mercredi 3 mai 2017

EN REMONTANT LE TEMPS... 55

5 MARS 55...

Cette page concerne l'année 55 du calendrier julien. Ceci est une évocation ponctuelle de l'année considérée il ne peut s'agir que d'un survol !

SUSPICIONS AUTOURS DE LA MORT DE BRITANNICUS.

Tiberius Claudius Caesar Germanicus, appelé ultérieurement Britannicus (12 février 41 - v. le 11 février 55), est le fils de l'empereur Claude et de sa 3e épouse Messaline. Selon Tacite, il est assassiné à l'âge de 14 ans par son frère par adoption, l'empereur Néron, lors d'un banquet.

La vie de Britannicus illustre les problèmes de succession au début de l'Empire Romain et les implacables luttes pour le pouvoir au sein de la dynastie Julio-Claudienne. Sa mort prématurée inspirera la tragédie Britannicus de Jean Racine, mettant en scène la dernière journée du jeune homme.

Les Annales de Tacite et la « Vie des douze Césars » de Suétone sont les principales sources latines relatant cette période. Cependant, les deux historiens ont écrit environ 50 ans après les événements, durant une période où Néron est (déjà) dénigré. Le tableau qu'ils dressent de ces événements est particulièrement sombre et les arrières pensées qu'ils prêtent aux protagonistes sans concession. Il n'est pas toujours aisé de distinguer la part du récit romanesque de celle d'une recherche historique « sérieuse ».
Même si, de par leurs fonctions, ils ont accès à des archives officielles et des documents de première main, leurs propres sources sont cependant très rarement explicitement données.
Les deux historiens sont certainement influencés par la société dans laquelle ils vivent, et pour laquelle ils écrivent. Leur tendance à noircir le tableau et à considérer les acteurs principaux comme des criminels souvent dégénérés, et leur manque d'esprit critique, voire leur crédulité sont aujourd'hui dénoncés, et on attribue en partie la sévérité de leur jugement à leurs a priori idéologiques, voire leur « philosophie politique ». Tacite est, par exemple, considéré comme le grand détracteur de Néron, Suétone comme exprimant les intérêts politiques du Sénat et des chevaliers Romains.

En 38, Claude, âgé alors de presque 50 ans et qui n'est pas encore empereur, épouse Valeria Messalina, âgée de 14 ans.

En 39, elle donne naissance à une fille Octavie et le 12 février 41, elle met au monde Britannicus, à peine 3 semaines après que Claude eut accédé au principat. Britannicus est donc l'héritier direct de Claude, le Spes augusta, étant l'espoir de la famille impériale, il est voué à être montré au peuple et aux soldats.

En 43, à la suite des victoires de Claude en Bretagne, le Sénat Romain lui accorde un triomphe et le nom honorifique de Britannicus. Son nom complet est désormais Tiberius Claudius Caesar Augustus Germanicus Britannicus. Pourtant, Claude ne se fera jamais appeler Britannicus, mais il transmet ce nom à son fils.
Nous possédons peu d'informations sur l'éducation de ce dernier. Tacite mentionne comme tuteur un grammairien du nom de Sosibius. En tant que fils de l'Empereur, Britannicus reçoit sans doute la meilleure éducation, mais, à partir de 51, sa situation se détériore rapidement.
Agrippine, la nouvelle Augusta, tire en effet prétexte du premier affrontement entre les deux « frères » pour prendre le contrôle total de l'entourage de Britannicus.

« Un jour qu'ils se rencontrent, Néron salue Britannicus par son nom et l'autre appelle son frère Domitius. Agrippine rapporte le fait à son mari, en s'en plaignant beaucoup, disant que c'était le début de la discorde :
Apparemment on ne tient pas compte de l'adoption, et l'avis donné par les Pères, le commandement du peuple, tout cela est aboli dans la famille, et si l'on n'éloigne pas les maîtres qui enseignent pareille hostilité, elle finira par une catastrophe pour l'État.
Touché par ces arguments, à ses yeux autant d'accusations, Claude fait exiler ou punir de mort tous les meilleurs précepteurs de son fils et impose pour le surveiller des hommes choisis par sa belle-mère. » (Tacite, Annales, Livre XII, 3)...

Tacite précise en outre que, sur la fin, « l'entourage immédiat de Britannicus est formé de gens sans foi ni loi », et que lors de la première tentative d'empoisonnement, ce sont ses propres précepteurs qui lui administrent le poison.

En 47, le mariage de Messaline avec Silius remonte jusqu'aux oreilles de Claude par le biais de Narcisse. Une fois informé, et après une très brève enquête qu'il mène lui-même, Claude fait mettre à mort la plupart des comploteurs, dont Silius, qui réclame seulement une mort rapide. Il ordonne également d'en finir avec Messaline. Un ordre que Narcisse se hâte d'accomplir avant que l'hésitant Claude ne change d'avis... Messaline est exécutée dans les jardins de Lucullus par les sbires de Narcisse.

Après la mort de Messaline, Claude doit se remarier pour réaffirmer sa place après l'assassinat de celle-ci (?). Narcisse lui propose la main de Aelia Paetina, jugée inoffensive. Une autre candidate est la dernière fille vivante de Germanicus : Agrippine la jeune, sœur de Caligula, seul problème : Elle est la nièce de Claude. Or, les mariages entre nièce et oncle sont considérés comme incestueux, et donc interdits.
Le mariage de Claude et d'Agrippine a donc lieu le lendemain de la validation d'une loi sénatoriale autorisant les mariages entre oncles et nièces.

En 49, quand Agrippine épouse Claude, elle a déjà un fils, Néron, né en 37 d'un précédent mariage avec Gnaeus Domitius Ahenobarbus. Néron est plus âgé que Britannicus et Agrippine va tout faire pour que son fils soit reconnu comme le successeur de l'empereur Claude qui meurt opportunément le 13 octobre 54. De nombreuses sources latines considèrent qu'Agrippine joue un rôle dans la mort de l'empereur. Mais Suétone donne la chose comme simplement possible et cite d'autres possibilités; Sénèque, alors tuteur de Néron, parle quant à lui, de mort naturelle. L'empoisonnement de Claude reste donc objet de discussions.
Selon l'une des versions, Agrippine a fait mettre du poison dans la nourriture de l'empereur. Tacite prétend qu'elle choisit « une drogue raffinée qui trouble la raison et diffère la mort ». Agrippine a donc fait le choix d'un poison lent qui fait perdre à l'empereur l'usage de la parole. Cette lenteur permet à Agrippine d'appeler un médecin, Xénophon, pour ainsi écarter tout soupçon.
Selon les récits les plus sombres, elle a alors profité de l'impuissance du malade pour lui administrer une nouvelle dose de poison, mortelle cette fois.
Une fois son mari décédé, elle conserve un moment le secret de sa mort, joue les épouses affolées et s'arrange pour retenir Britannicus et ses sœurs auprès d'elle, tandis que Néron s'en va se faire reconnaître par la garde prétorienne. Quand la mort de l'empereur est enfin révélée, tout est joué... Britannicus suit son père dans la tombe à peine 4 mois plus tard.

Messaline et Claude ne sont pas les mieux placés dans l'arbre généalogique des Julio-Claudiens, afin de garantir la légitimité au trône de Britannicus, Messaline et Claude prennent les mesures nécessaires.
Par exemple, Octavie, la sœur de Britannicus, est fiancée à Lucius Iunius Silanus, descendant d'Auguste par les Iunii Silani.

BRITANNICUS INGÈRE LE POISON
Les desseins d'Agrippine sont tout à fait perceptibles dès son mariage avec Claude. En effet, elle fait adopter Néron par l'empereur dès le 25 février 50 et fait tout pour écarter Britannicus du pouvoir. Sans état d'âme, Agrippine est connue pour avoir procédé à de nombreux exils et assassinats afin d'assouvir ses ambitions pour son fils.
Premier obstacle dynastique sur la voie impériale : Lucius Junius Silanus, le fiancé d'Octavie qui est en âge de se marier et d'avoir des enfants, donc des concurrents potentiels pour Néron. Agrippine pousse l'encombrant fiancé au suicide en portant de fausses accusations d'inceste contre lui, et en 53, Octavie épousera Néron. Une rivalité existant entre Messaline et Agrippine, cela crée le même climat entre Néron et Britannicus. En effet, lors des Jeux séculaires au cours de l'année 47, Néron a été plus applaudi par la foule que Britannicus.
Par son adoption, Néron devient le frère de Britannicus. Il est son aîné de 3 ans, peut être élu avant lui et est considéré comme un héritier officiel.

En 51, Néron reçoit selon Tacite la toge virile, soit 9 mois avant l'age légal de 14 ans. Au cours de la même année, il entre au Sénat et devient proconsul. Il semble que Claude lors de sa dernière visite au Sénat ait émit le vœu que Néron et Britannicus règnent ensemble... Cela explique le choix qu'a fait Claude en adoptant Néron.
En effet le partage du pouvoir est possible, cela c'est déjà produit avec Tibère et Drusus I, ainsi qu'avec Germanicus et Drusus II.

Tacite présente comme un fait avéré que Néron est l'assassin de Britannicus. En effet, il a de bonnes raisons de se débarrasser de son « demi-frère ».
L'historien rapporte qu'il y a une première tentative infructueuse d'empoisonner Britannicus. Devant cet échec, causé par un poison insuffisamment violent, Néron, furieux, menace d'exécuter l'empoisonneuse Locuste déjà emprisonnée (et qu'on a déjà sollicitée pour se débarrasser de Claude).

La mort de Britannicus survient vers le 12 février 55, à la veille de son 14e anniversaire durant lequel il aurait dû revêtir la toge virile, et aurait ainsi pu revendiquer le pouvoir qui est alors aux mains de Néron, empereur depuis octobre 54.
Lors d'un banquet, une boisson chaude, goûtée par un esclave, est servie à Britannicus.
Cependant la trouvant trop chaude, il demande qu'elle soit refroidie. On ajoute alors à la boisson de l'eau froide, qui contient le poison, et elle lui est alors présentée sans avoir été goûtée à nouveau. Britannicus boit le breuvage, et tombe alors raide mort, foudroyé par le poison .
« Le trouble se met parmi ses voisins de table, ceux qui ne réfléchissent pas s'enfuient de tous côtés, mais ceux qui comprennent plus avant demeurent à leur place, immobiles et les yeux fixés sur Néron. Lui, restant étendu, faisant semblant de ne rien savoir, dit que cela arrive souvent, à Britannicus pendant une crise d'épilepsie, une maladie dont il est affligé depuis son enfance, et que, peu à peu, il recouvre la vue et les sens.
Mais Agrippine laisse transparaître une telle peur, un tel bouleversement d'esprit, bien qu'elle cherche à en dissimuler l'expression sur son visage, qu'il est évident qu'elle est aussi peu au courant qu'Octavie, la sœur de Britannicus comprend que son ultime recours lui est arraché et que c'est un précédent pour un parricide.
Octavie, elle aussi, bien qu'elle soit encore jeune et sans expérience, a appris à cacher douleur, affection, et tous ses sentiments. Ainsi, après quelques instants de silence, la joie du banquet recommence. » (Tacite, Annales, Livre XIII, 16).
Un autre historien, Dion Cassius rapporte qu'un des amis de Britannicus, Titus est tombé très malade après avoir goûté le breuvage de celui-ci. Britannicus est brûlé en catimini la nuit même de sa mort sur un bûcher que l'on a préparé d'avance.
ON EMMÈNE BRITANNICUS MOURANT
Suétone donne de l'événement un récit très similaire à celui de Tacite y compris dans la préparation du poison, dans l'attitude de Néron au cours du repas fatal et dans les circonstances météorologiques qui entourent les funérailles à la sauvette du jeune prince.
Tacite rapporte enfin que de nombreux écrits de l'époque font état que Néron, peu avant le meurtre et profitant de leur différence de statut social (l'un adulte, l'autre enfant), a à plusieurs reprises abusé sexuellement de son jeune frère.

Titus, futur empereur, et, éduqué avec Britannicus, fait ériger à sa mémoire 2 statues. Une première statue en or au Palatin, et une seconde en ivoire représentant le jeune prince sur un cheval.
Une explication avancée pour expliquer la mort foudroyante de Britannicus est l'épilepsie, une maladie connue de l'Antiquité Romaine. L'historien Pierre Grimal avance que Claude, le père de Britannicus, était vraisemblablement atteint de ce mal, et que la maladie de Britannicus était connue de toute la cour impériale. Une violente crise d'épilepsie a ainsi pu provoquer une rupture d'anévrisme. C'est d'ailleurs l'épilepsie qu'invoque Néron pour justifier sa placidité lors de l'instant fatal...
Si l'on s'en tient à l'hypothèse de l'empoisonnement, l'efficacité réelle du poison ingéré par Britannicus est le point le plus discuté de l'affaire. Selon Georges Roux, dans son Néron (Fayard, 1962), 2 poisons tuent instantanément : le curare et l'acide prussique. Le premier doit être injecté, quant au second, il ne sera mis au point qu'en 1782 par des procédés chimiques très complexes. Les Romains ne connaissaient aucun poison assez puissant pour provoquer une mort instantanée.

Les poisons mortels connus dans l'Antiquité sont la ciguë, la muscarine, l'aconit et la belladone. Ils mettent en général entre 6 et 8 heures pour tuer, et il faut au minimum 2 heures pour que le plus puissant d'entre eux agisse. On estime toutefois que les anciens Athéniens déjà utilisaient un mélange de poisons (par exemple lors de la mort de Socrate) pour en augmenter les effets.

Les historiens Romains eux-mêmes relatent les grandes difficultés rencontrées dans la mise au point du poison et les menaces de mort qu'on avait fait planer sur Locuste.
Tacite rapporte que sur le cadavre de Britannicus apparaissent des taches noires. Or, la muscarine laisse des marques violettes et la belladone des plaques rouges, les autres ne laissent pas de marques cutanées. Il y a donc 2 possibilités, soit les historiens ont exagéré les faits, soit Britannicus n'est pas mort assassiné. S'il n'est pas mort assassiné, il est peut-être mort d'une rupture d'anévrisme à la suite d'une violente crise d'épilepsie.

Même si Britannicus est mort assassiné, la question de l'implication de Néron dans le meurtre reste posée. En effet, Néron est à l'origine de nombreux assassinats. Parmi eux, seul celui de Britannicus relève d'un empoisonnement. Tous les autres sont des exécutions par le glaive ou des « invitations au suicide ». L'empoisonnement est un procédé en majorité utilisé par les femmes et Agrippine aurait pu y recourir pour que Néron, son fils, n'ait plus d'opposant.

Toutefois, la thèse qu'on a empoisonné Britannicus en plein banquet et en présence de l'empereur, sans que celui-ci ne s'en émeuve le moins du monde, ni ne cherche à en savoir plus par la suite, paraît peu crédible. L'implication d'Agrippine ne cadre ni avec les détails du récit de l'événement, ni avec le contexte des jeux de pouvoir et le rapprochement d'Agrippine et de Britannicus. Agrippine semble d'ailleurs redouter autant Néron que Britannicus.
De fait, pour la mère de l'empereur, la mort de Britannicus est une catastrophe qui la prive d'un contrepoids face aux ambitions de son fils et elle va se voir ensuite peu à peu, mais fermement, écartée du pouvoir, avant d'être assassinée à son tour en 59.

Néron est inquiet et le 17 décembre 54 un événement le décide à assassiner Britannicus. En effet, lors de cette soirée, chaque convive doit réciter un poême.
Britannicus choisit de réciter des vers du poète Ennius: « Plus que la naissance, la chance me fait défaut. Sachez que je possédais un trône. Voyez donc de quelle richesse, de quelle fortune, de quelle puissance m'a précipité le sort. » Chaque invité saisit l'allusion et Néron est rouge de colère. Il fait donc appel aux services de la célèbre empoisonneuse Locuste. Celle-ci compose un breuvage mais celui-ci est trop dilué et une forte diarrhée en délivre Britannicus.
Néron convoque Locuste et l'oblige à préparer le poison en sa présence. La première tentative est infructueuse, un chevreau ayant essayé la mixture met 5 heures à mourir. Le poison est refait et donné à boire à un porc qui tombe raide mort.
Néron fait alors préparer un banquet, et pour contourner la difficulté du goûteur à recours à un stratagème. Il fait servir à Britannicus une boisson sans danger mais brûlante. Britannicus demande à ce qu'on y rajoute un peu d'eau fraîche. C'est à ce moment que Néron fait rajouter le poison. Britannicus s'écroule foudroyé. La terreur gagne l'assistance, mais Néron la rassure.

La mort de Britannicus : lecture critique de Tacite
« La coupe dans ses mains par Narcisse est remplie,
Mais ses lèvres à peine en ont touché les bords,
Le fer ne produit point de si puissants efforts,
Madame : La lumière à ses yeux est ravie,
Il tombe sur son lit sans chaleur et sans vie ».
Racine
AGRIPPINE MAUDIT NÉRON

Le récit de la mort de Britannicus est l'un des plus célèbres de Tacite, c'est lui, notamment, qui l'a fait qualifier par Racine de « plus grand peintre de l'Antiquité ». Souvent lu et commenté, il a donné lieu dans notre pays, il y a quelques années, à des essais de « lecture plurielle » (analyses textuelle et structurale) qui en mettent en lumière les procédés de style et décrivent son fonctionnement en tant que discours.


Biographie de BRITANNICUS - Monsieur-Biographie.com
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La mort de Britannicus : lecture critique de Tacite - Persée
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de M Dubuisson - ‎1999 - ‎Cité 5 fois - ‎Autres articles
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