Cette
page concerne l'année 743 du calendrier julien. Ceci est une
évocation ponctuelle de l'année considérée il ne peut s'agir que
d'un survol !
ÉRADICATION DES CROYANCES PAÏENNES AUX CONCILE DE 743 ?
Kervyn
de Lettenhove a publié dans le Bulletin de l’Académie un fragment
de texte du VIIIe ou IXe siècle, dans lequel il est dit, au sujet de
la Neustrie, qu’à la mort de Charles Martel le pouvoir y est
disputé par une foule de petits tyrans, et que pour mettre un terme
à cette anarchie, les Francs tirent du couvent un clerc qu’ils
élisent roi sous le nom de Childeric, et que néanmoins la noblesse
Franque, autrefois si illustre, est tombée en pleine décadence.
Ce
récit n’est pas dépourvu de vraisemblance, il explique d’une
manière naturelle l’avènement du roi Childeric III. Depuis l’an
737, il n’y a plus de roi ni en Neustrie, ni en Austrasie... Le but
des légitimistes de cette époque doit être de régner sous le nom
de ce pauvre clerc qu’ils ont tiré du couvent, et d’éloigner
les Austrasiens dont la prédominance ne peut manquer de les
froisser. Ce but n'est pas atteint, parce que Hunold, qui s’est mis
à la tête du parti, manque des qualités indispensables pour
réussir dans une pareille
entreprise.
L’introduction
du christianisme en Belgique a eue sur la transformation de l’ordre
social et sur l’adoucissement des mœurs beaucoup de
retentissement. On peut faire honneur principalement à Pépin de
Landen de ces premiers essais de civilisation, il reste à parler du
zèle de Charles Martel, et plus encore de celui de ses 2 fils, non
seulement pour la propagation de la foi, mais encore pour l’épuration
du culte chrétien.
La
grande et imposante figure de Saint Boniface, appelé avec raison le
fondateur de l’Église Germanique. C’est Saint Boniface qui
détermine Charles Martel et ses fils à opérer d’importantes
réformes religieuses d’abord dans quelques provinces d’Austrasie,
ensuite dans le royaume entier. Il est à remarquer que ces réformes
sont décrétées et effectuées par les princes Francs, et que ce
n'est pas l’Église qui agit comme législateur...
Ils
ne font, il est vrai, que céder aux sollicitations du pape et de son
représentant, mais ils ordonnent eux-mêmes les mesures jugées
utiles au bien de la religion.
Sont-ils
mus par des motifs purement politiques ou par le désir de consolider
et de fortifier leur puissance ?
Agissent-ils,
au contraire, en bons croyants, pénétrés de sentiments religieux,
et convaincus de la sainteté du christianisme ?
Se
croient-ils soumis, comme chrétiens, à la volonté de l’Église,
et obligés à ces actes de protection en qualité de défenseurs de
la foi ?
Ce
sont là des questions fort épineuses et presque impossibles à
résoudre. Si Charles Martel n’agit que par politique, Carloman Ier
du moins fait ses réformes religieuses par conviction et par motifs
de piété.
Pépin
III veut probablement gagner l’amitié du pape, qui lui est
nécessaire. et L’un et l’autre rendent des services éminents à
la religion, à l’Église et en même temps au pape dont ils
légitiment le pouvoir dans leurs États.
On
peut dire qu’ils sont avec Boniface les vrais fondateurs de la
religion Catholique Romaine dans le royaume des Francs, et par
conséquent dans toutes les contrées de l’Europe qui ont part à
la composition de l’empire de Charlemagne. Ils jettent les bases du
grand édifice politico-religieux que ce prince élève sur les
ruines de l’empire romain d’Occident.
Le
premier de ces conciles est tenu en 742, on ne sait dans quel lieu de
l’Austrasie, le deuxième est celui de Leptines, qui appartient à
l’histoire de la Belgique. En effet Leptines, Lestinœ, est
l’endroit qu’on appelle aujourd’hui les Estinnes, situé à une
lieue de Binche, dans la province du Hainaut.
Il
y a là 2 communes, Estinnes-Hautes et Estinnes-Basses, ou
Estinnes-au-Val et Estinnes-au-Mont. Cette dernière est traversée
par la voie romaine qui conduisait de Bavai à Tongres. On y voit
encore quelques vestiges d’un château Carolingien.
Les
donations faites par Pépin d’Herstal à l’abbaye de Lobbes, en
691 et 697, sont datées des Estinnes.
Les
résolutions prises dans les conciles ou synodes tenus en Austrasie
dans les années 742 et 743 sont décrétées et publiées par les
capitulaires de Carloman Ier, de sorte qu’elles reçoivent du
pouvoir séculier force de lois. C’est Carloman Ier lui-même qui a
pris l’initiative de cette grande mesure, et Boniface en a informé
le pape...
Le
capitulaire de l’an 742 constate que les évêques sont convoqués
directement par le prince.
Il
est plus que probable que ces synodes ont lieu à l’occasion du
Champ de Mars qui se tient chaque année, le préambule du
capitulaire de l’an 742 fait mention de l’assentiment des ducs,
des comtes, etc... alors assemblés.
L’Austrasie,
avec ses extensions et les contrées réunies sous le gouvernement de
Carloman, embrasse, outre les pays des anciens Francs Saliens et
Ripuaires, tous les territoires conquis sur les Alamans, la Souabe,
la Bavière, la Thuringe et une partie de la Frise.
La
hiérarchie ecclésiastique et diocésaine est organisée depuis
longtemps dans les contrées correspondant à la Belgique actuelle,
qui appartiennent d’une part aux archevêques de Cologne et de
Trèves, de l’autre aux évêques de Cambrai et de Tongres.
Ces
derniers résident déjà à Liège.
La
Souabe a les évêchés d’Augsbourg et de Constance.
Ceux
de la Bavière sont réorganisés avec la coopération du duc des
Bavarois, de nouveaux évêchés sont créés par Saint Boniface pour
le reste de l’Austrasie...
Mais
dans la plupart de ces contrées, peut-être même dans certaines
parties de la Belgique, on est encore secrètement fidèle aux
pratiques du paganisme, c’est-à-dire au culte des peuples du Nord.
Non
seulement le paganisme est parfaitement vivace chez les Saxons, ces
ennemis farouches du christianisme, mais même dans les pays devenus
chrétiens depuis des siècles, la pureté de la foi est ou perdue ou
altérée...
Les
mœurs du clergé même ne sont pas exemptes de vices et de
désordres, la plupart des prêtres sont mariés, d’autres vivent
en concubinage.
On
conçoit que des guerres continuelles ne soient pas favorables à
l’observance des préceptes de la religion.
En
Austrasie, le culte est défiguré, il en est de même en Neustrie,
même si certains évêques professent des doctrines hérétiques,
et où, depuis 80 ans, il n’y a pas eu de concile...
En
un mot, le christianisme est menacé de perdre l’unité et de se
dissoudre en une multitude d’Églises nationales, provinciales, et
même de sectes diverses.
Les
papes, ainsi que Saint Boniface, considèrent comme un de leurs
premiers devoirs de faire disparaître les restes du paganisme, de
proscrire les hérésies et de remplacer les pasteurs immoraux ou
hérétiques.
Il
faut aussi régler les relations de l’Église avec le pouvoir
séculier par rapport aux biens ecclésiastiques, dont une grande
partie se trouve en la possession tout au moins usufruitière des
hommes d’armes de Charles Martel... Il faut enfin et surtout
constituer l’unité de l’Église, en la soumettant à la
suprématie du pape.
Ceci
est le point capital dans la pensée de Boniface. Lorsque le pape
Grégoire III l’a nommé archevêque de Mayence et métropolitain
de tous les évêchés qu’il fondera en Germanie, il lui a fait
prêter le serment suivant :
« Moi,
Boniface, évêque par la grâce de Dieu, je promets à toi,
bienheureux Pierre, prince des apôtres, et à ton vicaire, le
bienheureux Grégoire, et à ses successeurs, par le Père, le Fils
et le Saint-Esprit, trinité sainte et indivisible, et par ton corps,
ici présent, de garder toujours une parfaite fidélité à la Sainte
Foi Catholique, de demeurer, avec l’aide de Dieu, dans l’unité
de cette foi de laquelle dépend, sans aucun doute, tout le salut du
chrétien, de ne me prêter, sur l’instigation de personne, à rien
qui soit contre l’unité de l’Église universelle, et de prouver
en toutes choses ma fidélité, la pureté de ma foi, et mon entier
dévouement à toi, aux intérêts de ton Église, qui a reçu de
Dieu le pouvoir de lier et de délier, à ton vicaire susdit et à
ses successeurs, etc...
Le
capitulaire de l’an 742 est une véritable charte ecclésiastique,
c’est la charte de réformation de l’Église d’Austrasie, bien
plus, c’est la charte de fondation de l’unité de l’Église et
par conséquent de l’unité de l’empire, car l’une ne se serait
pas faite sans l’autre.
Dans
notre réunion synodale, nous avons déclaré et décrété que nous
voulions garder jusqu’à la fin de notre vie la foi et l’unité
catholique et la soumission envers l’Église Romaine, Saint Pierre
et son vicaire.
Que
nous rassemblerions tous les ans le synode.
Que
les métropolitains demanderaient le pallium au siège de Rome, et
que nous suivrions canoniquement tous les préceptes de Pierre, afin
d’être comptés au nombre de ses brebis.
Et
nous avons tous consenti à soutenir cette profession de foi ...
Il
a donc été décidé, dans le concile de 742, qu’à l’avenir il
y aurait chaque année une assemblée synodale.
C’est
en exécution de ce décret qu'est tenu aux Estinnes, en 743, le 9e
concile. Celui-ci a pour la Belgique un intérêt particulier,
quoique ses décrets se rapportent à toute la monarchie et
spécialement à la Frise, à la Thuringe et à la partie
christianisée de la Saxe.
Malheureusement
nous n’avons pas le texte entier des décrets de 743. Ils sont
classés dans le capitulaire de Carloman Ier en quatre articles qu’on
peut subdiviser :
Le
premier de ces articles constate d’abord que les décrets du
concile de 742 sont confirmés par les évêques, les comtes et
autres seigneurs réunis aux Estinnes, aux calendes de mars.
Il
y est dit ensuite que les abbés et les moines ont reçu la règle de
Saint Benoît, afin de rétablir la pureté de la vie monastique.
En
troisième lieu, il y est ordonné que les clercs incontinents ou
adultères, qui ont souillé les Lieux Saints ou les Maisons
Religieuses, en seront éloignés et soumis à une pénitence, que
si, après cela, ils retombent dans la même faute, ils subiront les
peines édictées par le synode précédent, c’est-à-dire la
flagellation et l’emprisonnement, que cette disposition est
applicable aux moines et aux nonnes.
Le
capitulaire de l’an 742 a décrété la restitution aux églises
des biens qu’on leur a pris pendant la guerre. Ce décret est
confirmé comme les autres en principe, mais il faut croire que dans
l’exécution il rencontre de graves difficultés, car il est
stipulé, à l’article 2 du capitulaire de 743, qu’une certaine
partie des biens ecclésiastiques sera retenue à titre de précarie
et de cens, pour les besoins de l’armée, à condition qu’il soit
payé un solidus par année à l’Église ou au monastère, pour
chaque maison.
Ces
dispositions sont remarquables sous un autre rapport : On y reconnaît
le caractère qu’a le fief avant qu’il soit héréditaire, de
sorte que le concile de Leptines et le capitulaire qui donne à ses
résolutions force de loi politique constituent les plus anciennes
bases du régime féodal connues jusqu’à ce jour...
Le
3e article du capitulaire de l’an 743 contient des dispositions sur
les mariages et particulièrement sur les mariages incestueux et
adultérins.
Des
auteurs du Ier siècle nous ont transmis deux autres décrets
relatifs aux mariages et qui semblent avoir été sanctionnés par le
concile de Leptines, mais que Pertz n’a pas jugé convenable
d’ajouter au capitulaire.
Peut-être
ces canons sont-ils rédigés postérieurement, de même que le
document sur les superstitions païennes, et puis ajoutés comme
appendices à l’acte principal du concile.
L’article
4 du capitulaire renouvelle la proscription des pratiques
superstitieuses du paganisme, les punit d’une amende de 15 sols, et
rappelle que Charles Martel les a interdites sous la même peine.
A
cet article se rapporte un document extrêmement remarquable, qui
porte le titre de « Forma renontiationis diabolis et Indiculus
superstitionum et paganiarum ». Il en a été publié un texte
tout à fait correct, d’après un manuscrit de la bibliothèque du
Vatican, par M. Pertz, dans son 1er volume des Leges, p. 19 et 20.
M.
Massman de Berlin en a publié une espèce de fac-simile en 1833. Ce
document contient deux choses bien distinctes, la formule
d’abjuration et le catalogue des pratiques superstitieuses. La
première partie est particulièrement célèbre à cause du texte de
« l’abrenuntiatio et de la confessio ». On a dit que
ces actes sont conçus en idiome Anglo-Saxon, d’autres ont prétendu
qu’ils sont écrits en dialecte Ripuaire, mais à l’époque où
ils sont rédigés, les dialectes Germaniques ne sont pas aussi
différents entre eux qu’ils le sont aujourd’hui : Ces textes
sont probablement intelligibles à tous les Germains, à ceux de la
Frise, de la Thuringe et des pays Saxons, comme à ceux de la
Belgique. Ce langage se comprend encore facilement aujourd’hui dans
la Flandre, il offre avec le Flamand moderne une si frappante
analogie qu’on y reconnaît le type primitif de cette langue...
L’Indiculus
superstitionum et paganiarum est un des documents les plus précieux
que l’on possède pour la connaissance de la vieille religion
d’Odin. Il a été utilisé par tous les auteurs qui ont écrit sur
ce sujet, notamment par J. Grimm. Quelques passages cependant n’ont
pas encore été expliqués d’une manière satisfaisante. Comme les
anciens usages païens ont laissé des traces en Belgique, il est
intéressant de donner ici le texte de l’Indiculus avec des
éclaircissements tirés de ses plus récents interprètes.
1.
De sacrilegio ad sepulchra mortuorum.
2.
De sacrilegio super defunctos, hi est Dadsisas.
Ces
deux titres, relatifs à la sépulture des morts et à leurs
funérailles, ont pour objet de proscrire certaines pratiques
païennes en usage chez les Germains.
Nous
ne pensons pas qu’il existe à cet égard d’autres indications
que celles qu’on trouve dans les capitulaires de Charlemagne.
Le
chapitre 197 du livre VI d’Ansegise nous apprend qu’en portant
leurs morts en terre, les païens poussent des hurlements affreux, il
est désormais défendu de crier ainsi, et recommandé aux fidèles
d’implorer avec dévotion et componction la miséricorde divine
pour le défunt. Il est permis toutefois de chanter des psaumes ou de
réciter à haute voix Kirye eleyson, Christe eleyson, les hommes
entonnant et les femmes répondant.
Le
même capitulaire défend de boire et de manger sur les tombeaux,
« super eorum tumulos ». Cette interdiction paraît se
rapporter aux Dadsisas qui, d’après le II de l’Indiculus, sont
des cérémonies sur les défunts. L’usage des repas de funérailles
a résisté, chez les peuples Germains. Mais on a cessé de boire et
de manger sur la tombe même, mais on a continué de réunir dans un
festin toutes les personnes qui ont assisté à la cérémonie
funèbre.
Cet
usage s’est conservé longtemps en Belgique et particulièrement
dans la Flandre, il a pris place dans les coutumes, qui mettent la
moitié des frais à charge de la veuve et l’autre moitié à la
charge des héritiers. Aujourd’hui même, en Belgique comme en
Allemagne ainsi que dans le nord de la France, dans beaucoup de
localités, les enterrements sont encore suivis d’un repas de mort
ou plutôt d’une collation.
« De
spurcalibus in februario ».
Les
spurcalia sont des réjouissances qui ont lieu au mois de février,
et qu’il ne faut pas confondre avec la fête de Joël ou du retour
du soleil, que les anciens Germains célèbrent au solstice d’hiver.
Le mois de février s’appelle encore aujourd’hui en flamand
sporkel ou sprokkelmaend.
M.
de Reinsberg suppose que les mots spurcalia, spurcamina, spurcitiœ,
souvent employés pour désigner des fêtes ou coutumes païennes,
viennent de spurcus, sale, impur, et que c’est l’Église qui a
ainsi qualifié ces fêtes par dérision.
Suivant
M. Hefele, nos ancêtres sont fort attachés aux spurcalia, les
missionnaires chrétiens font en sorte que leur célébration
coïncide avec la fête de Noël. Depuis lors il est d’usage, chez
les peuples d’origine Germanique, que les paysans tuent un cochon
vers cette époque. En Allemagne on s’invite à manger en famille
la Metzelsuppe, en Belgique on se réunit pour fêter la Penskermis.
Cependant
nous devons faire remarquer que déjà au temps de Saint Eloy, la
fête de Joël, dans laquelle on immolait un porc, se célébrait au
mois de janvier, ce qui semble indiquer que cette fête est distincte
des spurculia.
Le
docteur Coremans, qui a fait sur les mythes des Germains des
recherches précieuses, nous apprend que la fête du Joël ou du
solstice d’hiver se célèbre depuis la veille de Noël jusqu’à
l’Épiphanie. La veille de la nuit-mère, dit-il, où la terre
accouche d’un géant formidable, les familles, les alliés, les
membres de la commune, se réunissent sous les toits hospitaliers de
leurs chefs naturels ou électifs.
La
bûche du Joul brûle sur l’âtre, comme elle y brûle encore en
Westphalie et ailleurs. La table, ornée de verdure, qui cache à
moitié les pommes, les poires, les noix (symbole du germe universel
et des espérances de l’avenir), attende le rôt fumant de sanglier
(remplacé aujourd’hui par le porc), animal immonde, emblème de
l’obscurité, et l’oie (symbole de la terre), entourée de 12
lumières.
Les
cornes à boire, les vases remplis de bière et d’hydromel,
complètent l’aspect du banquet de Joul ou de la Noël.
Le
travail du savant Raepsaet sur l’origine du carnaval tend à
démontrer l’identité des spurcalia avec les Lupercalia des
Romains. M. Hefele ne connaît pas ce travail, cependant lui aussi
pense que notre carnaval pourrait bien avoir pris sa source dans ces
réjouissances. L’analogie se montre d’une manière frappante
dans une lettre de Boniface au pape Zacharie, où il est dit : Ces
hommes charnels, ces simples Alamans, ou Bavarois, ou Francs, s’ils
voient faire à Rome quelqu’une des choses que nous défendons,
croient que cela a été permis et autorisé par les prêtres et le
tournent contre nous en dérision, et s’en prévalent pour le
scandale de leur vie... Ainsi ils disent que chaque année, aux
calendes de janvier, ils ont vu à Rome, et jour et nuit auprès de
l’église, des dames parcourir les places publiques, selon la
coutume des païens, et pousser des clameurs à leur façon, et
chanter des chansons sacrilèges... Et ce jour, disent-ils, et jusque
dans la nuit, les tables sont chargées de mets, et personne ne veut
prêter à son voisin ni feu, ni fer, ni quoi que ce soit de sa
maison...
Ils
disent aussi qu’ils ont vu des femmes porter, attachés à leur
jambe ou à leur bras, comme font les païens, des phylactères et
des bandelettes, et offrir toutes sortes de choses à acheter aux
passants, et toutes ces choses, vues ainsi par des hommes charnels et
peu instruits, sont un sujet de dérision et un obstacle à notre
prédication et à la foi... Si Votre Paternité interdit dans Rome
les coutumes païennes, elle acquerra un grand mérite, et nous
assurera un grand progrès dans la doctrine de l’Église.
4.
« De casulis et fanis ».
M.
Hefele voit dans ce titre une défense de construire des berceaux de
rainées (casulœ) pour les fêtes privées en l’honneur des
divinités païennes, et de célébrer dans les bois des fêtes
publiques de la même espèce. Suivant Schayes, il s’agit de petits
pavillons revêtus de chaume, qui servent à couvrir les emblèmes
des dieux.
5.
« De sacrilegiis per ecclesias ».
Ce
titre paraît se rapporter aux chants profanes, aux cantiques que les
Germains et leurs femmes font entendre dans les églises, ainsi
qu’aux festins qui s’y donnent. Ces pratiques païennes sont
également proscrites par les statuts de Saint Boniface, où il est
dit : Non liceat in ecclesia choros secularium, vel puellarum cantica
exercere, nec convivia in ecclesia prœparare.
6.
De « sacris sylvarum quos Nimidas vocant ».
On
ignore quels sont ces sacrifices du paganisme Germanique qu’on
appelle nimidas.
Eckhart
pense qu’il s’agit de fêtes dans lesquelles on sacrifie neuf
têtes de chevaux (nunhedas). Canciani et Seiters sont portés à
croire que les prohibitions de ce titre se rapportent à la coutume
de cueillir le gui qui croit sur les chênes, mais cette cérémonie
appartient au druidisme, et le gui n'est jamais un objet de
vénération pour les Germains.
Ceux-ci
consacrent des bois et des forêts, mais seulement parce qu’ils
voient dans ces solitudes l’habitation de leurs dieux.
D’après
le « Spiegel historiael de Van Maerlant », il y a encore,
à la fin du XIIIe siècle, entre Sichem et Diest, un chêne que le
peuple a en grande vénération. (dédié à Thor). L’usage de
placer des statuettes de saints ou de saintes sur les arbres s’est
conservé dans les campagnes.
En
743, il va même jusqu’à convoquer un Concile à Leptinnes près
de Mons, dans le Hainaut, pour tenter une fois de plus de mettre fin
aux pratiques païennes toujours en vigueur, alors qu’un siècle
auparavant, déjà, Saint Eloi a passé 20 ans de sa vie à convertir
la population païenne Belge au christianisme... Il leur défend
notamment :
« De
consulter les devins et les magiciens.
De
croire aux présages, et aux jours heureux ou malheureux.
De
célébrer le premier jour de janvier et l’époque du solstice par
des réjouissances impies et sacrilèges.
D’invoquer
les noms des mauvais esprits et des idoles.
De
considérer comme des jours fériés et de repos le jeudi » (jour de
Jupiter-Thor-Taranos) « ou tout autre jour de l’année, à
l’exception du dimanche.
De
placer des luminaires ou des offrandes dans les temples, auprès des
rochers, des sources, des arbres, des cavernes et des carrefours.
D’attacher
des amulettes au cou des bestiaux.
De
prononcer des exorcismes sur ces derniers, et de les faire passer par
le creux d’un arbre ou par une excavation faite en terre...
Saint
Éloi se prononce aussi :
Contre
les femmes qui se livrent aux pratiques de la magie.
Contre
la coutume des peuples de Belgique de faire un grand tintamarre aux
éclipses de la lune, dans la croyance où ils sont, qu’alors cette
planète est assaillie par les démons.
Il
les engage à détruire les fontaines et les arbres auxquels le
paganisme a voué un culte superstitieux.
A
ne point placer des objets en forme de pieds aux carrefours.
A
brûler ceux qu’ils y trouverent déposés, etc... »
En
pure perte semble-t-il si l’on en croit les canons retrouvés du
concile de Leptines (« Indiculus superstitionum et paganinarum »)
qui récapitulent les pratiques superstitieuses et païennes
interdites mais dont les développements d’origine de chacun
d’entre eux ne nous sont malheureusement pas parvenus :
Chapitre 1. Du sacrilège qui se commet auprès des sépultures.
Chapitre 2 . Du sacrilège qui se commet à l’occasion des morts, c’est-à-dire des complaintes funèbres appelées « Dadsisas ».
Chapitre 3. Des pratiques honteuses du mois de février, « Spurcalibus ».
Chapitre 4. Des chapelles ou des oratoires des païens.
Chapitre 5. Des sacrilèges qui se commettent dans les églises.
Chapitre 6. Des sacrifices que l’on fait dans les forêts et que l’on appelle « Nimidas ».
Chapitre 7. Des oblations que l’on fait sur les pierres.
Chapitre 8. Du culte rendu à Mercure ou à Jupiter .
Chapitre 9. Du sacrifice adressé à quelqu’un des saints.
Chapitre 10. Des phylactères et ligatures.
Chapitre 11. Des fontaines où l’on sacrifie.
Chapitre 12. Des chants incantatoires.
Chapitre 13. Des augures que l’on tire des oiseaux, des chevaux, du fumier des bœufs ou de l’éternuement.
Chapitre 14. Des devins ou sorciers.
Chapitre 15. Du feu sacré que l’on obtient en frottant deux morceaux de bois et que l’on nomme « Nodfyr » (feu de calamité).
Chapitre 16. De la cervelle des animaux.
Chapitre 17. Des superstitions païennes attachées au foyer des maisons et du commencement de quelque ouvrage.
Chapitre 18. Des lieux sans maître que l’on honore comme sacré.
Chapitre 19. D’une prière que les gens de bonne foi appelle « prière de Sainte Marie ».
Chapitre 20. Des fêtes célébrées en l’honneur de Mercure ou de Jupiter .
Chapitre 21. De l’éclipse de lune où l’on crie « Vince luna ».
Chapitre 22. De la conjuration des tempêtes, des cornes et des limaçons.
Chapitre 23. Des sillons tracés autour des domaines.
Chapitre 24. De la procession païenne que l’on nomme « Yria » et qui se fait avec des habits et des chaussures déchirés, des pains rompus et des pierres.
Chapitre 25. De l’usage que l’on est de considérer tous les morts comme autant de saints.
Chapitre 26. Du simulacre poudré de farine.
Chapitre 27. Du simulacre que l’on fait avec des haillons ou de draps.
Chapitre 28. Du simulacre que l’on porte dans les champs.
Chapitre 29. Des pieds et des mains de bois dont on se sert à la manière des païens.
Chapitre 30. De l’opinion que l’on est que certaines femmes commandent à la lune et qu’elles peuvent arracher le cœur des hommes, ce qui est la croyance des idolâtres.
Il
es le premier où l'on ait introduit l'usage de dater d'après l'ère
chrétienne, « selon le comput de Denys le Petit. Auparavant on
datait du règne des rois ou des empereurs. » .
On
trouve à la fin des actes de ce Concile une formule de renonciation
au démon et à ses œuvres... En langue Tudesque, si ressemblante à
la langue flamande que cette formule est un précieux monument de
l'antiquité de ce dernier idiome, et prouve, que la plupart des
Belges en descendent...
Histoire
des Carolingiens - Warnkœnig & Gerard
www.mediterranee-antique.fr/Auteurs/Fichiers/WXYZ/.../Car_202.htm
Malgré
la réunion des trois couronnes, la Neustrie, l'Austrasie et la
Bourgogne ... La huitième année de son règne, comme il parcourait
l'Austrasie avec une pompe ...... Il est dit en effet, dans le
deuxième capitulaire de Leptines de l'an 743, que les ..... les
Estinnes, situé à une lieue de Binche, dans la province du Hainaut.
Les
Belges, poème: accompagné de remarques historiques
https://books.google.fr/books?id=CPVNAAAAcAAJ
Adrien
Jacques Joseph Le Mayeur - 1812
...
fit assembler le 1er. de mars 743 un Concile à Leptines , où .
selon Hincmar, ... On y fit lecture des sept canons du Concile
germanique . convoqué l'année ...
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