lundi 28 avril 2014

1113...EN REMONTANT LE TEMPS






Cette page concerne l'année 1113 du calendrier julien. Ceci est une évocation ponctuelle de l'année considérée il ne peut s'agir que d'un survol !

Sur 40 km2, plus de 5 000 stupas et temples, un millier encore visibles, mais en ruines

A l’infini, dans une lumière digne des grandes étendues Sahariennes, les formes de stupas paisibles dépassent le temps, défient les siècles donnant cette étrange impression d’avoir suspendu les heures, les jours, les années dans cette lumière dorée du soleil levant. Pagan est incomparable dans le monde bouddhiste, à l’exception d’Angkor.
Les temples sont aussi nombreux que les lotus dans une mare sans fin, à perte de vue, l’horizon se confondant avec le ciel. Pourtant, la majorité des édifices disparus nous laissent imaginer le souffle créateur et religieux qui anime les Birmans d’alors. A l’instar de nos constructeurs de cathédrales, ils sont de grands bâtisseurs animés par une spiritualité hors du commun. On peut affirmer que la foi du peuple de Pagan unifie la Birmanie.
Au XIe siècle, alors que l’art roman fleurit partout en Europe et que le gothique flamboyant n’apparaîtra que bien plus tard, Pagan s’offre le luxe du bouddhisme flamboyant... Ce terme n’a jamais été donné à Pagan, il ne s'agit en aucune manière d’une école et d’un style spécifique et répertorié... Dans la lumière du jour naissant ou du soir couchant, Pagan flamboie de tous ses feux
La ville de Bagan (Pagan) commande le passage entre les plaines de Kyaukse et de Mingu, les 2 seuls bassins de l' Irrawaddy avant son delta. Elle se trouve à 21° de latitude nord, mais à l'intérieur des terres et à l'ombre des hauteurs de l'Arakan, qui arrêtent une partie de la mousson du sud-ouest. Il y tombe à peine 0,60 m d'eau par an, on l'appelle le Tattadesa, le « Pays brûlant ». L'irrigation y a pourtant très tôt créé un véritable grenier, le Ledwin, le « Pays du riz ». Bagan est équidistante des deux bras du fer à cheval de montagnes qui enserre la Birmanie, d'où, de tous temps, ont dévalé les envahisseurs... L'Irrawaddy, incomparable chemin d'eau, relie la ville à la mer, à la civilisation. Nulle prédestination géographique, nulle nécessité géopolitique n'expliquent pourtant sa destinée, mais bien plutôt la volonté des hommes, ou les hasards de leurs destins... Les Pyu de langue Tibéto-Birmane ont civilisé la vallée du fleuve où subsistent, de Halin à Prome, leurs antiques cités. Les Birmans proprement dits viennent les y rejoindre et se fondre avec eux.
Tout commence avec ce personnage d’exception qui se fait couronner roi en 1044. Très mystique avec un mental puissant, Anawrahta décide de faire un pèlerinage sur l’île de Ceylan, pays du bouddhisme theravada. Rompant avec son éducation mahayaniste, il se convertit au theravāda.
Le personnage décisif dans cette conversion est un moine de Thaton, Shin Aran. Le royaume de Thaton s’apparente à Suvarnabhumi appelé la « Terre de l’Or ». Thaton, port important commerce avec l’Inde et Ceylan. L’empereur Ashoka, le grand empereur indien et bouddhiste du IIIe siècle avant J.-C a mentionné cette terre d’or et y a envoyé ses moines bouddhistes.
Le moine Shin Aran participant à la conversion d’Anawrahta le pousse à l’étude, des textes pour ramener ceux-ci dans son royaume. Aussi officiellement, demande-t-il au roi de la ville de Thaton de lui fournir les textes liturgiques en pâli . Le roi pour une raison inconnue refuse. Outré, Anawrahta s’empare avec son armée de la ville en 1057. C'est au roi Anawrahta (1044-1077) qu'elle doit son essor. Ce roi guerrier soumet les Mōn de Thatön et même ceux du Ménam, jusqu'au Haripuñjaya et à l'Arakan, peuplé d'un rameau pyu. Consécration ultime de sa quête spirituelle, il parvient à faire venir enfin un exemplaire intégral du Tipitaka : toutes ses opérations soutenues par les aspirations d’un roi ascétique fait de Pagan la plus grande ville du bouddhisme, centre
culturel qui se renforce encore jusqu’au XIIIe siècle.
Deux siècles d’apogée.
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 Bagan dresse sur un promontoire, sa vaste enceinte quadrangulaire de 1 200 m de côté – l'angle nord-ouest est rongé par le fleuve (dressée dès 849). C'est au roi Anawrahta (1044-1077) qu'elle doit son essor. Converti au bouddhisme des Thera par le Mōn Shin Arahan, il en fait la religion officielle, le pāli et le mōn devenant ainsi les langues de culture. Kyanzittha (1084-1113) consolide la tutelle Birmane : rien ne le montre mieux que l'inscription du Myazedi (vers 1113) rédigée en 4 langues : le pāli, le mōn, le pyu et le birman qui est écrit pour la première fois. Alaungsithu (1113-1155 env.) poursuit l'édification de sanctuaires de plus en plus colossaux, de même que Narapatisithu (1174-1211), qui veille à une réforme du bouddhisme selon les règles de la secte Cinghalaise du Mahāvihāra. Sous Nantaungmya (1211-1230), le pouvoir s'affaiblit, à la suite des importantes dépenses de construction et des querelles de sectes. Sous la pression des raids Mongols (1271-1288), les rois abandonnent Bagan entre 1298 et 1312. C'est la fin de 3 siècles d'or, qui ont créé l'unité et la puissance de la Birmanie et déployé son art, avec un éclat jamais égalé...
Une histoire détaillée de la ville est impossible. La chronologie exacte des édifices n'est pas établie avec suffisamment de détails pour permettre de tracer les contours successifs de la cité. De la maison paysanne au palais, en passant par les bâtiments monastiques, l'habitat était en bois et a disparu. Seuls subsistent temples et stūpas, qui sont édifiés en brique.
On ne connaît pas davantage les systèmes d'irrigation, à tout le moins les adductions d'eau nécessaires à l'usage d'une énorme population, mais on en a reconnu les vestiges. Par des inscriptions sur les briques des temples et des stūpas, on a identifié les villages, échelonnés tout au long de l'Irrawaddy, qui les ont donc fabriquées, soit à titre de corvée, soit pour participer volontairement à ces œuvres pies. Il est probable que ces villages ont également nourri la ville.
On constate que les premiers temples ont été bâtis au XIe siècle dans l'antique cité fortifiée, débordant de ses limites au nord, et surtout au sud, mais toujours exactement sur la berge du fleuve. Plus tard, on glissera vers l'est et vers l'intérieur des terres, sans dépasser, au nord et au sud, les deux principaux affluents de l'Irrawaddy qui encadrent le promontoire primitif. Les stūpas semblent avoir été surtout commémoratifs :
Ici on a débarqué telle relique du Bouddha.
Là aurait péri tel roi.
On ne peut les intégrer dans une organisation urbaine systématique. Faute de connaître les palais royaux ou princiers, les quartiers d'artisans ou les villages, nous ne pouvons identifier les monastères, et donc saisir la distribution des temples.
On ne peut qu'admirer le sens de l'espace. Le pays est plat, le ciel presque toujours bleu. De chaque temple, au-dessus des palmes qui évoquent les toits de jadis, on découvre à l'horizon tous les autres monuments. À l'étiage, le fleuve est bordé de véritables falaises interrompues par les cañons de ses affluents. Comme en équilibre au-dessus des eaux, les stūpas semblent être les amers de la grande cité. Creusées dans les flancs des cañons, des grottes rappellent les ermites de jadis. À l'écart, dans ce qui était autrefois la forêt, un temple perdu évoque les sectes mystiques qui vivaient en marge de la société...
La variété des temples de Bagan s'explique par le caractère de creuset que revêt la cité. Tout d'abord Bagan a vu, sous l'égide des Birmans, la fusion des cultures antérieures :
Pyu du Śrīksetra.
Arakan, Mōn du Ramaññadeśa.
Thaï même des montagnes du nord-est.
On y sent en outre le poids de la Chine toute proche.
Dès l'Antiquité, les Pyu ont enseigné le Mahāyāna au Yun-nan, alors royaume de Nan-Tchao. En retour, la Birmanie reçoit, notamment, la technique des pierres dures, de la laque (les premières statues en laque sèche apparaissent sous Kyanzittha, et on a déterré des objets en laque datés de 1274), de la céramique, notamment les briques et les reliefs en terre cuite émaillée. Développée par les Pyu, l'architecture en brique, remarquablement audacieuse grâce à l'emploi de la plate-bande et de l'arc à claveaux, vient probablement de Chine, même si l'influence du Bengale s'avère certaine.
À travers les Mōn, les relations avec le Bengale (qui touche l'Arakan), l'Orissa, l'Andhra et Ceylan sont d'autant plus développées qu'elles sont source de prospérité économique. Shin Arahan va dès 1160 à Ceylan, dont le roi envoie une « dent » du Bouddha, somptueusement enchâssée dans le Shwezigon. L'ombrelle (la partie supérieure) de Shwezigon est constituée de centaines de clochettes qui tintinnabulent en permanence le soir. Kyanzittha fait restaurer le temple de Bodhgāyā, dont Nantaungmya (1211-1230), en dresse une réplique à Bagan : le Mahabodhi.
Des moines indiens décrivent au roi Kyanzittha leur temple (Paharpur, peut-être ?) et celui-ci cherche à le reproduire avec l'Ananda. Le moine Chapata introduit à Bagan, en 1190, l'orthodoxie Singhalaise, dont les stūpa et les peintures seront dès lors imités, on peut multiplier ces exemples à l'infini.
Au milieu du XIe siècle, les Birmans viendront au contact direct des Khmers dans le delta de la Ménam. On soupçonne une influence du temple-montagne Angkorien dans la conception, nouvelle à Bagan, du Thatbyinnyu (entre 1113 et 1150). Une imitation évidente du décor khmer se décèle sur le Mingalazedi (env. 1284). Au début du XIIIe siècle, le Payathonzu reproduit les temples bouddhiques de Jayavarman VII.
Le nombre et le gigantisme des temples royaux de Bagan s'explique, certes, par l'ambition et l'opulence des souverains, mais aussi bien par leur désir d'assurer la prospérité générale. Le roi se lance dans les conquêtes pour étendre son pouvoir politique, pour s'enrichir, pour s'assurer une main-d'œuvre gratuite de prisonniers, mais aussi, et au moins autant, pour s'approprier les trésors humains, spirituels et magiques de ses voisins : religieux, éminents, artistes, reliques, ou statues du Sage, autant de sources et de signes de prééminence. Parce qu'on lui a refusé une copie du canon bouddhique, Anowarahta s'empare en 1057 de Thatön et en ramène, certes, les textes convoités, mais aussi le roi, prisonnier, et ses artistes...
Les roitelets soumis envoient des tributs dont la valeur réside avant tout dans la rareté : matières précieuses, objets d'art locaux, orchestres, qui serviront de modèles. Les reines jouent un rôle non moins important dans le développement artistique. Aucun pays d'Asie n'accorde aux femmes un statut aussi strictement égalitaire et un rôle aussi considérable. Le roi épouse des princesses de chacune de ses provinces et de ses États vassaux... Elles apportent avec elles leurs modes, leurs artisans, leurs religieux. La première reine de Kyanzittha est sans doute Bengalie : on reconnaît son empreinte dans l'iconographie de l'Abeyadana, d'inspiration Tantrique. Nulle part en Indochine autant de temples ne sont réputés avoir été fondés par des reines : légende, peut-être, mais fort révélatrice.
On ne voit pas davantage dans les temples de Bagan la seule marque de la royauté. Nous connaissons mal l'organisation sociale, on distingue seulement, au sommet, une hiérarchie de chefs guerriers qui reçoivent du souverain des terres (les plus riches : les rizières irriguées) en échange des contingents qu'ils doivent lever. Comme le roi, chacun, dans son cercle, accumule les mérites par des fondations pieuses qu'il redistribue.
Les Birmans, très démocratiquement organisés en villages dirigés par un chef héréditaire, sont en fait possesseurs de la terre. Chaque village entretient un monastère. On ne peut, non plus, parler de théocratie. L'ordre politique, par ses entreprises guerrières, est en contradiction radicale avec le bouddhisme, qui ne le sanctionne nullement... Si le roi est sacralisé, c'est par des brahmanes, et Bagan possède des temples et des statues Hindouistes. Les villageois, eux, adressent surtout leur culte aux Nats, les génies Chthoniens primitifs. Le bouddhisme n'est donc pas une religion sacralisant ou sanctionnant l'ordre social. Le champ de rencontre entre les deux systèmes est l'enseignement, que les jeunes hommes reçoivent au monastère. En retour, le roi et les paysans acquièrent des mérites en nourrissant les moines. Mais l'entrée dans la vie monacale est un choix purement individuel. Ne cherchons donc pas, à Bagan, des évêques et des prêtres dans l'entourage du roi et des comtes. Songeons plutôt au rôle des grands ordres réguliers du Moyen Âge comme Cluny et Cîteaux, et rapprochons plutôt l'influence des prêtres bouddhistes sur le roi, dans certaines entreprises « pour la foi », de celle des moines occidentaux prêchant les croisades.
Ainsi peuvent se comprendre les raisons de l'épanouissement de Bagan, et son rôle primordial. C'est la capitale, avec ses fonctions politique, enseignante, religieuse, économique, en un mot son rôle « normatif ». C'est là qu'est établi le calendrier, et qu'Alaungsithu codifie les poids et les mesures. Ce même roi, puis Narapatisithu font rédiger les grands codes juridiques, de même que les grammaires normatives. Parallèlement, Bagan est un monde en soi et qui ne peut être réduit à une démultiplication du pays. Le roi est l'image sur terre d'Indra, roi des dieux : sa ville est une cité céleste, qui résume et protège le pays, un microcosme au sens plein. C'est par cette rencontre, exceptionnelle, de races et d'idées, que la ville forme la Birmanie et son art, et réussit à fédérer un État multinational. Car Bagan a survécu à ses rois. Des temples y seront bâtis jusqu'au XIVe siècle, des fresques ajoutées sur ses murs jusqu'au XVIIIe siècle... Elle reste, jusqu'au XVe siècle, le foyer littéraire de la Birmanie. Elle sanctionne longtemps le pouvoir royal : Tabinshweti, fondateur de la nouvelle puissance d'Ava, vient s'y faire couronner ostensiblement en 1546, et enrichit le Shwezigon, comme ses successeurs, jusqu'en 1768 ; c'est là, d'ailleurs, le stūpa le plus vénéré du pays. L'art de Bagan a codifié tous les styles postérieurs. Il es imité dans les pays Thaï, au Siam, au Laos, et même au Cambodge post-Angkorien. Ses moines, en effet, après avoir été formés par Ceylan, maintiennent l'orthodoxie, et Bagan se substitue en grande partie à l'île sainte. Ses monuments n'atteignent sans doute pas la perfection Angkorienne, mais ils ont une grande descendance, tandis que la capitale Khmère sombre dans la forêt...
Endommagés par un séisme le 8 juillet 1975, les monuments de Bagan sont graduellement restaurés et renforcés par le Département d'archéologie de Birmanie, aidé depuis 1981 par des spécialistes de plusieurs pays dans le cadre d'un programme international financé par les Nations Unies et mis en œuvre par l'U.N.E.S.C.O. avec la collaboration de l'École Française d'Extrême-Orient.
Cycle "Birmanie" - Bagan - Retour à l'accueil
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28 déc. 2013 - Kyanzittha (1084-1113) consolida la tutelle birmane : rien ne le .... Si le roi fut sacralisé, ce fut par des brahmanes, et Bagan possède des ..

Birmanie - Le Royaume de Pagan - L'âge flamboyant du ...

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19 sept. 2013 - Pagan est incomparable dans le monde bouddhiste, à l'exception d'Angkor. ... Le roi souhaite étudier les textes et les ramener dans son royaume. ... la pagode du Shwezigon (achevée par son fils Kyanzittha avant 1113).



2 commentaires:

  1. Belle page chère amie ! Dire qu'en Afghanistan les barbus incultes ont détruit les statuts de Bouddha !

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  2. Que voudriez-vous attendre d'autres de ces abrutis.

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