Cette page concerne l'année 1142 du calendrier julien. Ceci est une évocation ponctuelle de l'année considérée il ne peut s'agir que d'un survol !
DE
MANNEKEN-PIS A GODEFROID III DE LOUVAIN.
En 1139 :
Godefroy Ier de Louvain meurt le 25 janvier, il est inhumé à l'abbaye d'Affligem. Après Godefroy Ier de Louvain, le titre de comte de Bruxelles n’apparaît plus dans le protocole diplomatique (dernière attestation en 1138) Godefroy II de Louvain devient Comte de Louvain et de Bruxelles, Landgrave ou Duc de Brabant, Marquis d'Anvers. Puis il épouse en 1139 Lutgarde ou Liutgarde de Sulzbach ou Soulzbach (1109-1163), fille de Bérenger II de Sulzbach, Comte de Sulzbach et Seigneur de Bamberg, et d'Adélaïde de Diessen Dame d'Ambros ou de Lechsgemünd. Leur enfant est :
- Godefroid
ou Godefroy III de Louvain (1140 ou 1142/1190), Comte de Louvain et
de Bruxelles, Duc de Brabant, Marquis d'Anvers et Duc de
Basse-Lotharingie ou de Lothier.
Les ducs font devant l'autel de Saint Georges dans l’Église le serment d'observer les privilèges du pays et ceux de la ville. Ensuite lorsque les chambres de Rhétorique et les Serments sont organisés, les confrères avec des flambeaux ardents et le magistrat conduisent le prince chevauchant un cheval blanc, vers l'église de Saint Pierre, où il jure d'observer les privilèges de l'Eglise et des Peetermans (Praticiens). Ensuite le peuple lui fait serment à son tour, et son cheval blanc passe au prévôt du chapitre de Saint Pierre. Le magistrat lui donne toujours des cadeaux en vin, en vases et en draps...
BLASON DU BRABANT |
Pendant son règne assez court il a encore affaire avec Henri de Limbourg , qui voit à regret passer la Lorraine à la maison de Louvain. Henri de Limbourg place des gens d'armes à SaintTrond mais Godefroid II marche de suite sur cette ville et sur Aix la Chapelle, et l'affaire en reste là. Avant de mourir il confirme toutes les donations faites par ses prédécesseurs à l'église de Saint Pierre..
Celui-ci meurt le 13 juin 1142 d'une maladie du foie. Il est inhumé dans l'église Saint-Pierre de Louvain.
Un règne aussi court ne peut rien fournir de particulier sur Louvain. La légende conte qu'au moment de sa mort tombe dans les environs de la ville une rosée , dont le goût était aussi doux que le miel !... (Godefroid de Bouillon Chroniques et légendes, 1095-1180 Jacques Albin S. Collin de Plancy 1842 (Extraits) XXXVI).
C'est la première mention trouvée sur l'inauguration de nos comtes. Devant l'endroit où est bâti en 1197 le couvent de Terbanck, se trouve une image de la Vierge placée entre deux anges. C'est devant cette image que les comtes ou ducs prêtent serment...
Godefroy III de Louvain, son fils mineur, devient Comte de Louvain et de Bruxelles, Landgrave (ou Duc) de Brabant, Marquis d'Anvers et Duc de Basse-Lotharingie ou Lothier sous le nom de Godefroy VII.
Henri II de Limbourg, occupé à se battre contre le seigneur de Fauquemont, ne reprend pas la lutte pour récupérer la Basse-Lotharingie.
Dès son avènement, des parents et des seigneurs Brabançons cherchent à profiter de son jeune âge pour se révolter, mettant ses domaines en proie à l'anarchie.
Testament de Godefroid II : Si l'histoire générale des Pays-Bas est trop souvent décousue au Moyen-Âge, elle présent au moins en brillants reliefs ce qu'il faut rassembler pour former une imposante galerie. Telles sont les scènes du XIIe siècle dont les cœurs poétiques sentiront tout le prix...
On lit, dans nos vieilles chroniques, que, le 5 juin de l'année 1142, une réunion extraordinaire de hauts personnages anime la Cour de la Sainte Abbaye d'Afflighem, présentant une pieuse et austère solitude, bâtie depuis 60 seulement, refuge sacré où Saint Bernard dit qu'il ne voie que des anges, quand partout ailleurs, dans cette rude époque, il trouve à peine des hommes. L'éclatante arrivée de cette cour, qui jette du mouvement et du bruit dans l'asile de silence, n'amène pourtant ni la joie, ni les fêtes. Tous ces nobles seigneurs paraissent dans le deuil. Les hommes d'armes qui encombrent les avenues portent la tristesse empreinte sur leurs visages. Si dans les sombres corridors on entend les pas pesants des gentilshommes et des archers, la voix humaine semble devenue muette, et sans la variété des costumes, les armures étincelantes et la multitude des hôtes, on eût pu croire l'abbaye d'Afflighem toujours habitée par ses seuls religieux.
Toutefois, l'empressement et l'inquiétude de toutes les physionomies révèle quelque chose de terrestre et l'attente d'un événement grave... Tout le monde se rend à la grande salle, attenante à la chapelle. C'est le lieu où l'abbé d'Afflighem, qui est seigneur souverain, donne ses audiences et règle sa justice, que tempère toujours la mansuétude. Là, en ce moment, sur un lit couvert de somptueuses draperies, où l'aiguille a brodé en or le lion de Brabant, se trouve un homme qui parait âgé de 35 ans. Il est pâle, défait, amaigri, et semble s'éteindre d'une maladie de poitrine...
Cet homme est Godefroid II, dit le Jeune, duc de Brabant, marquis d'Anvers et duc de Lotharingie. Une belle et noble dame, la jeune princesse Lutgarde, son épouse, est assise auprès du chevet, tenant sur ses genoux un enfant d'un an, l'espoir des Brabançons. Le prince malade soulève sa tête affaiblie, quand l'abbé d'Afflighem introduit les seigneurs convoqués, et Lutgarde essuie ses yeux rouges de larmes.
Les sires de Diest, de Wemmel, de Bierbeck et de Wesemaele se rangent à droite du lit, autour de la Duchesse. Arnulphe, comte d'Aerschot, sénéchal de Godefroid II, Herzo, son chambellan, Henri d'Asche, son porte-étendard, se placent en silence de l'autre côté. On voit entrer ensuite les sires de Dilighem, de Cobbeghem, de Zellick, de Dilbeck , de Bodeghem, de Lorebeck, de Berseele, de Haeren, de Lennick, de Droogenbosch, de Gaesbeck, de Ganshoren, de Masenseel, de Liedekerke, de Ravestein, les dames d'Anderlecht, de Brandenbourg, et la plupart des autres fidèles vassaux des ducs de Brabant, ceux de la puissante maison de Berthold, seigneurs de Grimberg, avoués de Malines, ont été appelés aussi... Mais sachant d'avance quelles sont les résolutions de Godefroid II, résolutions qu'ils ne veulent pas approuver, ils ne se présentent pas.
Tous leurs parents et tous les nombreux vassaux dont ils sont suzerains font défaut comme eux au rendez-vous d'Afflighem. Le comte d'Aerschot, au nom de son seigneur le noble duc de Brabant, ayant invité tous les assistants à s'asseoir, Godefroid II se met péniblement sur son séant, puis il dit lentement ces paroles, que l'abbé d'Afflighem écrit, à mesure qu'elles sont prononcées, pour conserver ainsi l'expression formelle des dernières volontés du bon duc, lequel entend les donner comme son testament :
« Chevaliers, mes fidèles vassaux et mes braves amis, j'avais espéré une plus longue vie au milieu de vous. Le Ciel en ordonne autrement, et je sens qu'il faut nous séparer. Il n'y a pas deux ans que mon père Godefroid Ier est mort. Illustré dans la Croisade et dans les travaux d'un long règne, le noble prince, qui a rehaussé son duché de Brabant par la dignité de duc de Lotharingie, repose dans cette pieuse abbaye d'Afflighem. J'ai voulu vous réunir ici, entre la tombe de mon père et le berceau de mon fils, pour donner plus de solennité à notre dernière entrevue...
« Je vous ai connus, dans tous les temps, loyaux et fidèles. Vous m'avez aidé à consolider dans les mains des ducs de Brabant ce titre de duc de Lotharingie, conquis par mon père. Aujourd'hui, chevaliers, jurez-vous de soutenir et de défendre mon fils Godefroid III, cet enfant que voici et qui va être votre prince ? Car je ne suis plus qu'une ombre. Mes fidèles, ce petit enfant que je vous laisse et qui devient votre duc ne peut encore vous entendre. Mais Dieu est là, et j'emporte vos serments dans son sein. »
Tous les vassaux se sont levés, le cœur ému et la larme à l'œil. Ils s'avancent successivement, d'un pas grave, mettent le genou en terre et jurent tous, sur la tête de l'enfant, qui leur souriait dans les bras de sa mère, de le protéger de leurs biens et de leurs vies, de l'aimer, de le servir comme leur duc, de le garder et de le maintenir, appelant sur eux l'anathème, si jamais ils tombent dans le parjure. La figure de Godefroid II se ranime, il reprend :
« Que Dieu vous rende, mes fidèles, la joie que vous me donnez, mais, vous le voyez, nos plus puissants vassaux ont méprisé notre appel. La maison de Berthold marche-t-elle donc à la félonie ? Les deux frères, Gauthier de Malines et Gérard de Grimberg, veulent la tutelle de mon fils. Puis-je confier le jeune duc de Brabant à cette famille si ambitieuse et si puissante, qui bientôt peut-être convoiteront le trône ducal ? »
« Je souhaite que notre enfant (car vous l'adoptez, chevaliers,) ne soit pas enlevé à sa noble mère. C'est l'unique prière qu'elle m'ait faite. Je lui nomme pour tuteurs, (si vous le trouvez bon,) les dignes seigneurs Gérard de Wesemaele, Jean de Bierbeck, Henri de Diest et Arnold de Wemmel. Je charge de gouverner son enfance le bon sire de Gaesbeck, notre ami à tous. Approuvez-vous ces choix, mes fidèles ? » Les vassaux du noble duc s'inclinent tous et jurent avec effusion de faire respecter ses dernières volontés. L'abbé d'Afflighem les ayant mises sur un parchemin, tous ceux des assistants qui savent écrire les signent, les autres y posent leurs sceaux... Le cachet de l'abbaye, qui porte les clefs de Saint Pierre unies aux armes ducales, ferme l'enveloppe de ce testament. Alors, le malade, faisant un nouvel effort, déclare que, se sentant mourir, et ne pouvant plus songer qu'au salut de son âme, il abdique en ce même moment le pouvoir, dont il espère n'avoir pas abusé, et qu'il le transfère à son fils, sur qui il appelle la bénédiction de Dieu. Aussitôt les hérauts-d'armes proclament le petit enfant duc sous le nom de Godefroid III. Tous les seigneurs et tous les chevaliers lui font hommage dans les mains tremblantes de sa mère et en présence des 4 tuteurs. La réunion se rend ensuite au réfectoire des moines, où une collation est préparée. Le petit enfant est assis à la place de son père; et tous les assistants boivent dans la même coupe « à son avenir ! » Le bon duc Godefroid II, à qui le dévouement de ses vassaux fidèles a causé une vive joie, se fait transporter à Louvain. Il y meurt 8 jours après...
A la nouvelle de cette mort, les deux frères de la maison de Berthold, qui, depuis 400 ans fiers et riches , se regardent comme souverains indépendants de Malines, quoique vassaux du duc de Brabant, et qui possèdent à Grimberg, près de Vilvorde, une forteresse réputée imprenable, les deux frères Gauthier et Gérard, furieux de ce qu'ils sont exclus de la tutelle du jeune duc, annoncent qu'étant les plus puissants du pays et par conséquent les plus intéressés à la paix publique, ils vont réclamer, les armes à la main, cette tutelle, qui ne peut leur être ôtée sans injure, ni remise en d'autres mains sans troubles... Ils ne parlent plus comme vassaux, au contraire ils profitent de l'occasion pour nier le devoir qui les lie au duché de Brabant, disant qu'ils tiennent de Pépin-le-Bref la seigneurie de Malines, et qu'ils n'en doivent qu'un hommage de forme à l'évêché de Liège, qui autrefois a protégé leur fief...
Lutgarde, la duchesse veuve, âgée de 24 ans, est une femme douce et timide. Elle s'épouvante pour son fils. Le Brabant, épuisé par la Croisade, n'a pas alors les grandes ressources qu'il a depuis, et les domaines populeux de la maison de Berthold s'étendent jusqu'à l'Escaut... Mais les tuteurs du petit duc sont des hommes dignes du choix honorable que le Souverain a fait d'eux, ils ne se troublent point. Ils font sommer les chefs insoumis de venir rendre le serment féodal et jurer la foi de service qu'ils doivent à leur prince... Leur message ayant été repoussé formellement, ils déclarent Gauthier de Malines et Gérard de Grimberg félons et rebelles. Des deux côtés on court aux armes, les seigneurs de Malines, dont l'opulence s'accroisse chaque jour par un vaste commerce, entretiennent des archers et gens de guerre en tel nombre, que leur ville s'appelle alors Malines-la-Belliqueuse... Ils rassemblent à la hâte tous les chevaliers qui leur sont attachés comme parents, comme alliés, comme vassaux, et tous ceux qui dépendent de leur maison par des intérêts de commerce... Ils ont bientôt une armée 3 fois plus nombreuse et plus formidable que celle de l'enfant-duc. Lutgarde et les 4 tuteurs, que des actes d'hostilité et de rébellion, commis du vivant même de Godefroid II, ont mis sur leurs gardes, lèvent toutes leurs forces. Le nombre de leurs hommes de guerre est petit, et comme on voit bien qu'avec de telles ressources on ne pourront soutenir une lutte qui promet d'être sérieuse et longue, Lutgarde, qui est une princesse de la maison de Luxembourg, rappelle à ses fidèles conseillers que :
Sa sœur Gertrude est femme de l'empereur Conrad III.
Sa sœur Germaine est l'épouse du prince héréditaire de Constantinople, Manuel-Comnène
Le jeune duc de Brabant, par elle ou par son père, est allié aux cours de France, d'Angleterre, de Hollande, de Flandre et de Hainaut ; « Il faut, ajouta-t-elle, réclamer les secours de tous ceux qui tiennent à nous. Ils ne laisseront pas l'orphelin sans défense... Si le comte de Luxembourg et de Namur, notre cousin, n'était occupé à nous remettre en paix avec le Limbourg, il viendrait à notre aide. Mais du moins envoyez des messagers à tous nos autres parents »
Des émissaires sont expédiés sur-le-champ.
Conrad III promet des troupes qui ne viennent point.
Manuel-Comnène ne donne que des paroles.
Le roi de France et les autres princes s'occupent uniquement des Croisades.
Thierry d'Alsace, comte de Flandre, quoiqu'il se livre aussi avec ardeur aux devoirs de la Guerre Sainte, est le seul qui prend intérêt à la cause de l'enfant. Mais les secours qu'il donne d'abord ne sont pas capables de sauver le Brabant... Il a sur ses terres une de ces bandes indisciplinées, que l'on voit dans le même temps en France, en Allemagne, en Angleterre et dans les Pays-Bas, sous les noms de Routiers, de Compagnies-Franches , de Grandes-Compagnies et de Brabançons, parce que le Brabant fournit au douzième siècle beaucoup de ces aventuriers. Ce sont des hommes de tous pays, échappés à la glèbe dans les Croisades, ils se réunissent en bandes nombreuses, vendent leurs services au premier prince qui a besoin de troupes et vivent de guerre et de pillage.
On en voit de très-vaillants dans les batailles. Mais ils sont souvent gens de bruit et de désordre plutôt que bons guerriers. Ceux que Thierry d'Alsace envoie comme soutiens du berceau de Godefroid III viennent de quelque expédition lointaine. Leur petit nombre et le mauvais renom qu'ils se sont fait dans le pays rassurent mal les chefs du Brabant... Les troupes aguerries et disciplinées des seigneurs de Malines se sont emparées de Vilvorde et des villages voisins, qu'elles ont livrés aux flammes. Elles portent la dévastation dans les campagnes et jettent la terreur jusqu'aux portes de Bruxelles. Les 4 tuteurs, renforcés de la bande fournie par Thierry d'Alsace, marchent à l'ennemi.
Gérard de Wesemaele, qu'on trouve nommé dans quelques titres d'alors maréchal de Brabant, est chargé du commandement de l'armée ducale. Il dispose habilement ses troupes, qui prennent confiance quand les aventuriers, voulant montrer qu'ils valent mieux que leur renommée, demandent à marcher à l'avant-garde et à soutenir le premier choc. La bataille se livre entre Vilvorde et Bruxelles. La poignée des auxiliaires intrépides se fait tailler en pièces, et la petite armée nationale du Brabant est repoussée par le nombre jusque dans Bruxelles, dont on se hâte de fermer les portes. La consternation devient générale... Il faut une prompte résolution, tout le monde sent que Thierry d'Alsace seul, dont les états touchent au Brabant, peut assez tôt donner d'autres secours. Mais comment les lui demander, après l'extermination si rapide du premier renfort qu'il a envoyé ?
Les 4 tuteurs, remettant la garde de Bruxelles et du jeune duc à Lutgarde et aux sires de Gaesbeck et de Horn, montent à cheval et se rendent à Alost. Le comte souverain d'Alost se montre favorable au Brabant. Ils trouvent chez lui Thierry d'Alsace, qui est son frère d'armes, car les deux princes se sont croisés ensemble. Ils lui exposent l'affreuse extrémité où sont réduits les Brabançons.
Mais malgré leur démarche, leurs supplications et les instances du comte d'Alost qui les appuie chaudement, Thierry déclare qu'il ne leur permettra de lever des hommes dans les Flandres qu'à une seule condition expresse et formelle, c'est que le jeune duc, lorsqu'il sera en âge, se reconnaîtra son vassal, et que présentement ses 4 tuteurs jurent et signent, scellé de leur sceau, cet engagement pris en son nom... Les bons chevaliers sentent leur cœur se serrer, de grosses larmes roulent dans leurs yeux, à cette proposition qui froisse l'orgueil de leur maître. Dans ces siècles où la fidélité commence à devenir héréditaire, on donne déjà ce nom à un enfant. D'un autre côté, ils considèrent avec effroi les pressants dangers de la patrie... Après les avoir laissés quelques instants, le comte d'Alost les prend à part et leur dit :
MAISONS DES DUCS DE BRABANT |
Les tuteurs ne balancent plus, Ils jurent, quoique en gémissant, et signent, sous leur responsabilité personnelle, une promesse de vasselage. Dès le lendemain, un appel fait aux Flamands par leur vaillant comte met sur pied en peu de jours une petite armée qui se dirige sur Bruxelles. Plusieurs chevaliers et bons personnages de la noblesse Flamande, engagés par Frédéric d'Alsace, frère de Thierry, tiennent à honneur de marcher à cette guerre. La Duchesse et les seigneurs du Brabant soupirent amèrement, lorsqu'ils apprennent les conditions imposées aux 4 tuteurs, mais personne ne leur en fait reproche, tant leur fermeté et leur sagesse sont révérées.
Les Berthold, sachant l'arrivée des Flamands, se retirent dans Grimberg et dans Malines, concentrant dans ces deux places toutes leurs troupes. Le sire de Wesemaele sort avec quelques détachements pour les harceler. Par représailles des dévastations qu'ils ont semées autour de Bruxelles, il saccage les environs de Grimberg et les faubourgs de Malines... il irrite ainsi les deux frères, à qui il veut montrer que les Bruxellois ne sont ni abattus, ni effrayés. Les deux seigneurs rebelles s'ébranlent donc, et on apprend tout à coup que leur armée, appuyée sur la redoutable forteresse de Grimberg, se déploie en avant de Vilvorde et prend position dans les plaines de Ransbeck, près de Trois-Fontaines. Cette armée est plus considérable encore que celle du petit duc, malgré ses auxiliaires Flamands. Les frères Berthold ont appris que le comte d'Alost, qui a promis son secours aux 4 tuteurs, lève des troupes à la hâte et se dispose à venir. Ils veulent livrer bataille avant l'arrivée de ce renfort... Wesemaele essaie en vain de gagner deux ou trois jours. Les Bruxellois, piqués par les sarcasmes des guerriers de Malines, déclarent qu'ils veulent le combat. Les Flamands ne témoignent pas moins d'impatience. Donc le 24 septembre, après avoir entendu la sainte messe, toute l'armée du petit duc de Brabant, (6 000 hommes), est passée en revue dans les rues de Bruxelles.
Comme tous ces guerriers, par de grands cris, demandent à voir l'enfant pour qui ils vont combattre, sa mère l'apporte dans ses bras et le présente aux troupes qui défilent devant lui. Il ne parle pas encore, mais sa beauté et les petits saluts gracieux qu'on lui a appris à faire avec gentillesse suffisent pour exciter un enthousiasme général... (Son berceau verra une victoire !) dit-on de toutes parts...
Tandis qu'on dispose tout pour sortir le lendemain matin avant le jour, le vieux sire de Gaesbeck vient trouver la Duchesse.
« Madame, lui dit-il, vous avez entendu les cris de l'armée. La journée de demain, si vous le voulez, sera décisive. Il faut pour cela que le jeune prince soit présent sur le champ de bataille ».
La Duchesse pâlit à ce mot. Elle presse son fils contre son sein, comme si elle craignait qu'on ne le lui ravît à l'instant même.
« Y pensez-vous ? dit-elle avec effroi. Sur le champ de bataille un enfant ! Oubliez-vous que ce champ de bataille peut devenir un champ de mort ? »
« Nos ennemis n'approcheront jamais du jeune duc, reprit le vieillard. Les Brabançons ne reculeront pas, lorsqu'ils verront au milieu d'eux le berceau de leur prince. »
« Nous irons donc », dit Lutgarde. Le jour suivant, aux premières lueurs de l'aurore, l'armée alliée, Brabançonne et Flamande, sort de Bruxelles en bon ordre. Elle se range au-dessus de Strombeck, s'appuyant sur la Senne, devant l'autre armée qui, dans son développement, occupe tout le fond de la plaine. Le hameau de Ransbeck, dépendant de Vilvorde et qui a donné son nom à la bataille, est presque entièrement détruit dans cette affaire. Il y a près de l'endroit qu'on appelle la Maison-aux-Cailles (Kwakkelhuys), en un lieu que traverse à présent le canal de Vilvorde, qu'on a percé depuis, un bouquet d'arbres devant lequel s'arrête le cortège qui amène l'enfant-duc au champ du combat, un jeune chêne très élancé s'avance comme une vedette sur la plaine. Le sire de Gaesbeck ôte le petit prince aux embrassements de sa mère, on suspend aux branches du chêne le berceau portant l'enfant, l'étendard de Brabant déployé au-dessus de cette jeune tête sacrée... La mère inquiète reste au pied de l'arbre, gardée par le sire de Gaesbeck et par quelques serviteurs dévoués qui, à cheval et bien armés, portent de grands boucliers pour protéger le berceau. L'armée s'étend au-devant de ce petit groupe et semble ainsi commandée par un enfant. Avant de tirer l'épée, le sire de Horn va proposer aux seigneurs de Malines de remettre la décision de la querelle au jugement de 12 vieux seigneurs choisis par les deux partis.
« Pourquoi, leur dit-il, voulez-vous ensanglanter la couronne naissante d'un enfant qui est votre suzerain et qui ne vous a fait aucune offense ? » Mais les frères de la maison de Berthold répondent fièrement que l'affaire ne pouvait plus se vider que par les armes. Ainsi, on sonne les trompettes, les soldats frappent leurs boucliers de leurs glaives et de leurs lances, on voit briller les haches d'armes, des grêles de pierres lancées par les frondes se croisent en tous sens avec les flèches et les bâtons aigus, espèces de javelines encore fréquentes alors...
La Duchesse tremblante couvre de ses regards humides le berceau de son fils. La mêlée devient si ardente, si acharnée, si terrible, que la nuit seule peut séparer les combattants, et l'on reconnaît que la présence du petit duc a ce jour-là balancé la victoire. Les Brabançons, 4 fois repoussés, ont 4 fois reculé jusqu'à l'arbre où est le berceau on ne peut les pousser plus loin... Cette bataille, reprise le lendemain , dure 3 jours entiers, furieuse et opiniâtre, et, pendant ces 3 jours, le berceau où siège le petit prince reste suspendu aux branches du chêne, bannière vivante, caressée par le vent, toujours en vue de l'armée...
Le Ciel, touché des angoisses de la mère, protège l'enfant dans ces longs périls. La victoire, après une lutte si constante, après des flots de sang versé, ne se décide pas encore. Vers le milieu du troisième jour, le comte d'Alost arrive sur le champ de bataille avec les siens. Alors l'ennemi plie et à la fin de la journée, le petit duc est salué par les cris de triomphe des Brabançons. Les rebelles ont battu en retraite.
Mais la part que le prince enfant a prise à la bataille de Ransbeck, avec des circonstances si naïves et si piquantes, doit rester dans les souvenirs. Les Bruxellois plusieurs fois ont remarqué que leur petit duc, semblant se plaire au grand spectacle qu'on lui donne, n'en a témoigné ni effroi, ni impatience. Seulement, de temps en temps il s'est levé, et se tenant debout, le visage tourné vers l'ennemi, il a satisfait fièrement à ce léger besoin que l'enfance ressent au moins sans rougir... Chaque fois que cet incident s'est produit, il a été accueilli par de joyeuses et bruyantes clameurs... On veut garder la mémoire de ces choses singulières... Sur le champ de bataille même, on décide qu'un monument en conserverait sa trace. Il est résolu qu'une petite statue sera élevée au noble enfant, dans la position ingénue où il a semblé le plus clairement laisser tomber ses mépris sur les rebelles. Le vote est unanime et spontané... On fait plus, on enlève le jeune chêne qui a porté le berceau, et qui devient ainsi cher et vénéré, on l'emporte à Bruxelles, on le replante à l'entrée d'une rue, appelée depuis la rue du Chêne, et c'est tout à côté qu'on élève la statue d'un enfant haut d'un pied et demi (ce monument, en pierre jusqu'à l'année 1648, et depuis en bronze par l'habile sculpteur Duquesnoy, se voit toujours à Bruxelles), dans la même place qu'il occupe depuis le XIIe siècle, protégé par une niche en coquille où l'on reconnaît encore la vieille prétention de rappeler un berceau. C'est le « Manneken-Pis », dont l'action produit une petite fontaine au moins fort originale, et auquel les traditions confuses ont fidèlement conservé le nom de Godefroid, mais sur lequel on a fait tant de contes et tant de suppositions, et que le peuple appelle toujours le plus ancien bourgeois de Bruxelles...
LE MANNEKEN-PIS |
Godefroy II de Louvain - Histoire de l'Europe
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de Louvain avec Ide de Chiny. Godefroy Ier de
Louvain épouse en …
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Charles
Piot - 1839
1142 — 1190. Godefroid
II avait songé en mourant à la tutelle de son fils mineur Godefroid
ill , qu'il confia aux soins de Henri de Diest , de Gérard de
Wesemael ...
LA GARDIENNE DE LA 9e PORTE: Testament de Godefroid II
lagardiennedela9eporte.blogspot.com/.../testament-de-gedefroid-ii.html
28 nov. 2012 - On lit, dans nos
vieilles chroniques, que, le 5 juin de l'année 1142, une
réunion .... fidèles avait causé une vive joie, se fit transporter
à Louvain.
Merci chère amie historienne pour cette évocation d'une Belgique qui n'était pas constituée telle que nous la connaissons aujourd'hui ! La Belgique d'aujourd'hui est relativement récente puisque sa constitution exsite depuis 1830. Mais je pense que notre ami Christian Léon est plus à même que moi de parler de cette noble nation.
RépondreSupprimerMerci de votre commentaire, en effet on connais mal ce qu'était la Belgique avant 1830, sans doute parce qu'elle était tellement imbriquée dans le destin de ses voisins immédiats nous y compris... un peu d'ailleurs comme toutes nos provinces frontalières qu'un trait de crayon impétueux à amputé.
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