mardi 25 février 2014

1175/1174... EN REMONTANT LE TEMPS

Cette page concerne l'année 1175/1174 du calendrier julien. Ceci est une évocation ponctuelle de l'année considérée. Il ne peut donc s'agir que d'un survol !

Saladin (1137 - 1193)

« Le 4 mars 1193, le sultan Saladin meurt à Damas à l'âge de 55 ans. C'est le début d'une légende qui va s'épanouir au XXe siècle, à la faveur de la renaissance arabe ».
André Larané


Au milieu du XXe siècle, le raïs Nasser tentera de restaurer l'unité du monde arabe en rapprochant son pays, l'Égypte, de la Syrie au sein d'une éphémère République Arabe Unie. À cette occasion est exalté et magnifié le souvenir de Saladin. Le sultan devient un modèle pour les nationalistes arabes en guerre contre Israël et l'Occident aussi bien que pour les propagandistes de la guerre sainte...
SALADIN





  • 1174 - Pendant la minorité du jeune roi lépreux Baudouin l'ignoble régent de Jérusalem Millon de Plancy se fait poignarder en pleine rue. Raymond III, comte de Tripoli, libéré il y a deux ans des prisons d'Alep, devient alors le régent de Jérusalem.
  • 1174 - En décembre Saladin qui a mis le siège devant Alep, fait marche arrière et le lève pour éviter de faire mourir des concitoyens. Le jeune As-Salih entre pacifiquement dans Damas, Homs et Hama.
  • 1175 - Les conseillers de l'enfant As-Salih Ismaël (roi d'Alep) font appel aux services des « assassins » commandés par Rachide din-Sinan qui est heureux d'envoyer deux émissaires dans le camp de Saladin, mais ils sont vite reconnus et massacrés. Un an plus tard 3 autres bâtinis arrivent à pénétrer avec leurs poignards jusqu'à la tente du sultan qui heureusement s'est « protégé de toiles de mailles. » Youssef est lui-même étonné d'être encore en vie, après ce triple assaut.
    - Le cousin du petit As-Salih Ismaël attaque Saladin avec l'aide des troupes d'Alep et se fait battre par lui à Qurun Hama le 23 Avril,
    - mi-mai le régent de Jérusalem (Raymond III) conclu une trêve avec Saladin et obtient de lui la libération de nombreux prisonniers Francs.
  • 1176 - Libération de Renaud de Châtillon, qui épouse en 1177 Stéphanie de Milly châtelaine du Krak de Moab, forteresse des Templiers.. Manuel Comnène subit une importante défaite à Myrioképhalon. Recul de l'hégémonie Byzantine.
  • 1177 - Mars, le jeune roi lépreux Baudouin IV favorise l'union de sa sœur Sibylle avec le fils du marquis de Montferrat « Guillaume III » qui hélas meurt 3 mois après le mariage, atteint de paludisme, laissant sa jeune épouse enceinte d'un futur garçon.
    - 25 novembre, victoire des Francs à Montgisard près d'Ascalon sur l'armée de Saladin qui se sauve de justesse au travers des sables du désert.
  • CONQUETES AYYUBIDE
    1179 - Première défaite des Francs de l'année et mort du connétable Onfroi de Toron qui a été général en chef de 3 rois de Jérusalem.
    - le 10 juin deuxième défaite des Francs dans la plaine de Marij'Ayûn où le grand maître des Templiers Eudes de saint-Amand, responsable du désastre est capturé par les musulmans.
    Baudouin déjà fortement défiguré par la lèpre demande une trêve à Saladin qui l'a lui accorde.
    - mariage de Sibylle (sœur du roi lépreux) avec Guy de Lusignan qui reçoit Jaffa, Ascalon et un titre de comte. Tandis que l'autre demi-sœur Isabelle épouse Onfroi IV de Toron âgé de 14 ans.
  • 1180 - Mort de l'empereur Byzantin Manuel Comnène dont l'armée est décimée en 1176 dans un défilé, par les soldats de Kilidj-Arslân II.
  • 1181 - Mort subite du jeune roi Syrien As-Salih Ismaël, probablement empoisonné. Saladin est désormais le seul chef musulman de Syrie et d’Égypte.
  • 1180 - La belle, mais impopulaire Marie d'Antioche assure la régence à Byzance dès la mort de son époux Manuel Comnène.
  • 1181 - Au mépris de la trêve de 1179 conclue avec les Francs, le prince d'Antioche Renaud de Châtillon s'engage sur la route de Médine pour piller et assassiner des caravanes de pèlerins et de marchands. Il projette même d'aller jusqu'à la Mecque pour détruire le lieu sacré de l'Islam.
    - Saladin se fâche et rompt la trêve en attaquant le Krak des chevaliers de Moab. Le pauvre Baudouin couché sur une litière veut absolument mener lui-même ses troupes contre Saladin et de son neveu Farruk Shah.
  • En 1182 Andronic s'empare du pouvoir en écrasant une révolte Italienne où 50 000 colons Italiens (!) seront massacrés par l'armée. La foule qui ne lui a jamais pardonné son geste, le lapide en 1185 sur la place publique.
  • 1183 - Le 18 Juin Saladin fait son entrée solennelle dans Alep
  • 1183 - Le 20 novembre Baudouin IV abdique et fait nommer comme Roi de Jérusalem son neveu le petit Baudouin V, fils du défunt Guillaume III de Montferrat et de Sibylle (remariée Lusignan). L'enfant a juste 5 ans ! Quant au pauvre Baudouin IV il est pratiquement aveugle et paralysé, il meurt en mars 1185. Le régent reste Raymond de Tripoli .
  • 1185 - Révolte à Constantinople - Isaac Ange succède à Andronic Comnène comme empereur d'Orient.
    Saladin tente de s'emparer de Mossoul
  • 1185 - Nouvelle trêve de 4 années conclue entre Saladin et Raymond III
  • 1186 - Décès à Acre du roi-enfant : Baudouin V (destitution du Régent)
    en septembre à Jérusalem, couronnement discret de Sybille et du nouveau Roi Guy de Lusignan par le Patriarche Héraclius.
    - Déçu et outré l'ex-régent Raymond III fait alliance avec Saladin.
    - fin 1186, Renaud de Chatillon enlève la caravane de Damas qui se rendait au Caire. Il fait main basse sur un énorme butin et jette les voyageurs en prison. Saladin exige la restitution des biens à Guy, roi de Jérusalem...
  • 1187 - La trêve étant rompue, mobilisation de toutes les armées de Syrie du Nord, de Damas, d'Alep et de l’Égypte par Saladin. Pendant que les barons empêchent Guy de Lusignan d'aller attaquer le comte de Tripoli qui refuse de se battre à ses côtés.
BATAILLE DE HATTÎN
  • 1187 en mai, défaite de 150 templiers qui veulent battre plusieurs milliers de musulmans à Séphoris (près de Nazareth).
  • 1187 - 4 juillet: « La célèbre bataille du plateau de Hattîn » au nord-ouest du grand lac de Génésareth.
Contre l'union de toutes les armées musulmanes, les Francs opposent : environ 1 000 chevaliers, 25 000 fantassins, 40 000 mercenaires d'origines musulmane et plus de 2 500 cavaliers, auxquels s’ajoutent 7 000 fantassins armés par les templiers, même Bohémond III envoie son fils aîné Raymond avec 50 chevaliers.
Après avoir mis le siège devant la ville de Tibériade, Saladin attend les Francs, qui partent de Séphoris. En ce soir du 4 juillet la puissance Franque est écrasée, Saladin remporte la plus grande victoire de sa vie.
Saladin a fait le vœu d'exécuter lui-même Renaud de Châtillon avec le comte Raymond III (également accusé). Il fait venir Renaud Châtillon et le roi Guy sous sa tente. Au lieu d'implorer le pardon, Renaud garde son attitude de mépris et d'arrogance. Après avoir donné à boire au roi Guy déshydraté, celui-ci s'empare de l'écuelle pour boire à son tour. Saladin saisit alors son épée et l'assène sur l'épaule de Renaud que ses lieutenants achèvent. Puis fait conduire le roi avec les nobles captifs vers Damas pour servir de rançon.
  • 1187 - Après la prise de Tibériade le 5 juillet,  Saladin poursuit son avance en prenant dans ce même mois St Jean d'Acre, Jaffa, Césarée et Sidon. Beyrouth tombe le 6 août et Ascalon ainsi que Gaza le 5 Septembre, ces deux villes appartiennent aux Templiers, c'est pourquoi Saladin les préfère à Tyr. Seuls les habitants de Jaffa qui ont longuement résisté au frère de Saladin, sont vendus comme esclaves.
    Cette avancée triomphante de l'Islam fait beaucoup de bruit en Europe puisque dès septembre on commence par prêcher la libération des Lieux Saints par une nouvelle grande croisade.
  • 1187 - Le 20 septembre Saladin installe le siège autour de Jérusalem. Mais à cause de la grande bataille de Hattîn, la ville ne compte plus que 6 000 soldats ! C'est pourquoi la Ville Sainte tombe dès le 2 Octobre 1187.
  • 1187 - Mort de Raymond III comte de Tripoli emporté par une pleurésie à l'âge de 48 ans. Son successeur au comté est le jeune Bohémond second fils du prince d'Antioche qui reçoit également à la mort de son père et de son frère aîné la principauté d'Antioche.
  • 1187 - En novembre Saladin commence le siège de Tyr défendue par le baron Conrad de Montferrat, frère du premier époux (défunt de Sibylle). Sur 10 vaisseaux Turcs, 5 sont rapidement brûlés. Sur l'avis de ses conseillers Saladin abandonne le siège et puisque l'hiver est proche, il renvoie la moitié de son armée. En rentrant vers le Nord il s'empare des villes de Lattaquié, Tartous, Safed.
    Les seules possessions Franques qui restent sont : : Tyr, Antioche, Tripoli et 3 forteresses isolées.
SALADIN
Afin d’appuyer cette conquête l’architecture ayyubide développe deux types principales de construction : les forteresses et les madrasas (écoles). Leur rôle de défenseur du jihad s’illustre dans ces constructions austères. Ils emploient des matériaux sobres, comme la pierre, où l’utilisation de couleurs variées demeure parfois le seul ornement. Parmi les exemples les plus significatifs qui nous soient parvenus, la citadelle d’Alep (début du XIIIe siècle) reste l’un des chefs-d’œuvre de cette architecture défensive. Surplombant la ville et entourée d’un glacis, on n’y accède par une longue rampe, coupée de deux portes massives en pierre. Quand aux madrasas. Composées d’une cour entourée de salles de cours, elles s’ouvrent souvent sur un iwân et comporte un mihrab décoré de pierres colorées, comme dans la madrasa al-Firdaws à Alep (1235 - 1236). Déjà présentes en Syrie, elles se répandent alors en Égypte.
Le territoire contrôlé par les Ayyubides se compose d’un ensemble de principautés, organisées autour d’une ville, à l’exception de l’Égypte, pays unifié. Il restaure également une économie stable, des routes commerciales avec le sud (Soudan, Yémen) mais aussi avec l’Italie, tout en s’appuyant sur une organisation militaire et administrative antérieure. Mossoul devient ainsi le principal centre de production pour de luxueux métaux incrustés d’or, d’argent et parfois de cuivre rouge, innovation technique de cette période. D’autres ateliers voient le jour en Syrie, notamment à Damas et certainement à Alep. Les artistes travaillent pour les cours qui leur passent commande et se déplacent avec elles. Plusieurs artisans ont également signés leurs œuvres, en indiquant leur origine (nisba) : la ville de Mossoul (al-Mawsili) revient régulièrement, même si ces artisans n’y travaillent plus...
Dans les autres domaines artistiques, peu d’informations nous sont parvenus. Des centres de productions de céramiques ont probablement existé dans le Nord de la Syrie et au Caire, sans être attestés avec certitude. A la mort de Saladin en 1193, ses descendants directs sont progressivement écartés au profit de son frère, al-Adil (r. 1200 - 1218), puis d’al-Kamil (r. 1218 - 1238). Ils continueront sa politique en préférant les négociations aux combats contre les Francs, tout en restituant Jérusalem à Frédéric II. La solidarité familiale qui prévaut jusqu’au règne d’al-Salih (r. 1240 - 1249) disparaît face aux nombreuses rivalités familiales. Ce dernier se constitue alors une armée composée d’esclaves Turcs qui, face aux dissensions internes des Ayyubides, prennent le pouvoir en Égypte à la mort du dernier Ayyoubide en 1250. La nouvelle dynastie des Mameluks est née.
BATAILLE DE MONTGISARD
Le nom de Saladin (1174-1193) évoque, en Occident, la croisade, l’esprit chevaleresque, la générosité et la magnanimité. En Orient, son image est également celle du héros, unificateur des Arabes et conquérant de Jérusalem. Mais qui est-il vraiment ? Un souverain doté d’un grand sens politique et paré de toutes les vertus ? Un usurpateur dénué de scrupules, comme certains ont voulu le décrire ? Dans les diverses sources parvenues jusqu’à nous, du XIIe siècle à nos jours, comment faire la part entre le panégyrique et la description fidèle, entre la légende et la réalité 
Même si Saladin (Salâh al-Dîn) est aujourd’hui une icône pour les Arabes, il n’est pas d’origine arabe, mais Kurde. Né à Takrît, en Irak, vers la fin de l’année 1137, au sein d’une famille de notables, il grandit et se forme au métier des armes à Baalbek (Liban actuel) et à Damas (Syrie), sous la houlette de son père Ayyûb (d’où le nom de sa dynastie, les Ayyoubides) et de son oncle Shîrkûh.
En 1154, lorsque le prince Turc Nûr al-Dîn Ibn Zengi (1146-1174) unifie la Syrie sous son autorité, Saladin et sa famille comptent parmi ses plus fidèles soutiens. Entre 1164 et 1169, il est envoyé à plusieurs reprises, avec son oncle Shîrkûh, en Égypte afin de conquérir cette région convoitée par les Francs et dominée par la dynastie déclinante des Fatimides chiites, rivaux des Abbassides sunnites de Bagdad.
En 1169, il parvient à se faire nommer vizir du dernier calife Égyptien avant de mettre fin à sa dynastie en 1171. Il rétablit alors la suzeraineté du califat abbasside au Caire et consolide son pouvoir sur l’Égypte, la Cyrénaïque, le Yémen et la mer Rouge. A la mort de Nûr al-Dîn, en 1174, il doit encore lutter une dizaine d’années pour imposer son autorité à toute la Syrie et la Haute-Mésopotamie, au détriment du fils héritier de Nûr al-Dîn et de sa famille Zenguide.
N’ayant pas de légitimité dynastique, Saladin va chercher, pour imposer son pouvoir, la reconnaissance du calife de Bagdad. En terre d’Islam, à cette époque, la légitimité repose, en effet, sur le respect d’un système hiérarchique de délégation de l’autorité. Le calife tient son pouvoir de Dieu. Il en délègue une partie au souverain (sultan, prince, grand émir) qui lui-même nomme ses représentants pour exercer en son nom la justice, contrôler l’administration, faire régner l’ordre et défendre le territoire. Pour convaincre le calife, Saladin met en avant ses succès religieux et militaires, notamment le renversement des Fatimides et le rétablissement de l’orthodoxie sunnite en Égypte. Il insiste également sur la nécessaire unification musulmane, condition essentielle d’un jihad victorieux contre les Francs... qu’il affirme être le seul à pouvoir conduire. Il accuse enfin ses adversaires musulmans d’être des traîtres, de soutenir les hérétiques et de pactiser avec les « infidèles ». Autant d’arguments qui lui valent d’obtenir, dès le début de son règne, en 1175, la reconnaissance du calife al-Mustadî’ (1170-1180), gagnant ainsi une légitimité politique et religieuse au moins aussi forte que la légitimité dynastique dont se réclame la famille de Nûr al-Dîn.
SALADIN ET GUI DE LUSIGNAN

Dans la conduite de son gouvernement, Saladin est d’abord soutenu par les membres de sa famille (ses frères, ses neveux et plus tard ses fils) qui lui apportent une aide militaire, financière et souvent morale. Ils en sont le plus souvent remerciés par l’octroi de postes et de territoires importants, formant ainsi une vaste confédération familiale. Mais pour obtenir l’adhésion des populations, Saladin a aussi besoin de l’appui des élites religieuses et militaires. Son attitude très respectueuse de la religion et de la loi musulmanes lui permet de rallier la plus grande partie des oulémas dont l’influence sur le peuple est grande grâce à leurs fatwas, leurs jugements, leur enseignement et leurs sermons. Et si quelques rares émirs (officiers) préfèrent l’abandonner pour soutenir ses adversaires, le sens de la négociation de Saladin, son pragmatisme et ses généreuses concessions territoriales lui permettent en général d’obtenir leur très fidèle soutien. Les nombreuses guerres qui jalonnent son règne vont toutefois épuiser les ressources de ses territoires et même s’il tente d’introduire en Égypte, avec l’aide d’anciens fonctionnaires fatimides passés à son service, quelques réformes fiscales et monétaires, il ne parvient pas à construire un véritable État structuré et efficace... Une fois les territoires musulmans du Proche-Orient unifiés sous son autorité, en 1186, Saladin se retourne contre les 3 États Francs qui subsistent dans la région, le royaume de Jérusalem, le comté de Tripoli et la principauté d’Antioche. Mais c’est surtout sur la ville de Jérusalem, occupée par les Francs depuis 1099, que Saladin va concentrer ses efforts. Troisième ville sainte de l’islam après La Mecque et Médine. La « mosquée très éloignée (al-Aqsâ) » mentionnée dans le Coran (XVII, 1) est identifiée par les exégètes à Jérusalem. C’est vers elle que Dieu envoie son Prophète pour qu’il entreprennent son voyage nocturne vers les cieux et c’est aussi dans sa direction que Muhammad demande aux premiers musulmans de prier. « Mourir à Jérusalem c’est presque comme mourir au ciel » dit une tradition (hadith) musulmane.
De 1187 à sa mort, Saladin remporte d’importantes victoires contre les Francs sans parvenir toutefois à mettre fin à leur présence dans la région.
SIEGE DE JAFFA
En juillet 1187, sa victoire écrasante à Hattîn, à l’ouest du lac de Tibériade, lui ouvre la route de Jérusalem. Le roi, Guy de Lusignan et de très nombreux chevaliers (dont le bouillonnant Renaud de Châtillon) ayant été faits prisonniers, le royaume est désormais sans défense. Après avoir rapidement conquis toutes les places fortes du littoral (à l’exception de Tyr), depuis Jubayl (Byblos) au nord jusqu’à Ascalon et Gaza au sud, Saladin s’empare de Jérusalem, le 2 octobre 1187. Les Francs obtiennent l’autorisation de quitter la ville, sains et saufs, en échange d’une rançon de dix pièces d’or par homme, cinq par femme et deux par enfant. Ceux qui ne peuvent payer sont vendus comme esclaves. L’année suivante, un grand nombre de forteresses Franques de Syrie du Nord tombent également entre ses mains. Saladin est alors au sommet de sa gloire...
Toutefois, la résistance des Francs à Tyr et surtout l’arrivée de la Troisième Croisade (1189-1192) conduite par les rois d’Angleterre et de France, Richard Cœur de Lion et Philippe Auguste, vont freiner ses ambitions. Les Francs récupèrent la ville d’Acre, en juillet 1191, et Saladin est forcé d’accepter la signature d’un traité en septembre 1192 avec Richard Cœur de Lion. Une trêve de trois ans et huit mois est instaurée et les musulmans reconnaissent aux Francs la possession du littoral de Tyr à Jaffa. Sur son lit de mort, en mars 1193, malgré ces dernières concessions et un pays appauvri par les guerres, Saladin peut toutefois se vanter d’avoir donné Jérusalem à l’Islam et d’avoir conquis une grande partie des territoires Francs.
Aucun portrait contemporain de Saladin n’étant connu, il reste à jamais pour nous un souverain sans visage. Sa personnalité même garde des zones d’ombre, car si ses biographes s’attardent volontiers à le décrire dans l’accomplissement de ses devoirs religieux et militaires, ils ne nous parlent que très peu de sa vie de famille, de ses loisirs ou de ses émotions. Élevé en Syrie, il parle, lit et écrit l’arabe et se plaît à suivre les cours de quelques professeurs et suivre les débats de juristes et de théologiens. Décrit comme un souverain très respectueux de ses devoirs de croyant, il n’a pourtant jamais accompli le pèlerinage à La Mecque, sans doute par crainte de s’absenter durant plusieurs mois de ses territoires. Un certificat de pèlerinage attestant l'accomplissement du « petit pèlerinage » (‘umra) pour son compte a néanmoins été retrouvé... un musulman dans l’incapacité d’effectuer son pèlerinage à La Mecque peut rétribuer l’un de ses coreligionnaires pour l’effectuer à sa place.
En 1176, il épouse à Damas la veuve de Nûr al-Dîn, un mariage sans nul doute politique (Saladin reprend ainsi à son compte l’héritage de son prédécesseur et se situe dans sa lignée) Quand dix ans plus tard, son épouse meurt, Il aura de nombreuses concubines qui lui assureront une importante descendance : 17 fils et une fille (sans compter les enfants morts en bas-âge), dès l’âge de 15 ans il les associe à ses batailles.
Si la véritable personnalité de Saladin ne nous est pas révélée, l’image qu’il donne et qui perdure jusqu’à nos jours présente des contours beaucoup plus nets. Saladin ayant pris le pouvoir en renversant la dynastie de son maître, il lui faut, en effet, légitimer son coup de force pour espérer se maintenir sur le trône. Cette légitimité que seul le calife peut lui donner, Saladin l’obtient en mettant l’accent sur sa puissance militaire et ses qualités de souverain, chef providentiel envoyé et guidé par Dieu, défenseur de l’orthodoxie et artisan de l’unité musulmane sans laquelle aucune victoire n’est possible contre les Francs.
La recherche d’exemplarité et de modèles très présente dans le monde musulman – il suffit de rappeler l’importance de la Sunna du Prophète, c’est-à-dire l’ensemble de ses dires et de ses gestes, dans l’élaboration du droit – est également un élément essentiel dans la construction de l’image de Saladin. Il est ainsi souvent comparé à Joseph ou Salomon, deux figures bibliques très populaires en Islam. Cette comparaison est destinée à rapprocher Saladin d’un modèle de sainteté – les saints étant souvent présentés comme les héritiers d’un ou de plusieurs prophètes – à lui donner un modèle à suivre et à affirmer sa légitimité et son autorité aux yeux d’une population très sensible à cette forme de piété populaire.


Au fil des siècles, Les écrivains occidentaux l'on magnifié :
Voltaire dans son Essai sur les mœurs (1756).
Une vingtaine d’années plus tard, le dramaturge allemand Gotthold Ephraim Lessing livre dans sa pièce Nathan le Sage (1779), dont l’histoire est inspirée de la parabole des trois anneaux du Décaméron de Boccace, le portrait d’un Saladin humaniste.
Au début du XIXe siècle, le romancier Écossais Walter Scott, dans Le Talisman ou Richard en Palestine (1825), éprouve à son tour une grande admiration pour Saladin.
Le cinéaste Ridley Scott s’est lui-même inspiré de l’ouvrage de son homonyme du XIXe siècle pour mettre en scène dans Kingdom of Heaven (2005) un Saladin bon, respectueux de la parole donnée et tolérant à l’égard du christianisme...
Dans le monde arabe, la légende ou plutôt le mythe de Saladin n’a commencé à prendre de l’ampleur qu’à la fin du XIXe siècle. Aux populations comme aux dirigeants, Saladin apparaît alors comme le libérateur, le résistant, le modèle. Ses origines Kurdes s’effacent au profit de son « arabité » culturelle et linguistique... Des chefs d’État aussi différents que l’Égyptien Gamal Abdel Nasser et l’Irakien Saddam Hussein se sont identifiés à lui pour se poser en nouveaux chefs charismatiques des Arabes.
STATUE DE SALADIN A JÉRUSALEM.
A Damas, son tombeau attire de nombreux visiteurs et pèlerins. En outre, sous la présidence de Hafez al-Asad, une immense statue de Saladin a été installée devant l’imposante citadelle médiévale. On y voit Saladin chevauchant, l’épée au poing, entourés de fantassins armés, écraser de toute sa hauteur Renaud de Châtillon et Guy de Lusignan assis sur une rocher à l’arrière du cheval.
En Syrie comme en Jordanie, des billets de banque ou des timbres portent son effigie.
En Irak, sous la présidence de Saddam Hussein, son nom fut introduit dans l’hymne national Irakien avec ceux des Assyriens, des Babyloniens et du calife abbasside Hârûn al-Rashîd.
En 1987, lors du huit centième anniversaire de la victoire de Hattîn, trois colloques se sont déroulés à la fois à Bagdad, au Caire et à Damas pour célébrer l’événement et nombreuses sont les publications sur Saladin qui ont vu le jour.


25 novembre 1174 - Saladin unifie les pays arabes - Herodote.net

www.herodote.net/25_novembre_1174-evenement-11741125.php
25 novembre 1174 : Saladin fait son entrée à Damas - Le jeune sultan d\'Égypte unifie les pays arabes d\'Égypte et de Syrie. Les royaumes des croisés en 
www.qantara-med.org/qantara4/public/show_document.php?do_id...
La dynastie ayyubide, qui règne sur le Proche-Orient entre 1174 et 1260, est marquée par une figure majeure : Saladin (Salâh ad-Dîn, r. 1169 - 1193). Né en 
www.lesclesdumoyenorient.com › Personnages historiques
16 mars 2011 - Le nom de Saladin (1174-1193) évoque, en Occident, la croisade, l'esprit chevaleresque, la générosité et la magnanimité. En Orient, son 
www.historyofwar.org/articles/wars_saladin_syria.htmlTraduire cette page
10 oct. 2013 - Saladin's Conquest of Syria, which took from 1174 to 1185, established him as the ruler of a powerful empire that included Egypt, Syria and 
www.historel.net/moyenage/12e/youssef.html
1174 - En décembre Saladin qui a mis le siège devant Alep, fait marche arrière et le lève pour éviter de faire mourir des concitoyens. Le jeune As-Salih entre ...










14 commentaires:

  1. bonsoir Monique..Comme vous le dites fort justement on peut se poser la question de savoir qui était vraiment Saladin..

    La postérité et les chroniques npn seulement arabes, mais aussi franques, vont dresser du sultan l'image quelque peu surfaite d'un pieux chevalier, respectueux des règles de la guerre et de ses ennemis.

    Les chroniqueurs francs rapportent avec émotion que, lors de la prise d'Acre, Saladin rachète de ses deniers le nourrisson d'une jeune prisonnière franque pour le réunir à sa mère.

    Mais le sultan témoigne aussi d'une cruauté inutile comme son époque en était coutumière. Ainsi laisse-t-il des religieux musulmans sans expérience du sabre massacrer de façon atroce les Templiers et Hospitaliers capturés après la bataille de Hattîn... Et lorsque, jeune officier, il s'empare du pouvoir au Caire, il frappe avec une grande rigueur les chrétiens et juifs d'Égypte..

    Amitiés

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    1. J'avais lu ce panégyrique, mais comme j'avais une trentaine de pages il a fallut que je taille dedans, et très arbitrairement j'ai trouvé que la notoriété de Saladin était assez riche pour rester dans le domaine plus terre à terre, comme vous le savez je ne fais que survoler une année, déjà il m'a fallut en investir 2 pour le personnage... alors que relater sa vie en long et en large doit demander au bas mot plusieurs volumes. Je laisse à mes ami(e)s et à ceux qui veulent approfondir la lecture, les nombreux écrits qui depuis le Moyen-Âge relatent les faits plus ou moins chevaleresques du Sultan Saladin.

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    2. Bonjour Monique, bien sûr je ne doute pas un seul instant que vous connaissiez ces anecdotes, vu le travail de recherche que vous accomplissez!
      Lorsque je viens commenter j'en profite justement pour ajouter un ou deux détails que vous n'avez pu intégrer dans le corps du texte faute de place, mais qui peuvent rendre mon intervention moins banale.

      Amitiés

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    3. C'est une des raisons, qui me rendent heureuse que vous soyez là.

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    4. Merci pour ces paroles si amicales, Monique!

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  2. Une fois de plus, quand on se replonge dans l'histoire, suivant d'où viennent les témoignages, il est difficile de faire la part de la vérité et celle de la légende.
    Bonne soirée (il est 21:20 - Lisa vous dit bonsoir à 11:44 ??).
    Cordialement.

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    1. Bonjour Ada j'ai en effet remarqué ce décalage horaire, lorsque je compose ma page je suis en décalage aussi, ce sont des détails, pour moi l'important est le plaisir de lire vos commentaires, de vous retrouver ici et ailleurs, de pouvoir publier sans autre problème que la mise en page et l'ordonnancement des illustrations, me perfectionner dans les légendes etc... Rien que des préoccupation triviales loin du stress de la modération.

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    2. C'est un détail, vous avez raison Monique, mais je trouve la remarque d'Ada rigolote, non?

      Bien à vous

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    3. Oui bien sûre, mais c'est un pince sans rire.

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  3. C'est bien ce que je pensais, mon commentaire est signalé avec 9 heures d'écart.
    Vraiment bonne et amicale soirée.

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  4. Hi hi hi, vous avez raison Ada..On n'a pas idée de dire "Bonsoir" à 11h44!

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  5. Comme toujours, textes agréables à lire, bien décortiqués, pour un rapide voyage dans le passé.
    Bonne continuation...Je viendrai vous lire.
    Amitiés.
    Sylvie

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  6. Oup's...Il manque le début de mon texte ? Voici :

    Bonjour Chantal et Tous,
    Toutes mes félicitations pour votre blog, il est TOP !

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    1. Bonjour, amie Heureuse de vous retrouver, et c'est avec plaisir et impatience que je chercherai votre sigle... et cette belle plage d'Aquitaine, amitiés
      Monique.

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