jeudi 2 juin 2016

EN REMONTANT LE TEMPS... 352

21 MAI 2016...

Cette page concerne l'année 352 du calendrier julien. Ceci est une évocation ponctuelle de l'année considérée il ne peut s'agir que d'un survol !

QUAND CONSTANCE ABANDONNE STRASBOURG AUX BARBARES.

Le premier nom de la ville est en celtique Argantorati Argentorate, romanisé en Argentoratum (Argentoraton IIe siècle), même nom qu'Argentré (Mayenne, Argentrato IXe siècle). L’étymologie de ce terme est discutée, certains y voyant un lien avec la Grande Déesse Celte, dont Argantia est un des épithètes et qui est identifiée avec la lune.
L’acceptation la plus courante veut que la racine Celtique arganto- (argent, luisant) renvoie à la couleur et la brillance argentée d'un cours d'eau (cf. l’Argens, l'Arc, etc.), en l'occurrence de l'Ill (Ainos en gaulois).
« Cette hypothèse est renforcée par l’ancien nom de Horbourg (Argentovaria), commune également située sur l’Ill, dont l'élément ver / var désigne précisément un cours d'eau en Indo-européen. -rate de rāti désigne une levée de terre ou une fortification (cf. vieil irlandais ráith / ráth, fortin, fortification). »

Cette hypothèse affirme donc qu'Argentoratum est l'enceinte sur l'Argenta, in extenso la cité de la rivière. Ce nom est alors en parfaite cohérence avec la perception de ce lieu frontière, situé à proximité du Rhin, partie intégrante du réseau de camps défendant le Limes nord de l’empire Romain.
Puis, à la suite de son intégration dans l'entité Germanique, cette ville n'est plus frontalière, mais au cœur du réseau des cités Goths. Sa perception n’est dès lors plus sur un axe fluvial et orienté Nord-Sud, mais routière et sur un axe Est-Ouest. Strasbourg est en effet au niveau d’un des rares ponts permettant de franchir le Rhin et de ce fait placée sur une route majeure Est-Ouest. Son nom évolue alors en Straßburg, le château (die Burg, bâtiment fortifié) sur la route (die Straße), issu de Stratiburg nom antérieur à la mutation consonantique haut-allemand mentionné pour la première fois au VIe siècle par Saint Grégoire.

Sous Constantin (306-337) le camp d’Argentorate est reconstruit et fortifié, on ajoute une muraille à la cité, ce qui permet de recevoir la population civile.
Partout dans le pays l’activité économique reprend avec la sécurité revenue. Mais en 351 l’usurpation de Décence provoque la guerre civile et le départ pour l’Italie de nombreuses troupes du front Rhénan alors qu’une coalition de Francs et d’Alamans aux ordres de Chnodomar passe le Rhin à l’appel de Constance, l’empereur usurpé (337-361) et écrase les troupes de Décence à Bingen en 352.
La région entre Rhin et Moselle est envahie, les coalisés s’installent, déportent en masse les populations Gallo-Romaines pour cultiver les terres à leur place. Les villes sont démantelées et laissées à l’abandon. Beaucoup d’habitants fuient et se réfugient dans les montagnes... En 355, Cologne tombe.
En 355, la ville est saccagée par les Alamans. Julien reconquiert la ville en 357 après une victoire décisive sur les Alamans lors de la bataille de Strasbourg. Mais en 406 les Germains envahissent à nouveau la Gaule puis en 451, la ville est complètement détruite par Attila.
Les villes sont démantelées, pillées et laissées à l’abandon. De cette époque datent les trésors de Villing (Lorraine), Mackwiller, Strasbourg, Saint Étienne, et le fabuleux trésor d'argenterie de Kaisers Augst... Beaucoup d’habitants fuient et se réfugient dans les montagnes. Constantin II appelle son cousin Julien (dit « Julien l’Apostat ») pour redresser une situation qui paraît sans espoir.

En 356, une première expédition permet à Julien de battre les Alamans au sud de Brumath. Prudent, il se replie sur Saverne qu’il fortifie. L’année suivante, 2 armées Romaines, l’une venant d’Augst commandée par Barbation, l’autre venant de Lorraine avec Julien, tentent de prendre les Alamans en tenaille. Barbation est mis en déroute près de Bâle.
Tout repose sur Julien. En août, il marche sur Argentorate. Les 2 armées se rencontrent entre Mundolsheim et Hausbergen. Longtemps indécise, la bataille tourne à l’avantage des Romains et de leurs auxiliaires Gaulois. Chnodomar est pris, envoyé à Rome où il meurt en prison.
 
La victoire de Julien redonne espoir aux Gallo-Romains, d’autant qu’une série d’incursions en Germanie ramène nombre de déportés. Des Germains vaincus sont fixés sur le Rhin et deviennent soldats-paysans (Villages en « Heim » du Kochersberg ?). Julien et ses successeurs réorganisent la défense du pays. Le castrum d’Argentorate est reconstruit et fortifié par une double enceinte. Dans le Haut Rhin, près de Colmar, est érigé l’important fort d’Argentovaria-Horbourg.

En 377, Gratien repousse une invasion Alamane du côté d’Argentovaria, passe le Rhin et mène la dernière campagne Romaine en Germanie. Mais à partir de 383 de nouvelles guerres civiles affaiblissent l’Empire, dégarnissant les frontières.
 
En 401, Stilichon, un Vandale au service de l’empereur Honorius réorganise la défense du territoire : Troupes d'intervention à l'arrière et troupes frontalières groupées dans les forteresses et le long des routes stratégiques avec rôle de surveillance et de renseignement. Le système permet d'engager des batailles massives dans lesquelles les Romains sont supérieurs, au lieu de disperser les forces sur toute la frontière. Rien n’y fait :

En 451 Attila traverse le Rhin à Strasbourg et brûle celle-ci comme en témoignent les fouilles de l'église Saint-Etienne, de la ruelle Saint Médard et de la chapelle Saint-Laurent. Il repasse à l'automne après sa défaite des Champs Catalauniques. C'est la fin de la défense de l'Alsace par les Romains, la fin de la Gaule Romaine.
Une nouvelle interprétation des textes, complétée par l'étude des trésors enfouis sous Magnence et Décence, découverts dans des couches d'incendie, et par celle des sites ravagés dont les monnaies les plus récentes appartiennent aux 2 usurpateurs, a permis à M. Schwartz de dater avec précision la défaite de Décence par les Alamans et l'incendie d'Argentorate.
L'invasion paraît avoir été brutale et peu profonde (les régions à l'Ouest de la Moselle en ont peu souffert).
On a pu reconstituer 2 fronts : L'un entre la Sarre et la Moselle, jalonné par la destruction des sites de Betting, Villing, Halstroff et Mackwiller, dont les monnaies les plus récentes appartiennent à la période IV du monnayage de Magnence et de Décence selon certains (qui couvre l'année 351), l'autre site sur le Rhin supérieur dans la région de Bâle, marqué par les incendies de Koestlach, de Frick et les découvertes de Bassecourt dans le Jura Bernois (période I à IV) et de Kaiseraugst (période IV).
Les deux fronts forment les extrémités d'une grande tenaille allant du Luxembourg au Jura Suisse. Strasbourg, situé au centre, ne peut que succomber à l'invasion, même s'il n'y a pas d'attaque sur le Rhin.

Les monnaies les plus récentes du trésor découvert sous l'église Saint-Étienne à Strasbourg sont de la période V (352) et permettent de supposer que l'incendie de cette ville est postérieur aux enfouissements de Villing, etc.
Les textes anciens confirment cette datation... L'usurpation de Magnence dure du 18 janvier 350 au 11 août 353. Après l'assassinat de Constant, il devient maître de la partie Occidentale de l'Empire.
Il doit renoncer à une entente avec Constance II, maître de l'Orient. En janvier 351 il élève son frère Décence à la dignité de César.
Ce n'est qu'après ses victoires sur Vetranion (dec. 350) et sur Magnence à Mursa (sept. 351) que Constance II, de retour en Italie, a pu lancer les Barbares de la région du Rhin contre la Gaule (352).
D'autre part, avant de traverser les Alpes (hiver 352-353), Magnence sait que Constance II s'est gagné la faveur des provinces au-delà des Alpes. C'est donc entre ces 2 événements que se place la défaite de Décence par le roi des Alamans Chnodomar, et la destruction d'un certain nombre de cités dont Argentorate.
L'occupation par les Barbares d'une portion du territoire de la Gaule remonte à cette invasion de 352. Ils installent une tête de pont entre la Moselle et le Rhin d'où ils partent pour des expéditions à l'intérieur du pays.
Cet état de choses ne prend fin qu'avec la victoire de Julien près de Strasbourg en 357.

Entreprises depuis 1947 afin de faire des recherches sur le passé Romain et la topographie de Strasbourg, en exploitant les facilités offertes, hélas, par les démolitions consécutives aux bombardements de 1940, les fouilles d'Argentorate ont duré jusqu'en 1970.
Elles se poursuivent actuellement dans le cadre de la rénovation de la vieille ville, sous la direction de Fr. Pétry de la Direction des Antiquités Historiques. Elles ont porté sur les emplacements suivants : Place de la Cathédrale, église Saint Nicolas, église Saint Étienne, rue du Sanglier, rue des Juifs, rue des Veaux, rue de la Croix, Marché Gayot, ruelle Saint Médard, rue de l'Ail, rue du Jeu des Enfants, rue Thomann, chapelle Saint Laurent de la Cathédrale, place Kléber, quai Lezay Marnésia.
Origines des villes de Strasbourg et de Metz des lumières nouvelles ont été apportées sur les origines lointaines des 2 villes de Strasbourg et de Metz.
En effet, les travaux ont démontré la très haute antiquité des 2 sites urbains. Strasbourg tout comme Metz est habité à l'âge du Bronze Final, vers 1 000 avant J.C.
A Argentorate, cette occupation a été interrompue par une période d'humidité et d'inondation, qui semble avoir considérablement grossi fleuves et rivières et transformé la plaine Rhénane en un vaste marécage.
L'agglomération a été reprise vers 50 avant notre ère. Mais c'est aux
Médiomatriques, tribu qui a donné son nom à la ville de Metz, qu'il appartient de créer sur l'éminence principale, à l'abri des inondations saisonnières, un marché et un sanctuaire, noyau primitif de la ville.

Il est probable et possible que les enceintes de Metz, et de Strasbourg aient été construites après la catastrophe nouvelle qui avait anéanti les 2 villes en 352. Ici encore les fouilles exécutées tant en Alsace qu'en Lorraine sont venues compléter de façon substantielle les connaissances sur l'histoire de la Gaule Romaine.
En effet, on a admis qu'il n'y a au milieu du IVe siècle en Gaule qu'une seule invasion : Celle de 355 qui a détruit Cologne et introduit les Francs en Belgique, et à peu près simultanément, les Alamans en Alsace. La chronologie de J. Delorme, dans sa dernière édition de 1956, n'admet encore que cette seule invasion.
En réalité elle a été précédée d'une autre, celle de 352, qui a amené une coalition de Francs et d'Alamans à occuper tout le territoire compris entre Moselle et Rhin, qui a eu pour conséquence la destruction d'un grand nombre de villes, parmi lesquelles Metz et Strasbourg.

Cette première invasion a pu être datée de façon tout à fait sûre par 3 trésors, tous 3 découverts dans les ruines calcinées consécutives aux destructions
Un 4e trésor est venu en renfort, celui qui, découvert il y a quelques années à Kaiseraugst, contient à côté de pièces d'argenterie provenant du trésor impérial de Constant des lingots d'argent et des pièces de même métal.
Ces pièces d'argenterie ont été raflées à Autun par Magnence et Décence, elles ont été destinées à être fondues pour payer les officiers de l'armée...
L'ensemble est enfoui sous une route à l'approche des envahisseurs de 352.
La bataille décisive qui a permis à la confédération Franco-Alamane de rompre les défenses Romaines et de percer vers la vallée de la Moselle a lieu près de Bingen.
Les coalisés Germains remportent là une victoire qui est comparée par Ausone à celle de Cannes (Aus.Mosella, 1 à 5)... Il reste encore de son temps les traces de ces furieux combats.


Le castrum d'Argentorate (Strasbourg) 4/6 - Le blog de LUTECE
www.e-stoire.net/article-le-castrum-d-argentorate-strasbourg-4-6-116379950.html
27 mars 2013 - passer le Rhin et écrase les troupes de Décence à Bingen en 352. ... Mackwiller, Strasbourg-Saint Etienne, et le fabuleux trésor d'argenterie de Kaisers Augst. ... L'année suivante, deux armées romaines, l'une venant d'Augst ...

Histoire de Strasbourg : quand Strasbourg était Argentorate
www.encyclopedie.bseditions.fr/article.php?pArticleId=169&pChapitreId=33151
... en profite pour passer le Rhin et écrase les troupes de Décence à Bingen en 352. ... De cette époque datent les trésors de Villing (Lorraine), Mackwiller, ... L'année suivante, deux armées romaines, l'une venant d'Augst commandée par ...

Jacques Schwartz, Trouvailles monétaires et invasions germaniques ...
www.persee.fr/doc/numi_0484-8942_1958_num_6_1_902_t1_0215_0000_7
de G Fabre - ‎1958
Examen des trésors de Strasbourg (Église Saint - Étienne), de Villing ... dater avec précision la défaite de Décence par les Alamans et l'incendie d'Argentorate. ... Magnence et de Décence selon Lafîranchi (qui couvre l'année 351), l'autre sur ... de la période V de Lafîranchi (352) et permettent de supposer que l'incendie de ...

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