mercredi 23 avril 2014

1117... EN REMONTANT LE TEMPS

Cette page concerne l'année 1117 du calendrier julien. Ceci est une évocation ponctuelle de l'année considérée il ne peut s'agir que d'un survol !

Bertrade de Montfort ( 1070 - 1117) est successivement, par ses différents mariages, comtesse d'Anjou et reine de France, c'est fille de Simon Ier, seigneur de Montfort, et de sa troisième épouse Agnès d’Évreux, elle est devenue orpheline presque en naissant, son frère Amaury, héritier du comté, a laissé l’enfant à la tutelle de Guillaume d’Évreux, le frère de leur mère... Bertrade a grandi, dans la maison de son oncle, au sein d’une retraite sévère, elle est bien jeune encore quand Guillaume la marie au comte d’Anjou, c’est presque la faire souveraine, car les comtes d’Anjou le disputent en puissance à la maison royale de France.. on l’a vu pendant le règne de Robert mais sous la couronne d’Anjou, Bertrade ne se regarde que comme une femme sacrifiée.
Voilà comment son mariage avait été amené : Foulques le Rechin, ce surnom l’indique, est d’une figure sans noblesse, d’une taille mal formée, de mœurs dépravées s'ajoutant aux disgrâces de la nature, des infirmités précoces le handicapent. Tourmenté par la goutte, il a inventé, pour cacher la difformité de ses pieds, une chaussure à plusieurs pointes, dont il impose la mode à ses vassaux. Le comte a déjà été marié 3 fois :
FOULQUES D'ANJOU
Veuf en premières noces, il épouse successivement Hermengarde de Bourbon, et Arengarde de Castel-Aillon, qu’il répudie l’une et l’autre sous prétexte de parenté, c’est alors que Robert, duc de Normandie, ayant besoin de son aide pour la conquête du Maine ; le comte, met au secours qu’il promet la condition d'avoir Bertrade de Montfort en mariage. Malgré la grandeur de cette alliance, la famille de la jeune comtesse se refuse à y consentir. Mais, le tuteur de Bertrade est vassal du duc de Normandie, qui fait la demande au nom du comte d’Anjou ; il n’ose déplaire à son suzerain, et, après une lutte plus feinte que réelle, il finit par livrer sa pupille... C’est sous ces auspices que se célèbrent les noces.
Bertrade de Montfort ne s’accoutume pas aux difficiles devoirs de sa nouvelle position : la naissance d’un fils ne la console pas même si elle cache ses chagrins... Confiante dans sa beauté et dans les ressources de son habileté, elle prépare un remède à ses malheurs... Elle est comtesse d’Anjou ! Elle veut devenir reine de France...
Son plan arrêté, elle fait prier Philippe Ier de lui venir en aide : Le roi relègue Berthe de Hollande à Montreuil, vient lui-même à Tours où il ne craint pas de trahir l’hospitalité de son vassal et de faire partir furtivement la comtesse, qu’il rejoint à Orléans, ville du domaine royal, puis, il fait prononcer, sous prétexte de parenté, la nullité de son mariage avec Berthe de Hollande, et allègue les premières alliances de Foulques pour la nullité du mariage de Bertrade avec le duc d’Anjou.
Bertrade de Monfort vit donc loin de son mari et tente de divorcer pour épouser le roi, ce mariage a lieu, sans être ni l'un ni l'autre divorcés, contre les lois de l’Église.
Philippe Ier annonce aux seigneurs et au peuple son mariage avec Bertrade, et le fait célébrer à Paris par l’évêque de Senlis, assisté de l’archevêque de Rouen et de l’évêque de Bayeux. Mais Yves de Chartres, invité à cette noce, ne s’y trouve pas il écrit à Philippe :
« Je ne veux ni ne puis me trouver à la solennité de ces noces sans être assuré auparavant qu’un concile général a approuvé votre divorce, et que vous pouvez contracter avec cette femme un mariage légitime... Vous m’invitez à me trouver à Paris avec votre épouse, et je ne sais si elle peut l’être ».
En même temps il écrit à l’archevêque de Reims :
« Je vous conjure de me dire la vérité de ce que vous savez, d’éclairer ma conscience, et de me donner un bon conseil, quelque difficile qu’il soit à suivre ; car j’aime mieux perdre pour toujours les fonctions et le titre d’évêque que de scandaliser le troupeau du Seigneur par ma prévarication ».
Les doutes et les craintes d’Yves de Chartres déplaisent au roi, qui, au lieu de répondre, défie l’évêque, c’est-à-dire, selon les termes du temps, se déclare son ennemi, il le fait attaquer par le seigneur du Puiset (vicomte de Chartres) qui entrant à main armée sur les terres du prélat, le fait prisonnier...
A la vue de cette violence, la ville de Chartres s’émeut, l’effervescence est au comble, les habitants prennent les armes :
« Vengeons notre évêque ! s’écrient-ils de toutes parts ; c’est notre pasteur, si nous le perdons, qui nous protégera ? Qui nous consolera ? Qui rompra pour nous le pain de la parole ? Vengeons-le ! C’est le saint de Dieu qu’on retient en prison ! »
Une lettre de leur évêque leur interdit la vengeance :
LE ROI PHILIPPE Ier
« Je vous défends, mes frères, je vous défends absolument, leur dit-il, de vous armer pour ma cause, ce n’est pas en brûlant des maisons et en pillant des pauvres que vous apaiserez Dieu, vous ne feriez que l’irriter, et, sans son bon plaisir, ni vous, ni personne, ne pouvez me délivrer. N’augmentez pas mon affliction par le chagrin que me causerait la misère d’autrui, car j’ai résolu non seulement de demeurer en prison, mais de perdre ma dignité et même ma vie, plutôt que d’être cause qu’on fasse périr des hommes... Souvenez-vous qu’il est écrit que Pierre était en prison, et que l’Église faisait sans cesse des prières pour lui ».
Les habitants de Chartres versèrent des pleurs à la lecture de cette lettre, et ils posèrent les armes. Pendant que le scandale de la prison de saint Yves trouble le diocèse de Chartres, Bertrade de Montfort et Philippe de France goûtent les plaisirs de leur union nouvelle, car ils ont passé outre et se sont mariés : Berthe de Hollande languissait à Montreuil.
Le bruit de la détention d’Yves de Chartres est arrivé jusqu’à Rome, Urbain II écrit au roi pour l’engager à rendre la liberté au prélat, et pour lui dire que son mariage ne peut être valable tant qu’un concile n’en a pas décidé, car Berthe de Hollande est vivante et Bertrade de Montfort toujours mariée à un autre. Un concile à Pise, un autre concile à Plaisance ne peuvent se prononcer que provisoirement, Philippe Ier demande des délais. Un troisième concile à Reims les excommunie. Ils vivent paisible sous le poids de l’excommunication : Bertrade de Montfort l’enchante du charme de sa grâce, et, il se soucie peu et du scandale et du soin de sa propre renommée... On lui obéit, mais on fuit sa présence, quand il arrive dans une ville, toute fête religieuse est suspendue, les chants des prêtres cessent, quand il en sort les cloches sonnent en branle : « Voyez, ma dame, comme on nous renvoie », se contente-t-il de dire en riant.
Berthe de Hollande sa première épouse il l'a fait enfermer au Château de Montreuil-sur-Mer où elle meurt en 1094.
Urbain II préside le concile de Clermont. Le 18 novembre 1095, devant 13 archevêques et 225 évêques, Urbain II réitère la condamnation de l'investiture laïque et interdit aux clercs de rendre hommage à un laïc, (même un roi), proclame solennellement la trêve de Dieu, qui suspend la guerre aux temps consacrés, déjà annoncée dans des synodes précédents. Les pillages et guerres privées sont combattus par des ligues pour la paix et des forces de polices organisées par les évêques. Urbain II renouvelle l'excommunication pour bigamie prononcée par Hugues de Romans contre le Philippe Ier de France pour son remariage avec Bertrade de Montfort, et empêche le roi de partir en croisade. Philippe Ier résiste tant qu’il peut pendant 2 ans, puis finit par se rendre et jure de cesser tout commerce illicite avec Bertrade de Montfort... Mais retourne très vite auprès de la belle, qui lui a donné 4 enfants :
Philippe (1093-1123)
Fleury (1095-1118)
Cécile (1097-1145)
Eustachie (v. 1100- ?)

BERTRADE ET PHILIPPE
Bertrade, malgré les excommunications renouvelées, conserve le titre et les honneurs de reine, elle s’occupe d’asseoir de plus en plus son pouvoir. Elle entreprend une chose inouïe : elle ose reparaître en Anjou, à la cour de son premier mari, pour le réconcilier avec le roi, et elle réussit... Foulques donne des fêtes, reçoit Bertrade comme sa souveraine, et consent à tout ce qu’elle lui demande. Il importe que le comte d’Anjou n’appuie pas le parti de l’excommunication et qu’on l’amène à reconnaître lui-même la validité du mariage de Bertrade avec Philippe Ier car Berthe de Hollande est morte (1094), et, depuis ce temps, les opinions sont partagées, les uns se prononcent pour le roi, les autres restent contre.

Elle est sans doute à l’origine du conflit qui éclate entre le roi et son fils associé au trône en 1098, conflit durant lequel la patience et la fidélité filiale du futur Louis VI sont mises à l’épreuve... Les mauvais traitements infligés par Bertrade de Montfort éloignent en effet le jeune prince Louis, qui se retire auprès d'Henri Beauclerc.
Anquetil affirme qu’ « il n’y est pas plus tôt arrivé que le roi d’Angleterre reçoit une lettre portant le sceau de France, dans laquelle on le prie de faire mourir ou tout au moins d’enfermer le prince Français. Henri Beauclerc remet cette perfide missive au prince, qui reconnaît la main de sa belle-mère ».
Les ennemis de Bertrade de Montfort l’ont accusée de vouloir empoisonner le fils aîné de Berthe de Hollande, mais ce crime est très loin d’être prouvé... C’est assez contre Bertrade de Montfort du scandale de sa vie, sans charger sa mémoire de fautes qu’elle n’a pas commises.
Suger loue ses talents « et les admirables qualités de son esprit » ; il ne parle pas de cette odieuse accusation de poison, dont il aurait été plus instruit que personne, puisqu’il est l’ami et le condisciple de Louis VI ; mais rien ne lave Bertrade de Montfort du double tort et d’avoir fait répudier Berthe de Hollande, et de n’avoir pas craint de troubler l’État...

La mort d’Urbain II en 1099 et l’élection de son successeur Pascal II n’arrange guère la situation des 2 amants, lequel renouvelle les dispositions prises par son successeur, l'aggravant même puisqu'il prononce l'interdit sur le royaume, Philippe Ier tente de se rendre à Rome pour négocier avec le souverain pontife, mais l’évêque de Chartres, fermement opposé à Bertrade de Montfort , l’empêche de partir pour l’Italie.
Lorsqu’un nouveau concile a lieu à Beaugency, Philippe Ier et sa maîtresse s’y rendent ensemble, et, faisant preuve de beaucoup d’humilité, jurent sur l’Évangile qu’il n’y aura plus relation charnelle entre eux.... Nouveau serment nouveau parjure. Ils ne respectent que très peu de temps cet engagement solennel, avant de retomber dans le péché.
Le pape, qui a besoin d’appuis militaires pour lutter contre l’empire Allemand, se lasse des procédures et laisse le couple vivre en paix avec l’Église. Même le très âgé Foulques d’Anjou pardonne à Bertrade de Montfort. Cependant il vient un moment où Philippe craint et croit devoir se soumettre, il promet, la main sur l’Évangile, de renvoyer Bertrade de Montfort, femme de Foulques, et de ne lui parler qu’en présence de témoins. Ce serment, il ne le remplit pas. Bertrade emploie tout ce qu’elle a de séduction, Philippe la reprend, encourt de nouvelles excommunications, fait des promesses qu’il viole comme les premières, enfin, en 1105, sous le pontificat de Pascal II, Yves de Chartres lui-même, voyant que cette passion dure toujours, que les partisans de Philippe Ier et de Bertrade de Montfort deviennent de jour en jour plus nombreux et plus forts, que la mort de Berthe de Hollande a rendu le roi libre, et que désormais le seul obstacle à son union est le mariage de Bertrade avec Foulques d'Anjou, se demande s’il ne vaut pas mieux rompre ce mariage... on suppose qu’à la fin de sa vie, l’union de Philippe Ier et de Bertrade de Montfort est reconnue, et qu’il meurt enfin époux de cette femme à laquelle il a sacrifié 15 ans le sort de son royaume, de sa conscience et de son âme.
Les preuves qu’on trouve de ce mariage sont : le titre de reine et de femme en secondes noces donné à Bertrade de Montfort dans les écrits de l’abbé Suger et le nom de belle-mère du prince Louis, que le pape Calixte II (1119-1124) lui donne dans une de ses bulles.
Il est vrai que Suger, tout en la nommant ainsi, parle de l’illégitimité des enfants qu’elle laisse, comme d’un fait notoire qui les exclue du trône. Elle a constamment porté le titre de reine.
Philippe Ier meurt le 30 juillet 1108 au château de Melun , Bertrade de Monfort, à presque 50 ans et passant encore pour fort belle, se retire de la cour où elle est peu appréciée, en particulier par le nouveau roi Louis VI (qu’elle a tenté de déposséder de ses droits dynastiques au profit de son fils)... elle a suscité des troubles en soutenant de ses intrigues les prétentions de son fils Philippe contre Louis le Gros. Selon la coutume le roi a nommé son fils aîné, Louis, issu de son premier mariage héritier de la couronne Philippe Ier de France est inhumé le 2 août 1108 dans la crypte de la basilique de Saint-Benoît-sur-Loire, les mains jointes sur la poignée de son épée.
Sous son règne se dessinent les grandes lignes de la politique des souverains capétiens du XIIe siècle : assurer une base réelle à la puissance royale en consolidant le domaine, et abaisser ou contenir les trop puissants vassaux.
PHILIPPE Ier ROI DES FRANCS
Philippe Ier de France développe l'administration royale aux dépens des seigneurs féodaux, et, pour assurer des revenus à la couronne, il dispose des biens d'Église et vend les charges ecclésiastiques, ce qui lui attire les foudres des réformateurs grégoriens. Louis VI le Gros doit se faire sacrer précipitamment le 3 août 1108 pour ne pas risquer la concurrence d'un fils de la seconde femme de son père, Bertrade de Montfort, mécontente de cette décision aurait dit-on tenté d'empoisonner le prince Louis. Après la mort de son mari, elle a dû quitter le terrain, et vendant sa dot aidée de son frère Amaury III fonde l'abbaye de Haute-Bruyère près de Saint Rémy l'Honoré où elle est enterrée. Elle prend le voile à l’abbaye de Fontevrault, où elle passe une fin de vie pieuse et austère. Bertrade de Montfort y meurt le 14 février 1117, à quarante-sept ans, totalement oubliée.
L'abbaye des Hautes-Bruyeres, de l'ordre de Fontevrault, est fondé par Robert d'Arbrissel en 1112 à Saint-Rémy-l'Honoré à l'initiative d'Amaury III de Montfort pour Bertrade de Montfort Ce prieuré abrite les sépultures des Montfort.

Bertrade de Montfort (1070 - 1117) - Find A Grave Memorial

www.findagrave.com/cgi-bin/fg.cgi?page=gr...Traduire cette page
10 déc. 2005 - 14, 1117. Royalty. She was the daughter of Simon I de Montfort and his third wife Agnes d'Evreux. She became the fifth wife of Fulk IV of Anjou ...

Bertrade de Montfort - Histoire de l'Europe

www.histoireeurope.fr/RechercheLocution.php?...Bertrade...Montfort...
Événements historiques concernant -Bertrade de Montfort- extrait d'une base historique ... 15 événements affichés, le premier en 1051 - le dernier en 1117.

Bertrade de Montfort - La France pittoresque

www.france-pittoresque.com › Reines, Impératrices
Bertrade de Montfort (née vers 1060, morte le 14 février 1117). (Épouse Philippe Ier en 1092). Publié le lundi 1er février 2010, par LA RÉDACTION ...

Bertrade de Montfort - Les Favorites Royales

favoritesroyales.canalblog.com › 01. Les Maîtresses Légendaires
29 avr. 2011 - Bertrade de Montfort vécut à la fin du XIème siècle et au début du XIIème. ... Elle y meurt en 1117, à quarante-sept ans, totalement oubliée.







2 commentaires:

  1. "C'est une femme remplie d'agréments et consommée dans l'art de ces admirables artifices naturels à son sexe, à l'aide desquels les femmes les plus hardies mettent sous leurs pieds des maris mais qu'elles ont accablés d'outrages et qui sont fascinés par ces enchantements ". C'est l'Abbé de Saint Denis, Suger, qui le dit. Son confrère, Yves de Chartres est encore plus sévère "c'est une nouvelle Jézabel qui désire renverser les autels et tuer les prophètes".

    Les hommes d'Eglise sont sévères avec Bertrade et il est vrai que sa vie ne fut pas exempte de faits malfaisants, mais d'un autre côté quelle tristesse d'être orpheline "presque en naissant" et mariée si jeune contre son gré..

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  2. C'était hélas le lot de beaucoup de ces jeunes princesses dont le seul attraits pour certains étaient d'apporter des terres et de la richesse... Et puis d'un point de vu tout à fait féminin le second était autrement plus joli garçon. comme disait Barbara dans une de ses chanson :"Si la photo est bonne qu'on m'amène ce jeune homme".

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