouve sa fonction de préparateur de la thériaque qu'il a perdue sous Commode. Sur ses vieux jours, il est de plus en plus réticent à parler de lui-même et affiche même un certain détachement vis-à-vis des affaires humaines.
On ne sait pas où Galien est mort. Les documents ne permettent pas d'établir si sa fin eut lieu à Rome ou bien s'il était retourne dans sa patrie de Pergame. Par contre, pour la date du décès, plusieurs sources arabes ont permis de corriger l'ancienne date de 199 donnée auparavant.
Ishaq ibn Hunayn, le fils du célèbre traducteur Hunayn ibn Ishaq, déclare que « Galien vécut 17 ans en tant qu'enfant et étudiant et 70 ans en tant que savant et professeur ». Le plus vraisemblable est donc qu'il soit mort en 216 à l'âge de 86 ans. (mais comme sa date de naissance est comprise entre 120 et 130 cela doit également varier de 10 ans et donc la date de 201 est possible)

L’œuvre de Galien représente une somme encyclopédique monumentale. Elle couvre en premier la sphère médicale (anatomie, physiologie, pathologie, thérapeutique, pharmacologie et hygiène) mais aussi la philosophie, les mathématiques, l'architecture, la littérature et la philologie. Seule une petite partie de cette œuvre multiforme, composée en grec sous le règne des 3 empereurs Romains Marc Aurèle, Commode et Septime Sévère, nous est parvenue.
Véronique Boudon-Millot évalue au quart la part du corpus galénique à nous avoir été transmis en grec, « de larges pans n'ayant survécu qu'en traduction arabe ou latine ou encore ayant complètement disparu ».

Il est considéré comme le dernier des grands médecins créateurs de l'Antiquité gréco-romaine et avec Hippocrate, un des principaux fondateurs des grands principes de base sur lesquels repose la médecine Européenne. Il a donné la priorité à l'observation anatomique et a cherché à établir des hypothèses sur les processus physiologiques en procédant à des expérimentations sur animaux.

Son œuvre immense, d'abord en grande partie oubliée en Europe Occidentale refait surface au XIe siècle. Transmise à Byzance et dans le monde musulman, elle revient en Europe d'abord à partir de traductions de l'arabe en latin puis à partir de la Renaissance, des sources grecques d'origine.
La théorie médicale de Galien a dominé la médecine jusqu'au XVIIIe siècle. Mais elle s'incline devant le développement irrésistible de la méthode expérimentale qui permet d'établir sur une base empirique solide les modèles du système cardiovasculaire, respiratoire, digestif et nerveux.
DISSECTION D'UN PORC
La médecine gréco-romaine est complètement balayée de la pratique médicale occidentale et ne subsiste plus même à titre de « médecine traditionnelle Européenne », contrairement aux médecines traditionnelles Chinoise et Indienne qui résistent beaucoup mieux à la déferlante de la médecine moderne. Toutefois, la version arabe du galénisme qui est importée en Inde par les musulmans, y a survécu jusqu'à l'époque moderne sous le nom de médecine Yunâni ou unani.



Claude Galien — Wikipédia
https://fr.wikipedia.org/wiki/Claude_Galien
Galien (en grec : Γαληνός Galīnós / Galênós ; en latin : Claudius Galenus), né à Pergame en ... Ne pas confondre avec Gallien, empereur romain du III e siècle. Claude .... Dans cette même année 157, il est nommé médecin des gladiateurs.

Encyclopédie Larousse en ligne - Claude Galien en grec Klaudios ...
www.larousse.fr/encyclopedie/personnage/Claude_Galien/120690
Médecin grec Pergame vers 131-Rome ou Pergame vers 201 Plus grand médecin de l'Antiquité après Hippocrate il a laissé une œuvre considérable qui fit ...

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