6 AVRIL 2016...
Cette
page concerne l'année 398 du calendrier julien. Ceci est une
évocation ponctuelle de l'année considérée il ne peut s'agir que
d'un survol !
RÉPARTITION DIFFICILES ENTRE BARBARES ET ROMAINS.
6
février : Édit sur l’hospitalité. Ce dictact impérial
oblige les propriétaires fonciers Romains à céder le tiers de
leurs domaines aux Barbares qui s'installent dans l'Empire...
27
juillet : Constitution d'Arcadius, qui réprime des
comportements de chrétiens qui, sous prétexte d'assistance aux
pauvres, menacent l'ordre public....
Le
régime de l'hospitalité appliqué aux fédérés Barbares,
Wisigoths et Ostrogoths dans l'Empire d'Orient, puis en Gaule, en
Espagne, en Italie, Bourguignons en Gaule, un moment Vandales en
Afrique, a justement attiré l'attention des historiens et des
juristes.
Le
premier travail scientifique où l'on traite de l'ensemble du sujet
est celui d'Ernst Theodor Gaupp, paru en 1844, et qui demeure
fondamental. Depuis lors, le sujet a été abordé à maintes
reprises, soit dans des manuels d'histoire du droit et des
institutions soit dans les histoires politiques des régions où ce
régime a été pratiqué, soit dans des études économiques, soit
même dans des histoires de l'art de la guerre. Enfin certaines
parties ont fourni la matière de monographies soignées : C'est
ainsi que l'« hospitalité » pratiquée en faveur des Bourguignons
a provoqué en France l'apparition de 4 mémoires au moins ;
ceux de Caillemer, de Julien Havet, de Léouzon le Duc, enfin de R.
Saleilles, le plus copieux de tous.
Si
remarquables que soient ces travaux, ils ont, le tort de laisser une
impression peu nette : On ne voit pas bien comment pratiquement a pu
s'opérer le partage des terres et comment le régime de
l'hospitalité a pu fonctionner. Pour mieux comprendre on a recours
surtout à la « Lex Burgundionum » où l'on trouve le
plus de renseignement sur ce régime de l'hospitalité.
La
Lex Burgondionum nous apprend que lors du partage des terres entre
Barbares et Romains, les premiers ont eu droit aux deux tiers des
terres et au tiers des esclaves : « ... tempore quo popülus noster
mancipiorum tertiam et duas terrarum partes accepit... » (titre
liv).
Quelle
étrange anomalie ! Si les Bourguignons reçoivent les 2/3 de la
terre pourquoi n'on-t-ils pas droit aux 2/3 des bras qui permetraient
d'exploiter cette terre ?
Autre
sujet d'étonnement : Si les Bourguignons ont droit aux 2/3
tiers des terres et au tiers seulement des esclaves, ils partagent
avec les Romains la moitié de la demeure rurale, du verger, de la
forêt : « medietatem silvarum ad Romanos generaliter praecepimus
pertinere, similiter de curte et pomariis circa fara- mannos
conditionc servata, id est ut medietatem Romano estiment praesumendam
» (liv, 2). Enfin les réfugiés ont droit seulement à la moitié
de la terre et n'obtiennent aucun esclave.
Gaupp
a tenté une explication en supposant que les Bourguignons ayant des
esclaves n'ont pas besoin de réclamer au Romain les 2/3 de ses
cultivateurs non-libres. Mais cette explication est contestable...
Les Bourguignons, peuple errant, ne peuvent traîner à leur suite
les milliers d'esclaves qui sont nécessaires à l'exploitation des
terres, et, d'ailleurs, eux-mêmes sont pas des agriculteurs. Gaupp
le premier remarque qu'il n'est jamais question de cultivateurs
ruraux Bourguignons de condition servile.
Quant
à l'explication de Montesquieu (x) qui fait des Bourguignons un
peuple pasteur, elle se heurte au fait que les 2/3 du sol qui leur
est concédé se composent de terres de labour et non de pâturages.
Puis
on a pensé, que l'explication de l'anomalie doit être cherchée
dans la constitution même de la propriété foncière de l'époque...
On
sait que le grand domaine (c'est sur lui qu'est installé le Barbare)
est divisé en deux parties :
1°
la réserve seigneuriale (indominicatum), comprenant terres de
labour, prés, vignes (s'il y a lieu), forêts
2°
les tenures des petits fermiers héréditaires, les colons (mansi
ingenuiles, colonicae), comprenant terres de labour, prés, vignes,
mais jamais ni pâturages ni forêts.
L'étendue
de chacune de ces deux parties est sensiblement égale, mais le
propriétaire conservant dans son lot forêts et prairies, sauf à en
permettre la jouissance à ses colons, la superficie des terres de
labour de son lot est moins considérable que celle des lots de
côlons : Le propriétaire n'en retient guère, semble-t-il, que le
quart en exploitation directe.
On
peut admettre que le droit de l'hôte Bourguignon porte soit sur
l'ensemble des terrae (indominicatum et tenures), soit sur l'une de
ces deux divisions. Il porte sur les tenures déclare Hans Delbrück
(!)...
Cette
interprétation a pour elle le mérite de la simplicité On
s'explique que, ne touchant pas à la réserve (indominicatum) l'hôte
n'a besoin que du tiers des esclaves (mancipia). Mais on se heurte au
titre LXVII : « Quicumque agrum aut colonicas tenent etc.
». Il saute aux yeux que ager étant opposé à colonica, ne peut
s'entendre ici que de la réserve (indominicatum). Les Bourguignons
ont donc droit à une part et des colonges (Terme de droit féodal.
Exploitation agricole reposant sur un contrat d'après lequel le
propriétaire du sol répartissait entre plusieurs personnes un corps
de biens plus ou moins considérable, à la condition d'une redevance
annuelle. ) et de la réserve.
Mais
dans quelle proportion ?
Selon
Ernst Mayer, il prélève le tiers des tenures et les deux tiers de
la réserve. Néanmoins il est à présumer que à l'époque Romaine,
alors que, les esclaves sont encore nombreux, le propriétaire peut
encore avoir une réserve étendue. Celle-ci a dû diminuer, à
mesure que l'esclavage proprement dit recule. Au IXe siècle la
réserve n'est plus cultivée que grâce aux corvées et manœuvres
des colons.) Reste cependant à savoir pourquoi les Bourguignons
obtiennent des mancipia. Les tenures étant exploitées par les
colons romains, l'hôte Barbare qui obtient la propriété de ces
colonges n'a pas besoin de la main d'œuvre des serfs (mancipia)
(esclaves). C'est ce que fait justement observer E. Mayer (cf, p.
204. Dans l'intéressant compte-rendu du livre de. M. Hartmann, paru
dans les Goeitingische gelehrte Anzeigen, lfib. Jahrgang, 1903, ρ
204, 205.
E.
M. se tire de cette difficulté en affirmant qu'il faut donner ici un
sens large au mot mancipium, et entendre sous ce terme les colons
aussi bien que les serfs propres : Dans la loi Bourguignonne le colon
et l'esclave sont mal distingués, ou pour mieux dire confondus, au
point de vue du droit pénal. Mais, il faut bien l'avouer, cette
affirmation repose sur un véritable paralogisme.
S'il
est vrai que la condition du colon dans le royaume Bourguignon
diffère peu en pratique de celle de l'esclave, s'il est vrai, par
exemple, qu'il soit soumis, comme celui-ci, à la bastonnade, il n'en
demeure pas moins certain que les deux conditions sociales sont
toujours nettement distinguées, et chaque fois que le terme
mancipium est employé, il s'entend invariablement d'un servus ou
d'une ancilla. (servante).
Et
même si l'on admettait que « mancipium » doive s'entendre de tout
le cheptel humain, sans distinction de colons et de serfs, des
énigmes subsistent... Celle-ci par exemple : Comment l'hôte Barbare
n'obtenant que le tiers des mancipia peut-t-il exploiter les deux
tiers de la réserve avec un personnel aussi réduit ? On peut
supposer qu'il use des services des colons des colonges, mais alors
il augmente la charge qui leur est imposée, charge coutumière,
immuable, et ce serait illégal. Quant à traiter les colons en serfs
et à les arracher à leur colonge, c'est chose inadmissible : Les
colons sont fixés au sol par la loi et nul, pas même le
propriétaire, n'a le droit de les arracher à la glèbe, ce n'est
pas un personnel mobilisable à volonté.
On
se pose encore l'objection suivante, provoquée par le début du
titre LIV :
«
quicunque agrum cum mancipiis seu parentum nostrorum sive nostra
largitate, etc. (p. 88). Mancipia doit s'entendre des colons aussi
bien que des serfs proprement dits. Cela est forcé,à moins de
restreindre les donations du roi à l'indominicatum exploité par les
serfs et d'en exclure les colonges, idée parfaitement insoutenable.
(En réalité le roi n'a pas à parler des colons : Ils font partie
intégrante de la terre (terra, offer), il n'en va pas de même des
mancipia,qui sont un capital mobilier.
Valentinien
Ier a même eu l'idée de distinguer dans les ventes l'esclave rural
(c'est Pour la même raison, le Romain, qui a perdu les 2/3 de la
réserve, n'a que faire de conserver les 2/3 des mancipia. C'est
trop, et il peut difficilement se tourner vers les tenures de colon,
dont il n'a plus qu'une faible partie, le personnel surabondant qu'on
lui laisse, on ne sait pourquoi...(Mon avis
personnel est qu'aujourd'hui encore il est des décideurs (empereur,
roi, ou président) qui au lieu de penser au bien être de son peuple
et par conséquent de sa nation n'a en tête que ses intérêts
personnels, ses amusements, ses amours ou son argent quand ce n'est
pas le tout à la fois... cette période de l'antiquité tardive
ressemble à si méprendre à notre époque où pour se faire plaisir
ou pour de bas barguignages on brade son pays et ses habitants au
profit d'autres qui semblent plus malléables)
De
quelque côté qu'on se tourne on n'arrive donc pas à une solution
qui satisfasse l'esprit...
Une
dernière hypothèse s'offre à nous et je n'hésite pas à la
formuler : Le Bourguignon n'a que le tiers des esclaves parce qu'il
ne reçoit que le tiers de la réserve (indominicatum), Le Romain
conserve les 2/3 des esclaves parce qu'il garde les 2/3 de la
réserve.
A
cette époque, en effet, la réserve est encore exploitée
principalement par les esclaves du propriétaire.
Ne
recevant que le tiers de la réserve, le Barbare aura la majorité
des colonges à sa disposition. Pour les exploiter nul besoin de main
d'œuvre servile : Les colons, attachés héréditairement au sitos
servos et a la terre (Cod. Just, XT, 47, 7). Théodoric l'Ostrogoth
revient sur cette décision au § 142 de son Édit : Il y autorise le
maître à transférer les esclaves ruraux d'un lieu dans un autre et
même à les reprendre pour le service domestique,fussent-ils
originarii, c'est-à-dire nés sur le domaine rural.
Ce
sont des dispositions exorbitantes. Garsonnet (op. cit., p. 128) a
compris que le roi affranchit les colons de la servitude de la glèbe.
A
l'époque Carolingienne, quand l'esclavage antique disparaît presque
entièrement, la réserve ne sera plus guère exploitée que par les
corvées et manœuvres des tenanciers (colons et serfs ruraux
chassés) et les redevances en argent ou en nature passeront au
second plan. Cf. page 985, (un peu comme
aujourd'hui où a force de tondre les petits propriétaires, les
petites entreprises, et les classes moyennes plus rien ne se
fabrique en France et des villages entiers perdent leurs âmes et
leurs occupants.)
Les
Bourguignons se sont simplement substitué aux droits du propriétaire
Romain, il perçoivent à sa place les redevances en nature ou en
argent dues par le colon et exige manœuvres, corvées et charrois à
son profit, voilà tout. Tentons de représenter d'une manière
concrète un domaine (fundus, villa) soumis au partage. Attribuons
lui la superficie moyenne d'un de nos villages, 1 300 hectares. Le
propriétaire Romain a partagé, rigoureusement, par hypothèse, en 2
parties égales son domaine, attribuant 650 hectares (2 600 jugera)
de terres labourables, prés et vignes à ses colons, à raison, par
exemple, de 12 hectares (48 jugera) par ménage, constituant ainsi 54
« colonges ». Il se réserve 650 autres hectares, dont la majeure
partie est formée de forêts et de prairies et le reste, 200
hectares, par hypothèse, en terres de labour... Le total des «
terres » est de 650+200 soit 850 hectares, dont l'hôte Bourguignon
reçoit les 2/3, soit 566 hectares. N'ayant droit qu'au tiers des
esclaves (mancipia), le Barbare, ne prend, selon notre
interprétation, que le tiers de la réserve cultivée, soit 66
hectares. Il lui reste à prélever sur les tenures 566 — 66 = 500
hectares, soit 41 à 42 colonges... Le Romain se trouve réduit à
134 hectares de terres de labour sur sa réserve et à 12 ou 13
colonges. (si certains Français pouvaient
avoir l'information il se représenteraient vite se qui les attend et
ils changeraient sans aucun doute d'opinion politique)
Ce
schéma présente un double inconvénient :
1°
il est compliqué, exigeant un calcul pour soustraire du total des
terres des colonges la portion des terres de la réserve attribuée à
l'hôte,
2°
il est peu satisfaisant, et même invraisemblable. Parce que le
Barbare (donnez lui le nom qui vous semble le
plus approprié, Ostrogoths, Wisigoths, Bourguignons, Vandales, Huns,
Vikings, Sarrasins etc. et vous aurez le schéma qui se produits
aujourd'hui lorsqu'il y a déséquilibre la porte est ouverte à tout
les débordements.) vivant du produit des 4/5 des colonges,
on ne comprend pas pourquoi celles-ci n'ont droit qu'à la moitié de
la forêt dont les produits sont indispensables à l'économie rurale
du temps.
Une
autre interprétation me parait préférable : L'hôte Barbare a
droit à un tiers des terres de la réserve. Pour compléter sa part,
du domaine, laquelle doit comprendre les deux tiers du sol arable, il
prend les deux tiers des tenures ou colonges. On s'explique mieux
ainsi que les colongers concédés au Barbare n'aient droit qu'à la
moitié de la forêt.
En
effet, le propriétaire Romain, s'il n'a conservé que la minorité
des colonges, un tiers environ, retient, par contre, les deux tiers
de la réserve. Cette dernière interprétation permet de comprendre,
en outre, pourquoi le Romain conserve, non seulement la moitié des
bâtiments d'exploitation (la curtis) et la moitié du verger, mais
pas la moitié de la forêt. Elle montre que le partage n'est pas, en
réalité, aussi défavorable au Romain qu'on le pense. Pour le
revenu, le dominus Romain et l'« hôte » Bourguignon ont des parts
très sensiblement égales : Le produit de L'indominicatum ou réserve
doit être pour le propriétaire, à superficie égale, supérieur à
celui des tenures, les colons rapportant plutôt par leurs manœuvres
et corvées que par leurs versements en argent ou même en nature.
(C'est par ce moyen inique en lui-même que les
uns comme les autres se sont trouvés dans la situation de devoir
laisser les terres en friches, pour les uns et d'interdire les
prélèvement normaux dans les bois et les halliers pour les ruraux,
donnant lieu au braconnage chapardage et autres exactions qui rendent
la vie impossible).
II
suffit de parcourir un polyptyque pour se rendre compte que les
versements en argent des tenanciers sont infimes. Ils rentrent pour
la plupart dans les trois catégories suivantes :
1°
rachat du service de guerre (hostilitium), transmis peut-être au
souverain par le propriétaire.
2°
parfois le chevage : Versement du cens annuel et symbolique de 4
deniers par tête.
3°
indemnité pour le droit de couper du bois ou de faire paître les
bestiaux. Les versements, en nature eux-mêmes sont peu importants :
Des œufs, des poules, parfois du vin, des bardeaux, etc.
Le
vrai profit pour le maître, c'est de trouver une main d'œuvre
assurée et gratuite pour les travaux de la réserve...
Quelle
que soit l'interprétation à laquelle on s'arrête, il demeure que
le premier partage s'opère d'une manière compliquée et il faut se
demander pourquoi il est compliqué. Il était si simple de prendre
ou tout un domaine, ou, dans une proportion quelconque, la moitié,
le tiers, les deux tiers, peu importe une partie bien déterminée,
la réserve, par exemple, ou les colonges, d'un même domaine.
Il
est certain que cette complication a été voulue· On voulait au
début du moins, sauvegarder les droits du propriétaire Romain, du
dominus, en enchevêtrant avec les siens les intérêts de l'« hôte
» Bourguignon. Que le Romain soit longtemps encore, considéré
comme le véritable propriétaire, c'est chose certaine.
Un
passage de la loi, qui a justement retenu l'attention, interdit au
Bourguignon, même si le Romain y consent, de se mêler d'un procès
entre Romains portant sur les limites des terres (agri) possédées
par des Barbares à titre d'hospitalité.
Au
contraire, l'intervention du Barbare est recevable s'il y a
contestation sur les limites d'un ager possédé en entier avec ses
esclaves (mancipia) par un Bourguignon qui le tient publica
largitione, c'est-à-dire en vertu d'une donation royale, nous savons
en effet que la donation du roi Bourguignon, comme celle du roi
Franc, est en pleine propriété. En ce cas la loi libère le Romain
de l'obligation du partage avec un hôte Barbare... Même quand les
biens du Barbare sont devenues, en fait, une propriété dont l'«
hôte » peut disposer à son gré, le propriétaire Romain garde en
cas de vente un droit de préemption. (Comme
les communes aujourd'hui)
A
cette mesure on aperçoit un double motif :
1°
celui de rassurer la population Romaine. Il ne faut pas oublier en
effet que l'établissement des Bourguignons en Sapaudia n'est pas
l'effet d'une conquête, mais est imposée par le gouvernement
Romain, par Aetius. Le cantonnement des Barbares en cette région
n'est envisagé, d'ailleurs, comme définitif, ni par les Romains ni
par les Barbares eux-mêmes.
En
deuxième lieu, si le droit « eminent », comme on dira plus tard,
du Romain
2°
est maintenu par les rois Bourguignons, même lorsque ceux-ci sont
devenus de vrais souverains pour les 2 races, cela tient sans doute à
des préoccupations fiscales. Dans l'intérêt du fisc le fundus doit
conserver, comme à l'époque Romaine, son individualité, ses
frontières.
Les
rois bourguignons ont naturellement continué à percevoir l'impôt
foncier. Et cet impôt, seul le propriétaire romain le paie. Il n'y
a pas lieu de croire, en effet, que l'hôte Bourguignon l'ait plus
versé que l'hôte Wisigoth. Déjà à l'époque Romaine il ne paye
rien... (déjà des passe-droits propre à
rendre les uns jaloux des autres) Fédéré, il est un soldat
au service de l'Empire et il n'a pas plus à acquitter l'impôt que
le légionnaire Romain : Le produit de la terre qu'il occupe lui
tient lieu de solde.
Des
2 hôtes, des 2 consorts, seul le Romain paie l'impôt, sauf
naturellement à jouir d'une décharge pour la portion de son domaine
concédée à son « hôte » Barbare. (et
après on s'étonne qu'il y eu des guerres)
Jusqu'ici
nous avons raisonné comme si la terre soumise au régime de
l'hospitalité est un grand domaine, admettant implicitement que
cette charge retombe sur l'aristocratie foncière. Cette opinion peut
s'autoriser d'un texte familier à tous ceux qui se sont occupés du
sujet, un passage de la Chronique de Marius, évêque d'Avenche, qui
porte sous l'an 456 : Eo anno Burgundiones partem Galliae
occupaverunt terrasque cum Gallis senatoribus divîserunt (x). 11
faut tirer de cette ligne la double conclusion :
1°
que les Bourguignons partagent la terre avec les membres de
l'aristocratie (senatores) lyonnaise (car il s'agit certainement de
cette région, ce qui autorise par analogie à croire qu'il en est de
même ailleurs, ainsi en « Savoie ». 2° que ce partage n'est pas
très onéreux, puisque l'initiative de l'appel aux Barbares vient
des Romains eux-mêmes, et on se rappelle aussitôt un passage où
Cassidore avance, non sans un optimisme de commande que le partage
ultérieur entre Romains d'Italie et Ostrogoths s'opère sans que
personne n'ait a à en souffrir.
Seulement
l'évêque d'Avenche écrit sa brève chronique à la fin du VIe
siècle et, si vraisemblable que soit l'opinion qu'il copie une
annale contemporaine, ce n'est toutefois, qu'une vraisemblance non
une certitude.
Quelle
garantie de stabilité, de sécurité même pour l'hôte Barbare, a
pu présenter une semblable opération ? Le simple bon sens oblige
d'admettre que la grande propriété a fait seule, ou presque, les
frais de l'opération. On sait l'énormité des fortunes
territoriales sous l'Empire Romain. Un « sénateur » auquel on
prend pour hospitaliser les Barbares un domaine, entre 10 ou 20
colonges, car il n'est jamais question de confisquer l'ensemble de la
fortune territoriale, ce n'est pas sociale !...
Ce
chiffre est peut-être celui de la peuplade tout entière. Les
Vandales Asdingues, unis aux débris des Alains, atteignent ce
chiffre en mai 429, lorsqu'ils passent en Afrique, mais en y
comprenant femmes et enfants (Victor Vitensis, De persecut., c. 1).
Au
contraire, Socrate (Hist, eccles., VII, 30) fait occire des milliers
de Huns par 3.000 Bourguignons seulement (τρίσχίλιοή dans
une rencontre qui aurait eu lieu vers 430. Mais, en 435, les
Bourguignons subissent une terrible défaite de la part des Huns
fédérés d'Aetius. Leur roi, Günther (Gunda- har) périt ainsi que
toute sa race (cf. G. Waitz, dans Forschungen zur deutschen Ges
hichte, t. I, 1862, ρ.Ί). Les survivants sont cantonnés par
Aetius, en 443, dans la Sapaudia, région qui va de Grenoble à
Ebrodunum (sans doute Yverdon sur le lac de Neufchâtel) A quel
chiffre sont-ils alors réduits ? On ne sait. A Jahhn, les
évalue à 93.900 hommes (sic), ce qui ferait 281.700 âmes ! Ce sont
des vues chimériques, comme l'a montré H. Delbrück (op. c ., t.
II, p. 305-306, 341).
Ce
dernier estime le nombre des guerriers au moment où ils reçoivent
l'«
hospitalité » en « Savoie » à 3.000, 5.000 au plus.
Même
à la fin du siècle, il n'y a que 200 guerriers en moyenne par «
comté » (le royaume en comptait 32 à cette époque). C'est
peut-être pêcher par un excès inverse. Quoi qu'il en soit, il est
difficile de croire que la région comprise entre les Alpes, la
Durance, le Rhône et, au Nord, le plateau de Langres et le lac de
Neufchâtel, ait renfermé vers 500 plus de 10 à 15.000 Barbares en
état de porter les armes. Des bandes de paysans réduits au
brigandage infestent la région. (normal
l'équilibre étant rompu les caractères se dévoilent... Quand il
n'y a plus de foin dans le râtelier les chevaux se battent)
En
407, le goth Sarus, qui vient d'échouer dans sa tentative d'enlever
Valence à l'usurpateur Constantin, doit acheter aux « bagaudes »
le passage des Alpes pour rentrer en Italie (Zosime, VI, 2). Delbrück
(II, 2, 342) fait justement observer que si le régime de
l'hospitalité a enlevé aux Romains les 2/3 de leurs propriétés,
comme certains ont l'air de le croire. Il n'est même pas
sérieusement appauvri, car cette diminution de la superficie de sa
propriété s'accompagne d'une diminution corrélative d'impôt
foncier et, en outre, de garanties appréciables de sécurité.
A
ce problème de la condition sociale de l'« hôte » Romain, se lie
étroitement celui de la condition sociale de l'« hôte » Barbare.
Celui-ci est-il un aristocrate, comme le veut Delbrück, par exemple,
ou un homme « moyen », opinion d'Ernst Mayer, ou même un pauvre
diable, comme semble le croire Saleilles ? Quelle idée se fait-on de
ces « fédérés » ?
La
minorité, cela va sans dire, est composée de nobles. Mais la
majorité, qui n'a que ses bras, entend-elle se livrer à
l'agriculture ? Goths, Bourguignons, Vandales aspirent-ils à être
des laboureurs, ou même des soldats-laboureurs ?
Répondre
par l'affirmative serait soutenir des vues parfaitement
invraisemblables.
Déracinés
depuis longtemps,errants par l'Europe et l'Afrique à la recherche
d'une retraite confortable, ces gens n'ont eu, pendant bien des
générations, ni le goût, ni même les possibilités, de consacrer
leurs bras à l'agriculture. Les fédérés sont des guerriers qui
cherchent à se faire entretenir, par les Romains.
L'idée
de se substituer au misérable colon, ou même au pauvre petit
propriétaire, n'a pu venir à l'esprit d'aucun Barbare sensé. Il
entend vivre en maître, entretenu par le travail des colons et des
serfs Romains et non par l'œuvre de ses mains comme les dediticii. (
la même chose se reproduit actuellement certains profitent
d'avantages auxquels les travailleurs pauvres cultivateurs ou les
retraités ne peuvent accéder.)
Est-ce
à dire que tout Bourguignon a reçu en partage un grand domaine, est
devenu un gros seigneur ? Non, à coup sur.
Nul
établissement n'a transformé de la sorte une peuplade toute
entière, même après une conquête violente (et ce n'est pas le
cas, les fédérés n'étant pas, à l'origine, des conquérants.)
(ah bon !)
Cette
mesure aurait eu, d'ailleurs, des résultats désastreux pour les
Goths, Bourguignons, Vandales. Dispersés parmi la population
Romaine, beaucoup plus nombreuse, les Barbares ont rapidement perdu
leur langue, leurs mœurs, leurs lois. Ils ont vite cessé d'être
des guerriers à la disposition de leurs rois nationaux. (Eux
au moins ont su s'intégrer). Genséric le comprend si bien
qu'il
masse
tout son peuple dans la Proconsulaire, c'est-à-dire dans le Nord de
la Tunisie actuelle, autour de Carthage.
Dans
la période primitive, alors que les fédérés sont encore vraiment
au service de l'Empire, les inconvénients n'ont pas été moins
éclatants. Comment mobiliser pratiquement cette masse humaine ?
Les
fédérés sont assimilables aux Germains, ou des Iraniens (Sarmates
et Alains), transplantés sur le sol Romain et qui y vivent en
qualité, non de laboureurs, mais de guerriers.
Ils
ne sont pas dispersés, mais cantonnés en des lieux déterminés où
ils demeurent comme une sorte d'armée territoriale, sous la
direction des
«
Préfets des Lètes ».
Autre
difficulté : Les textes où il est fait allusion à « l'hospitalité
» ne mettent en face l'un de l'autre qu'un seul Romain et un seul
Barbare.
Mais
au titre de la Lex Burgundionum il est dit : « Ceux qui tiennent de
Vager (réserve seigneuriale) ou des colonges partageront la forêt
au prorata de ce qu'ils possèdent en terre, étant entendu que le
Romain, si on fait des défrichements, en aura la moitié.
FRAGMENT D4UN CADASTRE DU IVe SIÈCLE |
Du
régime de l'hospitalité - Persée
www.persee.fr/doc/rbph_0035-0818_1928_num_7_3_6536
de
F Lot - 1928 - Cité 33 fois - Autres articles
Revue
belge de philologie et d'histoire Année 1928 Volume 7 Numéro 3 pp.
... Le régime de l'hospitalité, appliqué aux fédérés Barbares,
wisigoths et ...... à l'administration romaine que rien d'essentiel
n'était changé : au lieu de vivre à la ville, ...... Constitution
d'Arcadius et Hono ius de 398 : « In qualibet vel nos ipsi urbe
f ...
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