mercredi 11 janvier 2017

EN REMONTANT LE TEMPS... 167

19 NOVEMBRE 2016...

Cette page concerne l'année 167 du calendrier julien. Ceci est une évocation ponctuelle de l'année considérée il ne peut s'agir que d'un survol !

CONSIDÉRATIONS SUR LA PESTE A TRAVERS LES ÂGES.

Il est difficile de situer l’origine précise de la peste, on la situe généralement en Asie centrale, mais on a avancé aussi le fait qu’elle devait exister dans l’Égypte Pharaonique.
On pense via des études de génomes bacillaires que l’origine de l’ancêtre commun est très ancienne, il y a plus de 2 500 ans dans le voisinage de la Chine...
Dans la Bible, elle est évoquée comme le fléau majeur à plusieurs reprises. Dieu impose un choix à David : « Faut il qu’il advienne 3 années de famine dans ton pays ou que tu fuies pendant 3 mois devant ton ennemi qui te poursuivra, ou qu’il y ait pendant 3 jours la peste dans ton pays » (II Samuel 24 : 25)... David aurait choisi la solution la plus radicale « Yahvé envoie la peste en Israël depuis le matin jusqu’au temps fixé, et le fléau frappe le peuple et 70 000 hommes du peuple meurent depuis Dan jusqu’à Beersheba» (II Samuel 24 : 25).

La peste d’Athènes est connue grâce au récit de l’historien Thucydide au moment de la guerre du Péloponnèse opposant Sparte et Athènes, aux environ de 430-426 avant JC.
« Athènes se voit frappée brusquement et c'est d’abord au Pirée que les gens sont touchés, ils prétendent même que les Péloponnésiens ont empoisonné les puits […] Puis le mal atteint la ville haute et, dès lors le nombre des morts est beaucoup plus grand. »... Périclès en meurt.
On décrit la succession des symptômes : « En général, rien ne lui fournit de point de départ, elle vous prend soudainement, en pleine santé. On a tout d’abord de fortes sensations de chaud de la tête, les yeux sont rouges et enflammés, le pharynx et la langue sont à vif, le souffle sort irrégulier et fétide.
Puis survient, à la suite de ces premiers symptômes, l’éternuement et l’enrouement, alors en peu de temps le mal descend sur la poitrine, accompagnée d’une forte toux. Lorsqu’il se fixe sur le cœur, celui-ci en est retourné, et il survient des évacuations de bile, sous toutes les formes […] Le corps est semé de petites phlyctènes et d’ulcérations ».
Il existe un doute dans la description sur le fait qu’il s’agisse bien de la peste ou du typhus.

De 165 à 180 (et un retour en 190), la peste antonine, du nom de la dynastie des Antonins, sévit à Rome, sous le règne de Marc Aurèle puis de Commode.
Les historiens Anglais l’appellent peste galénique en référence à Galien.
Elle décime la population après le retour des armées de Lucius Verus.
Ce n’est pas forcément la maladie qui a provoqué le retrait des troupes mais des difficultés nombreuses en particulier pour le ravitaillement.
Les grands déplacements des armées de l’époque ont par contre bien contribué à la diffuser.
La légende veut qu’un soldat ayant pénétré dans le temple d’Apollon, après la prise de Seleucie sur le Tigre, ait ouvert un coffre qui a exhalé un souffle pestilentiel.
Galien a fui, ne revenant que l’année suivante à la demande de Marc Aurèle, et a établi la description de l’affection. Marc Aurèle en est d’ailleurs décédé.

En Orient, la peste se diffuse en Égypte, à Ephèse, à Antioche. Encore une fois il existe un doute sur une réelle peste ou sur la variole.
Galien n’est pas le seul à  l’avoir décrit. Pendant la 1ère période de la médecine Romaine (celle avant Galien), Rufus d’Ephèse travaille sur la peste et la lèpre

En 250-260, la peste de Cyprien (du nom de Cyprien de Carthage) sévit dans l’empire Romain sous le règne de l’empereur Trajan Dece. Venue d’Éthiopie, et touchant l’Afrique du Nord et l’Europe Occidentale, elle est peut être encore d’une autre origine que yersinienne, (le typhus ?).

Il s’agit d’une des épidémies les mieux documentées de l’Antiquité. Toutes les sources ne sont pas cependant d’égale valeur. L’Histoire Auguste nous décrit l’apparition de l’épidémie – ainsi qu’Ammien Marcellin – et ses ravages dans les armées Romaines. Lucien raconte comment Alexandre le prophète de Glycon émet un oracle sur la peste.
Aelius Aristide décrit la maladie.
Orose mentionne aussi l’épidémie.
Mais la description la plus intéressante se trouve dans les nombreux écrits médicaux de Galien, même si nous ne possédons plus le livre qu’il a consacré à la peste. Dion Cassius et Hérodien décrivent une épidémie similaire qui frappe Rome sous Commode et qui est souvent considérée comme le retour de la première.

Des sources épigraphiques ont aussi été rattachées à l’épidémie. Une inscription d’Antioche a conservé le texte de l’oracle d’Alexandre. En revanche, il est difficile d’assurer que tout ou partie des oracles de Claros mentionnant une épidémie se rapportent bien à la peste antonine et non à une épidémie locale moins importante antérieure ou postérieure. Il est encore plus difficile d’associer d’autres inscriptions à cette épidémie.

On peut aussi espérer retrouver des traces archéologiques de l'épidémie et de ses effets notamment à travers les sépultures, les changements importants dans la densité de l'occupation humaine ou dans la production des artefacts (révélant une baisse démographique importante), il est toutefois difficile dans ces cas d'arriver à des certitudes.
D’après les sources, l’épidémie se déclare lors de la prise de Séleucie du Tigre par les troupes de Lucius Verus menées par Avidius Cassius en 166. L’historiographie antique a insisté sur cet événement, et a été souvent reprise par les historiens modernes et contemporains, l’idée étant parfois avancée que le déclenchement de l’épidémie entraîne le retrait Romain. Cependant celui-ci s’explique mieux par la situation militaire, et l’impossibilité d’occuper une ville pillée.

Les difficultés rencontrées au retour par l’armée Romaine s’expliquent aussi par des problèmes de ravitaillement. Il est certain en revanche que les importants déplacements de troupes qui ont lieu durant ces années peuvent diffuser l’épidémie avec une plus grande ampleur.

D’Orient, la peste se diffuse donc dans de nombreuses provinces. En Égypte, les papyrus ont conservé la trace de ses ravages : Le village de Soknopaiou Nessos est presque entièrement dépeuplé. Comme en témoigne le papyrus Thmouis, la peste s’ajoute à des difficultés agraires, économiques et sociales. Des brigands ravagent la région, les paysans fuient des impôts trop lourds.
Les années 160 marquent durablement la démographie égyptienne.

En Asie, c’est sans doute l’épidémie qu’Aelius Aristide décrit à Éphèse vers 165. Des oracles du sanctuaire de Claros vers Colophon mentionnant des pestes ont été mis en rapport avec l’épidémie, mais leur datation est incertaine, et si certains se réfèrent probablement à l’épidémie antonine, d’autres ne peuvent concerner qu’une épidémie locale antérieure ou postérieure. On a parfois interprété ces oracles comme le signe d’un âge d’angoisse, d’un tournant dans les « mentalités ». Il faut fortement relativiser de tels jugements ainsi que l’a montré Peter Brown, les oracles attestent plutôt de la vitalité de la religiosité traditionnelle.

Alexandre d’Abonotichos et son dieu Glycon ont aussi donné un oracle contre la peste, dont le texte a été retrouvé à Antioche.
Cet oracle illustre les liens qu’Alexandre entretient avec la religiosité ordinaire de son temps, mais participe aussi sans doute de sa stratégie d’approche des cercles de la vie politique de l’empire : L’épidémie a alors touché son centre, Rome et l’Italie.

L’arrivée et l’extension de l’épidémie en Italie sont bien connues grâce aux ouvrages de Galien. Il est fort possible que le départ précipité de ce dernier, en 166, s’explique par le désir de fuir l’épidémie... Mais Galien est rappelé de Pergame par les empereurs et doit rentrer en Italie. Les deux empereurs, Marc Aurèle et Lucius Verus, ont en effet massé d’importantes troupes dans le nord de l’Italie, à Aquilée, pour faire face aux menaces barbares dans les régions Danubiennes. Les troupes sont sévèrement touchées par l’épidémie dans l’hiver 168-169, et les empereurs font appel à de nombreux médecins, dont Galien.
Ce dernier resté en Italie est un des médecins les plus importants de la cour impériale.
L’épidémie semble avoir encore duré un certain temps. Rien de certain cependant ne permet d’assurer que c’est bien elle qui a tué Marc Aurèle en 180. L'authenticité de l’inscription qui la mentionne en Norique en 182 a récemment été remise en cause : L'allusion à la peste a été le résultat d’une falsification moderne selon W. Hameter, mais l'examen d'un estampage de l'inscription en question a infirmé cette thèse : La peste sévissait encore au Norique en 182. Selon M. G. Schmidt, il faut donc bien aussi lui attribuer les victimes mentionnées sur l'album du culte de Mithra de Virunum.
Des fouilles archéologiques effectuées récemment à Gloucester, dans le cimetière Romain de Wooton, ont révélé une fosse commune datant de la seconde moitié du IIe siècle et contenant 91 corps. Les squelettes ne présentant pas de traumatisme mais ayant été inhumés de manière peu organisée, on se trouve peut-être en présence d'une sépulture de catastrophe liée à une épidémie : Il est donc possible qu'il s'agisse de victimes de la peste antonine. Il a toutefois été observé que d'autres interprétations sont possibles pour cette sépulture collective et qu'il peut s'agir d'une fosse commune destinée aux plus pauvres, un puticulus.

En général, ce sont les sources les plus tardives comme Orose, Eutrope ou l’Histoire Auguste qui insistent sur les dégâts occasionnés par la peste.
Durant le règne de Commode, une épidémie semblable touche la ville de Rome vers 190 et Dion Cassius et Hérodien assurent qu’elle se répand dans tout l’empire. Cet épisode, qui prend place dans un contexte de disette et qui peut être un retour de la peste antonine, est cependant bien moins connu.

La peste antonine a suscité de nombreux travaux historiques. La nature exacte de la maladie a été discutée. Le terme de peste ne doit pas induire en erreur, il ne renvoie pas en effet à la maladie aujourd’hui connue sous ce nom et qui a frappé durement l’Europe au Moyen Âge.
Le terme de peste n’est ici qu’une traduction des termes latin lues ou pestis ou encore du grec loimos. L’usage du terme « pestilence » en place de peste est d’ailleurs aujourd’hui recommandé par certains chercheurs.
Depuis les recherches de R. J. et M. L. Littman (1973), on considère le plus souvent qu’il s’agit d’une importante épidémie de variole. Il est cependant difficile d’atteindre une certitude absolue concernant ce paléodiagnostic, la médecine antique ignorant les micro-organismes et l’idée de contagion ne considérait pas les symptômes comme les médecins contemporains, à savoir comme les signes d’une infection par un agent infectieux invariant, mais comme les indices d’un déséquilibre interne spécifique à chaque patient.
Pour C. Haas et D. Gourevitch les témoignages laissent penser à la variole ou à une maladie proche.
La question est aussi posée de savoir si cette épidémie est le signe d’un changement dans le régime des maladies de l’empire et dans son équilibre microbien, ce que l’on appelle la pathocénose depuis Mirko Grmek. Là encore, les données étant très parcellaires il est difficile de se prononcer avec une certitude absolue.

Le paléodiagnostic est cependant important car il entraîne des conséquences quant au bilan de l’épidémie. Ce dernier a été fort discuté. Pendant longtemps l’impact de l’épidémie a été jugé très important, certains y voyant même le début, ou la cause, de la fin de l’Empire Romain, affaibli par la dépopulation. De telles évaluations concordent avec une historiographie qui dévalorise l’antiquité tardive et voit dans le règne de Marc Aurèle une césure immense.

James Gilliam, en 1961, dans un article de synthèse fondateur et encore incontournable, revient nettement sur ces exagérations des conséquences de la peste, appuyé en cela quelques années plus tard par les travaux de Littman. Cependant son travail très souvent cité ne voit pas ses conclusions toujours suivies.
Ainsi E. Lo Cascio considère que la peste antonine est une rupture forte dans l’histoire de la démographie de l’Italie Antique. Il est cependant très difficile de confirmer un tel jugement sur le terrain et dans l’archéologie. La pratique archéologique de prospection au sol à grande échelle (survey) permet de mieux connaître les rythmes d’occupation du sol, et donc d’une certaine manière la démographie.

Plus récemment de nombreux articles ont été consacrés à l’épidémie à la suite d’un travail de Richard P. Duncan-Jones (1996).
Ce dernier a choisi une approche statistique pour évaluer les conséquences de l’épidémie. Il met en évidence les perturbations – lacunes marquées – dans les séries quantitatives des sources pour les années correspondant à l’épidémie : Ainsi la production monétaire romaine chute très fortement en 167, ainsi que le nombre d’inscriptions datées de ces années et conservées. Cette chute serait la conséquences des effets destructeurs de l’épidémie et de la perturbation qu’elle occasionne dans la démographie et l’économie romaine.
RÉCIT DE LA VISITE DES SÉPULTURES
R. P. Duncan-Jones plaide alors pour une évaluation très forte de l’impact de la peste.
Son travail, dont l’originalité et l’apport ont été amplement reconnus, a depuis reçu plusieurs critiques qui modèrent considérablement ses conclusions. D’une part un certain nombre de travaux ont corrigé certaines des statistiques avancées, diminuant les lacunes et donc l’impact présumé de l’épidémie, ou mettant en avant des séries ne reflétant pas ces lacunes. D’autre part des travaux ont attiré l’attention sur la rapidité de la reprise après la perturbation, signe que ses conséquences dans le temps sont limitées, la prospérité étant retrouvée sous les Sévères.

La question est donc posée du rôle de la peste antonine dans les difficultés de l'Empire Romain après le IIe siècle

167 — Wikipédia
https://fr.wikipedia.org/wiki/167
Cette page concerne l'année 167 du calendrier julien. Page d'aide sur l'homonymie Pour le ... Printemps : ramenée par l'armée d'Orient démobilisée de Lucius Verus, la peste antonine continue à sévir à Rome et dans tout l'empire romain.

La peste antonine (166 ap. J.-C.) - Cairn.info
https://www.cairn.info/revue-hypotheses-2000-1-page-31.htm
de B Rossignol - ‎2000 - ‎Cité 2 fois - ‎Autres articles
Épidémie la mieux documentée de l'Antiquité [1][1] Pour un état de la question : J. F. Gilliam, « The..., la « peste » antonine occupe une place de choix dans .

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